Bonne nouvelle, il semble que l’Union européenne s’apprête à repousser la levée de l’embargo sur les armes en direction de la Chine au moins jusqu’à l’année prochaine. Mauvaise nouvelle, il a fallu une intervention états-unienne pour cela.
Les Européens affirment avoir une valeur morale supérieure à George W. Bush en se basant sur une tendance à chercher des résolutions pacifiques aux conflits. Pourtant, au début du mois, la Chine a adopté une loi qui autorise l’emploi de « moyens non-pacifiques » pour empêcher l’indépendance de Taïwan, terme orwellien pour désigner la guerre. Dans le domaine des Droits de l’homme, Amnesty International estime que des dizaines de milliers de personnes continuent d’être emprisonnées en violation de leurs droit de libre expression, d’association et ont de grands risques d’être torturés. En dépit de la libération de quelques prisonniers politiques célèbres, la situation ne s’est pas améliorée depuis le massacre de Tiananmen en 1989 qui avait provoqué le début de l’embargo.
Certains à Bruxelles, Paris et Berlin affirment que la Chine est en train d’émerger de la dictature communiste et que ce pays est sur la voie de la modernisation. C’est la voie européenne qui est donc proposée en levant l’embargo : le changement par la détente. En outre, l’Union européenne affirme qu’il ne s’agit que d’une levée symbolique de l’embargo. En fait, à l’automne 2003, le ministre des Affaires étrangères chinois avait posé la levée de l’embargo comme condition à une relance des relations bilatérales avec l’Union européenne. Jacques Chirac a sauté sur l’occasion et s’est montré docile avec Pékin en échange de contrats et de l’appui de la Chine à son modèle de « monde multipolaire ». Il s’agit d’une approche purement mercantile. L’objectif est de développer les contrats civils, mais aussi militaires. La ministre de la Défense française a même recommandé à la Chine d’acheter des technologies européennes plutôt que de développer les siennes.
Les parlementaires états-uniens, s’imaginant que bientôt des missiles européens pourraient frapper des bateaux états-uniens, ont menacé les entreprises européennes de sanctions économiques et cela va repousser la levée de l’embargo. toutefois, les États-Unis aussi exportent des armes en Chine. Aujourd’hui, Pékin utilise l’Union européenne contre les États-Unis comme Henry Kissinger l’avait utilisée contre l’URSS. Il faut donc une entente transatlantique sur l’attitude à adopter.

Source
The Guardian (Royaume-Uni)
Los Angeles Times (États-Unis)

« Chasing the dragon », par Timothy Garton Ash, The Guardian, 24 mars 2005.
« Selling Out for a China Deal ? », Los Angeles Times, 24 mars 2005.