Le mois dernier, je suis allé à Charm El-Cheikh pour assister au sommet durant lequel Mahmoud Abbas et Ariel Sharon ont promis une relance du processus de paix. J’ai téléphoné peu à Jacques Chirac pour prendre rendez-vous, une façon de reconnaître le rôle de la France dans la construction d’un avenir positif pour ma région et pour toute l’humanité, un avenir plein d’espoir de paix et de liberté. Il faut concrétiser les promesses de Charm El Cheikh et la France doit participer à ce processus.
Le conflit arabo-israélien demeure la crise centrale de la région, qui est à l’origine d’immenses souffrances, de destructions, et entrave le développement régional, tout en alimentant le terrorisme. Il faut donc soutenir la paix et cela passe par un soutien à la « feuille de route ». Ce plan apporte la solution de deux États, seul moyen d’une paix durable : une Palestine souveraine, démocratique et viable ; des garanties de sécurité pour Israël ; et un processus qui amène à un accord global s’adressant à la Syrie et au Liban. La France a un rôle moteur à jouer dans ce processus et elle pourra se faire entendre à la conférence de Londres au mois de mars. En anticipant cette réunion, ainsi que celle de la Ligue arabe à Alger, je me réjouis d’un dialogue étroit et ininterrompu avec le président Chirac.
Le processus de paix arabo-israélien n’est sûrement qu’un champ d’action où notre partenariat est requis d’urgence. Nous travaillons ensemble en faveur de la démocratie et de la paix au Liban et à la reconstruction de l’Irak. La Jordanie est aussi déterminée à soutenir la France dans ses propres intérêts. Nous avons été fiers d’avoir joué un rôle dans la libération des otages français, l’année dernière, et nous faisons encore tout ce qui est en notre pouvoir pour faire de même pour la journaliste française actuellement retenue captive.
La pacification de la région doit également s’accompagner d’efforts en faveur d’un développement durable dans la région. Le monde arabe doit se réformer pour donner plus de liberté et de prospérité à notre jeunesse. La Jordanie s’est déjà engagée dans cette perspective ; notre pays a effectué des changements structurels afin de construire une vie politique démocratique et pour enraciner les Droits de l’homme et l’accès à tous les niveaux de la société. Notre pays a été le premier du Machrek à signer un accord d’association avec l’Union européenne, et nous travaillons en étroite collaboration avec la France et d’autres pays européens à travers le processus de Barcelone. Nous croyons que le modèle local de la Jordanie est pertinent pour la région entière, dans la création du développement, dans le combat contre l’extrémisme, et pour apporter un nouvel espoir. L’initiative « Vision 2010 du monde arabe », qui sera lancée au Forum international économique de la Mer morte, en Jordanie, en mai, accueillera des chefs d’entreprises privées et de la société civile de tout le monde arabe afin d’organiser un plan d’action régionale efficace. Nous sommes fiers du soutien de la France à ce processus et de notre dialogue constant avec Paris.

Source
Le Monde (France)

« Espoir de paix au Moyen-Orient », par Abdallah II de Jordanie, Le Monde, 23 février 2005.