Guerre d’usure US contre l’État syrien sans perspectives
Par Ghaleb Kandil
De ce qui a filtré de la rencontre tripartite de Genève, entre les Russes, les États-uniens et l’émissaire international Lakhdar Brahimi, vendredi 11 janvier, il apparait clairement que le refus de Washington de reconnaitre l’échec de la guerre universelle lancée contre la Syrie et son président Bachar al-Assad, constitue l’obstacle majeur qui empêche une solution politique à la crise syrienne.
C’est Washington qui a saboté toutes les initiatives en refusant de s’engager à travers le Conseil de sécurité à cesser d’armer et de financer les groupes armés en Syrie. Cela est dû au fait que ce sont les États-Unis qui ont géré la guerre en Syrie, ont mis sur pied des chambres d’opération en Turquie, où siègent des agents de la CIA chargés de coordonner les efforts internationaux et régionaux de mobilisation des terroristes du monde entier pour les envoyer en Syrie. Les responsables US se vantent publiquement d’avoir fourni du matériels de communication modernes aux gangs armés, et ils n’ont exprimé aucun regret, même après avoir reconnu qu’une grande partie de ces équipements est tombée aux mains des combattants qaïdistes du Front al-Nosra ; une organisation qu’ils ont tardivement inscrit sur leur liste terroriste, dans laquelle ils pourraient inclure d’autres groupes prochainement, sans pour cela modifier leur position au sujet des engagements sur l’arrêt de la violence.
Tant que des engagements clairs sur l’arrêt du soutien militaire et financier aux groupes terroristes ne sont pas officiellement pris dans le cadre des rencontres de Genève, cela signifiera que l’administration Obama est déterminée à poursuivre la guerre d’usure contre l’État syrien dans les mois à venir. Les États-Unis, qui sont incapables de supporter les pertes matérielles et humaines d’une confrontation directe, savent que l’État national syrien, qui a fait preuve d’une solidité et d’une force remarquables tout au long de cette guerre, sera encore plus déterminé à préserver son indépendance politique après la fin des combats. C’est pour cette raison que Washington lie la mise en place des mécanismes d’arrêt de la guerre au départ du président Bachar al-Assad, qui est un leader populaire, résistant, ayant des choix patriotiques. S’il est évincé dans les circonstances actuelles, cela ouvrira la voie à de nouveaux équilibres qui pourraient écarter l’armée syrienne et la majorité populaire de leur choix d’une Syrie réellement indépendante. L’axe de la résistance en sera alors sérieusement affaibli.
Les propos de Lakhdar Brahimi sont en deçà du niveau du débat, car l’émissaire international est depuis longtemps le porte-parole des États-Unis et de l’Occident. D’un autre côté, la solidité de la position de la Russie, appuyé par les pays des Brics, et plus particulièrement par la Chine et l’Iran, part d’une réalité que la Syrie est la première ligne de défense de toutes les forces indépendantes, qui s’opposent à l’hégémonie unilatérale US. Le président Assad est le symbole de cette réalité. Demander sa démission c’est comme exiger le départ de Fidel Castro dans le Cuba des années soixante.
La force de Bachar al-Assad vient du soutien d’une large majorité de Syriens, qui voient en lui l’espoir d’un avenir meilleur. Ses proches alliés savent que le président syrien base toutes ses décisions sur l’intérêt national syrien, Et aucun force au monde ne peut obliger un chef soutenu par son peuple de changer ses décisions. Les vrais amis de la Syrie savent très bien que la bataille a aujourd’hui dépassé le cadre des réformes, aussi importantes soient-elle. Ces réformes sont d’ailleurs devenues, après le dernier discours d’Assad, le programme de travail du gouvernement. L’enjeu, le vrai, porte sur l’existence de la Syrie en tant que pays libre, souverain et indépendant, actif et influent dans son environnement géopolitique.
Tôt ou tard, Washington reculera et Assad proclamera la victoire dans la guerre la plus féroce jamais lancée contre un pays dans l’histoire contemporaine. Et les déclarations de Brahimi, après la dernière rencontre de Genève, sur le fait que la solution en Syrie doit être politique, est une reconnaissance de la force de l’État syrien et de l’impossibilité de le vaincre.
Déclarations et prises de positions
Michel Sleiman, président de la République
« J’aurais préféré que l’action de la Résistance reste secrète. Il aurait fallu avant d’annoncer publiquement le lancement de ce drone que le président de la République en soit informé, pour ne pas dire qu’il aurait fallu informer le président avant que l’avion soit lancé. Je ne pense pas en outre que l’Iran, qui est un pays ami et frère, devait annoncer qu’il a reçu les photos prises par le drone alors que le président de la République libanaise n’est pas au courant de l’affaire. »
Michel Aoun, leader du Courant patriotique libre
« Nous n’accepterons pas moins que nos droits, nous n’accepterons pas moins que le projet orthodoxe. Les Forces libanaises et les Kataëb ont soutenu cette loi, l’important est de camper sur cette position pour que le projet arrive au Parlement. La loi de Ghazi Kanaan [ex-gouverneur syrien du Liban] respecte-t-elle le pacte national qui stipule une bonne représentativité de toutes les composantes de la nation ? Je ne veux pas un député chiite, sunnite ou druze, je veux que les droits de chaque partie soient respectés. Je voudrai par ailleurs assurer que je n’ai jamais réclamé la fermeture des frontières face aux réfugiés syriens. »
Walid Joumblatt, leader druze libanais
« Il existe une constante unique et fondamentale, dont nous convenons tous. Il s’agit de l’Accord de Taëf qui restera notre priorité. De temps à autre, nous entendons des idées bizarres visant à le saper. C’est ce que nous ne pouvons pas accepter. Comme d’habitude, nous nous entendons avec le président Nabih Berry sur la plupart des questions. Les rencontres se poursuivront afin d’arrondir les angles, de consolider l’union nationale et de s’écarter des sensibilités futiles, d’autant plus que la crise en Syrie est plus grave que nous l’imaginons. Quelles que soient les déclarations provenant d’ici et là, nous ne pouvons en rien faire avancer ou reculer les développements. Il s’agit d’un conflit entre États visant à détruire un État pivot qui s’appelle la Syrie. La réalisation de cet objectif plongera la région dans le chaos constructif, comme l’a affirmé l’ancienne secrétaire d’État américaine, Condoleezza Rice. Nous devons être très prudents, en se cramponnant à l’unité nationale. Dans ce cadre, nous sommes appelés à traiter le dossier des réfugiés syriens et de régler nos problèmes par le dialogue. »
Nabil Nicolas, député membre du bloc de Michel Aoun
« Ce n’est pas le député Ahmad Fatfat qui parle au nom des chrétiens ou qui définit ce que représente le patriarche Béchara Raï. Le patriarche représente les chrétiens du Liban et d’Orient, alors que Fatfat ne représente que le Parti de la libération islamique. Le projet orthodoxe [visant à faire élire les députés par communauté religieuse] a obtenu le soutien de six des huit membres de la sous-commission parlementaire chargée d’examiner les projets de loi électorale. Les autres projets en gestation n’ont même pas obtenu la moitié des voix. Dorénavant, nous n’accepterons plus d’être marginalisés. Nous voulons une véritable parité. »
Marwan Hamadé, député membre du 14-Mars
« Le projet orthodoxe est inspiré de l’extérieur des frontières et n’est pas constitutionnel, comme l’a révélé le président Sleiman. Cette loi enterre Taëf, démantèle le pays et nous ramène au système du double caïmacamat [1] et à la moutassarifiyya [2], qui ont cessé d’exister il y a deux siècles. Cette loi révélera des disparités démographiques dangereuses qui ne vont pas dans le sens de l’attachement à la parité, à laquelle nous tenons, afin de préserver Taëf et l’équilibre national. Cette loi, ne passera pas à la Chambre. Il est temps de paver la voie à des élections qui ouvriront la voie à leur tour à l’application véritable de Taëf, c’est-à-dire la décentralisation administrative qui rassure tous les citoyens, et le système bicaméral pour inclure un élément de laïcité au Parlement et préserver le communautaire au Sénat. »
Événements
• Les rebelles syriens ont libéré 48 otages iraniens enlevés en août dernier près de Damas. De leur côtés, les autorités syriennes ont commencé à libérer mercredi 2 130 prisonniers civils en échange de la libération des 48 ressortissants iraniens, selon Serkan Nergis, porte-parole de l’organisation humanitaire islamiste IHH, une ONG turque qui a affirmé assurer une médiation. « C’est le fruit de négociations menées depuis des mois par notre organisation dans le cadre d’une diplomatie civile », a-t-il souligné.
• Le chef du Parti socialiste progressiste, le député Walid Joumblatt, a dénoncé « certaines prises de position et fatwas religieuses qui sont émises dans certains pays arabes interdisant de féliciter les non-musulmans à l’occasion de leurs fêtes et occasions religieuses », qualifiant ces fatwas de mesures surprenantes et incompréhensibles « dans des États qui ont été le théâtre de révolutions populaires au nom de la liberté d’opinion sur les plans politique, religieux et de la presse ».
• Les familles des neuf pèlerins libanais toujours retenus en Syrie ont observé jeudi un sit-in devant l’ambassade du Qatar à Beyrouth, et ont tenté d’empêcher les employés de la chancellerie d’accéder à leurs bureaux. Cette manifestation était entourée de mesures de sécurité draconiennes. Les proches des neuf otages avaient organisé le 2 janvier un sit-in similaire devant la compagnie d’aviation turque Turkish Airlines à Beyrouth. Lors du rassemblement, les manifestants avaient publié un communiqué dans lequel ils avaient fait assumer la responsabilité de l’enlèvement des leurs à la Turquie.
Le lendemain, ils ont manifesté devant l’ambassade du Qatar.
• L’ancien directeur de la Sûreté générale, Jamil Sayyed a mis à la disposition du procureur général, le juge Hatem Madi, une copie authentique d’un CD comportant les enregistrements de quatre conversations téléphoniques entre le député Okab Sakr et des groupes armés en Syrie, afin que le parquet agisse conformément aux procédures légales. Le général Sayyed a par ailleurs été reçu deux heures durant par le président syrien, Bachar al-Assad.
Revue de presse
As Safir (Quotidien libanais proche de la majorité, 11 janvier 2013)
Mohammad Ballout, correspondant en France
Georges Ibrahim Abdallah arrivera à Beyrouth lundi soir. Son avocat Jacques Vergès a affirmé à As Safir que le ministère de l’Intérieur français lui a demandé de se présenter lundi matin au ministère pour qu’il soit officiellement notifié de la décision de l’expulser au Liban dans la journée. Georges Abdallah aura passé la moitié de sa vie (29 ans) en prison pour défendre la cause de la résistance nationale libanaise sans « courber l’échine devant ceux qui voulaient se venger de lui et l’humilier en prolongeant son séjour en prison », comme l’indique Me Vergès, « parce qu’il défendait sa dignité, et la dignité fait peur dans un monde de nains ». Dès que ce prisonnier politique libanais sera informé de la décision du tribunal lundi à 9h, il sera conduit à bord d’un avion vers un aéroport parisien puis au consulat libanais sous bonne escorte française. Le consul à Paris lui remettra alors un « laissez-passer provisoire » qui fera office de document de voyage afin que les autorités françaises puissent mettre à exécution la décision d’expulsion immédiate vers le Liban. Mais jusqu’à hier soir, les autorités consulaires libanaises et l’ambassade du Liban à Paris n’avaient toujours pas reçu de demande officielle française de délivrer un « laissez-passer » à Abdallah pour qu’elles puissent informer la Sûreté générale libanaise de la date à laquelle il devait arriver à Beyrouth. Ce « laissez-passer » pourrait être le 1er document de voyage officiel portant le vrai nom de Georges Ibrahim Abdallah, qui détenait un faux passeport algérien au moment de son arrestation en 1984. Jacques Vergès a par ailleurs démenti les informations selon lesquelles les autorités françaises auraient proposé de le transférer en Algérie ou dans un autre pays, le gouvernement libanais ayant accepté, voire réclamé, qu’il soit rapatrié au Liban. Le président de la République Michel Sleiman avait évoqué le cas de Georges Abdallah avec les autorités françaises, et le Premier ministre Mikati l’avait défendu à deux reprises. Le gouvernement libanais est rarement intervenu pour obtenir la libération d’un prisonnier libanais.
As Safir (11 janvier 2013)
Imad Marmal
Les Libanais sont confrontés à une épreuve de taille, celle de parvenir par eux-mêmes à élaborer une nouvelle loi électorale, compte tenu du fait que les parties régionales et internationales sont absorbées par le conflit en Syrie à tel point que le Liban n’est devenu à leurs yeux qu’un minuscule détail sur la scène régionale.
Si les élections en 1992, 1996 et 2000 se sont déroulées sous le parrainage de la Syrie, en 2005 sous la houlette de la communauté internationale et en 2009 sous l’égide de l’Accord de Doha, les traits du parrain qui supervisera le scrutin de 2013 ne se sont toujours pas dessinés, mais restent tributaires de la tournure que prendra le conflit syrien.
Dans ce contexte, les Libanais travaillent d’arrache-pied afin de trouver une recette magique sur la base de laquelle les prochaines élections législatives auront lieu. Il convient de constater dans ce cadre que le projet orthodoxe a mis les Forces libanaises et les Kataëb entre le marteau et l’enclume. Si ces deux partis chrétiens retirent leur soutien à ce projet, ils risqueront de perdre une partie de leur popularité en faveur du Courant patriotique libre et du Courant Marada. Et s’ils décident de camper jusqu’au bout sur leur position, ils risqueront de perdre leur allié stratégique, l’ancien Premier ministre Saad Hariri. De surcroît, le projet de loi du Rassemblement orthodoxe bute contre un obstacle sunnite majeur, qui serait difficile à franchir si Najib Mikati et Omar Karamé décident de s’aligner sur la position Saad Hariri, en refusant de cautionner la proposition en question.
Sur le plan chiite, le Hezbollah et le Mouvement Amal ont accepté de consentir à leurs alliés chrétiens toutes les facilités requises à cet égard, fût-il aux dépens de leur ambition de mettre en place une loi électorale moderne et non confessionnelle, partant de leur conviction que la bataille électorale se jouera sur la scène chrétienne et que la priorité consiste donc à améliorer les conditions de la confrontation en faveur du CPL et des Marada contre les composantes chrétiennes du 14-Mars.
Pour le Président de la Chambre, Nabih Berry, l’approbation du projet orthodoxe illustre la préoccupation chrétienne qui ne se limite pas aux chrétiens du Liban mais qui taraude également les citoyens chrétiens dans les pays arabes, tout particulièrement en Irak, en Égypte, en Palestine et en Syrie.
Par ailleurs, les milieux proches du président de la République, Michel Sleiman, affirment que l’entente chrétienne quadripartite sur le projet orthodoxe ne mettra pas le chef de l’État dans l’embarras, car ce dernier, vu sa responsabilité de garantir l’unité nationale, ne pourra pas fermer les yeux sur le fait que ce projet de loi est anticonstitutionnel et va à l’encontre du pacte national.
An Nahar (Quotidien libanais proche du 14-Mars)
(10 janvier 2013)
Le résultat des discussions entreprises au sein de la sous-commission chargée de la réforme électorale se résume selon des sources suivant de près les réunions comme suit : six députés du Bloc du Changement et de la Réforme, du Mouvement Amal, du Hezbollah, des Kataëb et des FL, ont approuvé le projet orthodoxe. Les députés Ahmad Fatfat, Serge Tor Sarkissian, et Akram Chehayeb, s’y sont opposés. Le président de la sous-commission, Robert Ghanem, a adopté quant à lui une position neutre ; les députés des Kataëb, des FL, du Courant du futur et du Bloc d’Achrafié, ont approuvé le projet de loi basé sur 50 circonscriptions, proposé par les composantes chrétiennes du 14-Mars. Le chef du PSP a exprimé son attachement à l’accord de Doha et son ouverture à toute loi électorale majoritaire à même de garantir une juste représentation. Le Bloc du Changement et de la Réforme et le tandem chiite ont exprimé leur refus de ce projet ; quant au projet soumis par le gouvernement au Parlement (proportionnelle, 13 circonscriptions), 4 députés du 8-Mars l’ont approuvé et 4 députés du 14-Mars s’y sont opposés. Robert Ghanem a opté pour une position neutre.
L’ancien Premier ministre Fouad Siniora a contacté le président Michel Sleiman saluant sa position courageuse à l’égard du projet orthodoxe. Il a également appelé le Président des Kataëb, Amine Gemayel, le Chef des FL, Samir Geagea, et les députés Michel Murr et Boutros Harb, en vue de leur faire part du refus du CDF du la loi en question. Par ailleurs, en réponse à certaines analyses évoquant le partage du pouvoir en trois tiers au Liban, des sources chrétiennes ont affirmé à An-Nahar que les chrétiens représentent 38 % des électeurs enregistrés, ce qui signifie qu’il n’existe aucune majorité au Liban qui est une mosaïque formée de minorités.
An-Nahar (10 janvier 2013)
Radan Akil
Le Courant patriotique libre (CPL) se sent plus à l’aise à l’égard de la position de ses alliés musulmans au sujet du projet orthodoxe [chaque communauté élit ses propres députés, ndlr] que ne le sont les chrétiens du 14-Mars vis-à-vis de leurs partenaires musulmans. Les Forces libanaises (FL) et le parti Kataëb savent que le Courant du futur ne soutiendra en aucun cas ce projet défendu vigoureusement par les aounistes, qui expliquent aux chrétiens que c’est leur seule planche de salut. Cela a embarrassé les FL et les Kataëb, qui ont été entrainés dans la surenchère, alors qu’ils préfèrent le projet des 50 circonscriptions proposé par Samir Geagea.
Les délibérations des deux premiers jours à la sous-commission parlementaire chargée d’examiner les projets de loi électorale ont montré que les FL et les Kataëb n’ont pas affiché un grand enthousiasme dans la défense de ce projet, bien qu’ils ne puissent s’en dissocier. En revanche, le député Alain Aoun (CPL) l’a défendu avec acharnement.
Ce que le Courant du futur n’a pas annoncé ouvertement, le député Serge Torsarkissian s’est chargé de le faire avec une expression succincte : « Nous ne voulons pas ce projet ».
Le représentant du Mouvement Amal, Ali Bazzi, avait, lui, des instructions claires du président Nabih Berry sur la nécessité de se ranger du côté de l’unanimité chrétienne. M. Berry a réaffirmé au Nahar qu’il appuyait ce projet « en dépit du fait qu’il ne rejoint pas ma vision en matière électorale. » Le chef du Législatif a ajouté : « J’ai adopté la même position à Doha lorsque j’ai approuvé la loi de 1960, soutenue par le général Michel Aoun. Je ne manœuvre pas au détriment des chrétiens. »
M. Berry a tenu ces propos au moment même où il devait recevoir le chef du Parti socialiste progressiste (PSP), Walid Joumblatt, venu justement lui expliquer les « aspects négatifs » du projet orthodoxe et le danger qu’il représente pour le Liban et pour l’accord de Taëf. « Ce projet est anticonstitutionnel, il est contre la convivialité et provoque l’isolement des communautés », a répété au Nahar le chef du PSP.
La position de M. Joumblatt a trouvé un soutien dans celle du président Sleiman qui a rejeté le projet orthodoxe qu’il a jugé anticonstitutionnel. Mais le CPL estime que le chef de l’État doit être conséquent avec lui-même lorsqu’il a appelé, à la veille de Noël, à la tenue des élections à la date prévue. Selon les aounistes, M. Sleiman doit également annoncer que la loi de 1960 n’est pas conforme à l’esprit de la Constitution.
An Nahar (9 janvier 2013)
Khalil Fleihane
Les responsables ont été déçus par le nombre réduit de Libanais émigrés s’étant inscrits sur les listes électorales dans les 69 ambassades et 15 consulats à travers le monde. Leur nombre s’élève à 6 733 dans 46 représentations diplomatiques, alors que dans 35 autres représentations, aucun émigré ne s’est présenté. Les pages des registres sont restées blanches, bien que le délai ait été prorogé du 31 décembre 2012 au 18 janvier 2013.
Le ministre des Affaires étrangères, Adnane Mansour, a estimé que la raison de ce nombre réduit n’est pas d’ordre logistique, car tout Libanais, quelle que soit son appartenance partisane ou autre, peut s’inscrire. « Ce qui est choquant, c’est que dans certaines colonies libanaises, où nous nous attendions à un taux d’inscription de 70 à 80 %, personne n’est venu », déclare le ministre.
Voici quelques exemples : Dubaï 302 inscrits ; Sénégal 388 ; Montréal, qualifiée de capitale de l’émigration libanaise : 537 ; Mascat 330 ; France 825 ; Koweït 818 ; Allemagne 18, alors qu’il y a 100 000 Libanais dans ce pays, la moitié sont chiites ; Abou Dhabi 68 ; Melbourne 1 136, pour un total de 60 000 Libanais ; Sao Paolo 186 ; Los Angeles 135 ; Washington 113 ; New York 269 ; Gabon 1 ; Bogota 2 ; Athènes 5 ; Buenos Aires 20 ; Cote d’Ivoire 18 ; Kazakhstan 35 etc…
Al Akhbar (Quotidien libanais proche de la majorité, 11 janvier 2013)
Rola Ibrahim
Une source proche de Bkerké [patriarcat maronite] révèle qu’après les derniers échecs du 14-Mars et sa préoccupation par des sujets qui ne figurent par sur l’agenda des États-Unis, il est devenu nécessaire pour les Occidentaux, plus particulièrement pour les Américains, « de changer le staff dirigeant et d’avoir recours à des personnalités plus influentes dans le milieu libanais ». Ils se sont donc employés à produire un nouveau groupe politique, plus subtil, dans le but de servir les mêmes objectifs : encercler le Hezbollah, et, par conséquent, le Courant patriotique libre. Ce groupe est composé du président Michel Sleiman, du Premier ministre Najib Mikati, du chef du PSP Walid Joumblatt, du président des Kataëb Amine Gemayel et du chef du législatif Nabih Berry (dans les cas d’urgence). Au départ, Bkerké a trouvé dans ce groupe des caractéristiques rejoignant sa vision qui consiste à renforcer la présidence de la République. Mais le patriarcat a très vite compris que les méthodes de travail de ce groupe et ses prises de positions vont placer l’Église dans la case du 14-Mars, alors elle a modéré son enthousiasme. Les motivations de ce groupe sont strictement d’ordre électoral. Dans ce contexte, la machine de Baabda [siège de la présidence de la République] a commencé à s’activer dans toutes les régions pour évaluer les chances de ses listes « centristes » et la possibilité de créer un bloc parlementaire ayant un poids. Michel Sleiman a chargé plusieurs instituts de sondages d’effectuer des études sur les régions les plus réceptives aux slogans centristes et sur les candidats les plus acceptées.
Selon un proche du palais présidentiel, dès que ces candidats potentiels ont commencé à travailler, ils ont spontanément collaboré avec le 14-Mars. Dans le Kesrouan, le noyau de cette liste est composé de l’industriel Nehmat Frem et de l’ancien ministre Ziad Baroud, qui ont en vain essayé d’obtenir la bénédiction de Bkerké. Les informations disent que l’ancien député Mansour el-Bone représentera le 14-Mars dans cette liste. Dans le caza de Baabda, le palais présidentiel joue cartes sur table. Mais le refus des anciens députés Pierre Daccache et Abdallah Farhat d’adhérer à « la fausse liste centriste » l’a obligé à revenir à des noms connus pour être plus proches du 14-Mars, comme le président de la municipalité de Hazmié, Jean Asmar, pro-Kataëb, et l’ancien député Salah Honein.
Des sources assurent que ce groupe est hostile aux choix politiques locaux et régionaux du 8-Mars. Et le fait que le président Sleiman ait estimé que l’envoi par le Hezbollah du drone Ayyoub a torpillé la table du dialogue auquel il a appelé inaugure une nouvelle ère politique, où le 14-Mars jouera un rôle secondaire.
Al Akhbar (9 janvier 2013)
Hyam Kosseify
Depuis quelques semaines, le langage diplomatique sur la Syrie a changé. Les diplomates et les visiteurs européens posent à leurs interlocuteurs libanais deux types de questions : quelle est la vision objective des Libanais sur l’évolution des événements en Syrie ; quelle est la situation réelle des organisations fondamentalistes, leur infiltration au Liban et dans les pays voisins, et les possibilités qu’elles s’emparent d’armes chimiques.
Des responsables libanais confirment le changement dans le type de questions adressées par les visiteurs européens au Liban, ou lors de rencontres tenues à l’extérieur du pays. Les Européens ne cachent pas leurs craintes de la poursuite de la guerre en Syrie aussi longtemps, contrairement à ce qu’ils avaient imaginé au départ, et des répercussions que pourrait avoir le conflit sur le Liban et la Jordanie. Ils s’inquiètent également que des rebelles syriens, notamment les groupes fondamentalistes, ne s’emparent d’armes chimiques appartenant à l’armée syrienne. D’ailleurs, la montée en puissances de ces mouvements occupe une grande partie des discussions, preuve en est le recul des déclarations concernant la Coalition nationale syrienne et le Conseil national syrien au profit du Front al-Nosra. Des rapports diplomatiques indiquent que les services de renseignements européens et américains focalisent leur intérêt sur ce mouvement extrémiste et commencent à examiner avec des services moyen-orientaux toutes les conséquences de la montée en puissance du Front al-Nosra sur la scène interne syrienne et sur les pays avoisinants. Ces services posent des questions exhaustives sur les liens entre ces mouvements extrémistes et des régimes arabes connus pour financer et aider ce type d’organisations.
Toutes ces questions reflètent des craintes sérieuses sur la période post-Assad.
Al Hayat (Quotidien panarabe à capitaux saoudiens, 11 janvier 2013)
Randa Takieddine, correspondante à Paris
La justice française a décidé de libérer Georges Ibrahim Abdallah (61 ans), à condition d’être expulsé du territoire français. L’ex-dirigeant des Fractions armées révolutionnaires libanaises (FARL) est incarcéré en France depuis 28 ans pour complicité d’assassinat de deux diplomates, l’attaché militaire américain à Paris, Charles Robert Ray, et l’Israélien Yacov Barsimantov. Le célèbre avocat français de Abdallah, Jacques Vergès, a affirmé que la décision de son expulsion sera prise par le ministère français de l’Intérieur, soulignant que le prisonnier libanais devait être libéré bien avant cette date.
Contacté par le quotidien, Vergès a affirmé : « Nous attendons l’arrêté d’expulsion que le ministère de l’Intérieur devra prendre le 14 janvier en vue de l’exécution de la décision de sa libération. Nous devons attendre quatre jours pour savoir si le ministère de l’Intérieur l’expulsera du territoire français. Soit il y a un gouvernement en France soit il n’y en a pas. J’avais déjà dit que Abdallah devait être remis en liberté 10 ans plus tôt. Toutefois, les États-Unis s’y sont opposés. Cette affaire relève d’un scandale, compte tenu du fait que le gouvernement américain est une partie civile au procès et que des documents existent au sein du Département d’État américain prouvant son opposition catégorique à sa libération ».
Et de se demander : « En leur qualité de quoi s’opposent-ils à sa libération. La France n’est pas un protectorat américain. Voilà pourquoi dans la dernière lettre que j’ai adressée à la Chambre d’enquête du tribunal, j’ai demandé du juge français de faire savoir aux États-Unis que la justice en France n’est pas la putain d’Amérique ».
Pour ce qui est des griefs retenus contre Abdallah, lui reprochant de ne pas avoir exprimé son regret pour ce qu’il a fait, l’avocat a affirmé : « De quel regret s’agit-il. C’est un patriote qui a fait des actes patriotiques. C’est plutôt sa dignité qu’on lui reproche ». À ceux qui disent que Abdallah a tué des gens, Vergès rétorque : « J’ai tué des Allemands durant la Seconde Guerre mondiale. Même l’ex-patron de la DST considère que son maintien en détention est un scandale. L’on reproche à Abdallah de ne pas avoir versé d’argent aux veuves des agents américains. J’étais dans l’armée du général de Gaulle. J’ai tué des Allemands. Personne ne m’a demandé de payer d’argent aux veuves des Allemands que j’ai tués. C’est ridicule ». Vergès a souligné : « J’ai pris la défense de Abdallah tout comme j’ai pris la défense d’Anis Naccache. Mais ce dernier fut libéré car l’Iran est un pays fort. J’ai dit durant la dernière séance à la prison que c’était la dernière fois où j’appelais à la libération de Abdallah. Et que si on ne m’écoutais pas, nous irons à la recherche d’autres mesures que nous mettrons en œuvre ».
À Beyrouth, la « Campagne pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah a célébré sa remise en liberté lors d’un rassemblement organisé à Ras Beyrouth. Les activistes ont appelé les autorités libanaises à prendre les mesures nécessaires afin de garantir son rapatriement le plus tôt possible ».
L’Orient-Le Jour (Quotidien libanais francophone proche du 14-Mars)
Scarlett Haddad (11 janvier 2013)
L’heure de la solution n’a pas encore sonné en Syrie... À la veille de la rencontre de Genève entre l’émissaire onusien Lakhdar Brahimi et des représentants des États-Unis et de la Russie, certains milieux diplomatiques libanais ne croient pas beaucoup à l’imminence d’une solution de la crise en Syrie, pour une raison très simple : le régime, selon ces milieux, est encore trop fort, contrairement à tous les pronostics ; ils considèrent ainsi que le dernier discours du président syrien à l’opéra de Damas a donné des indices clairs à ce sujet.
Indépendamment de la mise en scène qui semble sortir d’une autre époque, Bachar el-Assad, selon eux, a parlé en homme encore fort, présentant un plan de sortie de crise et posant des conditions. De tels propos –ni d’ailleurs la mise en scène– n’auraient pas été possibles si l’homme était aux abois et si son armée était sur le point de s’effondrer. Au contraire, disent-ils, Bachar el-Assad a choisi le timing de son discours après que son armée eut marqué quelques points sur le terrain, notamment à Damas et autour de son aéroport, à Alep et également autour de son aéroport et même à Homs et Idleb. Il est clair que l’armée du régime est en train d’adopter de nouvelles tactiques avec l’opposition, laquelle malgré les aides considérables dont elle bénéficie ne parvient toujours pas, près de deux ans après le déclenchement des troubles, à remporter des victoires importantes. De plus, ajoutent ces milieux, cette opposition reste divisée malgré les efforts déployés pour l’unifier, mais elle est surtout désormais dominée par les groupes islamistes qui commencent à inquiéter sérieusement les Occidentaux, États-Unis en tête. Ces mêmes milieux diplomatiques libanais précisent à cet égard que si l’idée de départ était de les envoyer des quatre coins du monde en Syrie pour qu’ils tombent en martyrs sur la nouvelle scène du jihad, ce sont eux maintenant qui sont en train de prendre les initiatives...
Cette nouvelle, soulignent-ils, bénéficie au régime syrien qui profite aussi d’une conjoncture arabe en évolution. Après avoir fortement appuyé les rebelles appelant même ouvertement à les doter d’armes sophistiquées, l’Arabie saoudite, selon eux, est en train de nuancer sa position. C’est ainsi que le ministre des Affaires étrangères Saoud al-Fayçal s’est déclaré, à l’issue d’une réunion avec son homologue égyptien, en faveur d’une solution politique en Syrie, alors que le fils du roi, le prince Abdel Aziz, a rencontré récemment des officiers syriens en Jordanie. Dûment mandatés par le régime, ceux-ci ont réclamé l’arrêt des aides saoudiennes à l’opposition et selon des rapports diplomatiques, ces aides auraient effectivement diminué sans toutefois s’arrêter. Signe d’un changement dans l’approche saoudienne du dossier syrien, le président Assad n’a pas critiqué l’Arabie dans son dernier discours. De même, des réunions ont eu lieu entre des officiers syriens et des officiers du renseignement égyptien, alors que des États comme le Koweit, le sultanat d’Oman et les Émirats se sont récemment prononcés en faveur d’une solution politique en Syrie. D’ailleurs, le royaume hachémite et les Émirats arabes unis craignent de plus en plus la montée en puissance des islamistes et des Frères musulmans en particulier et commencent à les soumettre à de fortes pressions chez eux. Ce qui permet de croire que la situation actuelle du président syrien serait nettement plus confortable qu’il y a quelques mois. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il a choisi de prononcer un discours à ce moment précis.
Mais tout cela ne signifie pas pour autant, estiment ces milieux diplomatiques, qu’il va remporter la partie. Au contraire. La communauté occidentale, États-Unis en tête, ne peut en aucun cas accepter de voir Assad gagner le bras de fer engagé avec son opposition. La crise est donc appelée à se prolonger, Américains et Russes se contentant pour l’instant de mettre des garde-fous. À cet égard, la dernière rencontre de Dublin, entre la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton et le ministre russe des affaires étrangères Serguei Lavrov avait abouti à un accord sur deux points : les Russes s’engageaient à ce que les armes chimiques syriennes soient en lieu sûr et les Américains se prononçaient en faveur d’une solution politique au conflit syrien. Sous ce plafond, tous les coups sont encore permis et la rencontre d’aujourd’hui à Genève ne devrait pas enregistrer de sérieuses percées. Le seul élément nouveau a été donné par le président syrien qui a montré, à travers son discours, qu’il n’est pas sur le point de partir. C’est d’ailleurs ce qui a fortement déplu à la communauté internationale qui s’est empressée de rejeter son plan de sortie de crise. Dans ce contexte, une chose est sûre : l’heure de la solution n’a pas encore sonné et au train où vont les choses, elle ne serait peut-être pas au rendez-vous du prochain sommet russo-américain prévu en mars. Les parties libanaises qui continuent à miser sur un règlement rapide de la crise syrienne, dans un sens ou dans l’autre, devraient revoir leurs calculs. D’ici à la date des élections législatives, annoncées pour la première semaine de juin, il se pourrait bien que rien ne change en Syrie... Mais au Liban, par contre, les prochains mois pourraient être l’occasion d’un nouvel afflux de déplacés avec leur cortège de malheurs, de misères et de troubles.
L’Orient-Le Jour (9 Janvier 2013)
Le président Michel Sleiman a abordé hier le sujet de la réforme de la loi électorale au cours d’une interview accordée au site électronique de l’organe du PSP al-Anba’. Le chef de l’État a notamment estimé, en réponse à une question, que la proposition de loi électorale présentée par le Rassemblement orthodoxe est anticonstitutionnelle. Le chef de l’État a appelé sur ce plan à former une commission constitutionnelle qui serait chargée d’examiner toute nouvelle loi électorale afin de s’assurer de son caractère constitutionnel.
Le président Sleiman a exhorté dans ce cadre tous les protagonistes à aboutir à un consensus concernant la réforme électorale, émettant l’espoir à ce sujet que les discussions se concentrent sur le projet transmis par le gouvernement, basé sur la proportionnelle. Ce projet consiste en un découpage prévoyant treize circonscriptions auxquelles vient s’ajouter une circonscription de six députés consacrée aux émigrés. Le chef de l’État a souligné à cet égard que le projet approuvé en Conseil des ministres pourrait être amendé « de manière à se rapprocher d’une formule combinant la proportionnelle et le système majoritaire, afin de prendre en considération les appréhensions de toutes les parties. »
Al-Quds al-Arabi (quotidien panarabe édité à Londres, 6 janvier 2013)
Abdel Bari Atwan, rédacteur en chef
Cinq développements fondamentaux méritent une lecture approfondie pour connaitre les composantes du paysage syrien dans toutes ses dimensions pour les mois à venir : le premier est le long discours du président Bachar al-Assad, dans lequel il a proposé un plan pour une solution pacifique de la crise dans son pays ; le deuxième est la fatwa du grand mufti d’Arabie saoudite, cheikh Abdel Aziz Al Cheikh, mettant en garde les ulémas saoudiens contre l’appel au Jihad en Syrie, affirmant que le soutien aux jihadistes doit se limiter au niveau financier et à travers les canaux officiels ; le troisième est l’annonce par Benyamin Netanyahu de l’intention de son gouvernement de construire une clôture le long du Golan occupé, à titre préventif, après l’arrivée du "jihad international" et son positionnement à la place de l’armée syrienne, qui s’est retirée de la région ; le quatrième est la multiplication des plaintes de l’armée syrienne libre (ASL) de l’arrêt de l’aide financière et militaire, ce qui traduit un changement, permanent ou provisoire, de l’attitude des pays lui apportant un soutien ; enfin, le cinquième, est la tenue dans deux semaines d’une conférence à Genève, avec la participation d’opposants qui croient au dialogue avec le régime. Cette conférence est placée sous le titre de la préservation de l’unité géographique et démographique de la Syrie. Cette manifestation est soutenue par des États européens, notamment l’Allemagne et la Suède, selon ses organisateurs.
Le discours d’Assad était décevant pour ses détracteurs, car ce n’était pas celui d’un homme vaincu, qui vit terré, et se déplace d’un trou à un autre. Ce discours était le plus fort qu’il n’ait jamais prononcé, notamment depuis la révolte populaire contre son régime.
Le président Assad a dit clairement qu’il ne négociera pas avec l’opposition de l’extérieur qu’il a accusé de collaborer avec l’Occident, car si la négociation est inévitable, il le fera avec les maitres. Il a assuré qu’il restera en place et qu’il refuse ne serait-ce que d’évoquer son départ.
Nous sommes devant un homme déterminé à aller jusqu’au bout dans la voie qu’il a choisi, quelles que soient les pertes humaines.
Il est difficile que le président Assad tombe sans intervention étrangère. Et celle-ci est de plus en plus écartée. L’administration américaine craint ses conséquences et ne peut pas supporter des résultats humiliants comme ceux d’Irak et d’Afghanistan. La fatwa saoudienne, la déclaration du ministre Saoud al-Fayçal selon laquelle le départ du président Assad doit être décidé par le peuple syrien, et les plaintes de l’ASL, sont autant de facteurs qui font qu’Assad est moins inquiet sur son sort.
Beaucoup ont prédit la chute du président Assad en 2012, même avant. Beaucoup ont prédit sa chute avec le début de cette année. Mais la froideur américaine, la polarisation communautaire et la contagion de la crise syrienne dans les pays voisins (l’Irak, la clôture israélienne, la fatwa saoudienne, l’indifférence de l’Égypte etc...) allongeront la vie d’Assad et de son régime jusqu’à la fin de l’année, voire au-delà.
Elnashra.com (site d’informations libanais indépendant, 9 janvier 2013)
Naji S. Boustani
Ces derniers jours, le déploiement militaire naval russe dans la région a atteint des niveaux jamais vu depuis 40 ans. Les informations affirmant que cette flottille est chargée d’évacuer les ressortissants russes de Syrie sont inexactes, car les plans d’évacuation sont prêts depuis longtemps.
Les objectifs du déploiement militaire russe sont les suivants :
– 1. Adresser un message aux États-Unis et aux pays occidentaux que Moscou ne restera pas neutre en cas d’intervention militaire extérieure contre la Syrie, qu’elle soit terrestre -à travers le déploiement d’unité de combat dans certaines régions syriennes-, ou aérienne -à travers des raids de l’aviation-, ou encore si un blocus aérien était imposé au-dessus de certaines zones du pays.
– 2. Faire face au déploiement militaire occidentale croissant dans la région, qui comprend des armes sophistiquées dans des pays alliés de Washington, comme les Patriot en Turquie.
– 3. Montrer la détermination de la Russie à conserver la base navale de Tartous, qui est la dernière base russe à l’extérieur de l’ex-Union soviétique et au Moyen-Orient. Tartous est un point de ravitaillement pour les bâtiments russes de la Mer noire.
– 4. Préparer de grandes manœuvres militaires qui pourraient regrouper la Russie, la Chine, l’Iran, voire la Syrie. S’il a lieu, cet exercice vise à montrer que ces quatre pays sont dans une même tranchée en cas d’attaque extérieure contre la Syrie/
– 5. L’objectif le plus important est de transporter des armes et des munitions à l’armée syrienne sans devoir passer par un aéroport étranger ou survoler l’espace aérien d’un pays tiers, alliés ou non. De la sorte, les armes adéquates sont fournies à l’armée syrienne directement.
Face à ces activités militaires russes croissantes, il est utile de rappeler que les Américains disposent au Moyen-Orient quelque 50 000 Marines.
Toutefois, les navires russes ne vont pas engager le combat dans notre région car aucune intervention militaire extérieure n’est envisagée en Syrie dans un avenir proche. Les combats en Syrie resteront confinés entre l’armée régulière et l’ASL.
Fides (Agence missionnaire du Vatican, 11janvier 2013)
Environ 1 000 fidèles chrétiens grecs-orthodoxes et catholiques latins sont pris au piège dans le petit village entièrement chrétien de Yaakoubieh, au nord d’Alep. Privés de tout, sans nourriture, sans électricité, manquant des biens de première nécessité, ils se trouvent au milieu d’intenses combats entre les forces loyalistes et des groupes d’opposition. Ils sont dans l’impossibilité de quitter le village et « se trouvent dans des conditions désastreuses, dans lesquelles ils risquent l’extinction ». C’est l’alarme lancé, par l’intermédiaire de l’Agence Fides, par le Père François Kouseiffi, Curé de la Paroisse Saint François à Hamra (Beyrouth) qui s’occupe du soin et de l’assistance de près de 500 réfugiés syriens. Les réfugiés ont raconté au Père Kouseiffi la situation tragique du village de Yaakoubieh, dont beaucoup proviennent, et où se trouvent encore beaucoup de leurs parents. Avant la guerre, le village comptait environ 3 000 chrétiens, répartis entre arméniens, orthodoxes et catholiques, qui se sont désormais presque tous enfuis. Des religieuses franciscaines qui partagent le sort des civils se trouvent encore dans le village, indique le religieux. « La situation est très grave. Les fidèles sont pris au piège. Nous cherchons actuellement à les aider par tous les moyens à venir au Liban. Ces jours derniers, un certain nombre de nos émissaires sont partis pour se rendre sur place mais le trajet est très dangereux et, après plus d’une journée de route, ils sont parvenus à Alep. Les contacts avec les chrétiens demeurés sur place sont sporadiques. Ils ont lancé l’alarme s’agissant de leur survie. Ils risquent de mourir dans le silence général ».
Les chrétiens syriens paient le prix de la déstabilisation du pays et souffrent comme les autres syriens mais, comme les autres minorités, ils demeurent les groupes les plus vulnérables. Sur un total de quelques 4 millions de réfugiés syriens, les chrétiens sont environ 500 000 dont 25 000 se trouvent au Liban. Ces jours derniers, rappelle le Père Kouseiffi, « la vague de gel a rendu leurs conditions beaucoup plus difficiles. Nous sommes en pleine urgence humanitaire. Ils racontent leur drame, leurs espérances et rêvent d’un avenir meilleur pour leur pays. »
[1] En 1842, sur proposition de Metternich, les grandes puissances européennes imposent à l’Empire ottoman de diviser le Mont Liban en deux gouvernorats, un druze et un maronite.
[2] À partir de 1861, le Mont Liban est administré par un gouverneur ottoman, le moutassaref, qui doit être un sujet ottoman mais non-Libanais, de religion catholique, approuvé par les cinq grandes puissances européennes.
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