Intervention de Nickolay Mladenov par vidéo-conférence.

La séance est ouverte à 10 h 50.

Le Président (parle en anglais) : Conformément à l’article 37 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite le représentant de l’Iraq à participer à la présente séance.

Conformément à l’article 39 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite M. Nickolay Mladenov, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq, à participer à la présente séance.

Au nom du Conseil, je souhaite la bienvenue à M. Mladenov, qui participe à la présente séance par visioconférence depuis Bagdad.

Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.

J’appelle l’attention des membres du Conseil sur le document S/2014/480, qui contient le troisième rapport du Secrétaire général établi par le Secrétaire général en application du paragraphe 4 de la résolution 2107 (2013) du Conseil de sécurité. Je tiens également à appeler l’attention des membres du Conseil sur le document S/2014/485, qui contient le troisième rapport du Secrétaire général présenté en application du paragraphe 6 de la résolution 2110 (2013).

Je donne maintenant la parole à M. Mladenov.

M. Mladenov, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (parle en anglais) : En ce mois saint, je voudrais tout d’abord commencer par souhaiter un bon ramadan à tous nos amis et collègues musulmans, et leur dire Ramadan kareem.

J’ai l’honneur de présenter aujourd’hui au Conseil deux rapports au nom du Secrétaire général. Le premier, présenté en application de la résolution 2110 (2013), concerne les activités de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI) (S/2014/485) et les derniers faits nouveaux survenus en Iraq,
tandis que le second, présenté en application de la résolution 2107 (2013), a trait aux relations entre l’Iraq et le Koweït (S/2014/480).

Au cours des premier et deuxième exposés que j’ai présentés au Conseil, respectivement en novembre de l’année dernière (voir S/PV.7068) et en mars de cette année (voir S/PV.7149), j’avais expliqué comment l’est de la Syrie et l’ouest de l’Iraq étaient en train de devenir un seul et même champ de bataille. Le 29 juin, l’État islamique d’Iraq et du Levant – ou plus simplement l’État islamique – s’est emparé d’un poste-frontière militaire situé à la frontière entre l’Iraq et la Syrie et a déclaré exercer le contrôle de plusieurs régions de ces deux pays. Ce groupe, qui est inscrit sur la liste du régime de sanctions de l’ONU en tant qu’affilié à Al-Qaida, s’est emparé de la deuxième plus grande ville d’Iraq et contrôle désormais environ un tiers du pays. Ce faisant, il a mis la main sur quelque 450 millions de dollars qui se trouvaient dans les coffres de la Banque centrale iraquienne à Mossoul. Il contrôle un réseau d’infrastructures clefs, y compris des puits de pétrole et des pipelines. Il a également accru sensiblement ses capacités militaires.

Autrefois simple faction dissidente d’Al-Qaida, l’État islamique d’Iraq et du Levant représente aujourd’hui une menace complexe pour la paix et la sécurité de l’Iraq, de la région tout entière et même au- delà. Les actes terroristes qu’il commet sont criminels et injustifiables, quels qu’en soit les motifs. Il recrute et utilise des combattants étrangers, il commet des meurtres, des prises d’otages, des enlèvements, des violations flagrantes des droits de l’homme, autant de raisons qui font que la communauté internationale et le Conseil de sécurité devraient exiger de manière absolument catégorique qu’ils cessent toutes hostilités et atrocités, et demander aux États Membres de coopérer aux efforts pour faire appliquer les sanctions en place et de faire rendre des comptes à ceux qui commettent, organisent ou parrainent ces attentats, crimes de guerre et crimes contre l’humanité effroyables.

La stratégie de l’État islamique d’Iraq et du Levant est claire depuis le début. Son objectif est d’exercer un pouvoir permanent, par-delà le contrôle des autorités, grâce à la terreur et à la violence. Il s’emploie à radicaliser les populations en en exploitant les légitimes doléances. Il se sert des divisions au sein de la société iraquienne afin de creuser les lignes de fracture confessionnelles, d’alimenter l’instabilité sociale et de fragiliser le Gouvernement et les représentants élus.

Ces dernières semaines, l’État islamique d’Iraq et du Levant s’en est pris directement aux minorités de la province de Ninive. Les chrétiens ont reçu pour ultimatum de se convertir, de payer un impôt, de partir ou bien de risquer une exécution imminente. Les chiites, les turkmènes, les yézidis et les shabaks sont la cible d’enlèvements, de meurtres systématiques et leurs biens sont détruits. En ville, les maisons appartenant aux membres de ces minorités ont été marquées d’un signe distinctif. Des dizaines de milliers de personnes ont été déplacées ou forcées à fuir et à chercher refuge ailleurs, tandis que de nombreuses autres ont été exécutées ou kidnappées. Ces actes révoltants, qui sont un aspect de ce qui est en train de devenir un exode tragique de plus en plus massif, ont été vigoureusement condamnés par le Parlement iraquien, le Gouvernement et les autorités religieuses, ainsi que par le Secrétaire général et le Conseil de sécurité.

Depuis le début de l’année, on estime qu’environ 1,2 million d’Iraquiens ont perdu leur maison. Plus des trois quarts d’entre eux sont déplacés dans des zones qui ne sont pas sous le contrôle du Gouvernement ou des zones où règne une grande insécurité. Des millions d’autres sont pris au piège dans des zones de combats. L’ONU a recensé plus de 1600 sites de déplacement dans tout le pays. Le tableau qui se dessine est extrêmement inquiétant.

Les gouvernorats de la région iraquienne du Kurdistan accueillent aujourd’hui plus de 300 000 nouveaux déplacés et leurs capacités d’y faire face sont submergées. Ces nouveaux arrivants s’ajoutent aux plus de 225 000 réfugiés syriens déjà venus trouver protection dans les trois provinces kurdes de l’Iraq. Je tiens à saluer les efforts des milliers de familles d’accueil et des responsables locaux et nationaux qui, dans tout l’Iraq, participent à l’action humanitaire.

Je puis assurer le Conseil que l’ONU va continuer à travailler en lien et en coordination étroits avec le Gouvernement iraquien et le Gouvernement régional du Kurdistan pour répondre aux besoins humanitaires urgents de ces personnes déplacées par le conflit actuel. Je veux aussi être absolument clair : nous n’épargnerons aucun effort pour atteindre tous ceux qui souffrent du fait des combats, où qu’ils se trouvent.

Je me félicite tout particulièrement de la décision du Gouvernement iraquien d’affecter la somme de 400 millions de dollars à l’action de réponse aux besoins des déplacés. L’ONU est prête à apporter son aide pour le décaissement de ces fonds et à épauler le Gouvernement dans les efforts qu’il multiplie en ce sens. L’ONU est prête à travailler avec les autorités pour que des mesures soient rapidement prises en vue de créer un système exhaustif d’enregistrement des réfugiés qui couvre tout le territoire iraquien, et à les aider à localiser les déplacements. Je tiens aussi à remercier les États Membres de leur générosité, et notamment le Royaume d’Arabie saoudite, qui a récemment promis de verser 500 millions de dollars, ce qui va permettre à l’ONU de continuer de fournir un appui vital, en particulier des abris adaptés à la fois pour l’été et l’hiver.

La propagation de la violence a de graves répercussions sur la situation des droits de l’homme en Iraq. La MANUI suit et relate minutieusement les effets du conflit sur les civils et les infrastructures civiles. La Mission mène aussi directement des actions de plaidoyer auprès des chefs politiques, communautaires et religieux dans le but d’atténuer les effets de la violence et de sensibiliser toutes les parties au conflit à leur obligation de protéger les civils. La MANUI et l’équipe de pays des Nations Unies consacrent toutes leurs ressources à la coordination de la fourniture d’une assistance humanitaire vitale aux civils touchés par la violence.

Malgré nos efforts, toutefois, 5 500 personnes ont été tuées et quelque 12 000 autres blessées entre janvier et juin de cette année. Près de 900 personnes sont mortes rien qu’en juillet. J’exprime mes plus sincères condoléances aux victimes de toutes les victimes civiles du terrorisme, ainsi qu’aux familles des membres des forces de sécurité iraquiennes qui ont perdu la vie en service.

La MANUI est gravement préoccupée par la sécurité et la protection des civils dans les zones touchées par la violence, et notamment des membres des catégories les plus vulnérables tels les femmes, y compris les femmes ayant charge de familles, les enfants, les personnes âgées, les personnes handicapées, ainsi que de divers groupes ethniques, religieux et culturels. Des informations nous sont parvenues signalant que les femmes étaient prises pour cible et que leurs libertés étaient sévèrement restreintes dans les zones sous contrôle de l’État islamique d’Iraq et du Levant. Je suis également très inquiet par les meurtres et les mutilations d’enfants au cours des attaques aveugles qui sont menées, notamment les bombardements de zones habitées, ainsi que par le recrutement et l’utilisation d’enfants pouvant être âgés de 12 ans seulement, et ce, dans tous les camps.

Je demande à tous les acteurs de ce conflit de faire en sorte que les normes des droits de l’homme et le droit international humanitaire soient respectés dans toutes les phases du conflit armé, et de veiller à la protection des civils innocents, des infrastructures à caractère social et du patrimoine historique et culturel. Le Gouvernement iraquien doit tout mettre en œuvre pour que tout individu qui commet des violations du droit international humanitaire ou des atteintes aux droits de l’homme ait à rendre des comptes. Les civils doivent pouvoir être sûrs qu’ils peuvent quitter les zones touchées par la violence de manière digne et sûre, et leur droit d’accès à l’assistance humanitaire doit être respecté. Toutes les parties doivent mettre en place des couloirs humanitaires, notamment pour les populations assiégées, et respecter le droit des organisations impartiales de fournir une assistance humanitaire à ceux qui en ont besoin.

Face à l’engrenage de la violence et de l’instabilité en Iraq, beaucoup se demandent ce qui peut être fait pour inverser la tendance. Il est clair que l’Iraq ne sera jamais plus ce qu’il était avant la chute de Mossoul. L’État islamique d’Iraq et du Levant reste certes la plus grande menace à la souveraineté du pays, mais il a été rejoint au sein d’une alliance de convenance temporaire par plusieurs autres groupes ayant des objectifs différents. D’anciens militants baassistes et des tribus sunnites ont utilisé le prétexte de l’avancée de l’État islamique d’Iraq et du Levant pour s’allier. Les objectifs sont très variés, certains sont essentiellement d’ordre religieux, tandis que d’autres sont dirigés contre le Gouvernement ou visent un renversement de l’ordre constitutionnel.

L’État islamique d’Iraq et du Levant et les groupes armés associés ont livré des batailles féroces contre les forces de sécurité iraquiennes et se sont emparés de larges portions de territoire dans les provinces de Ninive, d’Anbar, de Salah al-Din et de Kirkouk, ainsi que de certaines zones de la province de Diyalah. Ils font peser une menace directe sur une infrastructure vitale, notamment la raffinerie de Bayji et plusieurs bases aériennes qui, s’ils venaient à s’en emparer, leur permettraient d’accroître considérablement leurs ressources financières et en matière de sécurité. En réponse à la crise, les forces de la région iraquienne du Kurdistan, également connues sous le nom de Peshmergas, se sont déployées dans les zones dont les forces de sécurité iraquiennes s’étaient retirées, y compris les zones situées près de la frontière interne contestée, et se battent actuellement elles aussi contre les éléments de l’État islamique d’Iraq et du Levant.

La solution à la crise ne peut être uniquement militaire. Pour réussir, toute opération de sécurité a besoin d’être largement acceptée par l’ensemble des forces politiques, religieuses et ethniques. Elle doit être mise en œuvre en pleine coopération entre le Gouvernement iraquien et le Gouvernement régional du Kurdistan, et elle doit respecter le droit international humanitaire et les normes des droits de l’homme. Il y a aussi une condition sine qua non qui est indispensable à la réussite de tout plan de sécurité, et c’est une condition fort simple : tous doivent se dresser à l’unisson contre le terrorisme. Nul ne doit se tenir à l’écart, car la menace touche des communautés entières. Tous doivent soutenir les institutions nationales légitimes de l’Iraq.

Mais nous devons le dire clairement : une solution militaire ne suffit pas, et ne sera certainement pas efficace à elle seule. En fait, elle sera impossible à moins de s’attaquer aux causes fondamentales de la violence et d’appliquer un ensemble de mesures sociales et politiques qui répondent aux préoccupations de toutes les communautés sans exception. Il est capital de dresser une feuille de route politique et d’avoir une vision d’ensemble pour réinsérer toutes les communautés dans le processus national de prise de décisions. Il faut répondre sans délai aux exigences des sunnites et de toutes les autres composantes de la société iraquienne qui sont légitimes et ne contredisent pas à la Constitution. L’impasse entre Bagdad et Erbil doit être résolue sans délai. Les inégalités sous l’angle de la pauvreté et du développement nourrissent aussi un légitime ressentiment, y compris parmi certaines minorités chiites dans le sud du pays.

Il n’est possible de répondre à ces préoccupations et à d’autres qu’en adhérant au processus démocratique et à la Constitution. Un nouveau Parlement a été élu fin avril avec une participation électorale supérieure à 62%. La semaine dernière, les blocs politiques ont montré qu’ils pouvaient conclure un accord en élisant le Président du Conseil des Représentants et ses adjoints. L’élan généré par leur élection doit maintenant se traduire par l’élection des dirigeants de l’exécutif, à savoir un nouveau président et un nouveau gouvernement. L’Iraq ne peut se permettre de faire durer longuement le processus de formation du gouvernement, car les menaces actuelles continuent de mettre en cause l’existence de l’État iraquien.

Aux urnes, le peuple iraquien n’a pas donné à un seul bloc politique la majorité absolue au Parlement. Le message des électeurs a été clair : tous les groupes doivent faire des compromis et coopérer pour unir le pays. En une heure comme celle-ci, un gouvernement ne peut réussir que s’il bénéficie d’un soutien substantiel des communautés et oeuvre sur la base d’un programme clair visant à sauver le pays du terrorisme, de l’esprit sectaire et des divisions. L’Iraq doit recevoir un soutien régional, interrégional et international. L’Iraq ne peut à lui seul faire face aux défis de l’heure sans l’appui de ses alliés, de la région et de la communauté internationale. L’État islamique d’Iraq et du Levant ne menace pas seulement l’Iraq. C’est pourquoi un sérieux engagement entre les parties concernées s’impose d’urgence.

Je vais maintenant passer brièvement à l’évolution de la situation dans la région kurde de l’Iraq et parler de la détérioration des relations entre Bagdad et Erbil.

Le 3 juillet, le Président de la Région kurde a déclaré son intention de sortir de l’impasse politique actuelle au moyen d’un référendum sur l’indépendance, du fait d’un désaccord insurmontable sur plusieurs questions critiques, notamment la loi sur les hydrocarbures et le partage des recettes, le statut des peshmerga, l’adoption du budget fédéral de 2014 et l’application de l’article 140 de la Constitution iraquienne. Le Gouvernement de Bagdad a rejeté toutes les initiatives tendant à l’indépendance comme inconstitutionnelles.

Je voudrais encore une fois souligner que le projet de loi sur le budget fédéral de 2014 est toujours en suspens, sept mois après le début de l’exercice budgétaire. Un aspect du différend en cours tient au fait que le Gouvernement régional kurde n’a pas reçu depuis mars les allocations budgétaires prévues. De ce fait, il n’a pu payer les traitements du secteur public. Apparemment en réaction, Erbil a commencé à exporter du pétrole indépendamment, mesure contestée par le Gouvernement fédéral. Malgré les efforts faits par la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq pour trouver des compromis acceptables, un net désaccord subsiste.

Les relations entre Bagdad et Erbil ont continué de se détériorer du fait de l’échange de déclarations inamicales entre leurs dirigeants politiques respectifs, ce qui a conduit les ministres kurdes à suspendre leur participation au Conseil des Ministres iraquien. J’appelle tous les dirigeants politiques à s’abstenir de déclarations et d’accusations extrêmes qui pourraient compliquer davantage la situation. J’ai trouvé encourageant de voir, aujourd’hui, que les membres kurdes du parlement continuaient de participer au processus politique. La
Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq se tient prête à poursuivre ses bons offices et son appui juridique et technique.

Je vais aussi présenter aujourd’hui le troisième rapport du Secrétaire général (S/2014/480) sur la question des Koweïtiens et des citoyens de pays tiers portés disparus et des biens koweïtiens manquants, notamment les archives nationales, conformément à la résolution 2107 (2013). Les relations de l’Iraq avec le Koweït continuent de s’améliorer sensiblement. Le don de 10 millions de dollars fait par le Koweït pour les secours humanitaires au bénéfice des déplacés en Iraq en a démontré la bonne volonté à l’égard du pays voisin. La normalisation des relations est en bonne voie et j’ai l’espoir que ces deux pays ne feront que se rapprocher encore, ce dont ils tireront un avantage mutuel. L’instabilité actuelle en Iraq est le seul facteur qui s’oppose à ce que ces relations atteignent leur plein potentiel. Tant que le désordre persistera, les décisions sur des questions telles que les citoyens koweïtiens disparus et les biens koweïtiens manquants prendront plus de temps.

Le Gouvernement koweïtien s’inquiète à juste titre de ce que la situation sécuritaire et l’impasse politique en Iraq ne laisseront que peu de temps à la MANUI pour remplir son mandat concernant les citoyens koweïtiens disparus et les biens koweïtiens manquants. Je tiens à l’assurer, ainsi que le Conseil de sécurité, que nous restons déterminés à nous acquitter de cette tâche humanitaire et que l’Iraq reste déterminé à remplir ses obligations. Le dernier rapport fait état de nos efforts non seulement pour garder la question au premier plan, mais aussi pour formuler de nouvelles idées quant à la manière dont nous pourrions progresser ensemble sur les questions qui se posent depuis une décennie maintenant au sujet des déplacés et depuis 1990 au sujet des archives nationales.

En consultation avec le Comité international de la Croix-Rouge, nous avons reconnu dans la Commission international des personnes disparues un partenaire pour l’Iraq. Nous pensons qu’avec des moyens scientifiques et techniques on pourrait surmonter bien des difficultés dans la recherche des personnes disparues. J’espère que la situation en Iraq se stabilisera, et permettra ainsi au Gouvernement d’examiner de telles propositions pour que de nouveaux moyens et techniques puissent être utilisés dans la recherche des personnes disparues.

Je suis également satisfait qu’un témoin iraquien se soit adressé à la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq afin d’identifier une tombe au Koweït. En collaboration avec les autorités iraquiennes compétentes, la MANUI conduira ce témoin sur le site. Nous espérons que cela débouchera sur des résultats tangibles.

Le Secrétaire général a appelé à des contacts plus réguliers entre les membres du Comité interministériel conjoint Iraq-Koweït sur les biens koweïtiens manquants afin qu’ils s’accordent mieux sur les moyens pratiques de retrouver les archives nationales. Je suis heureux que l’Iraq et le Koweït soient convenus que le Comité des biens doit se réunir désormais deux fois par an. Le Premier Ministre iraquien m’a dit clairement qu’il donnerait suite à mon information sur les archives afin de résoudre ces questions. La MANUI se tient prête à seconder les efforts de l’Iraq en ce sens. Je souhaite aussi informer le Conseil que nous sommes prêts à faciliter plus de contacts entre les deux pays à tous les niveaux. Les relations entre les Gouvernements des deux pays sont excellentes. Il est temps qu’il en aille de même entre les citoyens des deux pays.

Les dirigeants koweïtiens ont réaffirmé leur désir d’élargir et d’approfondir les relations avec l’Iraq. La proposition du Représentant spécial adjoint du Secrétaire général, M. Buzstin, d’organiser une rencontre de jeunes artistes iraquiens et koweïtiens au Koweït dans le cadre d’une manifestation de l’ONU a été accueillie avec enthousiasme par les dirigeants koweïtiens. Si la situation sécuritaire en Iraq le permet, la MANUI, en coopération avec le Programme des Nations Unies pour le développement et les deux Gouvernements, étudiera le projet plus avant. Les relations entre Iraq et Koweït peuvent aussi produire des dividendes pour la région, les relations de l’Iraq se renforçant avec tous les pays du Golfe. Pour ma part, j’ai l’intention de me rendre au Koweït à la première occasion après l’Eid afin d’améliorer la coopération entre l’Iraq et le Koweït.

Pour terminer, je tiens à dire toute ma gratitude pour la confiance qu’ont mise en moi le Secrétaire général et le Conseil de sécurité en me plaçant à la tête de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq. Je tiens à marquer devant le Conseil ma gratitude personnelle envers mon équipe à Bagdad, Erbil et Bassorah et à remercier tous les membres de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq et de l’équipe de pays des Nations Unies de leur détermination d’assumer des tâches politiques, humanitaires, de développement et d’appui dans un environnement dangereux. Je dois une gratitude particulière à nos collègues du service de sécurité et aux gardes fidjiens et népalais des Nations Unies. J’attends avec intérêt de continuer à remplir le mandat confié par le Conseil de sécurité à la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq et j’exprime mes profonds et sincères remerciements au Gouvernement et au peuple iraquiens pour leur accueil.

Le Président : Je remercie M. Mladenov de son exposé.

Je donne maintenant la parole au représentant de l’Iraq.

M. Alhakim (Iraq) (parle en arabe) : Je voudrais d’abord féliciter le Rwanda de son accession à la présidence du Conseil de sécurité pour ce mois et des efforts considérables qu’il déploie à la tête des travaux du Conseil. Je tiens également à vous remercier, Monsieur le Président, d’avoir accepté de réunir le Conseil par deux fois, sur demande de mon pays, pour examiner les récents événements en Iraq. J’aimerais également remercier M. Nickolay Mladenov, le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Iraq (MANUI), ainsi que son équipe à Bagdad et à New York, compte tenu tout particulièrement des conditions difficiles que connaît notre pays.

De plus, je tiens à saluer le fait que le Secrétaire général et son équipe se rendent demain en Iraq en ces temps difficiles pour mon pays, en geste de soutien renouvelé, de soutien, notamment, des organes des Nations Unies au processus politique et à l’établissement d’institutions démocratiques, ainsi qu’à la formation d’un nouveau gouvernement d’union nationale.

Nonobstant les récentes menaces terroristes en Iraq, l’effort politique se poursuit pleinement, conformément à la Constitution. Les troisièmes élections législatives de l’histoire de l’Iraq se sont tenues dans les temps et, au regard des normes internationales, se sont bien déroulées. Plus de 13 millions d’Iraquiens ont défié les groupes terroristes et les problèmes de sécurité pour aller aux urnes. La Cour suprême a confirmé les résultats du scrutin le 16 juin. La première séance du Parlement iraquien s’est tenue le 1er juillet. Le Président du Parlement et ses deux vice-présidents ont été nommés le 15 juillet. Cette semaine, le Parlement élira le président de la République, qui aura la tâche de nommer le premier ministre et de former un nouveau gouvernement dans les 30 jours. Cela donnera lieu ensuite à des élections par lesquelles l’ensemble du peuple iraquien, y compris toutes les factions, entérinera ces décisions.

Dans nos déclarations devant le Conseil, nous avons maintes fois répété l’importance de la coopération entre les États et de la lutte contre le fléau international du terrorisme. Toute réticence à combattre le terrorisme, quel qu’en soit le prétexte, constitue une grave erreur qui conduira inévitablement à un renforcement des organisations terroristes internationales dont les répercussions se feront sentir dans les pays de la région. Nous avons, par conséquent, continué de plancher sur la question des conséquences de la poursuite du conflit en Syrie, et notamment de la mise en place d’organisations terroristes telles que le Front al-Nosra et l’État islamique d’Iraq et du Levant. Les mises en garde que nous avions lancées se sont exactement réalisées.

Un flux ininterrompu de groupes terroristes armés a traversé la frontière de la Syrie en Iraq. Au début du mois dernier, l’État islamique d’Iraq et du Levant, qui n’a cessé de monter en puissance et jouit du plein appui logistique, financier et militaire de sources extérieures, a lancé un vaste assaut dans les zones du nord et de l’ouest de nos pays, qui comprennent un certain nombre de grandes villes. Les forces de sécurité iraquiennes ont été contraintes d’effectuer une retraite. Dans les zones contrôlées par l’organisation terroriste de l’État islamique d’Iraq et du Levant se sont produits des enlèvements de diplomates ainsi que des massacres contre des civils, et des exécutions massives, autant d’actes qui constituent des crimes de guerre, comme l’a redit la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Navi Pillay.

Les attentats terroristes perpétrés dans les gouvernorats iraquiens ont conduit à un exode massif de la population – plus d’1 million de personnes –, qui cherche à échapper à l’oppression de l’État islamique d’Iraq et du Levant en fuyant vers la région du Kurdistan et d’autres zones du centre et du sud de l’Iraq. Les réfugiés doivent endurer des conditions très difficiles dans la chaleur de l’été, qui coïncide avec le jeûne du mois saint du ramadan. Le Gouvernement iraquien, en coopération avec la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq et les institutions des Nations Unies concernées travaillant en Iraq, s’efforce d’atténuer le plus possible les souffrances pour que les forces de sécurité puissent reprendre le contrôle du territoire iraquien.

L’État islamique d’Iraq et du Levant a établi un État de type califat dans les territoires qu’il contrôle, et changé son nom en État islamique. Dans les dernières semaines, il a, dans le cadre d’un effort organisé et systématique, ciblé des édifices religieux et détruit des lieux saints aussi bien des chrétiens que des musulmans. Il s’attèle également à ce qu’il appelle le djihad du sexe. L’organisation terroriste de l’État islamique d’Iraq et du Levant a promulgué un décret obligeant les chrétiens à payer de lourdes pénalités s’ils ne se convertissaient pas à l’islam, ou leur donnant le choix entre se faire tuer ou quitter la ville de Mossoul. En conséquence, la ville s’est désormais vidée de sa communauté chrétienne. À cet égard, nous tenons à dire notre gratitude au Conseil de sécurité pour la déclaration qu’il a publiée le 21 juillet et dans laquelle il condamne fermement la persécution des minorités en Iraq par l’organisation terroriste de l’État islamique d’Iraq et du Levant. Le dernier rapport en date publié par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, le 18 juillet, confirme ce que le Gouvernement iraquien avait affirmé, à savoir que les violations flagrantes perpétrées par l’État islamique d’Iraq et du Levant le mois dernier relevaient des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre.

Les forces de sécurité iraquiennes travaillent actuellement avec des volontaires et avec les tribus afin de faire front contre le terrorisme et de reprendre progressivement le contrôle du territoire. Ils le font dans le respect du droit international humanitaire et en cherchant à éviter toute victime civile dans la mesure du possible, conformément à la Constitution iraquienne, qui prévoit que nul ne peut être arrêté ou détenu sans mandat d’arrêt et que les prisonniers ont droit à une défense à chaque étape de l’instruction.

L’Iraq applique une politique internationale équilibrée visant à établir une coopération avec les pays voisins et le reste du monde. Nous avons amélioré nos relations avec l’État fraternel du Koweït par le biais d’un certain nombre d’accords. Nos relations diplomatiques sont rétablies par l’ouverture de nouveaux consulats dans différentes villes d’Iraq. L’Iraq déploie également tous les efforts possibles pour retrouver les dépouilles des Koweïtiens portés disparus et les archives nationales de ce pays. En coopération avec les autres autorités gouvernementales, le Ministère des droits de l’homme procède à des excavations et des enquêtes dans les gouvernorats de Karbala et de el-Mouthanna. Bien qu’aucune dépouille n’ait encore été retrouvée, l’Iraq est déterminé à obtenir des résultats tangibles à cet égard. En outre, la coopération avec la République arabe d’Égypte a été renforcée, tout comme nos relations avec l’Iran, grâce à la signature d’accords de coopération bilatérale dans les domaines économique et juridique.

L’Iraq continue d’assurer la protection des résidents du camp Hurriya à Bagdad et de leur fournir toute l’assistance humanitaire nécessaire, même s’ils appartiennent à l’organisation terroriste Mojahedin- e-Khalq. À cet égard, nous saluons les efforts de la Conseillère spéciale du Secrétaire général, Mme Jane Holl Lute, pour reloger les résidents de ce camp dans d’autres pays et ainsi mettre fin à leur statut illégal en Iraq, situation qui perdure depuis plus de deux décennies.

Dans ce contexte, nous appelons la communauté internationale à honorer ses obligations envers les résidents de ce camp et à les reloger dans des pays tiers, compte tenu en particulier du fait que mon pays s’est acquitté de tous ses engagements internationaux à cet égard.

Les dirigeants politiques iraquiens ont conscience que le Gouvernement d’unité nationale doit prendre des mesures énergiques pour préserver la stabilité de l’Iraq en tant qu’État homogène. L’Iraq peut sortir du statu quo en réglant les problèmes liés à l’unité nationale, à la participation et à la citoyenneté.

Qui plus est, la stabilité de l’Iraq est déterminante pour la stabilité de la région tout entière, mais aucun gouvernement ne peut être à même d’assurer la stabilité politique en l’absence de sécurité. Les attentats terroristes qui ont lieu en Iraq doivent être combattus fermement, grâce à la coopération régionale et internationale, pour que le pays retrouve la paix et la sécurité. C’est pourquoi le Gouvernement iraquien, dans deux lettres qu’il a adressées au Conseil de sécurité, le mois dernier, a insisté sur la nécessité que les États Membres coopèrent avec l’Iraq dans la lutte commune contre le terrorisme. Il a fait part de ses besoins logistiques et précisé ce qu’il attendait des membres du Conseil et d’autres États Membres de l’ONU à cet égard.

L’appui du Conseil de sécurité aux efforts antiterroristes du Gouvernement iraquien, confirmé dans les résolutions qu’il a adoptées, demeurera sans effet tant que les États Membres ne mettront pas en œuvre lesdites résolutions, et plus particulièrement les dispositions relatives à la coopération entre les pays de la région, afin de démanteler les réseaux terroristes et de travailler ensemble pour s’attaquer aux causes du terrorisme, imposer des sanctions et interdire les activités qui encouragent la pensée salafiste.

Sans quoi, et ce n’est pas la première fois que nous faisons cette mise en garde, laisser le dénommé État islamique d’Iraq et du Levant gagner de l’influence n’aboutira qu’à fragiliser la sécurité et la stabilité de toute la région, et par voie de conséquence la paix et la sécurité internationales. Nous demandons donc l’assistance constructive du Conseil pour mettre fin à l’essor de ce groupe. Nous sommes persuadés que le Conseil peut le faire. Le Conseil est l’organe principal de la communauté internationale en mesure de faire respecter les résolutions contraignantes et d’obliger les pays à lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes.

Je tiens à souligner le souhait de mon gouvernement de voir la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI) prorogée pour un an supplémentaire, comme cela a été indiqué dans la lettre en date du 20 juillet 2014 que le Ministre iraquien des affaires étrangères a adressée au Secrétaire général, Ban Ki-moon, conformément aux normes applicables énoncées dans la résolution 1770 (2007).

Pour conclure, nous saluons les efforts de la Mission pour venir en aide au Gouvernement iraquien, et notamment fournir une assistance humanitaire aux réfugiés et aux personnes déplacées en raison des attentats, assistance sous la forme, par exemple, de distribution de tentes pour permettre aux enfants de continuer d’étudier, et d’une coopération au lancement de la campagne de vaccination contre la poliomyélite.

Ma délégation remercie le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, M. Antonio Guterres, du déplacement qu’il a effectué à Bagdad et au Kurdistan du 15 au 18 juillet. Nous renouvelons également nos remerciements et notre gratitude à M. Mladenov et à son équipe pour leur dévouement. Nous espérons qu’ils poursuivront leurs efforts aux côtés de l’Iraq.

Le Président : Il n’y a pas d’autre orateur inscrit sur ma liste. J’invite à présent les membres du Conseil à poursuivre l’examen de la question dans le cadre de consultations.

La séance est levée à 11 h 30.