La séance est ouverte à 14 heures.

Le Président (parle en anglais) : Conformément à l’article 37 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite le représentant de l’Ukraine à participer à la présente séance.

Conformément à l’article 39 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite M. Jeffrey Feltman, Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, à participer à la présente séance.

Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.

Je donne la parole à M. Feltman.

M. Feltman, Secrétaire général adjoint aux affaires politiques (parle en anglais) : Une fois de plus, nous nous réunissons aujourd’hui alors que circulent des informations faisant état d’une dangereuse escalade de la crise en Ukraine. La rencontre officielle, le 26 août, entre le Président Poutine et le Président Poroshenko, ainsi qu’un cycle de négociations multilatérales, ont rapidement été éclipsés par de nouvelles informations inquiétantes faisant état d’une intensification des combats dans le sud-est de l’Ukraine.

Ce matin, le Président ukrainien, M. Poroshenko, a demandé au monde « de prêter attention à la situation en Ukraine qui est en train de se dégrader considérablement ». Nous sommes ici parce que nous y prêtons attention, mais nous devons aussi trouver des moyens constructifs de régler d’urgence cette crise, qui a des répercussions bien au-delà de l’Ukraine et de la région.

Les groupes armés illégaux opérant dans la région de Donetsk auraient intensifié leurs activités au cours des deux derniers jours, étendant la violence le long de la côte sud de l’Ukraine, dans la direction du port stratégique de Marioupol. Il a en outre été signalé que de violents combats sont en cours dans plusieurs petits villes et villages de la région, et que la ville de Novoazovsk a été prise par les groupes armés. La propagation des combats vers le sud, le long de la frontière de la Fédération de Russie et de la mer d’Azov, laisse prévoir une escalade dangereuse du conflit. La bataille pour le contrôle de Lougansk se poursuit, et les hostilités à Donetsk dans plusieurs zones stratégiques clefs ont pris de l’ampleur.

Nous ne pouvons pas faire fi des informations extrêmement préoccupantes faisant état d’une intervention militaire russe dans cette nouvelle escalade. Si cette intervention est confirmée, elle constituerait une violation directe du droit international et de la Charte des Nations Unies. L’ONU n’a aucun moyen indépendant de vérifier ces informations, qui ont été vigoureusement niées par la Fédération de Russie.

Aujourd’hui, nous avons pris contact avec l’Ambassadeur Apakan, chef de la Mission spéciale de surveillance de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Il nous a informés que, pour le moment, la Mission spéciale de surveillance n’était pas présente à Marioupol et à Novoazovsk, mais que l’OSCE était en train de déployer une équipe dans ces zones. Cela sera essentiel en vue de la collecte d’informations factuelles sur ce qui se passe réellement sur le terrain. La situation le long et aux environs de la frontière entre l’Ukraine et la Fédération de Russie est particulièrement préoccupante et demeure un obstacle important à la désescalade de la situation sur le terrain, vu que des armes et des armes lourdes en provenance de la Russie continueraient d’être acheminées en Ukraine.

Il faut assurer d’urgence la sécurité des frontières entre les deux pays au moyen d’un mécanisme de vérification international, comme cela a été évoqué pendant les pourparlers de Minsk. À cet égard, nous prenons note de la déclaration faite récemment par le Président Poroshenko selon laquelle les premières consultations bilatérales entre les gardes-frontières ukrainiens et russes sont prévues pour samedi, le 30 août.

Il est également essentiel que les élections annoncées pour le 26 octobre puissent se tenir sur tout le territoire ukrainien et servir de mécanisme d’unification et de réconciliation permettant à tous les citoyens ukrainiens de se sentir représentés à Kiev.

Je voudrais citer la déclaration faite aujourd’hui par le Secrétaire général :

« La communauté internationale ne peut pas laisser la situation dégénérer davantage, tout comme elle ne peut permettre que la violence et la destruction, générées par le conflit dans l’est de l’Ukraine, ne continuent. »

Le Secrétaire général prend note des récents pourparlers à Minsk, le 26 août, ainsi que de la première rencontre officielle entre les Présidents de l’Ukraine et de la Fédération de Russie. Il appelle à la poursuite de ces pourparlers, en vue de trouver une issue pacifique au conflit, sur la base du plan de paix du Président Poroshenko. Tous doivent apporter leur contribution au règlement pacifique de ce conflit, dans une approche qui respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Nous devons redoubler d’efforts pour résoudre le conflit en Ukraine ; il y a des vies à sauver. La paix en Ukraine, cela signifie également la paix dans la région et au-delà.

Le Secrétaire général reste déterminé à poursuivre sa mission de bons offices pour contribuer à régler cette crise, et nous tiendrons le Conseil informé des efforts collectifs que déploie l’Organisation pour aider le peuple et le Gouvernement ukrainiens à rétablir la paix et la stabilité dans leur pays. La semaine dernière, le Secrétaire général m’a dépêché à Kiev pour mener des consultations avec les responsables ukrainiens sur la voie à suivre, et la Secrétaire générale adjointe, Mme Valerie Amos, dont la visite a coïncidé partiellement avec la mienne, a discuté des moyens de renforcer l’action humanitaire. Après sa visite sur le terrain dans l’est de l’Ukraine, elle a parlé des efforts impressionnants accomplis par les autorités ukrainiennes pour rétablir la normalité dans les zones repris par le Gouvernement aux groupes armés. Le Secrétaire général adjoint aux droits de l’homme, M. Ivan Šimonović, se trouve actuellement en Ukraine, et les membres de l’équipe de pays des Nations Unies demeurent engagés à coopérer avec leurs homologues ukrainiens en ce qui concerne les questions humanitaires et de développement. Par ailleurs, nous continuons à coordonner nos efforts avec d’autres partenaires internationaux, notamment l’OSCE et les Pays-Bas, à la suite de l’attentat contre l’appareil de la Malaysia Airlines affrété pour le vol MH17.

Toutefois, dans l’immédiat, la priorité est de trouver les moyens d’inverser l’escalade dangereuse des combats observée au cours des dernières 48 heures et de passer rapidement d’une situation de conflit armé à un dialogue politique et à la recherche de solutions politiques.

Le Président (parle en anglais) : Je remercie M. Feltman pour son exposé.

Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil de sécurité.

Mme Murmokaitė (Lituanie) (parle en anglais) : Monsieur le Président, je vous remercie d’avoir convoqué la présente séance d’urgence.

La Lituanie condamne dans les termes les plus vifs l’invasion du territoire ukrainien par les forces armées de la Fédération de Russie, qui est une violation manifeste et flagrante de l’indépendance, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine et qui porte un rude coup à la paix, à la sécurité et à la stabilité de toute la région et au-delà. Depuis des mois, nous constatons des violations incessantes de l’unité et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine : il y a d’abord eu l’annexion de la Crimée, puis la guerre lancée par des groupes séparatistes marginaux appuyés par la Russie dans l’est de l’Ukraine, les manipulations provocatrices de l’aide humanitaire avec des camions humanitaires à moitié vides, les soldats égarés de l’autre côté de la frontière, et maintenant les forces russes qui se trouvent sur le territoire souverain ukrainien.

Depuis la journée d’hier, des contingents de la 98 division aéroportée russe d’Ivanovo ont pris la ville ukrainienne de Novoazovsk. De nouvelles zones de l’Ukraine qui jusque-là avaient été préservées sont désormais touchées, étendant ainsi la zone de conflit. « Certains soldats motivés préfèrent passer leurs vacances non pas à la plage mais avec nous, aux côtés de leurs frères, pour défendre leur liberté », s’est vanté Aleksandr Zakharchenko, commandant rebelle et Premier Ministre autoproclamé de la fictive « République populaire de Donetsk », au cours d’une entrevue à la télévision nationale russe, ajoutant que près de 3 000 à 4 000 Russes figuraient dans les rangs séparatistes.

Une membre du conseil consultatif du Président russe pour les droits de l’homme, Ella Polyakova, a déclaré jeudi qu’elle pensait que la Russie était en train de procéder à une invasion de l’Ukraine. « Lorsque des masses de personnes obéissent aux ordres d’un commandant, conduisent des chars ou des véhicules blindés de transport de troupes et utilisent des armes lourdes sur le territoire d’un autre pays, de l’autre côté de la frontière, il s’agit, selon moi, d’une invasion ».

Ces agissements de la Fédération de Russie constituent une violation grave de la Charte des Nations Unies, en particulier du paragraphe 4 de l’Article 2, et d’autres principes et normes fondamentaux du droit international – comme cela a déjà été dit au Conseil à maintes reprises – dont l’Acte final d’Helsinki, le Traité d’amitié, de coopération et de partenariat entre la Fédération de Russie et l’Ukraine de 1997, et le Mémorandum de Budapest conclu en 1994 par lequel l’Ukraine renonçait à ses armes nucléaires en échange de garanties de sécurité. Plus précisément, les articles 1 et 2 du Mémorandum de Budapest imposent clairement à la Russie l’obligation de respect l’indépendance politique et l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans le cadre de ses frontières telles que définies en 1994, et de s’abstenir de la menace ou de l’emploi de la force contre elles.

À ce jour, le Conseil a tenu près de 30 séances sur l’Ukraine. Nous avons entendu à de nombreuses reprises, ici et ailleurs, la Russie nous assurer qu’elle souhaitait qu’une solution soit trouvée à la crise ukrainienne. Entre-temps, toutefois, au lieu de chercher cette solution, la Russie a provoqué l’escalade de la situation, en ne cessant de déverser sur le territoire ukrainien des flots d’armes, de matériel, de mercenaires, et, à présent, de soldats.

Que les choses soient claires : les armes ne sont pas tombées du ciel pour se retrouver entre les mains des rebelles. Sans l’appui actif et continuel de la Russie, les séparatistes illégaux – qui constituent une nette minorité au sein de la région qu’ils déclarent représenter – auraient depuis longtemps été à court de matériel et d’armes. L’est de l’Ukraine se serait remis sur pied, les mouvements de personnes déplacées auraient cessé pour s’inverser, et pas une vie de plus n’aurait été perdue.

Ce conflit a déjà causé trop de pertes en vies humaines. Même les estimations les plus modérées indiquent que 2 000 personnes ont péri depuis le mois d’avril. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires a indiqué que 200 000 déplacés et environ 3,9 millions de personnes étaient directement touchés par le conflit à la date du 15 août. Des personnes meurent en Ukraine à cause d’actes criminels perpétrés par les séparatistes illégaux et leurs partisans russes. Certains soldats de nationalité russe sont eux aussi en train de donner leur vie dans cette guerre criminelle contre l’État ukrainien. Comme le signalent diverses sources, les mères de soldats russes attendent des réponses à propos de leurs enfants, dont au moins 400 sont morts. Les journalistes qui tentent de mener des enquêtes et de ramener des informations concernant les tombes de soldats à Pskov font l’objet de menaces et de harcèlement.

Combien de vies perdues ou de blessures supplémentaires faudra-t-il pour que la Russie prenne conscience de la folie de son agression contre l’Ukraine ? L’Ukraine n’a plus besoin des convois russes supposément humanitaires. L’Ukraine n’a plus besoin des chars, soldats ou armes des groupes séparatistes. Ce dont l’Ukraine a besoin, c’est que la Russie se conforme de nouveau et de toute urgence aux normes de comportement convenues au plan international, se conforme au droit international et respecte la Charte des Nations Unies – au regard de laquelle la Russie, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, assume une responsabilité particulière.

La Lituanie demande dans les termes les plus forts à la Russie de se ressaisir et de se conformer aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies ; de retirer immédiatement ses forces, armes et matériel militaire du territoire ukrainien souverain ; et d’interrompre sur-le-champ l’appui qu’elle fournit aux groupes séparatistes armés illégaux dans l’est de l’Ukraine.

Le plan de paix du Président Poroshenko doit être mis en œuvre sans plus tarder. Quant à la déclaration de Genève, dont la Russie regrette l’absence de mise en œuvre, elle doit être appliquée, de même qu’un cessez-le-feu, par toutes les parties, y compris par les séparatistes illégaux et même par la Russie. Autrement, ce serait demander de façon cynique à l’Ukraine de se rendre sans conditions. Tout comme n’importe quel État Membre souverain de l’ONU, l’Ukraine a le droit de se défendre, en vertu de l’Article 51 de la Charte des Nations Unies. L’on ne saurait laisser quiconque usurper ce droit.

Depuis trop longtemps, nous observons l’attaque furtive de la Russie pour venir à bout de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Comme cela s’est produit progressivement, notre réaction ressemble à celle de la fameuse la grenouille que l’on fait bouillir.

Une fois que les lois sont bafouées de manière aussi flagrante, comme c’est le cas en Ukraine, il serait naïf de penser qu’un tel mépris des normes de comportement internationales s’arrêtera là et ne s’étendra pas furtivement plus loin. Sommes-nous réellement prêts à prendre de tels risques ?

M. Lamek (France) : Je remercie à mon tour M. Jeffrey Feltman pour sa présentation.

Les informations qui nous parviennent du terrain sont très inquiétantes. Les actions menées par les séparatistes et l’intensification des combats en zones urbaines entraînent des conséquences humanitaires graves. Aujourd’hui, nous appelons toutes les parties à la retenue, à la protection des populations civiles et au respect du droit international humanitaire, en ayant à l’esprit ces centaines de milliers de personnes déplacées et terrorisées.

Le soutien de la Russie aux séparatistes, en violation de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, est inadmissible. La présence de soldats russes sur le territoire ukrainien et leur participation directe aux côtés des séparatistes à la prise de la ville de Novoazovsk ne sauraient être tolérées. Comme l’a rappelé le Président de la République française ce matin, la Russie doit respecter la souveraineté de l’Ukraine, arrêter de soutenir les séparatistes et les amener à accepter un cessez-le-feu bilatéral. C’est dans ce cadre que doit être recherché un règlement politique durable. Mais encore faudrait-il que Moscou accepte de s’engager sur la voie de la désescalade. Cela suppose dans l’immédiat l’arrêt des livraisons de matériel militaire aux séparatistes. Cela suppose également le contrôle de la frontière russo-ukrainienne. Sur ces points, nous attendons de la Russie des gestes qui nous permettent d’engager, enfin, un dialogue politique sérieux et bénéfique à tous. La prolongation ou l’amplification du conflit n’est dans l’intérêt ni de l’Ukraine, ni de la Russie, ni de la communauté internationale.

La tenue, le 26 août dernier à Minsk, d’une rencontre en tête-à-tête entre M. Poroshenko et M. Poutine – même si elle n’a apporté que peu de résultats concrets, avait constitué un pas positif – dans la mesure où elle avait permis un contact direct entre les deux Présidents, après celle du 6 juin à Bénouville.

La crise ukrainienne constitue l’une des crises les plus graves en Europe depuis la fin de la guerre froide. Notre objectif est de parvenir, enfin, à une solution politique durable à cette crise qui n’a que trop duré. Mais tant que la Russie poursuivra sur la voie de l’escalade, et ne saisira pas l’opportunité de reprendre le dialogue politique, nous maintiendrons la pression. C’est pour cette raison que l’Union européenne a adopté, le 29 juillet dernier, un paquet substantiel de sanctions économiques sectorielles à l’encontre de la Russie. Ces sanctions seront maintenues, voire augmentées, si l’escalade devait se poursuivre. Nous ne souhaitons pas en arriver là. Ce n’est dans l’intérêt ni de la Russie, ni même de personne.

Mme Kawar (Jordanie) (parle en arabe) : Nous remercions M. Feltman de son exposé sur la situation en Ukraine.

La Jordanie exprime sa profonde préoccupation devant l’escalade de la crise en Ukraine et l’évolution de la situation dans ce pays. Elle réaffirme la nécessité de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, et de s’abstenir de toute provocation susceptible de menacer la paix et la sécurité. Un tel comportement ne peut que compliquer les choses dans l’est de l’Ukraine et nuire aux efforts de paix. Nous appelons toutes les parties à s’abstenir de recourir à des moyens militaires et à coopérer en vue de trouver une solution pacifique fondée sur la Charte des Nations Unies, les principes du droit international et l’ensemble des efforts déployés au cours des derniers mois, y compris les accords signés entre les deux parties.

Il est absolument nécessaire de faciliter l’accès de l’aide humanitaire afin que l’aide puisse être acheminée par le Comité international de la Croix-Rouge et d’autres organisations. Cette aide ne doit pas faire l’objet de politisation et elle doit conserver un caractère humanitaire afin d’aider ceux qui en ont besoin.

Nous réaffirmons également la nécessité de faire en sorte que les conclusions du sommet du Bélarus donnent lieu à des avancées concrètes dans les pourparlers de paix et la libération de tous les otages. À cet égard, nous appelons les deux parties, russe et ukrainienne, à poursuivre les pourparlers et les consultations dans l’espoir de rétablir la paix. Nous espérons également qu’elles pourront lier la paix aux intérêts économiques et politiques des deux populations. Cette coopération permettrait d’éliminer les risques accrus posés à la sécurité de la Russie et de l’Ukraine, et de la région tout entière.

La Jordanie appelle l’ONU et l’ensemble des parties à prendre les mesures qui s’imposent pour favoriser le dialogue politique entre la Russie et l’Ukraine, et poursuivre les efforts déployés pour protéger la sécurité et la stabilité de l’Ukraine, en mettant notamment en place des mécanismes de protection des civils qui garantissent également que l’aide parvienne à ceux qui en ont besoin. La Jordanie estime que, pour qu’une paix véritable s’instaure, il faut que les deux parties fassent preuve de volonté politique et de bonne volonté et comprennent que tout acte de provocation, militaire ou autre, ne mènera pas à la paix mais à une escalade et à une aggravation de la situation.

M. Maes (Luxembourg) : Je remercie à mon tour le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. Jeffrey Feltman, pour son exposé.

Nous sommes très préoccupés par la grave détérioration de la situation dans les zones contrôlées par les séparatistes dans les régions de Donetsk et de Lougansk, en raison de l’intensification des combats dans ces régions. Nous sommes également très préoccupés par des rapports faisant état d’une reprise des combats dans le sud-est de l’Ukraine, à proximité de la ville de Marioupol, combats lors desquels les séparatistes ont pris le contrôle de la ville de Novoazovsk.

Depuis quelques jours, des rapports faisant état d’incursions de troupes régulières et de véhicules militaires russes sur le territoire ukrainien se multiplient. Nous sommes également préoccupés par les rapports de bombardements du territoire ukrainien en provenance de la Russie et des violations de l’espace aérien ukrainien. Toute action militaire unilatérale de la part de la Fédération de Russie en Ukraine, quel qu’en serait le prétexte, y compris humanitaire, constituerait une grave violation du droit international et serait considérée comme telle par la communauté internationale. Nous ne pouvons accepter que la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine soient violées.

La présence de combattants russes parmi les séparatistes, y compris parmi leurs dirigeants, est tout à fait inacceptable et doit être condamnée dans les termes les plus fermes. Elle a été mentionnée notamment dans les différents rapports du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur la situation en Ukraine. Elle a été d’ailleurs reconnue récemment par un leader des séparatistes à Donetsk, qui a expliqué dans un entretien diffusé à la télévision russe que les derniers succès des séparatistes n’auraient pas été possibles sans l’aide de soldats russes.

Nous assistons aujourd’hui à une nouvelle étape dangereuse dans l’escalade de la situation en Ukraine, malgré les proclamations officielles russes en faveur du dialogue et de la désescalade. Nous demandons donc instamment à la Fédération de Russie de mettre immédiatement fin à toute forme d’activité hostile aux frontières, en particulier à l’afflux d’armes, de conseillers militaires et de personnel armé dans la zone de conflit, et de retirer ses forces de la frontière.

Au regard de la détérioration continue de la situation sur le terrain, la nécessité de trouver une solution politique et durable à cette crise devient de plus en plus pressante. À cet égard, nous saluons les efforts entrepris par le Secrétaire général afin de favoriser le dialogue entre l’Ukraine et la Fédération de Russie, notamment grâce aux missions du Secrétaire général adjoint, M. Jeffrey Feltman, dans la région.

Le dialogue entre l’Ukraine et la Russie, initié à Genève et à Berlin, doit être poursuivi afin de rétablir la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Nous saluons la réunion qui a eu lieu avant-hier à Minsk entre le Président de la Fédération de Russie et le Président de l’Ukraine, en présence notamment de l’Union européenne. Nous espérons qu’elle permettra d’aboutir à des résultats concrets et surtout à l’établissement d’une feuille de route basée sur le plan de paix du Président Poroshenko. Nous espérons que des consultations entre la Russie et l’Ukraine pour assurer un meilleur contrôle des frontières se tiendront bientôt et que les parties aboutiront à la libération des prisonniers détenus par les groupes armés illégaux.

Les pourparlers trilatéraux initiés par la présidence en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sont essentiels à cet égard, tout comme le déploiement d’observateurs de l’OSCE aux deux postes frontière de Gukovo et Donetsk sur la frontière russo-ukrainienne. Nous espérons que le mandat de la mission pourra être élargi pour qu’elle puisse contribuer à un contrôle efficace, global et bilatéral de la frontière russo-ukrainienne. La sécurisation de cette frontière est essentielle pour le rétablissement de la paix puisqu’elle permettra de faire cesser le flux d’armes et d’armements au profit des séparatistes.

La solution à la crise ukrainienne ne peut être que politique. La Fédération de Russie doit être partie intégrante des efforts en vue de trouver cette solution politique au lieu de continuer à attiser ce conflit qui date d’une autre époque.

M. Barros Melet (Chili) (parle en espagnol) : Nous remercions le Secrétaire général adjoint, M. Jeffrey Feltman, pour son exposé, ainsi que le Secrétaire général pour tous ses efforts visant à mettre fin à la situation que connaît l’Ukraine. Le Chili est extrêmement préoccupé par l’escalade considérable de la crise dans l’est et le sud de l’Ukraine, notamment dans les régions de Donetsk et de Lougansk, et aujourd’hui de Novoazovsk. Il faut mettre fin d’urgence à cette escalade afin que la paix et la sécurité soient rétablies dans ces régions où la situation est tout à la fois dangereuse et imprévisible. C’est pourquoi nous appelons les parties à faire preuve de la plus grande retenue possible et à cesser les combats.

Notre pays réitère encore une fois, comme il le fait depuis le début de la crise, l’obligation de respecter la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, conformément à la Charte des Nations Unies et au droit international, et d’appliquer également le principe de non-intervention et de non- ingérence dans les affaires internes des États, ce que consacrent notamment l’Acte final d’Helsinki, qui a créé l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) dont l’Ukraine et la Russie sont membres, et le Mémorandum de Budapest sur les garanties de sécurité, documents qui s’appliquent à la Russie et à l’Ukraine, entre autres États.

C’est pourquoi nous réaffirmons également que les parties au conflit doivent s’abstenir de toute action contraire à la Charte des Nations Unies et au droit international. À cet égard, le Chili réclame le retrait immédiat du territoire ukrainien de tout contingent étranger n’ayant pas été expressément autorisé par les autorités légitimes du pays.

Nous sommes très préoccupés par la situation humanitaire et des droits de l’homme que connaissent l’est et le sud de l’Ukraine, en particulier le nombre croissant de personnes déplacées et la situation à laquelle font face les minorités ethniques. Nous jugeons également alarmante la multiplication des violations des droits de l’homme dans ces régions. C’est pourquoi il faut y rétablir immédiatement l’état de droit. À cet égard, nous notons que l’assistance humanitaire devra être mise en œuvre dans le plein respect de la souveraineté de l’Ukraine et conformément aux principes de la Charte.

Nous espérons que la mission d’observation, en coopération étroite avec la mission spéciale de surveillance de l’OSCE, continuera à jouer un rôle constructif dans le processus d’atténuation des tensions sur le terrain.

Comme nous l’avons déjà signalé, nous réitérons la nécessité de garantir que les auteurs et les responsables des violations des droits de l’homme, quels qu’ils soient, rendent compte de leurs actes devant la justice.

Nous appelons encore une fois les parties à chercher une solution pacifique à cette crise par le biais d’un dialogue politique direct, à s’abstenir d’adopter des mesures unilatérales et à appuyer les initiatives internationales de médiation, conformément à la résolution 68/262 de l’Assemblée générale. À ce titre, nous nous félicitons de la réunion qu’ont tenue à Minsk les Présidents de la Russie et de l’Ukraine le 26 août dernier. Et nous les encourageons à maintenir et à intensifier ces contacts en vue de trouver une solution pacifique et rapide à cette crise.

Nous soulignons également les diverses initiatives prises par le Secrétaire général de l’ONU et par l’ensemble du système des Nations Unies qui s’attachent, depuis le début de la crise, à trouver une solution politique.

Le Chili estime que le moment est venu de participer de manière constructive à un processus inclusif qui garantisse l’état de droit, les libertés fondamentales, le respect des droits de l’homme, de même que la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, afin de créer les conditions qui permettent au peuple ukrainien de décider de son avenir en toute souveraineté, dans la paix et la démocratie.

M. Bliss (Australie) (parle en anglais) : Je remercie M. Feltman de son exposé. Nous saluons les efforts qui sont déployés par le Secrétaire général, M. Feltman et d’autres collègues pour trouver une solution à cette crise.

Il est maintenant clairement prouvé qu’un nombre considérable de soldats, de véhicules blindés de transport de troupes, de chars et d’autres matériels russes sont entrés sur le territoire ukrainien. Des informations crédibles indiquent que des soldats russes équipés de systèmes d’armes perfectionnés mènent des opérations en Ukraine. De grandes quantités d’armes perfectionnées, y compris des systèmes de défense aérienne, de l’artillerie, des chars et des véhicules blindés de transport de troupes, sont transférés aux forces séparatistes dans l’est de l’Ukraine. Des parachutistes russes ont été arrêtés en Ukraine et, d’après certaines informations, des soldats russes tués en Ukraine auraient été enterrés en Russie. Hier, une centaine de chars, de véhicules blindés et de lance- roquettes auraient été transférés vers Telmanove, au sud de Donetsk.

Au cours des dernières 48 heures, des séparatistes ont mené des opérations pour prendre le contrôle de la ville côtière de Novoazovsk et de plusieurs villages situés en Ukraine, près de la frontière avec la Russie. Les informations faisant état de l’implication des forces armées régulières russes sont extrêmement inquiétantes.

Les derniers événements indiquent une nouvelle escalade encore plus dangereuse de la crise, qui semble s’étendre à une zone plus large de l’Ukraine et se rapprocher de la route méridionale menant en Crimée. Tout cela indique que la Russie emploie la force contre l’Ukraine. Cela constituerait une violation flagrante de la souveraineté de l’Ukraine et de la Charte des Nations Unies.

Ces derniers faits sont survenus dans le contexte d’autres incidents graves, y compris le meurtre par des séparatistes du consul honoraire lituanien à Lougansk, le 22 août ; les soldats ukrainiens capturés par des séparatistes, qui les ont fait défiler le 24 août, en violation flagrante de l’interdiction d’humilier et d’infliger un mauvais traitement aux prisonniers de guerre, des Conventions de Genève et du droit international coutumier ; et une attaque russe menée par hélicoptère contre un poste frontière dans la province de Lougansk, le 25 août, au cours de laquelle quatre gardes frontières ont été tués. Bien que la Russie affirme ne pas être impliquée dans ce conflit, nous disposons de la déclaration publique faite le 28 août par le chef séparatiste Zakharchenko soutenant qu’entre 3 000 et 4 000 Russes auraient combattu dans les rangs séparatistes depuis le début du conflit.

Nous sommes également extrêmement préoccupés par l’annonce faite le 25 août par le Ministre russe des affaires étrangères, M. Lavrov, selon laquelle un deuxième convoi d’aide serait envoyé en Ukraine cette semaine, bien que le premier ait été envoyé sans l’accord du Gouvernement ukrainien et que le Comité international de la Croix-Rouge n’y ait pas participé. La Ministre australienne des affaires étrangères, Mme Bishop, a décrit, le 24 août, la situation relative à ce convoi comme une situation dans laquelle la Russie a fait preuve d’un mépris flagrant et irresponsable des normes internationales et du droit international. Tout nouveau convoi d’aide ne doit être envoyé qu’avec l’accord du Gouvernement ukrainien.

Le 26 août, les pourparlers à Minsk auraient pu servir de cadre utile pour trouver un moyen diplomatique de mettre fin à cette crise. Cependant, en même temps que la Russie participait à ces pourparlers, la situation s’aggravait encore dans le sud de l’Ukraine.

Des mesures doivent être prises immédiatement. La Russie doit immédiatement retirer son matériel et ses effectifs militaires du territoire ukrainien. La Russie devrait cesser de fournir tout appui aux séparatistes et leur demander de déposer les armes afin qu’il soit possible de mettre fin immédiatement à ce conflit. La Russie doit contrôler sa frontière. C’est le seul moyen efficace d’empêcher des soldats et du matériel d’entrer en Ukraine et un élément essentiel pour instaurer un cessez-le-feu, comme l’ont dit d’autres orateurs. Il faut déployer des efforts considérables pour engager un dialogue politique. Cela dépend de la Russie.

Même si la présente séance est axée sur les faits survenus ces dernières 48 heures, nous ne devons pas perdre de vue le fait qu’il faut appliquer pleinement la résolution 2166 (2014). La Mission des Pays-Bas vient de distribuer aux membres du Conseil une lettre concernant les mesures qu’ils ont prises suite à la destruction du vol MH17 de la Malaysia Airlines. Les Pays-Bas ont beaucoup progressé dans l’identification des dépouilles des victimes et leur rapatriement dans leur pays. Cette lettre fait également savoir que l’enquête indépendante sur la cause de la destruction de l’avion est en cours et que les Pays-Bas demeurent pleinement déterminés à faire en sorte que les auteurs rendent compte de leurs actes.

L’Australie travaille en coopération étroite avec les Pays-Bas sur les mesures prises après cette catastrophe et appuie pleinement leurs efforts. Pour que ces efforts donnent des résultats, il est impératif que tous les États appliquent pleinement les dispositions de la résolution 2166 (2014).

M. Gombo (Tchad)  : Je remercie le Secrétaire général adjoint, M. Feltman, de sa disposition à nous faire cette présentation sur la situation urgente en Ukraine.

Le Tchad exprime sa vive préoccupation face à la dégradation rapide de la situation en Ukraine, particulièrement dans la région de Donetsk. La réunion, tenue à Minsk le mardi 26 août, entre les deux chefs d’État, M. Poroshenko et M. Poutine, représente pour nous une nouvelle étape vers la désescalade des tensions. Mais seulement deux jours après, des informations font état de l’intensification des combats dans les régions de Lougansk et de Donetsk et de la présence de 1000 volontaires russes qui combattraient sur le terrain ukrainien aux côtés des séparatistes pro-russes. Cette nouvelle escalade est préoccupante pour le Tchad.

Comme nous l’avons maintes fois répété, la solution à la crise en Ukraine est politique et doit être trouvée dans le cadre d’un dialogue direct, inclusif, et dans le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine, conformément à la Charte des Nations Unies.

Mme Power (États-Unis d’Amérique) ( parle en anglais) : C’est la vingt-quatrième fois que nous nous réunissons pour tenter de mettre un frein aux actes agressifs commis par la Russie en Ukraine. À chacune de ces séances, un message direct et unifié a été envoyé : la Russie doit faire cesser ce conflit. La Russie n’écoute pas.

Nous l’avons dit quand la Russie a commis une violation flagrante du droit international en occupant la Crimée. Nous l’avons dit lors de l’épouvantable destruction du vol MH17 de la Malaysia Airlines, qui a fauché la vie d’hommes, de femmes, d’enfants et de nourrissons innocents de 11 pays différents. Nous le disons aujourd’hui, au moment où des soldats, des chars, des moyens de défense aérienne et d’artillerie russes appuient les séparatistes et combattent à leurs côtés tandis qu’ils ouvrent un nouveau front dans une crise créée et alimentée par la Russie. Mais la Russie n’écoute pas.

Au lieu d’écouter, au lieu de répondre aux exigences de la communauté internationale et aux règles de l’ordre international, à chaque étape, la Russie s’est présentée au Conseil pour dire tout, sauf la vérité. Elle a manipulé. Elle a semé la confusion. Elle a carrément menti. Nous avons donc appris à évaluer la Russie par ses actes et non par ses paroles.

Au cours des dernières 48 heures, les actes de la Russie se sont fait très fortement entendre. Le 26 août – ce mardi – après avoir rencontré le Président ukrainien, M. Poroshenko, à Minsk, au Bélarus, le Président Poutine a parlé de la nécessité de « faire cesser l’effusion de sang le plus rapidement possible ». Pourtant, le même jour, des images satellite montraient des unités de combat russes – des unités de combat – au sud-est de Donetsk, dans l’est de l’Ukraine. Le même jour, à Lougansk, l’Ukraine arrêtait des membres de l’armée de terre russe de la 9e brigade. En réponse, la Russie a affirmé que ces soldats s’étaient rendus sur le territoire ukrainien par erreur. Et ce, prétendument, en période de conflit le long d’une des frontières les plus soigneusement surveillées au monde.

Le lendemain de ces pourparlers, la Russie a tiré des roquettes Grad depuis la Russie en direction de positions ukrainiennes à Novoazovsk, puis a attaqué à l’aide de deux colonnes de véhicules blindés et de chars russes. Des véhicules blindés russes et des lance- roquettes multiples Ouragan sont positionnés à la périphérie de cette ville en ce moment même.

La force russe présente le long de la frontière n’a jamais été aussi forte depuis que la Russie a commencé à y redéployer des forces en mai et comprend un nombre considérable d’avions et d’hélicoptères de combat. Des drones russes traversent régulièrement l’espace aérien ukrainien.

La Russie a effectué d’autres déploiements sur le territoire ukrainien, y compris des systèmes d’artillerie et de défense aérienne perfectionnés qui ne figurent pas dans le parc de matériels ukrainien. Ces systèmes d’artillerie ont bombardé des positions ukrainiennes en dehors de la ville de Lougansk, en même temps que se déroulait la récente contre-offensive séparatiste.

Un des chefs séparatistes armés et soutenus par la Russie a publiquement déclaré que 3 000 ou 4 000 soldats russes avaient rallié leur cause. Il a été prompt à préciser que ces soldats étaient en permission. Mais un soldat russe qui décide de combattre en Ukraine pendant la pause estivale reste un soldat russe, et le véhicule militaire blindé russe qu’il conduit sur place n’est pas sa voiture personnelle.

Pendant ce temps, en Russie, les familles des soldats russes assistent aux funérailles des proches qui ont été tués dans les combats en Ukraine. Elles exigent qu’on leur explique comment ils se sont faits tuer. Les journalistes qui essaient de couvrir ces funérailles sont malmenés et menacés par des hommes en armes. Pourtant, toujours selon le Gouvernement russe, les soldats n’ont jamais mis les pieds sur place. Ils n’ont jamais mis les pieds en Crimée non plus, jusqu’à ce que la Russie annonce que les soldats qui n’avaient jamais mis les pieds sur place avaient annexé la Crimée.

Les 48 heures qui viennent de s’écouler s’inscrivent dans un système bien rôdé par la Russie. Chaque étape a préparé la voie à celle qui a suivi. Et pourtant, malgré toutes ces menées révoltantes, l’Ukraine a cherché à maintes reprises une solution politique à la crise. Elle a cherché à maintes reprises une voie vers la désescalade. En dépit de ces menées systématiques, le Président Poroshenko est bien parti à Minsk rencontrer le Président Poutine. En revanche, le Président Poutine n’était toujours pas disposé à reconnaître les faits les plus élémentaires que nous connaissons tous : le fait que la Russie a armé, équipé et maintenant rejoint dans les combats les séparatistes illégaux combattant en Ukraine. Des négociations sérieuses s’imposent – d’urgence – mais la Russie doit cesser de mentir et doit cesser d’alimenter le conflit.

Le masque est en train de tomber. Dans les faits récents, nous pouvons voir les agissements de la Russie pour ce qu’ils sont vraiment, c’est-à-dire un effort délibéré pour venir à l’appui et, maintenant, en renfort des séparatistes illégaux sur le sol d’un autre pays souverain.

À présent, la Russie prétend que l’Ukraine n’est pas intéressée par un cessez-le-feu. Mais soyons clairs : nous avons tout intérêt à ce qu’il y ait un cessez- le-feu, tout comme les Ukrainiens, tant qu’il s’agit d’un véritable cessez-le-feu. Or, non seulement les séparatistes russes, eux, n’ont aucun intérêt à observer un cessez-le-feu mais en plus, ils mettent le temps à profit, avec cynisme, pour se réarmer et attendre les renforts et les réapprovisionnements qui leur viendront de Russie par la frontière.

Face à ces actes profondément alarmants, la question la plus importante qui se pose à nous maintenant est de savoir non pas ce que nous devons dire à la Russie, mais plutôt ce que nous devons faire pour que la Russie nous écoute. Durant toute cette crise, les États-Unis, en étroite coordination avec leurs partenaires européens – l’Union européenne et le Groupe des Sept (G7) – a exercé des pressions ciblées, efficaces, pour que ce message soit entendu, pour que la Russie entame sa désescalade au lieu de poursuivre l’escalade, et pour que le plan de paix raisonnable proposé par le Président Poroshenko soit adopté et mis en œuvre. Et face à la poursuite de l’agression de la Russie et à son mépris flagrant de la Charte des Nations Unies et de l’Acte final de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, nous continuerons de travailler en étroite collaboration avec nos partenaires du G7 et de l’Union européenne pour que la Russie supporte encore plus nettement les conséquences de ses actes.

Maintenant, je suis consciente du coût concret, pour les citoyens des pays concernés, de la décision que prennent leur gouvernement d’adopter ce type de mesures. Il y a un coût pour les entreprises qui commercent avec la Russie et vendent leurs produits sur les marchés russes, depuis les petites exploitations agricoles jusqu’aux plus grandes usines. Ce coût est élevé et nul ne devrait le traiter à la légère.

Mais soyons clairs : si nous n’y mettons pas le holà, le tort causé par le mépris flagrant affiché par la Russie à l’égard de l’ordre international sera beaucoup, beaucoup plus important encore. Ces règles et principes se sont constitués sur des générations, au prix d’un investissement sans équivalent : d’innombrables personnes ont perdu la vie pour établir et défendre ces principes et il est dans l’intérêt de chacun d’entre nous de les défendre. Toute menace à cet ordre – l’ordre international – est une menace à l’ensemble de la paix et de la sécurité dont nous jouissons. Ce sont les règles que la Russie bafoue lorsqu’elle s’empare illégalement de territoires et arme, équipe, et rejoint au combat les groupes illégaux de pays voisins.

L’Ukraine n’est que l’un des pays sur la dizaine qui partagent une frontière avec la Russie. Et je voudrais, à cet égard, poser ces quelques questions en guise de conclusion : comment pouvons-nous dire à ces pays frontaliers de la Russie que leur paix et leur souveraineté sont garanties si nous ne faisons pas passer notre message sur l’Ukraine ? Pourquoi croiraient-ils que la situation sera différente si, demain, le Président Poutine décide de se mettre à soutenir des séparatistes armés et à laisser des soldats en permission aller combattre dans leur pays ? De surcroît, quel message envoyons-nous aux autres pays de par le monde qui caresseraient des ambitions tout aussi alarmantes, lorsque nous laissons la Russie violer les règles sans lui en imposer suffisamment les conséquences ? Face à pareille menace, le coût de l’inaction est inacceptable.

M. Oh Joon (République de Corée) (parle en anglais) : Je voudrais remercier le Secrétaire général adjoint, Jeffrey Feltman, de son exposé. Nous saisissons cette occasion pour réaffirmer tout notre soutien aux bons offices du Secrétaire général, y compris le déplacement récent en Ukraine de M. Feltman.

La République de Corée suit de près les événements dans l’est de l’Ukraine et elle est profondément préoccupée par l’escalade continue des tensions. Nous espérions que l’entretien qu’ont eu à Minsk les deux Présidents permettrait de faire basculer la situation en faveur d’une solution diplomatique à la crise. Or la situation sur le terrain, au contraire, s’est encore dégradée. Nous sommes tout particulièrement alarmés de voir que les groupes séparatistes armés ont poussé jusqu’à la ville méridionale de Novoazovsk, ouvrant ainsi un nouveau front dangereux dans la crise actuelle.

Nous sommes également gravement préoccupés par l’information faisant état de la participation de soldats russes à la dernière série de combats sur le sol ukrainien. Nous espérons que ce n’est pas vrai. Nous espérons que c’est l’explication donnée par la Russie – il n’y a pas de soldats russes sur le sol ukrainien – qui est vraie. Sinon, nous nous trouverions en présence d’une violation flagrante de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, ce qui donnerait à la crise une toute autre dimension. Nous sommes fermement opposés à toute intervention militaire extérieure dans la situation en Ukraine.

Compte tenu de l’instabilité de la situation, nous insistons sur le fait que l’on ne peut régler véritablement la crise qu’en cessant immédiatement les hostilités, au moyen d’un dialogue entre toutes les parties concernées. À cet égard, nous espérons que le projet de feuille de route du Président Poroshenko en vue d’un cessez-le-feu avec les groupes armés permet d’offrir une base solide à une désescalade des tensions.

La stabilité et la prospérité de l’Ukraine revêtent une importance critique non seulement pour la paix en Europe mais également bien au-delà. Nous réaffirmons une fois de plus notre plein appui à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Mme Perceval (Argentine) (parle en espagnol) : Je remercie le Secrétaire général adjoint, Jeffrey Feltman, de son exposé sur la situation en Ukraine.

L’Argentine redit sa préoccupation face à la dégradation continuelle des conditions de sécurité dans l’est et le sud de l’Ukraine et à la recrudescence de la violence. Il est impératif que toutes les parties inscrivent leur action dans les strictes limites du droit international et des principes de la Charte des Nations Unies. À cet égard, nous rappelons l’obligation qui est faite à tous les États de régler leurs différends internationaux par des moyens pacifiques de façon à ne pas mettre en péril la paix et la sécurité internationales, et ce, conformément à la Charte des Nations Unies et dans le respect des principes énoncés à l’Article 2 de son Chapitre I, et compte dûment tenu du rôle important des organisations régionales pertinentes.

La seule solution possible réside dans le dialogue et la négociation, nous l’avons dit et nous le redisons ici. Il faut éviter toute rhétorique belliqueuse et toute intervention dans les affaires des États qui relèvent de leur juridiction interne, qu’elles soient militaires, politiques ou économiques. À cet égard, nous accueillons avec satisfaction la rencontre tenue le 26 août dernier à Minsk entre les Présidents russe et ukrainien et nous espérons qu’elle portera ses fruits, à la faveur de nouvelles rencontres, jusqu’au règlement politique des différends. De même, nous nous faisons l’écho de l’appel du Secrétaire général en faveur de la poursuite de ces discussions, dans le but de parvenir à une issue au conflit. Nous saluons les intenses efforts et les bons offices du Secrétaire général à cet égard. Il est nécessaire que les parties observent sans conditions les droits de l’homme et le droit international humanitaire et qu’elles se portent garantes que les auteurs des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire et des exactions commises devront dûment en répondre.

Pour terminer, l’Argentine, comme elle l’a fait en de précédentes occasions, souligne que c’est au Conseil de sécurité qu’il incombe au premier chef de veiller au maintien de la paix et de la sécurité internationales, conformément au mandat qui lui est confié par la Charte. Nous regrettons qu’à ce jour, en dépit du nombre de séances tenues sur la situation en Ukraine, le Conseil n’ait pas été capable de surmonter ses divisions et de jouer un rôle positif en amenant les parties à trouver un terrain d’entente sur lequel fonder un règlement politico-diplomatique. En priorité, il faut intensifier les efforts pour créer les conditions propices au lancement du dialogue, si nécessaire, afin de trouver des solutions permettant de régler les différends. En particulier, les acteurs les plus influents doivent recourir à la diplomatie constructive. Nous réaffirmons que dans le cadre de ses efforts, la communauté internationale doit s’attacher à amener les parties à s’engager dans un dialogue constructif et à parvenir à un règlement pacifique de cette situation, dans le plein respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire, tout en respectant les droits de toutes les minorités et en se conformant strictement au droit international et à la Charte des Nations Unies.

Mme Ogwu (Nigéria) (parle en anglais) : Je voudrais remercier le Secrétaire général adjoint, M. Feltman, de son exposé.

La situation qui règne actuellement dans l’est de l’Ukraine constitue une escalade dangereuse du conflit entre les rebelles séparatistes et les forces gouvernementales. De nouveaux fronts ont été ouverts dans le cadre de ce conflit, qui s’étend désormais sur une zone géographique plus vaste. Il va sans dire que cela complique davantage une situation déjà très difficile et délicate, dans laquelle sont impliqués des acteurs de plus en plus nombreux. Les informations faisant état de l’entrée de troupes et de matériel militaire russes sur le territoire ukrainien nous préoccupent tous vivement. Nous notons toutefois que le représentant de la Russie auprès de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, Andrey Kelin, a catégoriquement nié ces informations.

Par conséquent, nous demandons à l’Ukraine et à la Russie de régler leurs différends de manière pacifique, au moyen d’un dialogue et de négociations sincères. Les cadres existants et relativement crédibles, comme le traité d’amitié entre les deux pays et la déclaration de Genève du 17 avril, constituent un bon point de départ pour des efforts visant à la réconciliation. Les Présidents Poutine et Poroshenko doivent maintenir leur dialogue et le renforcer : c’est en effet la seule voie viable pour parvenir à une solution diplomatique acceptable permettant de régler cette crise. À notre avis, une solution militaire n’est pas viable. Il faut négocier d’urgence un cessez-le-feu, qui serait un premier pas pour mettre fin à ce conflit, qui a fait 2000 morts et plus de 3 000 blessés et a forcé des dizaines de milliers de personnes à quitter leurs foyers.

Pour sa part, le Gouvernement ukrainien doit continuer à tenir compte des aspirations légitimes de tous les segments de la population et à protéger leurs intérêts. Nous sommes convaincus que des efforts robustes visant à renforcer l’intégration permettront de promouvoir la cohésion nationale, qui est indispensable. Une telle démarche permettrait d’enrayer les hostilités et les troubles et jetterait les bases d’un processus d’édification d’une nation pacifique, prospère et unie.

Pendant toutes nos discussions sur cette question, nous avons toujours insisté sur la nécessité de respecter les principes universellement reconnus et le caractère sacré du droit international. Cela commence bien évidemment par le respect des principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, à savoir la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de tous les États. Notre position se fonde sur ces principes. Nous estimons que seule une solution diplomatique, issue d’un dialogue direct entre les parties, peut permettre de régler le conflit actuel. Nous demandons instamment à ceux qui ont une influence sur les parties au conflit d’exercer cette influence afin de régler cette situation, dans l’intérêt de la paix et de la sécurité internationales au sens large.

M. Wang Min (Chine) (parle en chinois) : Je remercie le Secrétaire général adjoint, M. Feltman, de son exposé.

La Chine est vivement préoccupée par le conflit armé qui continue de s’aggraver dans l’est de l’Ukraine et qui a fait de nombreux morts et causé d’énormes dégâts matériels. Face à la situation actuelle, toutes les parties concernées doivent faire preuve de retenue pour éviter qu’elle ne se détériore davantage.

La Chine a exprimé à plusieurs reprises sa position de principe sur la question ukrainienne. Je m’abstiendrai de la réitérer aujourd’hui.

Je voudrais souligner ce qui suit. La crise en Ukraine ne peut être réglée que par des moyens politiques. Aujourd’hui, la priorité pour toutes les parties concernées doit être de parvenir sans plus tarder à un cessez-le-feu, de poursuivre les efforts visant à promouvoir un règlement politique de la crise en Ukraine, de respecter pleinement les droits, les intérêts et les aspirations légitimes de toutes les régions et de tous les groupes ethniques en Ukraine et de prendre pleinement en considération les revendications légitimes de toutes les parties, afin de trouver un équilibre entre les intérêts de tous. La communauté internationale doit exhorter les parties concernées à tirer parti de divers mécanismes de dialogue et de liaison, à renforcer les échanges et à agir de manière à créer un climat de confiance mutuelle.

La Chine appuie tous les efforts visant à apaiser la situation, à mettre fin à la crise et à promouvoir une solution politique.

M. Nduhungirehe (Rwanda) (parle en anglais) : Monsieur le Président, je vous remercie d’avoir convoqué la présente séance d’urgence du Conseil de sécurité pour discuter de l’évolution récente de la situation dans l’est de l’Ukraine. Je remercie M. Jeffrey Feltman, Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, de son exposé très détaillé. Nous saluons les bons offices du Secrétaire général et les efforts déployés par M. Feltman pour trouver une issue à cette crise.

Le Rwanda, comme tous les autres membres du Conseil de sécurité, est vivement préoccupé par la situation qui se détériore rapidement dans l’est de l’Ukraine. Le sommet régional qui s’est tenu le 26 août à Minsk – qui fut l’occasion de la première rencontre entre le Président Petro Poroshenko de l’Ukraine et le Président Vladimir Poutine de la Fédération de Russie depuis l’élection de M. Poroshenko en mai dernier – avait suscité des espoirs quant à la conclusion d’un cessez-le feu et à une solution diplomatique au conflit.

Malheureusement, ces derniers jours ont été marqués par la reprise des combats dans l’est de l’Ukraine, en particulier dans la région de Donetsk, où la ville de Novoazovsk est tombée entre les mains des séparatistes armés, qui menacent de prendre le contrôle de la ville portuaire stratégique de Marioupol. À cet égard, nous sommes préoccupés par les informations émanant d’un responsable des séparatistes armés selon lesquelles environ 3 000 à 4 000 nationalistes russes ont rejoint leurs rangs. Nous sommes également préoccupés par les accusations selon lesquelles des éléments de l’armée russe ont franchi les frontières ukrainiennes. Il est clair que l’intensification des tensions et de la guerre des mots entre l’Ukraine et la Fédération de Russie pourrait, si des mesures adéquates ne sont pas prises à cet égard, conduire à un conflit déclaré entre les deux pays, ce qui représenterait une menace encore plus grave à la paix et à la sécurité internationales et conduirait à la détérioration d’une situation déjà très grave sur les plans humanitaire et des droits de l’homme dans l’est de l’Ukraine et dans l’ensemble de la région.

La situation en Ukraine est inscrite à l’ordre du jour du Conseil de sécurité depuis la fin de février. Nous avons tenu maintes réunions portant sur cette crise. Nous avons tenu 24 réunions, comme nous l’a rappelé Mme Power, l’Ambassadrice des États-Unis d’Amérique. Malheureusement, nous avons été incapables de prendre une décision digne d’intérêt, à l’exception de la résolution 2166 (2014) que nous avons adoptée le 21 juillet, relative à la chute de l’appareil de la Malaysia Airlines affrété pour le vol MH17.

Quoi qu’il en soit, compte tenu des divisions qui existent au sein du Conseil, il est peu probable que la solution vienne de New York. Seul un dialogue véritable entre les Ukrainiens, accompagné de négociations diplomatiques entre l’Ukraine et la Fédération de Russie, avec l’appui de l’ONU et des organisations régionales, peut permettre de trouver une solution durable à cette crise. Nous estimons que le plan de paix du Président Poroshenko et le processus de Minsk peuvent servir de cadre viable en vue de la réalisation de cet objectif.

Pour terminer, je voudrais une fois de plus appeler toutes les parties en Ukraine à respecter l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Les groupes armés doivent cesser les hostilités, déposer les armes afin de désamorcer la situation et de donner une chance à la paix. À cet égard, nous demandons instamment à toutes les parties impliquées depuis le début d’user de leur influence et d’œuvrer en faveur de la paix et de la stabilité dans la région.

M. Churkin (Fédération de Russie) (parle en russe) : L’escalade que connaît actuellement la situation dans le sud-est de l’Ukraine est la conséquence directe de la politique irresponsable de Kiev consistant à mener une guerre contre son propre peuple. Avec l’appui et sous l’influence d’un certain nombre d’États connus de tous, les autorités de Kiev ont torpillé tous les accords politiques visant à régler la crise en Ukraine, comme la déclaration de Genève du 17 avril et la déclaration de Berlin du 2 juillet, sans parler de l’abandon de leurs positions antérieures dans l’accord du 21 février, qui aurait réellement permis de trouver une issue civilisée à la crise.

La proposition unilatérale du Président Poroshenko d’un prétendu plan de paix n’a été qu’un pas de plus vers l’escalade, dans la mesure où il assujettissait l’armistice à la capitulation des insurgés. Or, tout cela s’inscrivait dans un contexte dépourvu de véritables mesures visant à lancer un processus politique ou à négocier avec les représentants des régions. Où sont le dialogue national ouvert à tous promis par Kiev, la réforme constitutionnelle, la décentralisation des pouvoirs et le statut spécial réservé à la langue russe ? Tout ce que nous voyons, c’est une lutte avec les dissidents et l’interdiction des partis politiques et des médias qui ne suivent pas la ligne officielle.

Le Président Poroshenko a souvent fait des déclarations d’apparence pacifiste. Hier encore, il a commenté l’issue de la réunion de haut niveau qui s’est tenue à Minsk, en affirmant que le principal but de Kiev était la paix, et que les autorités s’employaient à trouver les moyens décisifs de rétablir la paix en Ukraine. Il a également parlé d’un nouveau plan d’urgence pour résoudre la crise. Où est ce plan ? Est-ce encore une manœuvre de diversion supplémentaire qui tente de dissimuler l’idée d’un règlement par la force ? Nous espérons que les autorités de Kiev ne gâcheront par les perspectives prometteuses offertes par la réunion de Minsk.

Pendant ce temps, les forces armées ukrainiennes, sans aucun égard pour les normes du droit international humanitaire ou les simples préceptes moraux, frappent sans distinction les villes, les quartiers résidentiels et les infrastructures. Elles ont recours à l’artillerie, aux mitrailleuses et aux attaques aériennes, utilisent des explosifs au phosphore interdits par les conventions internationales et des fusées balistiques. Dans la prétendue zone d’opérations antiterroristes vivent 4 millions de personnes. Des centaines de milliers d’entre elles sont terrées dans des caves, sans eau ni électricité depuis des semaines, et les vivres et les médicaments sont quasiment impossibles à obtenir. Le nombre total de morts dépasse maintenant 2 000, et il croît de manière exponentielle. Le nombre de personnes, y compris des réfugiés, qui ont quitté l’Ukraine pour s’installer en Russie s’élève désormais à plus de 814 000.

Les médias font état de terribles pertes dans les rangs de l’armée ukrainienne, ce que confirment les manifestations de masse organisées en Ukraine contre la mobilisation. Des centaines de militaires ukrainiens se retrouvent sur le territoire russe pour diverses raisons. Nous leur fournissons de la nourriture, de l’eau et des soins médicaux, puis les renvoyons en Ukraine. Nous espérons que les autorités de Kiev traitent tout aussi humainement les parachutistes russes dont nous avons tant entendu parler ces dernières 24 heures. Cependant, nous avons appris qu’ils étaient détenus avec leurs papiers et des armes non chargées, ce qui ne ressemble guère à une force de diversion dans une zone de conflit. Tout le monde sait bien qu’il y a des volontaires russes dans l’est de l’Ukraine ; personne ne le cache. Il serait à souhaiter qu’une même transparence soit appliquée dans d’autres pays. Que nos collègues américains nous expliquent ce que font des dizaines de conseillers américains dans le bâtiment du Conseil ukrainien de la défense, ou nous disent combien de mercenaires américains travaillant pour des soi-disant prestataires militaires privés viennent se battre à des milliers de kilomètres de leurs côtes. Comment se fait-il que des systèmes d’armes américains se soient retrouvés dans les forces armées ukrainiennes ?

Notre collègue états-unienne a posé une question pertinente, à savoir quel message les voisins de la Russie peuvent-ils transmettre ? Je voudrais dire ceci à mes chers collègues. Je suggère qu’ils envoient un message à Washington : arrêtez de vous ingérer dans les affaires intérieures d’un État souverain. Arrêtez d’encourager des régimes contestables. Limitez vos ambitions géopolitiques. Ainsi, non seulement les voisins de la Russie, mais également de nombreux autres pays à travers le monde, respireront bien mieux. Autre chose encore : arrêtez de spéculer sur l’avion abattu de la Malaysia Airlines. Jusqu’à présent, seule la Russie a contribué à la réalisation d’une enquête transparente et essentielle concernant cette tragédie. Nous n’avons aucune information de la part des autres pays, rien que des insinuations. Pour une raison que l’on ignore, même la question de savoir comment les Ukrainiens ont obtenu les enregistrements des conversations de leurs contrôleurs aériens est en quelque sorte un terrible secret. Arrêtons la spéculation.

La Russie tente d’envoyer de l’aide humanitaire aux habitants des régions de Donetsk et Lougansk, qui en ont besoin de toute urgence. Il y a peu, malgré l’opposition véhémente de certains membres du Conseil de sécurité adeptes des intrigues politiciennes, le premier convoi humanitaire russe est arrivé à Lougansk, sous les auspices du Comité international de la Croix- Rouge. Les préparatifs sont presque terminés pour l’envoi d’un second convoi. Un accord en la matière a été confirmé aujourd’hui au cours d’une conversation téléphonique entre le Ministre russe des affaires étrangères, M. Sergey Lavrov, et le Ministre ukrainien des affaires étrangères, M. Klimkin.

Il convient de se rappeler que le Conseil n’existe pas dans le but de lancer des conjectures et des accusations, mais de prendre des décisions susceptibles d’aider à résoudre les crises. Aujourd’hui, nous proposons que les membres du Conseil fassent la déclaration suivante à la presse :

« Les membres du Conseil de sécurité ont exprimé leur vive préoccupation face à la détérioration de la situation dans le sud-est de l’Ukraine, et ont appelé à un cessez-le-feu rapide et sans conditions. Les membres du Conseil de sécurité ont appelé à l’ouverture d’un dialogue politique sans exclusive sur l’Ukraine sur la base de la déclaration de Genève du 17 avril 2014 et de la déclaration commune de Berlin du 2 juillet 2014. À cet égard, le Conseil a pris note du rôle du groupe de contact et a demandé instamment à ce que le processus soit repris sans délai au sein du groupe de contact.

Les membres du Conseil de sécurité ont exhorté la communauté internationale à intensifier ses efforts pour fournir une aide humanitaire à la population des régions ukrainiennes de Donetsk et de Lougansk. »

Ici s’achève le projet de déclaration à la presse du Conseil de sécurité. Nous proposons que l’on vote sur cette déclaration ici et maintenant autour de cette table.

Le Président, Sir Mark Lyall Grant (Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord) (parle en anglais) : Je vais maintenant faire une déclaration en ma qualité de représentant du Royaume-Uni.

Je remercie M. Feltman de son exposé. Le Royaume-Uni est profondément alarmé par l’escalade de l’intervention militaire russe dans l’est de l’Ukraine au cours des dernières 72 heures. Les unités constituées des forces armées russes participent désormais directement aux combats contre les forces armées ukrainiennes à l’intérieur de l’Ukraine. Ces unités se composent de plus
de 1 000 soldats russes de l’armée régulière équipés de véhicules blindés, de pièces d’artillerie et de systèmes de défense anti-aérienne. Cette incursion constitue une violation flagrante du territoire ukrainien souverain par la Fédération de Russie. Il s’agit d’une infraction patente au droit international et à la Charte des Nations Unies.

Le fait que la Russie nie cette réalité s’inscrit dans la démarche malhonnête qu’elle adopte face à l’Ukraine depuis le début de cette crise. Nous nous souvenons tous que la Russie niait avoir déployé du personnel militaire supplémentaire sur le terrain en Crimée jusqu’à son annexion illégale par la force militaire. La Russie a nié avoir fourni un soutien militaire aux séparatistes. En réalité, la Russie transfère depuis plusieurs mois d’importantes quantités d’armes sophistiquées, y compris des chars, des véhicules blindés de transport de troupes et de l’artillerie, aux groupes séparatistes. À ce jour, l’arsenal des séparatistes comprend jusqu’à 100 chars de combat, 80 véhicules blindés de transport de troupes, 100 systèmes portatifs de défense aérienne, 500 armes antichar et plus de 100 pièces d’artillerie. La quasi-totalité de ces articles sont fournis directement par la Russie depuis le début du conflit.

Au cours des trois dernières semaines, cet appui s’est accru de manière notable, très certainement en raison du fait que l’Ukraine a réussi à reprendre des territoires aux séparatistes. Le 7 août, 50 véhicules, dont des chars, des véhicules blindés de transport de troupes et des lance-roquettes multiples de type BM-21 Grad, en provenance de la Russie, ont franchi la frontière ukrainienne à Chervono Partizansk. Le 15 août, un convoi de 23 véhicules blindés de transport de troupes a franchi la frontière non loin de l’endroit où le convoi humanitaire russe attendait le dédouanement. Le lendemain, un autre convoi de 84 véhicules militaires a franchi la frontière. Les preuves sont accablantes, et beaucoup d’entre elles nous parviennent de l’armée russe elle-même. Le 13 juillet, des véhicules blindés battant pavillon russe ont été photographiés par un militaire russe traversant la frontière ukrainienne à Izvarine, dans l’oblast de Donetsk. Le 31 juillet, un soldat russe a affiché des photographies de lui-même en train d’opérer du matériel militaire à l’intérieur de l’Ukraine. Dans ses photographies, on voyait notamment ce soldat à l’intérieur d’un système de lancement de missiles SA-11 – la même arme qui semble avoir été utilisée pour abattre le vol MH17 de la Malaysia Airlines.

La Russie a également nié avoir bombardé le territoire ukrainien. En fait, en cinq jours seulement, entre les 14 et 19 août, les forces armées ukrainiennes ont essuyé, à au moins 21 reprises, des coups de feu tirés depuis des positions situées à l’intérieur du territoire russe par des systèmes d’armes allant de mortiers lourds à des roquettes GRAD. Et aujourd’hui, nous voyons des preuves irréfutables indiquant que des forces russes régulières opèrent à l’intérieur de l’Ukraine. Depuis plusieurs mois, la Russie déploie des petits groupes de forces spéciales opérant sous le commandement des services centraux de renseignement des forces armées russes en appui aux séparatistes. Ces forces ont assuré la coordination des attaques et la facilitation des communications, ainsi que les transferts de matériel et de personnel. Leur présence est clairement signalée par leurs communications. En 24 heures seulement, du 29 au 30 juillet, il y a eu 45 cas séparés de transmissions radio militaires russes sécurisées émanant de l’intérieur du territoire ukrainien.

Aujourd’hui, l’OTAN a publié des images satellites, prises les 21 et le 23 août, d’unités d’artillerie automotrices russes à l’intérieur de l’Ukraine aux alentours de Krasnodon, dans la province de Lougansk. Lundi, 10 parachutistes russes appartenant au 331e régiment de la 98e division aéroportée de Svirsk ont été capturés près du village de Dzerkalne, à 20 kilomètres à l’intérieur du territoire ukrainien. Nous avons des images satellites qui confirment le déploiement de véhicules blindés russes, appuyés par l’artillerie au sud de Donetsk, à proximité de cet endroit. Aujourd’hui, un autre soldat russe, Petr Khokhlov, de la 9e brigade d’infanterie motorisée, a été capturé à Lougansk.

Il n’est tout simplement pas crédible pour la Russie et ceux qui agissent en son nom à Donetsk et Lougansk de continuer à affirmer que des membres des forces armées russes se trouvent en Ukraine par accident ou parce qu’ils y sont en vacances. Et la Russie ne peut pas non plus continuer à dire au monde entier, y compris au peuple russe, qu’il n’y a pas de soldats russes sur le territoire ukrainien. Le nombre croissant de victimes russes et de soldats russes capturés dément ces affirmations. La Russie ne peut plus prétendre qu’elle n’est pas directement partie à ce conflit. En fait, ce conflit aurait cessé depuis longtemps si les forces militaires russes ne soutenaient pas directement les séparatistes.

Le Président Poutine a dit que la Russie était prête à trouver une solution pacifique au conflit. Ces mots ont peu de valeur face à l’escalade manifeste de
l’engagement militaire russe dans l’est de l’Ukraine. La violation flagrante du droit international et de la Charte des Nations Unies n’est pas compatible avec les responsabilités qui incombent à la Russie en sa qualité de membre permanent du Conseil de sécurité. Nous appelons à nouveau la Russie à retirer immédiatement ses forces militaires de l’Ukraine, à mettre fin au flux d’armes qui alimentent les séparatistes et, au contraire, à œuvrer en faveur d’une solution politique à la crise.

Je reprends à présent mes fonctions de Président du Conseil de sécurité.

Je donne maintenant la parole au représentant de l’Ukraine.

M. Pavlichenko (Ukraine) (parle en anglais) : Je remercie M. Jeffrey Feltman pour l’exposé qu’il a fait plus tôt aujourd’hui.

Il y a déjà six mois de cela, le 28 février, le Conseil examinait pour la première fois la question de l’agression de la Russie contre l’Ukraine (voir S/PV.7123). Cette agression a commencé par l’occupation militaire et l’annexion d’une grande partie du territoire ukrainien, la République autonome de Crimée. Elle a ensuite pris la forme d’une guerre hybride contre l’Ukraine, du parrainage du terrorisme et de la fourniture d’armes et de mercenaires à des groupes armés illégaux dans la région orientale de notre État, le tout accompagné par des tirs d’artillerie intensifs depuis le territoire russe et de violations régulières de l’espace aérien ukrainien par des drones, des hélicoptères et des avions militaires. Cela a été suivi par la destruction en vol d’un avion civil par des groupes terroristes à l’aide de systèmes de missiles sol-air d’origine russe, destruction qui a provoqué la mort des 298 passagers et des membres de l’équipage. La ligne rouge suivante a été le passage illégal de la frontière de l’État ukrainien par un convoi « humanitaire » dépêché par la Russie sans l’autorisation du Gouvernement ukrainien et en violation des procédures et accords internationaux.

La Russie a positionné ses troupes le long de la frontière ukrainienne. À l’heure actuelle, plus de 45000 soldats, environ 160 chars, 1360 véhicules blindés, 390 systèmes d’artillerie, 150 missiles GRAD, 192 aéronefs militaires et 137 hélicoptères sont déployés à proximité de notre frontière.

La situation a désormais changé de manière dramatique. La Russie a lancé une invasion directe de l’Ukraine par ses forces armées régulières. Hier soir, deux convois militaires ont traversé la frontière ukrainienne et se sont dirigés vers le village de Telmanovo avec sept chars, un BMP-2 et un camion de soldats, et vers la ville de Novoazovsk avec cinq chars T-64, deux BMP-2, et deux camions de soldats. Après avoir bombardé les positions des forces ukrainiennes depuis le territoire russe et le district de Sjedove, les troupes russes se sont emparées de Novoazovsk.

Plus de 10 000 civils ont été retenus en otage par les envahisseurs russes. Les citoyens ukrainiens sont soumis à des pressions psychologiques et à des menaces de violence psychologique.

Le 24 août, deux groupes tactiques du bataillon des forces armées de la Fédération de Russie, appuyés par des unités de chars, ont traversé la frontière ukrainienne près du village de Berestovo, dans la région de Donetsk, à 500 mètres à l’intérieur de l’Ukraine. Apparemment, aucun des véhicules russes n’était immatriculé et sur certains véhicules de combat, deux bandes blanches avaient été peintes pour ressembler aux véhicules de combat ukrainiens déployés dans une zone d’opérations antiterroristes. Les soldats portaient des uniformes de combat russes sans insigne. Aujourd’hui, ces unités de combat occupent plusieurs villages de la région de Donetsk, dont Pobeda, Glinka, Amvrosiivka, Telmanovo, Granitny et Sontseve, et érigent des places fortifiées.

Le 25 août, les forces armées ukrainiennes ont arrêté près de la ville de Dzerkalne 10 soldats du 331e régiment de la 98e division aéroportée de Svirsk des forces armées de la Fédération de Russie. Leurs identités ont toutes été révélées. Nous doutons sérieusement que des troupes russes lourdement armées aient pu s’égarer et pénétrer à 25 kilomètres à l’intérieur de l’Ukraine. Nous avons de nombreuses preuves, y compris des vidéos des troupes et des soldats russes actuellement en détention, et des véhicules blindés et des chars russes, avec toute la documentation prouvant qu’ils appartiennent à l’armée russe. Ceci ne laisse absolument aucun doute quant à l’invasion russe directe de l’Ukraine.

Nous considérons que la Fédération de Russie est entièrement responsable de la mort quotidienne de civils et de soldats ukrainiens, ainsi que de la détérioration de la situation humanitaire dans le Donbass. Nous exigeons qu’elle retire immédiatement tous ses soldats du territoire ukrainien afin d’épargner la vie tant d’Ukrainiens que de Russes. Nous exigeons que la Fédération de Russie mette la frontière russo-ukrainienne sous le contrôle effectif de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, ce qui mettrait fin à l’entrée illégale de matériel militaire, d’armes et de militants en Ukraine. Nous exigeons que la Russie libère tous les Ukrainiens retenus en otage. Nous sommes ouverts à toutes les initiatives diplomatiques et avons participé à toutes les négociations. Le Président ukrainien a proposé son plan de paix pour désamorcer la situation, plan que la Russie a délibérément sapé.

Tout en démontrant qu’il était totalement prêt à des négociations de paix avec la Russie lors de la réunion tenue à Minsk, le Président Poroshenko a clairement fait savoir que la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine ainsi que les aspirations européennes du peuple ukrainien ne sont pas négociables. Compte tenu de l’agression militaire russe manifeste, l’Ukraine se réserve le droit d’agir en vertu de l’Article 51 de la Charte des Nations Unies, qui garantit le droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l’objet d’une agression armée. Nous demandons à la communauté internationale de fournir une assistance efficace à l’Ukraine afin qu’elle puisse résister à l’agression russe.

La communauté internationale va-t-elle continuer d’être le témoin silencieux des violations flagrantes des principes fondamentaux du droit international actuellement commises ? L’ensemble du monde démocratique est attaqué et l’ordre mondial même est détruit. Ou va-t-elle enfin parler d’une même voix et agir ? Il ne s’agit pas d’un choix tactique mais d’un choix essentiel : le monde est menacé par une puissance nucléaire militaire qui fait fi de principes fondamentaux et est avide de pouvoir absolu. Combien d’autres lignes rouges devront-elles être franchies avant que des mesures soient prises face à cette attaque ?

Nous demandons au Conseil d’assumer la responsabilité que lui confie la Charte et de prendre des mesures urgentes pour mettre fin à cette agression contre un État Membre souverain de l’ONU.

Le Président (parle en anglais) : La représentante de la Lituanie a demandé la parole pour faire une autre déclaration.

Mme Murmokaitė (Lituanie) (parle en anglais) : Nous prenons acte de la demande de la Fédération russe. Je suis également tout à fait consciente de certaines étiquettes accolées à ma délégation. Malgré cela, étant donné que cela a été fait à diverses occasions – nous avons notamment été catalogués comme proposant des « amendements tueurs » et autres appellations de la
sorte – nous accueillons avec satisfaction la rédaction de la déclaration à laquelle le représentant de la Fédération de Russie a fait référence. Néanmoins, nous souhaiterions avoir un peu plus de temps pour examiner sérieusement ce texte. Nous estimons que certains aspects ne sont pas pris en compte dans ce texte.

Pour notre part, nous sommes parfaitement au fait de l’information selon laquelle des séparatistes ont empêché la fourniture de l’ aide humanitaire aux populations ; celle offerte par le Gouvernement ukrainien. Nous estimons qu’il serait souhaitable qu’il soit demandé aux séparatistes, dans ce texte, de ne pas entraver la fourniture de l’aide humanitaire, mais nous pourrions aussi proposer certains autres amendements.

Le Président (parle en anglais) : Le représentant de la Fédération de Russie a demandé la parole pour faire une nouvelle déclaration.

M. Churkin (Fédération de Russie) (parle en russe) : Je voudrais adresser quelques mots à nos collègues ukrainiens.

Premièrement, comme il l’a fait dans une déclaration antérieure, faisant allusion à la Russie, le représentant ukrainien – comme vient de le faire la représentante des États-Unis – a de nouveau parlé du vol de la Malaysia Airlines. Aurait-il l’obligeance de dire au Conseil pourquoi l’Ukraine n’a pas rendu publique la transcription des enregistrements des conversations des contrôleurs aériens ? Pourrait-il au moins nous dire si elle a été transmise aux autorités néerlandaises ?

Deuxièmement, je voudrais faire une observation concernant davantage le fond de la question. Je suis conscient que Washington ou Bruxelles l’ignorent peut-être car, pour eux, peu importe qu’il s’agisse de l’Ukraine ou d’un pays d’Amérique latine ou d’Afrique. J’essaie cependant de comprendre. À Kiev, lorsqu’ils ont annoncé le prétendu plan de paix de M. Poroshenko, indiquant que les insurgés devaient capituler, les politiques n’ont-ils pas compris le type de conséquences qu’il pourrait y avoir ? Je ne le comprends pas. Ce que je veux dire, c’est que nous connaissons notre région. Nous savons à quel point nos liens sont étroits. Cette mesure visait clairement l’escalade et un désastre, auxquels nous assistons. Ne pouvaient-ils pas comprendre que les insurgés ne pouvaient pas simplement déposer les armes, renoncer, se rendre en Russie et voir des chars ukrainiens entrer à Lougansk et Donetsk ?

Je ne comprends pas. Si quelqu’un leur a conseillé de le faire, alors, soit cette personne n’a pas compris ce qu’elle faisait ou tentait simplement de provoquer, de déstabiliser totalement la situation en Ukraine et de rendre la vie difficile pour la Russie. Si le représentant ukrainien pouvait fournir une explication à ce sujet, je lui en serais très reconnaissant.

Le Président (parle en anglais) : Le représentant de l’Ukraine a demandé la parole pour faire une autre déclaration. Je la lui donne.

M. Pavlichenko (Ukraine) (parle en russe) : Je tiens à remercier le représentant de la Fédération de Russie pour ses questions. S’agissant de la première, je peux l’assurer que l’Ukraine participe activement aux travaux de la commission intergouvernementale chargée d’enquêter sur cet incident. Mon gouvernement coopère de bonne foi avec nos partenaires internationaux. Je crois qu’un rapport sur les travaux de cette commission et les premières conclusions de l’enquête devrait être prochainement publié.

S’agissant de la deuxième question posée par le représentant de la Russie, je tiens à dire que notre Président, y compris lors de sa rencontre avec le Président russe à Minsk, a clairement dit que nous étions prêts à poursuivre le dialogue pour trouver une solution à la situation dans l’est de l’Ukraine. Il a été clairement dit que nous étions prêts à prendre part à des négociations sur toute une série de questions. La seule question qui ne peut faire l’objet de discussions est celle de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine et de son intégration européenne, que notre peuple souhaite et a décidé.

Le Président (parle en anglais) : Il n’y a pas d’autre orateur inscrit sur la liste. Le Conseil de sécurité a ainsi achevé la phase actuelle de l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.

La séance est levée à 15 h 30.