Situation des droits de l’homme en République arabe syrienne

Le Conseil des droits de l’homme,

Rappelant les résolutions 66/253A, 66/253B et 66/176 de l’Assemblée générale en date respectivement du 16 février 2012, du 3 août 2012 et du 19 décembre 2011, les résolutions S-16/1, S-17/1, S-18/1, 19/1, 19/22, S-19/1 et 20/22 du Conseil des droits de l’homme en date respectivement du 29 avril 2011, du 23 août 2011, du 2 décembre 2011, du 1er mars 2012, du 23 mars 2012, du 1er juin 2012 et du 6 juillet 2012 et les résolutions 2042 (2012) et 2043 (2012) du Conseil de sécurité en date du 14 avril 2012 et du 21 avril 2012,

Rappelant également les résolutions 5/1 et 5/2 du Conseil en date du 18 juin 2007,

Rappelant en outre toutes les résolutions de la Ligue des États arabes relatives à la situation en République arabe syrienne, en particulier la résolution 7523 du 5 septembre 2012, dans laquelle la Ligue a exprimé sa ferme condamnation des violences, des assassinats et des crimes odieux que les autorités syriennes et les milices Shabbiha qui leur sont affiliées continuaient de commettre contre des civils syriens et de l’utilisation d’armement lourd, notamment de blindés, d’artillerie et d’avions de combat pour bombarder des quartiers résidentiels et des villages ainsi que des exécutions arbitraires et des disparitions forcées, perpétrées en violation flagrante des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et a appelé le Gouvernement de la République arabe syrienne à mettre fin immédiatement à toutes les formes d’homicide et de violence commises contre le peuple syrien,

Rappelant la résolution EX-4/2 (IS) de l’Organisation de coopération islamique, en date du 15 août 2012, sur la situation en République arabe syrienne, dans laquelle l’Organisation a appelé à l’application sans délai du plan de transition et à la mise en place d’un mécanisme de paix qui permette d’édifier un nouvel État syrien fondé sur le pluralisme et un système démocratique et civil, qui garantisse l’égalité sur la base du droit, de la citoyenneté et des libertés fondamentales,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République arabe syrienne et aux principes de la Charte des Nations Unies,

Exprimant sa grave préoccupation face à l’escalade de la violence en République arabe syrienne et au nombre croissant de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur du pays qui fuient la violence, et saluant les efforts des pays voisins pour accueillir les réfugiés syriens,

Exprimant sa profonde préoccupation face à la non-application du plan en six points de l’ancien envoyé spécial conjoint Kofi Annan et se félicitant de la nomination de M. Lakhdar Brahimi en tant que nouveau Représentant spécial conjoint de l’Organisation des Nations Unies et de la Ligue des États arabes sur la crise syrienne,

Rappelant les déclarations faites par la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme devant le Conseil des droits de l’homme et le Conseil de sécurité, dans lesquelles elle a indiqué que des crimes contre l’humanité avaient probablement été commis en République arabe syrienne, et notant que la Haut-Commissaire avait maintes fois encouragé le Conseil de sécurité à saisir de la situation la Cour pénale internationale,

1. Accueille avec satisfaction le rapport de la commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne1, présenté en application de la résolution 19/22 du Conseil de sécurité, et les recommandations qu’il contient ;

2. Regrette la non-coopération du Gouvernement de la République arabe syrienne avec la commission d’enquête ;

3. Condamne toutes les violences, d’où qu’elles viennent, y compris les actes terroristes ;

4. Condamne vigoureusement la persistance des violations flagrantes généralisées et systématiques des droits de l’homme et des libertés fondamentales par les autorités syriennes et les milices Shabbiha contrôlées par le Gouvernement, comme l’utilisation d’armes lourdes et de la force contre des civils, les massacres et les exécutions arbitraires, les exécutions extrajudiciaires, l’assassinat et la persécution de manifestants, de défenseurs des droits de l’homme et de journalistes, la détention arbitraire, les disparitions forcées, les entraves à l’accès aux soins médicaux, la torture, les violences sexuelles et les mauvais traitements, y compris contre des enfants, ainsi que toute atteinte aux droits de l’homme commise par les groupes armés de l’opposition ;

5. Condamne dans les termes les plus énergiques le massacre perpétré au village d’Al-Houla près de Homs, où des forces du Gouvernement de la République arabe syrienne et des membres des Shabbiha ont commis, selon la commission d’enquête, des crimes odieux inadmissibles et souligne la nécessité de demander des comptes aux responsables de ces crimes ;

6. Demande à toutes les parties de mettre fin à toutes les formes de violence ;

7. Demande également à toutes les parties de respecter pleinement le droit international applicable aux droits et à la protection des femmes et des filles et de prendre des mesures spéciales pour protéger les femmes et les filles de la violence sexiste, notamment des viols et d’autres formes de sévices sexuels, et demande aussi que soit assurée la participation des femmes à la prise de décisions concernant les processus de règlement du conflit et de paix ;

8. Invite instamment les autorités syriennes à libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement, à publier une liste de tous les lieux de détention, à faire en sorte que les conditions de détention soient conformes au droit international applicable et à autoriser sans délai l’accès d’observateurs indépendants à ces lieux ;

9. Appelle de nouveau les autorités syriennes à s’acquitter de leur responsabilité de protéger la population syrienne ;

10. Souligne la nécessité de donner suite au rapport de la commission d’enquête et de mener rapidement une enquête internationale transparente et indépendante sur les abus et les violations du droit international afin de demander des comptes aux responsables, notamment de violations et d’abus pouvant constituer des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, et encourage les membres de la communauté internationale à faire en sorte qu’il n’y ait pas d’impunité pour de tels abus et violations, vu que les autorités syriennes n’ont pas engagé de poursuites contre les auteurs présumés d’abus ou de violations graves susceptibles de constituer des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité, et note à cet égard la pertinence potentielle de la justice internationale, tout en mettant l’accent sur l’importance de la recommandation de la commission d’enquête tendant à ce que le peuple syrien détermine, sur la base de consultations larges, inclusives et crédibles, dans le cadre constitué par le droit international, le processus et les mécanismes pour parvenir à la réconciliation, établir la vérité et demander des comptes aux responsables de violations flagrantes, ainsi qu’assurer une réparation et des recours utiles aux victimes ;

11. Insiste sur son appui aux aspirations du peuple de la République arabe syrienne à une société pacifique, démocratique et pluraliste, ne laissant aucune place au sectarisme ou à la discrimination à motivation ethnique, religieuse, linguistique ou autre, fondée sur la promotion du respect universel et effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

12. Souligne qu’il incombe à tous les États membres du Conseil des droits de l’homme et à la communauté internationale dans son ensemble d’être très attentifs à la situation critique qui règne en République arabe syrienne ;

13. Exhorte la communauté internationale à fournir d’urgence un soutien financier aux pays hôtes pour leur permettre de répondre aux besoins humanitaires croissants des réfugiés syriens, en mettant l’accent sur le principe du partage du fardeau ;

14. Demande instamment à tous les organismes compétents des Nations Unies, en particulier au Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et à d’autres donateurs, d’accorder d’urgence un soutien accru aux réfugiés syriens dans les pays hôtes ;

15. Invite instamment tous les donateurs à fournir rapidement au Bureau de la coordination des affaires humanitaires et aux organisations humanitaires internationales le soutien financier demandé dans l’appel international relatif à la République arabe syrienne, afin qu’ils puissent mettre en oeuvre de manière plus active le plan d’intervention humanitaire à l’intérieur du pays ;

16. Demande à nouveau aux autorités syriennes d’autoriser et de faciliter un accès immédiat, plein et sans entrave des organisations humanitaires à toutes les régions de la République arabe syrienne pour qu’elles puissent fournir des secours et une assistance humanitaire, et invite toutes les parties à respecter la sécurité des travailleurs humanitaires et du personnel des Nations Unies ;

17. Décide de prolonger le mandat de la commission internationale indépendante d’enquête sur la République arabe syrienne, créée par le Conseil des droits de l’homme dans sa résolution S-17/1, et demande à la commission de poursuivre ses travaux et de présenter un rapport écrit sur la situation des droits de l’homme en République arabe syrienne, dans le cadre d’un dialogue qui aura lieu à la vingt-deuxième session du Conseil ;

18. Demande à la commission d’enquête de continuer de tenir à jour son relevé des violations flagrantes des droits de l’homme commises depuis mars 2011, y compris une évaluation du nombre des victimes, et de le rendre public à intervalles réguliers ;

19. Condamne dans les termes les plus vigoureux la multiplication des massacres en République arabe syrienne, et invite la commission d’enquête à enquêter sur tous les massacres ;

20. Prie le Secrétaire général de fournir des ressources additionnelles, notamment humaines, à la commission d’enquête, afin de lui permettre de s’acquitter pleinement de son mandat, compte tenu de la détérioration croissante de la situation des droits de l’homme en République arabe syrienne ;

21. Demande à nouveau aux autorités syriennes de coopérer pleinement avec la commission d’enquête, notamment en lui accordant un accès immédiat, entier et sans entrave à l’ensemble du territoire de la République arabe syrienne ;

22. Décide de transmettre tous les rapports et mises à jour orales présentés par la commission d’enquête à tous les organes compétents de l’Organisation des Nations Unies et au Secrétaire général pour action appropriée ;

23. Décide de rester saisi de la question.

Relevé des votes :
Ont voté pour (41) : Angola, Arabie Saoudite, Autriche, Bangladesh, Belgique, Bénin, Botswana, Burkina Faso, Cameroun, Chili, Congo, Costa Rica, Djibouti, Équateur, Espagne, États Unis, Guatemala, Hongrie, Indonésie, Italie, Jordanie, Kirghizistan, Koweït, Libye, Malaisie, Maldives, Maurice, Mauritanie, Mexique, Nigéria, Norvège, Pérou, Pologne, Qatar, République de Moldavie, République tchèque, Roumanie, Sénégal, Suisse, Thaïlande et Uruguay.
Ont voté contre (3) : Chine, Cuba et Fédération de Russie.
Abstentions (3) : Inde, Philippines et Ouganda.

Référence ONU : A/HRC/21/L.32