À la veille du lancement de la campagne officielle de son parti, l’UMP, en faveur du « oui » au referendum sur le traité constitutionnel européen, Jean-Pierre Raffarin expose les arguments de son gouvernement dans Le Monde. Selon lui, ce texte permet à l’Europe de se renforcer sur le plan politique international et d’être un rempart contre le choc des civilisations. Il démocratise l’Union, reconnaît les services publics à la française, permet de grands projets et une relance de l’économie européenne et renforcera la dimension culturelle de l’Europe. On peut relever dans ces grandes déclarations au moins une erreur évidente concernant la reconnaissance des services publics « à la française ». En effet, le texte ne parle jamais de services publics, mais de « services d’intérêt économique général » (SIEG). Or, dans son Livre blanc de 2004, la Commission européenne stipulait : « les termes service d’intérêt général et service d’intérêt économique général ne doivent pas être confondus avec l’expression service public ». En outre, on voit mal comment ce texte permettrait de renforcer l’Europe sur le plan international en insistant pour le maintien de l’OTAN, sous commandement d’un général états-unien, comme pivot de la défense européenne.
L’ancien Premier ministre socialiste, Laurent Fabius, dénonce cet argumentaire dans Le Figaro. Réfutant l’idée d’un choix pour ou contre l’Europe à l’occasion du référendum, il estime que ce traité freine l’Europe plus qu’il ne la fait avancer. Pour lui, comme pour l’ancien Premier ministre Édouard Balladur, l’Union européenne doit se construire en cercles concentriques regroupant les différents États qui veulent aller plus loin dans l’intégration. Or, comment faire quand chaque avancée est soumise à l’unanimité des États membres ? En réalité, plus que cette question des groupes pionniers, c’est l’orientation de l’Union européenne depuis le traité de Maastricht, son tournant pseudo-libéral et atlantiste qui divise les élites politiques française qui l’ont soutenu et qui le regrettent parfois sans l’avouer.

Le président syrien Bachar El Assad a annoncé le repli de toutes les troupes syriennes vers la plaine de la Bekaa et leur retrait progressif. Cette décision attendue avait été anticipée par l’opposition libanaise qui s’efforce désormais de calmer le jeu et de prôner l’apaisement. En effet, elle est soupçonnée d’être soutenue par Washington et Tel-Aviv et elle doit calmer les craintes de ceux qui pensent qu’un retrait syrien pourrait causer une reprise des affrontements entre communautés.
Le chanteur Rabih Abou-Khalil demande, dans Der Spiegel, le retrait des troupes syriennes du Liban. Toutefois, il estime que ce retrait ne doit pas être utilisé par les États-Unis pour étendre leur influence dans la région. En outre, il note que la résolution 1559 demandant le retrait de toutes les forces d’occupation étrangères doit s’appliquer aussi aux forces israéliennes qui continuent d’occuper la frontière Sud. Il affirme que les Libanais sont aujourd’hui unis contre le gouvernement et la Syrie et qu’on ne risque donc pas un éclatement du pays.
Walid Joumblatt assure lui aussi qu’il n’y aura pas de guerre civile au Liban dans Nezavissimaïa Gazeta. Il réitère ses accusations contre la Syrie et les services de renseignement libanais concernant l’assassinat de Rafic Hariri, mais sur un ton moins dur qu’auparavant. Il affirme vouloir le retrait des troupes syriennes conformément aux accords de Taëf de 1989. Pourtant, il refuse la fin de la division confessionnelle du pays bien que cela soit stipulée par ces accords. Niant tout lien avec les États-Unis, il affirme au quotidien russe que son mouvement n’a rien à voir avec la « révolution » orange et refuse la proposition de Condoleezza Rice de déployer des casques bleus.
Le cardinal Nasrallah Boutros Sfeir, le patriarche maronite d’Orient, estime dans Le Monde qu’un mouvement libanais est né lors des manifestations anti-syriennes, mais reconnaît dans le même temps qu’il n’a rien de spontané. En effet, ce sont les organisateurs qui ont demandé aux manifestants de n’arborer que des symboles nationaux et non communautaires. Au passage, il minimise l’importance de son prochain voyage à Washington où il rencontrera George W. Bush.
Enfin, l’opposante libanaise Randa Aractingi demande, comme les autres, dans Die Tageszeitung, le retrait des troupes syriennes et assure qu’il n’y aura pas de guerre civile. Toutefois, elle revient sur quelques conceptions erronées rencontrées dans la presse occidentale : Rafic Hariri n’était pas aimé par la population, il n’est pas à exclure qu’il ait été tué pour des questions politiques intérieures n’ayant rien à voir avec la présence syrienne ; et le Hezbollah est un parti démocratique et populaire au Liban.