Les dirigeants de Rosneft et d’ExxonMobil se congratulent au forum de Davos.

Une filiale de Rosneft va participer à l’exploration pétrolière dans le Golfe du Mexique sur les aires dévolues à la major US ExxonMobil. Un accord en ce sens a été signé, le 5 mars 2013, lors de la visite d’Igor Setchine, PDG de la compagnie russe, aux États-Unis.

D’après l’accord, la filiale de Rosneft Neftegaz Holding America Limited détiendra 30 % des parts dans 2 « blocs » en eau profonde situés dans le Golfe du Mexique — trois d’entre eux dans la partie centrale, les autres plus à l’ouest — sur une superficie totale de 450 km². Exxon Mobil conserve 70 % des parts et reste l’opérateur de production. En ce moment, il n’y a pas de prospection, mais l’on analyse les données issues des études sismiques.

Le dirigeant de Rosneft Igor Setchine a noté que grâce à l’accord signé, la compagnie et ses filiales obtiennent un accès au plus riche gisement pétrolifère offshore mondial. « Nous sommes sûrs que nos efforts communs permettront une exploitation bien plus effective des gisements du Golfe du Mexique (…) l’expérience et les connaissances ainsi reçues pourront être utilisées pour la mise en valeur des gisements offshore russes, notamment l’aire de Touapse [1] qui entre dans le cadre de l’accord pour une collaboration stratégique ». Rappelons que Rosneft et ExxonMobil continuent à réaliser cet accord qu’elles avaient signées en 2011. Il est prévu que les deux compagnies conduiront des explorations pétrolières communes en Russie et dans d’autres pays.

Vitalii Krioukov, d’IFD Kapital a estimé dans un entretien avec le journal Izvestia que cet accord faisait le pendant d’un autre accord semblable des deux mêmes compagnies dans le Grand Nord. L’expert estime que, comme il n’y a pas encore eu d’exploration géologique sur les aires d’exploitation d’Exxon Mobil dans le Golfe du Mexique, le niveau de connaissance est semblable à celui des gisements projetés en mer de Kara. Krioukov a aussi remarqué qu’à son avis, ExxonMobil a proposé à Rosneft des projets complexes qui nécessitent des investissements importants et à hauts risques. Cependant, le golfe du Mexique est une région très attractif pour l’exploration pétrolière. En bref, il est encore tôt, à son avis, pour parler d’expansion internationale de Rosneft ; c’est surtout une possibilité d’obtenir des savoir-faire et une expérience technologique.

L’expert de la Raiffeisenbank Andrei Polichtchuk est d’accord avec son confrère, mais dans un entretien avec le journal Vedomosti, il a constaté que la position de Rosneft est plus favorable, puisque l’exploitation est conduite depuis longtemps avec succès dans le golfe du Mexique (à l’inverse de l’Arctique) et est moins risquée.

Le vice-président du Centre des liaisons stratégiques Dmitri Abzalov estime que l’accès au marché états-unien est porteur de perspectives tant pour Rosneft que pour la Russie en général. La région est « attractive par son maillage d’infrastructures de transport  » De plus, en détenant 30 % des parts de l’exploitation dans le golfe du Mexique, Rosneft pourra améliorer sa compétence pour la mise en valeur des gisements en mer de Kara. Après la signature des accords sur les gisements offshore avec Eni et Statoil et du voyage d’Igor Setchine en Asie, Rosneft a établi les grands axes de son expansion sur les marchés extérieurs.

Sergueï Pravosoudov, directeur de l’Institut du secteur national de l’Énergie a déclaré à Odnako que Rosneft suit le chemin de Gazprom « Le schéma est très simple et avait été inventé par Gazprom en son temps : il faut donner une part de marché dans ses projets [nationaux] en échange d’autres dans des pays étrangers. Rosneft a pris cette voie en permettant aux USA de participer à l’exploration des gisements offshore du plateau continental Arctique, et en échange la compagnie a pu avoir la possibilité d’extraire du pétrole sur le territoire des États-Unis. Par ailleurs, ce n’est pas un scoop, Rosneft est une entreprise multinationale qui n’extrait pas que du pétrole russe. »

En plus du contrat avec Exxon, le 6 mars, Rosneft a signé des accords de fourniture de pétrole à long terme [2] avec les courtiers pétroliers Glencore et Vitol, parmi les plus importants du monde. L’accord prévoit une fourniture de 46,9 millions de tonnes de pétrole à Glencore et de 20,1 millions de tonnes à Vitol, comme l’indique le communiqué de presse de la major russe [3]. Celle-ci devrait recevoir une avance de paiement de 10 milliards de dollars qui seront attribués à des investissements extérieurs, et permettront notamment de diminuer la somme qui devra être empruntée pour acheter TNK-BP [4].

Traduction
Louis-Benoît Greffe
Source
Оdnako (Russie)