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Nous, ministres des affaires étrangères de l’Allemagne, de l’Arabie Saoudite, de l’Égypte, des Émirats arabes Unis, des États-Unis, de la France, de l’Italie, de la Jordanie, du Qatar, du Royaume-Uni et de la Turquie, nous sommes réunis aujourd’hui à Paris avec une délégation de la Coalition nationale syrienne menée par son président Ahmad al Jarba, et avons adopté la déclaration du Core Group suivante :

1. Nous soutenons le droit du peuple syrien à déterminer son propre destin et à se défendre face à l’oppression. La conférence de Genève II, fondée sur la pleine mise en oeuvre du communiqué de Genève, doit permettre au peuple syrien de prendre en main son destin et mettre fin au régime despotique actuel, à travers une véritable transition politique.

2. Nous condamnons dans les termes les plus fermes les atrocités commises quotidiennement par le régime contre son propre peuple, avec le soutien du Hezbollah et d’autres groupes étrangers. Nous exprimons notre indignation en particulier face à l’utilisation intensive de barils d’explosifs contre la population de la ville d’Alep, qui ont fait plus de 700 morts et 3.000 blessés depuis le 15 décembre, et dans plusieurs autres endroits à travers la Syrie. Nous sommes révoltés par la stratégie du régime consistant à affamer la population pour qu’elle se rende, qui prive notamment de nourriture et de médicaments plus de 200.000 personnes dans la banlieue de Damas et dans la vieille ville de Homs. Nous rappelons que toute stratégie visant à affamer des civils constitue un crime de guerre. On ne doit pas attendre de la communauté internationale qu’elle tolère la poursuite de tels crimes.

3. L’accroissement des souffrances du peuple syrien du fait du régime nuit gravement aux chances de succès de la Conférence de Genève 2. Le régime doit remplir les obligations prévues par les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies 2042 et 2043 qu’il a formellement acceptées, et doit en particulier mettre immédiatement un terme aux attaques indiscriminées contre des civils, et libérer toutes les personnes détenues arbitrairement. Il doit permettre un accès humanitaire immédiat et sans entrave à l’ensemble du territoire syrien par des opérations transfrontalières et à travers les lignes de front. Nous demandons instamment à la Russie et à l’Iran d’user de toute leur influence sur le régime pour qu’il agisse en conséquence. Nous déplorons que le Conseil de sécurité de l’ONU n’ait pas pu s’exprimer depuis la déclaration présidentielle du 2 octobre. Considérant que la situation continue de se dégrader, nous appelons à une résolution humanitaire du Conseil de sécurité des Nations unies.

4. Nous réaffirmons notre conviction que la seule solution au conflit est une véritable transition politique, fondée sur la pleine mise en oeuvre du communiqué de Genève et préservant la souveraineté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale de l’État syrien.

5. Nous nous félicitons de l’invitation adressée par le Secrétaire général des Nations unies, qui convie les parties à la conférence de Genève 2 pour mettre pleinement en oeuvre le communiqué de Genève, avec l’objectif prioritaire de former, par consentement mutuel, un gouvernement de transition doté des pleins pouvoirs exécutifs. Nous rappelons que l’invitation indique clairement que la participation à la Conférence sera considérée comme un engagement vis-à-vis cet objectif.

6. En conséquence, nous condamnons fermement les dernières déclarations du régime, par lesquelles il refuse de se rendre à Genève pour établir une transition politique. Ces déclarations contredisent complètement le communiqué de Genève, entériné par la résolution 2118 du Conseil de sécurité des Nations unies, à laquelle le régime doit se conformer. En outre, la perspective d’une élection présidentielle organisée par le régime, dans laquelle Bachar Al-Assad se présenterait, est totalement contradictoire avec le processus de Genève 2 et son objectif d’une transition démocratique négociée. Une telle parodie de scrutin, visant à maintenir au pouvoir un homme dont les Nations unies considèrent qu’il a commis des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, ne ferait qu’alimenter le conflit et augmenter le risque d’une partition du pays. Si un tel scrutin devait se tenir, nous le considérerions comme totalement nul et non avenu.

7. Nous réaffirmons notre plein soutien au communiqué ministériel du Core Group du 22 octobre 2013. Les négociations pour former le gouvernement de transition, sous la médiation du Représentant spécial conjoint, doivent commencer dès le 24 janvier et ne doivent pas se tenir indéfiniment. Le processus de Genève 2 doit déboucher sur des progrès tangibles et immédiats pour le peuple syrien. Au cours des négociations, toutes les parties doivent mettre fin à l’utilisation d’armes lourdes et mettre en oeuvre des pauses humanitaires. Dès que le gouvernement de transition sera mis en place, toutes les parties devront coopérer avec ce dernier pour assurer l’arrêt définitif de la violence à travers le pays. Conformément au communiqué de Genève, une fois le gouvernement de transition établi et doté du contrôle sur toutes les institutions gouvernementales, comme spécifié par la lettre d’invitation du Secrétaire général des Nations unies, y compris sur les forces armées, les services de sécurité et de renseignement, Assad et ses proches collaborateurs ayant du sang sur les mains ne joueront plus aucun rôle en Syrie.

8. Tous ceux qui ont commis des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité doivent être tenus responsables. Nous réaffirmons notre soutien aux mécanismes de justice pénale internationale pour parvenir à la réconciliation, la vérité, la non-impunité des coupables de violations flagrantes, et permettre des recours efficaces et l’indemnisation des victimes.

9. Nous demandons instamment à la Coalition nationale de répondre positivement à l’invitation à former la délégation de l’opposition syrienne, envoyée par le Secrétaire général des Nations unies. Nous invitons la Coalition à former, dès que possible, une délégation des forces de l’opposition pour participer au processus politique à partir du 22 janvier. La Coalition nationale, le représentant légitime du peuple syrien, devra établir une délégation qui reflète la diversité de la société syrienne et qui respecte la parité. Nous nous engageons à soutenir pleinement l’opposition lors de la Conférence de Genève 2.

10. Nous soutenons fortement la vision exprimée par la Charte nationale adoptée au Caire, qui ouvre la voie à une Syrie démocratique et pluraliste.

11. Nous saluons l’initiative du Koweït d’accueillir la deuxième Conférence internationale humanitaire des donateurs pour la Syrie, le 15 janvier. Nous appelons tous les pays à mobiliser des ressources financières pour répondre aux besoins à l’intérieur de la Syrie, y compris dans les zones libérées, attaquées et assiégées, ainsi que dans les pays de la région qui ont généreusement accueilli un nombre croissant de réfugiés. Nous reconnaissons l’impact social, économique et financier considérable que ces réfugiés ont sur leurs sociétés, et appelons la communauté internationale à assumer ses responsabilités en partageant le fardeau. Nous saluons également la tenue à Urfa (Turquie), le 17 janvier, d’une rencontre du HCR et des pays voisins de la Syrie, qui mettra l’accent sur la pression accrue pesant sur les pays d’accueil et les communautés hôtes, alors que le nombre de réfugiés de Syrie dépasse 2,5 millions. Nous soulignons l’importance de répondre aux besoins des personnes déplacées à l’intérieur de la Syrie, concentrés dans certaines régions, qui cherchent refuge et protection. Il est essentiel d’augmenter le niveau de l’aide humanitaire, en particulier dans les zones libérées, contestées et assiégées. Ce soutien passe notamment par l’aide au gouvernement provisoire et à l’Unité de coordination des aides de la Coalition, ainsi qu’aux réseaux locaux de solidarité. Nous exprimons notre plein soutien au travail effectué par la secrétaire générale adjointe des Nations unies pour les affaires humanitaires, le HCR, les agences spécialisées des Nations unies et tous les acteurs humanitaires pour alléger les souffrances du peuple syrien, et soulignons la nécessité urgente de parvenir à des résultats significatifs.

12. Tous les groupes armés doivent respecter les valeurs démocratiques et pluralistes, reconnaître l’autorité politique de la Coalition nationale et accepter la perspective d’une transition démocratique négociée à Genève sur la base des objectifs énumérés ci-dessus. Nous les exhortons à faciliter l’accès humanitaire et à respecter le droit humanitaire, ainsi que le travail des acteurs humanitaires et des journalistes. Nous exhortons également les groupes armés de l’opposition qui aspirent à une Syrie libre et pluraliste à s’unir et à assurer la sécurité des civils dans les zones sous leur contrôle, y compris face aux violations des groupes extrémistes.

13. Nous condamnons la présence de combattants étrangers en Syrie, à la fois ceux qui luttent avec le régime comme le Hezbollah et d’autres forces soutenues par l’Iran, et ceux qui se battent au sein d’autres groupes extrémistes. Nous exigeons leur retrait immédiat. Il est important que les pays qui soutiennent et encouragent ces groupes cessent de le faire, et que tous les groupes respectent la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie. Nous appelons instamment la communauté internationale à envisager des mesures politiques et économiques pour obliger la branche militaire du Hezbollah, une organisation terroriste, et les autres groupes soutenus par l’Iran, à se retirer de Syrie.

14. Nous soutenons pleinement le Conseil militaire suprême de l’Armée syrienne libre et les autres forces de l’opposition démocratique dans leur action contre l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL). Les groupes extrémistes font le jeu du régime, et ternissent l’image des forces de l’opposition syrienne démocratiques et légitimes en les privant de soutien local et international. Nous exhortons les forces de l’opposition démocratique à continuer leur combat contre les groupes affiliés à Al-Qaïda. Nous partageons une préoccupation croissante face à la propagation de groupes extrémistes, y compris l’EIIL et Jabhat Al-Nosra. Le régime, contrairement à ce qu’il prétend, ne prend aucune mesure significative pour lutter contre l’extrémisme. Au contraire, il alimente cette menace en facilitant son développement dans le but de miner l’opposition démocratique. La détermination de Bachar Al-Assad à s’accrocher au pouvoir, et la brutalité du régime, sont les racines de l’extrémisme en Syrie. Tant que Bachar Al-Assad restera au pouvoir, il n’y aura aucune perspective de stabilité et de paix en Syrie et dans la région. Ce n’est que lorsque le peuple syrien sera maître de son avenir qu’il y aura une perspective de paix et de stabilité en Syrie.