Monsieur le Secrétaire général des Nations unies,
Monsieur le Président de la Confédération helvétique,
Mesdames et Messieurs,

Dans le drame syrien, la solution ne peut être que politique. L’objet de cette conférence dite de Genève II est politique et il est clair. Il est défini par la lettre d’invitation de M. Ban Ki-moon, que je félicite pour sa détermination. Je le cite :

« Face aux effroyables souffrances en Syrie, notre mandat est de parvenir de toute urgence à un règlement négocié, un règlement politique qui mettra intégralement en œuvre le communiqué de Genève I, à commencer par un accord sur une autorité de transition dotée des pleins pouvoirs exécutifs, formée sur la base du consentement mutuel ».

Les choses, du moins sur le papier, sont donc claires. Il s’agit, non pas de conduire une discussion générale sur la Syrie, non pas de lancer des injures ou des slogans de propagande, pas non plus d’une façon de gagner du temps ou de prononcer des discours répétant le mot « terrorisme » sans en analyser les vraies causes, donc les vrais moyens de le combattre. Il s’agit de rechercher un accord politique pour la Syrie concernant cette autorité de transition dotée des pleins pouvoirs exécutifs.

Et pour qu’il n’y ait aucune ambigüité possible, le Secrétaire général des Nations unies précise que « la participation sera considérée comme une adhésion aux objectifs de la conférence tels qu’ils sont énoncés ci-dessus ».

La France est en plein accord avec ces objectifs, rappelés par une résolution unanime du Conseil de sécurité, qui ne constituent pas, contrairement à ce que certains prétendent, des « préconditions ». L’ordre du jour d’une conférence n’est nullement une précondition ; c’est le mandat donné par les Nations unies et qui donc s’impose à tous.

Dès lors, nous devrons être très vigilants pour que cet ordre du jour soit respecté, pour que les faux-semblants et les manœuvres dilatoires éventuelles soient évités et qu’on avance sous la médiation du Représentant spécial conjoint Lakhdar Brahimi autant qu’il sera possible vers la recherche de la paix.

Est-ce à dire que cette recherche sera facile ? Certainement pas. Il suffit d’entendre tels des premiers discours de ce matin. Tout conflit de cette nature et de cette violence est très compliqué à éteindre. Il a fallu un an et demi avant que cette réunion ne se tienne. Les affrontements sanglants en Syrie et dans toute la région, l’horreur des exactions montrée encore hier — nous n’oublions pas le massacre chimique commis à Damas par Bachar Al-Assad qui quelques jours avant jurait ne pas détenir ce type d’armement —, le recours à des crimes de masse, les famines organisées, tout cela et bien d’autres monstruosités ne peuvent pas être oubliées. Le régime porte une responsabilité écrasante dans cette situation et, du même coup, dans la montée d’un terrorisme criminel, qu’il prétend combattre mais qui est en réalité objectivement son allié. La Coalition nationale syrienne agit courageusement contre l’un et contre l’autre, et nous la soutenons pleinement.

Parce que cette situation terrible existe, qu’elle tue chaque mois des centaines, des milliers de femmes, d’enfants, d’hommes innocents, nous demandons dès l’entrée de cette conférence que, de toute urgence, un ou des cessez-le-feu soient pratiqués, des couloirs humanitaires ouverts, des vivres et des médicaments apportés aux survivants. Ces mesures, ponctuelles sans doute, mais indispensables, doivent aider non seulement les populations qui souffrent mais le déroulement de cette conférence.

Car nous sommes là, dans ce confortable hôtel, au moment où sur le terrain des gens souffrent, meurent et des combattants s’entretuent. S’il est vrai que chaque homme porte en lui une part de la condition humaine, alors la France, puissance de paix, demande aux belligérants, et singulièrement au régime, de procéder d’urgence à ces mesures concrètes dites de confiance. Ceux qui ne le feraient pas ajouteraient de l’inhumanité à leur inhumanité.

Mesdames et Messieurs,

La France, nation indépendante, membre permanent du Conseil de sécurité, amie traditionnelle des peuples syrien, jordanien, libanais, et de tous les peuples de la région, revendique d’être là pour essayer de faire progresser la cause de la paix. Nous n’avons pas d’agenda caché. Nous n’avons pas d’autre intérêt à défendre que celui de la réconciliation, d’une Syrie enfin unie, démocratique, respectueuse des droits de la personne humaine et des diverses communautés, d’une Syrie indépendante. Sans combattants étrangers sur son sol. Et sans criminel de masse à sa tête.

Tel est le double vœu que je formule aux côtés de la Coalition nationale syrienne pour cette conférence et pour ses participants :
 Mener à bien l’ordre du jour de la conférence tel qu’il a été défini ;
 engager sans tarder des mesures de confiance positives pour la population syrienne.

Tout cela pour avancer vers la paix.