Des problèmes politiques très vastes ont été soulevés par la crise irakienne, des questions sur les nouvelles menaces, sur l’utilisation de la force, sur la guerre préventive. Je ne savais pas dans quelle direction aller, c’est pourquoi j’ai organisé une rencontre entre spécialistes. L’ONU était dans une position difficile au sujet de l’Irak. Au début, nous avons été sous la pression des deux camps, ceux qui s’opposaient à la guerre et ceux qui étaient pour, mais nous avons accompli un gros travail depuis la guerre, comme l’aide apportée à la tenue des élections.
Je ne pense pas que l’ONU soit devenue insignifiante comme l’avait déclaré George W. Bush et je pense que la grosse majorité des politiciens états-uniens sont convaincus de l’utilité de l’ONU, même si je ne suis pas surpris que certains pensent le contraire. Nous sommes en train de revoir les rapports entre les États-Unis et l’ONU. Nous pensons qu’aucun pays, aussi puissant soit-il, ne peut tout résoudre, et c’est en cela que réside notre multilatéralisme. Pour ce qui est du terrorisme, les mesures coercitives sont nécessaires, mais elles incombent aux gouvernements qui doivent partager leurs informations et faire en sorte que les terroristes ne bénéficient d’aucun soutien. Avant 2003, on pensait qu’un pays pouvait agir préventivement au lieu d’attendre qu’il ne soit trop tard, cette doctrine de l’action préventive va plus loin désormais : le danger peut être là, il n’est pas imminent, mais si l’on ne s’en occupe pas tout de suite, on peut être surpris par lui.
Il faut prendre les accusations concernant le programme « pétrole contre nourriture » au sérieux, c’est pour cela que j’ai mis en place une commission. Nous acceptons les critiques constructives, mais il y a encore cinq ou six enquêtes en cours au Sénat, et quand il s’agit simplement d’attaquer l’organisation, en ignorant les faits, de pratiquer la désinformation systématique, au point que l’on en arrive à croire à ses propres mensonges, alors je trouve que c’est injuste. Il n’a jamais été question que je démissionne, comme le demandaient des sénateurs américains. Je travaille au nom des 191 États membres. La réforme du Conseil de sécurité est en cours actuellement et l’Allemagne fait partie avec le Japon, l’Inde et le Brésil, des candidatures à un siège permanent.

« Wir sind nicht ohne Fehl und Tadel », par Kofi Annan, Die Zeit, 17 février 2005. Ce texte est adapté d’une interview.