D’ordre de mon gouvernement, je souhaite vous faire part des observations qu’inspire à la République arabe syrienne le quarante-huitième rapport du Secrétaire général sur l’application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014), 2258 (2015), 2332 (2016) et 2393 (2017) du Conseil de sécurité (S/2018/138).

Le Gouvernement syrien souligne à nouveau les préoccupations dont il avait fait part dans ses lettres, à la suite des rapports du Secrétaire général sur l’application des résolutions susmentionnées du Conseil. Ce rapport, comme les précédents, affermit le Gouvernement dans sa conviction que les auteurs ne répondent pas aux exigences minimales en matière de compétence et de professionnalisme et servent de manière flagrante les objectifs d’États occidentaux, qui mettent à profit ces rapports pour ternir le blason du Gouvernement syrien. Ce dernier souligne que le rapport n’a aucun fondement juridique, du fait qu’il n’est pas conforme aux principes humanitaires de neutralité et d’impartialité ; de respect de la souveraineté, de l’unité et de l’intégrité territoriale de la Syrie ; et de fourniture d’une aide humanitaire à tous les Syriens qui en ont besoin.

On trouvera ci-après certaines observations de la part du Gouvernement au sujet du présent rapport.

• Le Gouvernement réaffirme son attachement de longue date aux principes du droit international et du droit international humanitaire, ainsi qu’au droit interne et à la Constitution syrienne, en vertu desquels l’État a pour mission d’assurer la sécurité et la sûreté de tous les citoyens syriens et de rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. Le Gouvernement fait observer qu’il continue de s’acquitter de ses responsabilités et de fournir un soutien et des services de base aux Syriens, quelles que soient leurs affiliations, dans toutes les régions du pays, une vérité bien établie, que les auteurs ne jugent pas utile de mentionner dans le rapport.

• Le Gouvernement rejette la façon politisée dont le rapport est établi, du fait que les auteurs n’ont de cesse de critiquer le Gouvernement et de répéter à l’envi les mêmes informations infondées.

• Le Gouvernement rejette les données erronées figurant dans le rapport ainsi que les statistiques inexactes provenant de sources non fiables et tendancieuses, comme les rapports du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, qui se fondent essentiellement sur de faux témoignages, sur des allégations portées par des membres de groupes terroristes armés et leurs proches et sur des témoignages de membres de l’organisation terroriste des Casques blancs. Par ailleurs, les auteurs conservent le mutisme le plus total en ce qui concerne les destructions considérables et les pertes en vies humaines et sur le plan matériel causées par les opérations de la coalition internationale et les milices qui lui sont alliées à Raqqa et à Deïr el-Zor.

• Le Gouvernement regrette les tentatives faites par les auteurs de détourner l’attention de la communauté internationale des conséquences catastrophiques de la décision prise par des États et d’autres donateurs de réduire délibérément le montant de l’aide accordée à l’intervention humanitaire en Syrie et notamment de la soumettre à des conditions politiques qui sont incompatibles avec les principes de l’action humanitaire. Les auteurs ont choisi sciemment d’évoquer brièvement cette question au paragraphe 33, alors qu’elle a de graves conséquences pour la vie et les moyens de subsistance des Syriens et l’aide qu’ils reçoivent.

• Le Gouvernement souligne que la dégradation récente de la situation dans la Ghouta orientale (province de Rif-Damas) est due au fait que les groupes terroristes positionnés dans le secteur ont mené des attaques contre des zones résidentielles et des points de contrôle militaires et effectué plus de 2 180 tirs de missile et d’obus de mortier contre Damas, qui ont occasionné au moins 66 morts et 474 blessés parmi les civils. Les forces gouvernementales se sont abstenues de riposter face à ces actes d’agression du fait de la mission que leur confère la Constitution de veiller à la sécurité et à la sûreté des civils. Le Gouvernement s’étonne que les auteurs portent une attention excessive à la situation dans la Ghouta orientale au détriment d’autres zones qui connaissent une situation humanitaire tout aussi difficile, comme dans les localités de Fouaa et de Kefraya, assiégées par des groupes terroristes armés, ou encore des secteurs qui accueillent des déplacés. Les auteurs se comportent comme si la ville de Raqqa et d’autres, qui ont été détruites par la coalition internationale dirigée par les États-Unis d’Amérique, n’existaient pas.

• Le Gouvernement dénonce le fait que les auteurs persistent à utiliser l’expression « zones assiégées » pour décrire la situation dans la Ghouta orientale alors que, sous la pression d’États influents membres ou non membres du Conseil de sécurité, ils ferment délibérément les yeux sur le sort infligé aux habitants de la Ghouta orientale, soumis au diktat de divers groupes terroristes armés contrôlant la zone, qui exploitent les civils et se servent d’eux comme boucliers humains. De même, ces groupes ont fait mainmise sur l’aide humanitaire, qu’ils ont distribuée à leurs partisans ou vendue à des prix exorbitants à des personnes dans le besoin, ce qui avait également été le cas dans les quartiers est d’Alep.

• Le Gouvernement regrette que les auteurs passent sous silence le sort réservé à des milliers de personnes détenues dans les prisons de la Ghouta orientale et d’autres secteurs investis par des groupes terroristes, parmi lesquelles se trouvent des femmes, des enfants et des personnes âgées, qui ont été enlevées à leur domicile ou à leur lieu de travail et soumises aux pires formes de torture. Les auteurs n’ont pas réclamé l’évacuation de ces personnes, afin qu’elles puissent recevoir l’attention médicale qu’elles méritent.

• Le Gouvernement souligne que les affirmations faites par les auteurs du rapport et les pays occidentaux qui les influencent, d’après lesquelles il assiégerait la Ghouta, ont été systématiquement réfutées, les dernières en date concernant une « aide » fournie par le régime saoudien à la Ghouta orientale en février. Cela prouve d’abord que la Ghouta orientale n’est pas soumise à un siège et ensuite qu’elle est accessible, le volume d’armes et de munitions fourni aux groupes terroristes dans la Ghouta par les régimes qui les soutiennent n’ayant aucunement diminué mais, au contraire, augmenté. Le Gouvernement souligne que la fourniture de l’aide susmentionnée par le régime saoudien constitue une violation des résolutions du Conseil de sécurité, y compris les résolutions 2139 (2014) et 2393 (2017), dans lesquelles ce dernier a souligné qu’il importait de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de la République arabe syrienne et d’informer son Gouvernement de la nature de l’aide fournie depuis l’étranger. De plus, comme dans le passé, « l’aide » fournie par l’Arabie saoudite est en réalité un moyen d’acheminer un appui direct aux membres des groupes terroristes armés, car elle comprend des armes, des munitions, des missiles et des obus de mortier dont les terroristes se servent dans la Ghouta orientale pour tirer sur Damas.

• Le Gouvernement regrette que les auteurs du rapport, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires et d’autres n’aient pas évoqué, voire souligné les effets de l’attaque turque barbare contre Afrin, en Syrie, qui a fait un grand nombre de morts et de blessés, tout particulièrement parmi les enfants et les femmes, endommagé des biens publics et privés, entraîné le déplacement d’un grand nombre d’habitants de la ville et occasionné une pénurie grave de produits humanitaires de base. À ce propos, la démarche adoptée par les auteurs et leur partialité à l’égard du régime turc montrent une fois encore qu’ils manquent de professionnalisme et ne sont pas en mesure d’évaluer la réalité de la situation humanitaire en Syrie de manière impartiale et objective, comme en témoignent les informations au paragraphe 8 « faisant état de morts et de blessés parmi les civils, ainsi que de déplacements de population ». Cette démarche prouve également que ce n’est pas l’absence d’accès qui empêche l’ONU de fournir une aide humanitaire en Syrie mais celle d’une administration dotée du professionnalisme et de l’objectivité nécessaires face à la situation humanitaire.

• Le Gouvernement dénonce le comportement de l’armée turque qui a visé, au cours de son attaque barbare contre Afrin, des convois humanitaires qui acheminaient de l’aide aux habitants de la ville ainsi que l’absence de fourniture de garanties au Comité international de la Croix-Rouge, qui travaillait en coopération avec le Croissant-Rouge arabe syrien, contre les attaques ciblant les convois d’aide, menées par les combattants armés affiliés à la Turquie ou par son armée.

• Le Gouvernement souligne que l’acheminement d’une aide humanitaire par l’ONU à des millions de personnes qui sont dans le besoin dans le pays n’aurait pas pu se produire sans l’assistance que l’État et ses institutions ont apportée, conformément au paragraphe 22 du rapport, d’après lequel le Gouvernement a fourni l’aide nécessaire aux organismes des Nations Unies. Cela infirme toutes les accusations que les auteurs ont cherché à porter contre la Syrie dans leur rapport, afin d’accuser cette dernière de faillir à ses responsabilités et de bloquer l’accès.

• Les auteurs du rapport continuent de commettre l’énorme erreur, sur le plan juridique, de décrire les groupes terroristes armés en Syrie comme des groupes d’opposition armés non étatiques, ce dont ils portent l’entière responsabilité sur les plans politique et moral, ainsi qu’au regard du droit international. Les forces gouvernementales visent au cours des opérations menées dans la province de Hama et d’Edleb les camps des organisations terroristes Front el-Nosra et Daech ainsi que les milices d’autres entités combattant à leurs côtés.

• Les hauts fonctionnaires du Bureau de la coordination des affaires humanitaires n’ont pas réussi à faire respecter les normes de transparence et à fournir les garanties nécessaires pour convaincre la communauté internationale que l’aide acheminée à travers la frontière parvenait effectivement aux personnes à qui elle était destinée, plutôt qu’à des groupes armés. À cet égard, le Gouvernement regrette que le Secrétariat n’ait pas donné suite à la demande de clarification entourant le flou de certaines notions figurant dans les rapports, comme au paragraphe 31 du présent rapport, concernant les soi-disant partenaires de l’Organisation et sociétés tierces indépendantes engagées par elle pour assurer une vérification indépendante de l’aide arrivant aux entrepôts et aux bénéficiaires. Ces notions et références sont inadmissibles du fait qu’aucun haut fonctionnaire n’en a touché mot au Gouvernement, la principale partie concernée, et qu’elles vont à l’encontre de la résolution 2165 (2014) du Conseil de sécurité. Ceux qui ont diffusé ces notions doivent en porter l’entière responsabilité à l’échelon international. Le Gouvernement exige une fois de plus que l’ONU lui communique les noms et les dossiers des parties censées agir comme partenaires des Nations Unies. Il attend également avec intérêt les informations et les éclaircissements que le Secrétariat a été prié de fournir conformément à la résolution 2393 (2017).

• Le Gouvernement rejette catégoriquement le mutisme que continuent d’observer les auteurs du rapport concernant les conséquences catastrophiques des opérations menées par la soi-disant coalition internationale et ses membres, qui ont fait des centaines de morts parmi les civils et les forces syriennes combattant Daech ainsi que des destructions considérables dans la ville de Raqqa. Le Gouvernement rejette en particulier le silence des auteurs face aux dégâts écologiques causés par la coalition à la suite de l’emploi d’armes interdites au plan international contre des civils en Syrie et face à d’autres violations du droit international, du droit international humanitaire et des droits de l’homme, qui constituent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. Le Gouvernement demande, une fois de plus, la dissolution de cette coalition illégitime et la cessation des crimes commis contre les Syriens.

• Le Gouvernement regrette qu’en dépit de ses demandes répétées et celles de certains membres du Conseil de sécurité, les auteurs du rapport n’aient pas évoqué les souffrances endurées par les Syriens sur les plans humanitaire et économique, du fait des mesures coercitives unilatérales imposées au pays par les États-Unis et l’Union européenne, entre autres. Ces mesures ont des conséquences néfastes, notamment pour le secteur de la santé, et portent atteinte aux activités des organismes des Nations Unies et des organisations non gouvernementales internationales opérant en Syrie, qui ont dû mettre un terme à un certain nombre de projets vitaux permettant de pourvoir aux besoins des Syriens.

• Le Gouvernement réaffirme que les fonctionnaires des Nations Unies travaillant en Syrie ne doivent coopérer avec aucune milice illégitime, entité séparatiste, ni aucun « conseil local » illégitime ou association civile non autorisée. Les restrictions imposées à l’ONU dans la province de Hassaké sont en conformité avec les objectifs poursuivis par les milices séparatistes présentes dans certaines parties de la province, qui y ont imposé des conditions à la fourniture de l’assistance de l’Organisation. Par ailleurs, les institutions officielles syriennes ont apporté toute l’assistance possible à l’ONU.

• Le Gouvernement réaffirme que les habitants du camp de Roukban souffrent du fait de l’occupation de ce secteur par les États-Unis et de leurs supplétifs, qui empêchent les autorités syriennes d’en reprendre le contrôle. Le Gouvernement demande qu’il soit mis fin à la présence des États-Unis sur le sol syrien et aux crimes qu’ils y commettent.

• La référence au paragraphe 7 du rapport à une attaque contre un hôpital de Médecins Sans Frontières à Saraqeb (province d’Edleb) est absurde car il n’existe aucun hôpital de ce nom. Le Gouvernement n’a pas autorisé cette organisation à travailler ou à mettre en place des hôpitaux en Syrie et n’a pas accordé de visas d’entrée à ses membres, qui sont donc entrés illégalement en Syrie, tout comme ceux de groupes terroristes armés et les combattants terroristes étrangers. Il est donc futile de parler de « l’hôpital » ou du « dispensaire » de cette organisation dont les autorités compétentes n’ont pas connaissance et dont la création n’a pas été autorisée.

• Le Gouvernement souligne qu’il a prévenu l’ONU et la communauté internationale que les groupes terroristes armés, en particulier ceux déployés dans la Ghouta orientale, se préparaient à employer des armes chimiques afin d’accuser ensuite le Gouvernement de l’avoir fait. Le Gouvernement réaffirme ne pas posséder de telles armes et souligne qu’il n’en a pas utilisées et ne compte pas le faire à l’avenir.

• Le Gouvernement note que le nombre d’organisations non gouvernementales internationales autorisées à travailler en Syrie s’élève désormais à 27, et non 23, comme indiqué dans le rapport.

• Le Gouvernement rappelle une fois encore sa position concernant la Cour pénale internationale et les appels lancés pour qu’elle soit saisie de la question syrienne. Non seulement cette Cour n’est pas compétente pour connaître de la situation en Syrie, mais elle a perdu toute crédibilité et est désormais un instrument politique utilisé par certains pour s’en prendre à des États à des fins politiques sordides, qui n’ont rien à voir avec les exigences de la justice. Le Gouvernement réaffirme également ce qu’il a indiqué dans sa lettre au Secrétaire général portant sur les graves lacunes juridiques que présente la résolution relative au mécanisme international d’investigation et de poursuite des responsables (A/71/799).

• Le Gouvernement réaffirme sa position de longue date, à savoir que pour régler la crise, il faudrait une solution politique reposant sur un dialogue intersyrien conduit par les Syriens eux-mêmes, sans ingérence extérieure ni conditions préalables. Il rappelle que, pour aboutir, toute démarche politique et toute amélioration sensible de la situation humanitaire dépendront avant tout de l’instauration d’un climat propre à susciter un engagement international et régional sérieux et non politisé en faveur de la lutte contre le terrorisme.

• Le Gouvernement souligne que ces rapports doivent porter sur la situation humanitaire en Syrie et non pas aborder la question d’une solution politique.

• Le Gouvernement demande une fois encore au Conseil de sécurité d’amener les États qui soutiennent et financent les groupes terroristes armés à s’abstenir de le faire, en application des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité sur la lutte contre le terrorisme et le financement du terrorisme, tout particulièrement les résolutions 2170 (2014), 2178 (2014), 2199 (2015) et 2253 (2015). Le respect de ces résolutions et l’application de leurs dispositions sont la clef du règlement de la situation en Syrie et de l’acheminement de toute l’aide humanitaire requise aux personnes qui en ont besoin dans le pays.

Je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire distribuer le texte de la présente lettre comme document du Conseil de sécurité.

Référence : Onu S/2018/162