La séance est ouverte à 10 h 10.

La Présidente, Mme Craft/M. Barkin (parle en anglais) : Conformément à l’article 37 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite le représentant de la République arabe syrienne à participer à la présente séance.

Conformément à l’article 39 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite les personnalités suivantes appelées à présenter un exposé à participer à la présente séance : M. Geir Pedersen, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, et Mme Rajaa Altalli, Cofondatrice et Codirectrice du Centre pour la société civile et la démocratie.

M. Pedersen participe à la séance d’aujourd’hui par visioconférence depuis Genève.

Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.

Je donne maintenant la parole à M. Pedersen.

M. Pedersen, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie (parle en anglais) : Il y a un an, beaucoup pensaient que le conflit syrien était sur le point de se terminer. Pourtant, au cours des 12 derniers mois, les violences se sont poursuivies à un rythme soutenu, ponctuées par des escalades qui se poursuivent à ce jour dans de nombreuses régions de la Syrie, comme le nord-ouest, le nord-est et le sud. Par ailleurs, des groupes terroristes interdits n’ont pas encore été vaincus et représentent toujours une menace grave à la sécurité. Tout cela nous rappelle constamment et tragiquement la nécessité, plus pressante que jamais, de mettre en place un processus politique global, tel que le Conseil de sécurité l’a demandé dans sa résolution 2254 (2015). Aujourd’hui, je voudrais tout d’abord communiquer au Conseil des informations actualisées sur l’un des aspects de ce processus - la Commission constitutionnelle.

Le 25 novembre, l’organe restreint de la Commission constitutionnelle dirigée et contrôlée par les Syriens s’est réuni pour sa deuxième session. Avant d’arriver à Genève, j’avais demandé à chaque Coprésident de proposer un ordre du jour pour la deuxième session, conformément au mandat et aux principales règles de fonctionnement. Le 21 novembre, le Coprésident désigné par la Commission syrienne de négociation, qui représente l’opposition, m’a envoyé une proposition de programme de travail composé de 10 rubriques constitutionnelles, ainsi qu’un ordre du jour portant essentiellement sur le préambule et les principes fondamentaux de la Constitution. Le 25 novembre, le Coprésident désigné par le Gouvernement syrien a proposé un ordre du jour portant sur les piliers nationaux, c’est-à-dire les piliers nationaux relatifs aux questions qui préoccupent le peuple syrien, tout en soulignant que l’on ne pouvait pas débattre des questions constitutionnelles avant de discuter de ces piliers nationaux. Pour sa part, le Coprésident de la Commission syrienne de négociation a indiqué qu’on pouvait discuter des piliers nationaux, mais à condition que cela se fasse conformément au mandat et aux principales règles de fonctionnement ou dans le cadre d’un ordre du jour portant sur les principes constitutionnels fondamentaux.

Du 25 au 29 novembre, conformément à mon mandat et au principe d’un processus dirigé et contrôlé par les Syriens, je me suis efforcé de faciliter un consensus entre les Coprésidents et à rapprocher leurs points de vue. Nous avons eu des discussions sérieuses à cet égard. Différentes formules, qui auraient permis aux deux parties de s’asseoir à la table et de discuter des questions d’intérêt commun dans le cadre du mandat de la Commission constitutionnelle, ont été proposées. Mais à la fin de la semaine, il était devenu clair qu’il ne serait pas possible de parvenir à un consensus et d’organiser la réunion de l’organe restreint. Durant cette période de suspension de séances, je poursuis mes efforts pour faciliter un accord sur un ordre du jour pour la prochaine session de l’organe restreint. À cette fin, j’espère que je pourrais bientôt avoir des consultations directes avec le Gouvernement syrien à Damas, ainsi qu’avec la Commission syrienne de négociation.

Mon équipe reste aussi en contact avec le tiers médian, à savoir les membres de la délégation de la société civile, et je suis disposé à les aider comme je l’ai indiqué dans mon dernier exposé au Conseil (voir S/PV.8674). En outre, je me suis entretenu avec les parties prenantes internationales sur cette question et sur tous les autres autres aspects du processus. Au cours du mois écoulé, j’ai rencontré les Ministres des affaires étrangères de la Russie, de la Turquie, de l’Italie, de la Jordanie et de l’Algérie, ainsi que de hauts responsables des États-Unis, de la France, de l’Iran et de l’Allemagne, et ils ont tous exprimé leur appui à mes efforts de médiation. J’espère qu’il sera possible de parvenir à un accord rapidement sur un ordre du jour, conformément au mandat et aux principales règles de fonctionnement de la Commission constitutionnelle. En l’état actuel des choses et en l’absence d’un ordre du jour faisant l’objet
d’un consensus, je ne vois aucune raison de convoquer une autre session de l’organe restreint.

La dernière fois que j’ai présenté un exposé au Conseil, nous venions juste de conclure une session d’ouverture de la Commission constitutionnelle couronnée de succès. De toute évidence, cette deuxième session était très différente pour ce qui est du fond comme du ton, mais d’une manière générale, il y a des désaccords sur l’ordre du jour dans le cadre de tout processus politique. Je pense toutefois qu’il y a plusieurs enseignements que nous pouvons tirer de l’expérience du deuxième cycle. Je voudrais en souligner trois.

Premièrement, la Commission est et restera fragile. Les progrès dépendent du Gouvernement syrien et de la Commission syrienne de négociation, les deux parties qui, grâce à leur accord, ont rendu possible la création de la Commission constitutionnelle, et ont autorisé leurs représentants à se pencher de façon professionnelle sur les questions constitutionnelles, sans se dissocier du travail de ceux qu’ils ont désignés. Il faut encourager la Commission et lui apporter un appui sincère si l’on veut qu’elle réussisse. C’est une responsabilité qui incombe aux parties syriennes. Les parties prenantes internationales ont aussi un rôle d’appui à jouer. Je sais que je peux compter sur l’appui du Conseil à cet égard.

Deuxièmement, toute proposition d’ordre du jour doit être conforme au mandat et aux principales règles de fonctionnement adoptés de commun accord par le Gouvernement et l’opposition. Cela veut dire que toutes les questions peuvent être examinées par la Commission, sans conditions préalables et sans qu’il faille s’accorder sur telle ou telle question pour en examiner telle ou telle autre. Cela veut dire aussi que ces questions doivent relever d’une rubrique constitutionnelle et s’inscrire dans le cadre d’une rubrique constitutionnelle. La Commission constitutionnelle est chargée, sur la base d’un accord, d’élaborer et de rédiger un projet de réforme constitutionnelle en tant que contribution à un règlement politique. Pour ce faire, elle doit se concentrer sur son mandat constitutionnel.

Troisièmement, le deuxième cycle ne fait que souligner la nécessité d’un processus politique plus large et plus complet. Le Gouvernement et l’opposition l’ont réaffirmé lorsqu’ils sont convenus dans le mandat et les principales règles de fonctionnement de la nécessité d’engager un processus politique au sens large, ayant pour objectif d’instaurer la confiance et d’appliquer la résolution 2254 (2015). En effet, j’estime que, bien qu’elle ne puisse pas régler la crise, la Commission constitutionnelle peut encourager la confiance entre les parties de sorte à ouvrir la voie à un processus au sens large. Un tel processus peut également avoir une incidence positive sur les travaux portant sur les questions constitutionnelles.

Je considère qu’un véritable processus politique approfondi permettra de prendre des mesures tangibles, d’accomplir des progrès en matière de libération des détenus et des personnes enlevées, et de faire la lumière sur le sort des disparus. Je suis très frustré de constater qu’il n’y a pas eu de progrès significatifs à cet égard. Mon adjoint et moi-même continuerons de collaborer directement avec les parties syriennes, ainsi qu’avec tous les acteurs concernés. Nous restons également déterminés à contribuer activement aux efforts consentis par le groupe de travail qui a été créé pour traiter de cette question. Dans ce contexte, j’ai rencontré la semaine dernière des hauts responsables russes, turcs et iraniens à Nour-Soultan, et, parallèlement à des discussions sur d’autres questions, j’ai souligné la nécessité de dépasser le stade des échanges individuels et de libérer un grand nombre d’enfants, de femmes et de malades.

La désescalade de la violence et un cessez-le-feu à l’échelle nationale doivent sous-tendre un processus politique plus large. Le nord-ouest de la Syrie a été le théâtre d’une escalade de la violence très inquiétante ces derniers jours. La Sous-Secrétaire générale Mueller a fait un exposé circonstancié au Conseil hier (voir S/PV.8694) sur les terribles souffrances endurées par les civils dans cette région. Une offensive militaire de grande envergure aurait sur le plan humanitaire des conséquences catastrophiques que ne peuvent tout simplement pas supporter les 3 millions de personnes vivant dans le nord-ouest de la Syrie. Toutes les parties doivent de toute urgence désamorcer la situation.

Les civils continuent également de souffrir dans le nord-est de la Syrie, où la situation en matière de sécurité demeure instable, bien qu’elle soit plus calme par rapport aux jours et aux semaines qui ont suivi le début de l’intervention turque. Il est essentiel que les différents accords de cessez-le-feu négociés entre les acteurs sur place soient respectés et conduisent à une désescalade pérenne de la violence. Les conditions de sécurité dans le sud de la Syrie restent également instables, et nous devons y remédier.

Il est aussi impératif de lutter contre les groupes terroristes inscrits sur la liste du Conseil de sécurité en adoptant une approche coopérative, en
garantissant la protection des civils et en respectant le droit international humanitaire et le droit des droits de l’homme. Comme toujours, si les conditions de sécurité constituent la menace la plus dévastatrice, les Syriens sont également confrontés à des difficultés économiques croissantes, notamment du fait des pénuries de produits essentiels et de la pauvreté endémique. Le processus plus large devra en définitive permettre de régler aussi cette question. Ce processus devra respecter et, à terme, rétablir la souveraineté, l’unité, l’intégrité territoriale et l’indépendance de la Syrie, et aboutir à une réconciliation durable, réelle et authentique.

Le processus devra également être sans exclusive. Nous continuons de consulter le Comité consultatif des femmes syriennes afin de recueillir les préoccupations, les priorités et les vues des Syriennes au sujet d’une solution politique durable et inclusive. La société civile syrienne doit être pleinement associée à tout processus plus large. En fin de compte, le processus doit contribuer à créer un environnement sûr, calme et neutre qui permette le retour librement consenti et dans la dignité des réfugiés dans leur pays d’origine ou dans le lieu de leur choix ; un environnement dans lequel une nouvelle Constitution, soumise à l’approbation du peuple, sera véritablement appliquée dans la pratique par les institutions ; et un environnement dans lequel peuvent se tenir des élections ouvertes à tous, libres et régulières, auxquelles participe la diaspora, sous la supervision de l’ONU, conformément à la résolution 2254 (2015).

Nombre de ces questions ont trait à l’élaboration de la Constitution, et certaines pourraient être examinées sous une rubrique constitutionnelle, mais il est peu probable qu’un processus d’élaboration de la Constitution puisse permettre de les résoudre d’une manière qui réponde aux préoccupations urgentes et légitimes du peuple syrien. Je reste convaincu qu’une approche par étapes pourrait permettre de réaliser des progrès dans la pratique – des étapes qui renforcent la confiance entre les Syriens et entre la Syrie et la communauté internationale et qui soient franchies par les deux parties. Je continue d’insister sur ce point dans tous mes échanges avec les parties syriennes et les acteurs internationaux. Je continue d’offrir mes bons offices à cet égard et d’appuyer la convocation d’un nouveau format international pour rassembler la volonté des principaux acteurs.

Le présent exposé est le dernier de ma première année au poste d’Envoyé spécial. Dans mon premier exposé au Conseil (voir S/PV.8475), j’avais dit que mes priorités étaient les suivantes : un dialogue soutenu avec le Gouvernement syrien et l’opposition, la formation de la Commission constitutionnelle pour faire avancer la situation, un dialogue plus large avec la société civile, des mesures concernant les détenus, les personnes enlevées et les disparus, et des discussions internationales en faveur d’une solution politique. J’ai toujours les mêmes priorités, mais le moment est venu de les actualiser.

La Commission a été formée, mais elle doit travailler avec diligence et sans interruption pour produire des résultats et progresser dans ses travaux. Je me félicite du dialogue ouvert et direct engagé avec les deux parties syriennes, mais si nous voulons passer à la phase suivante, nous devons traiter de tout l’éventail de questions. Nous devons permettre une désescalade qui mène à un cessez-le-feu à l’échelle nationale, ainsi qu’une approche coopérative et légale pour lutter contre les groupes terroristes illégaux. Dans le cadre du dialogue, nous devons prendre des mesures concrètes sur la question des détenus, des personnes enlevées et des personnes disparues.

Je suis convaincu que tout cela pourrait profiter à l’ensemble des Syriens au moyen d’une approche progressive, et qu’un élément clef de cette approche est l’approfondissement des discussions internationales et la création d’un nouveau format international en vue de la consolidation du processus. Nous savons que rien de tout cela ne sera facile, et je continuerai à compter sur le plein engagement des parties syriennes et le plein appui du Conseil.

La Présidente (parle en anglais) : Je remercie M. Pedersen de son exposé.

Je donne maintenant la parole à Mme Altalli.

Mme Altalli, Cofondatrice et Codirectrice du Centre pour la société civile et la démocratie (parle en anglais) : Lorsque j’avais 12 ans, mon père, Jries Altalli, un enseignant à la retraite qui subvenait seul aux besoins de sa famille, a été enlevé à Damas par les services de la sécurité politique. Il a été torturé pendant une année, puis transféré à la prison d’Adra et ensuite à la tristement célèbre prison de Palmyre. Après neuf années d’emprisonnement, mon père a été libéré le 16 novembre 2000, à la suite d’une grâce présidentielle.

Cette histoire est celle de milliers de Syriens avant et pendant le conflit. Il est difficile de décrire les souffrances que les femmes, les hommes, les filles et les garçons syriens ont endurées ces neuf dernières années. Dois-je parler des bombardements, des sièges entraînant des famines mortelles, des armes chimiques, des changements démographiques forcés ou du bombardement aveugle des maisons, des hôpitaux et des écoles ? Plus de la moitié de la population a été déplacée à l’intérieur du pays ou contrainte de quitter la Syrie. Des dizaines de milliers de personnes ont été arrêtées et torturées.

Le Gouvernement syrien et de nombreuses parties sont les principaux responsables de la situation en Syrie. La crise syrienne entrera bientôt dans sa neuvième année et, alors que cette année marque le quatrième anniversaire de l’adoption de la résolution 2254 (2015), le moment est venu de mettre fin aux souffrances des Syriens. Au nom de la majorité silencieuse des Syriens, je demande aux membres du Conseil de sécurité de collaborer entre eux et avec les Syriens pour trouver une solution durable fondée sur la résolution 2254 (2015). Les organisations non gouvernementales syriennes, telles que le Centre pour la société civile et la démocratie, ainsi que nos partenaires, estiment qu’une solution politique est certes urgente et nécessaire, mais qu’elle est également possible. C’est pourquoi je présente aujourd’hui au Conseil une feuille de route en six points pour mettre fin à la tragédie syrienne.

Premièrement, toutes les hostilités, y compris les violences sexuelles et fondées sur le genre, doivent prendre fin sur l’ensemble du territoire syrien.

Deuxièmement, nous devons améliorer la situation des déplacés et des réfugiés, les soutenir, et faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire par toutes les parties. Une commission indépendante de l’ONU doit être créée, avec la participation de la société civile syrienne, pour superviser le retour, volontaire et en toute sécurité, des réfugiés et des déplacés dans leur lieu d’origine, ou bien là où ils décideraient d’aller.

Troisièmement, il faut créer, sous les auspices du Conseil de sécurité, une commission spécialisée soucieuse de l’égalité des sexes chargée de traiter de toutes les questions concernant les détenus syriens, afin de superviser leur traitement et de surmonter les effets néfastes de la détention pour tous les détenus en Syrie, d’appuyer la libération de tous les détenus et des personnes enlevées, d’élucider le sort des détenus et des personnes disparues de force, et de fournir tout le soutien nécessaire à ceux qui ont été détenus et enlevés, ainsi qu’à leurs familles.

Ces trois premiers points visent à renforcer la confiance des Syriens, non seulement dans le processus politique mais aussi dans le Conseil de sécurité.

Quatrièmement, nous appelons la création d’un groupe de travail international composé de membres permanents du Conseil de sécurité, pour appuyer les efforts de l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Pedersen, dans le cadre du processus politique global, y compris le processus constitutionnel, et pour créer un environnement sûr, neutre et propice, notamment en restructurant les services de sécurité et les entités militaires conformément aux principes du droit international des droits de la personne. Tout cela ouvrira la voie à la tenue d’élections libres et régulières, sous la supervision des Nations Unies, en 2020-2021.

Cinquièmement, nous devons appuyer l’obtention d’un accord politique entre les différentes parties, avec la participation directe des femmes et de la société civile syriennes, en respectant les critères suivants : mettre en place des mécanismes de justice et de responsabilisation garantissant les droits des victimes ; procéder à la séparation des pouvoirs et redistribuer pacifiquement les compétences en fonction des résultats des négociations ; garantir le plein exercice des droits de l’homme et de la femme et sauvegarder toutes les libertés, y compris les libertés de religion, d’expression et d’association ; permettre la formation de partis politiques et des organisations de la société civile en Syrie ; et construire une identité syrienne commune fondée sur la diversité, en garantissant les droits des Syriens de toutes communautés, religions, sexes, races et origines ethniques.

Sixièmement, enfin, nous devons planifier et préparer un développement et une reconstruction durables de la Syrie, notamment en élaborant un plan d’action national syrien efficace pour les femmes et la paix et la sécurité, ancré dans la résolution 1325 (2000) et les résolutions ultérieures. Les jeunes doivent également être inclus, conformément à la résolution 2250 (2015). La mise en oeuvre de ces plans pourra commencer dès que l’accord sur la transition sera conclu.

J’implore les membres du Conseil de travailler ensemble, dans l’unité, pour décider de ces mesures et agir afin de faire cesser les souffrances de millions de Syriens. Nous espérons que le Conseil appuiera les efforts de la société civile syrienne et des femmes syriennes actrices de la paix en écoutant leurs voix, directement et en permanence, à toutes les séances que l’ONU consacre à la Syrie.

Après tout ce qui s’est passé en Syrie, je me sens très privilégiée d’avoir pu, à de nombreuses reprises, rendre visite à mon père en prison, et je suis reconnaissante
de sa libération après neuf années d’incarcération. Aujourd’hui, 19 ans plus tard, je m’adresse au Conseil de sécurité pour demander son aide, afin d’obtenir la libération de tous les détenus en Syrie. Il faut donner à des milliers d’enfants syriens la chance de revoir leurs parents. Il faut donner la possibilité à ces enfants syriens de ressentir de la joie, alors que nous sommes au seuil d’une nouvelle année.

La Présidente (parle en anglais) : Je remercie Mme Altalli de son exposé.

Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil qui souhaitent faire une déclaration.

M. Aljarallah (Koweït) (parle en arabe) : D’emblée, nous tenons à exprimer notre reconnaissance à l’Envoyé spécial Geir Pedersen pour son exposé très complet et d’excellente facture. Nous tenons également à remercier Mme Rajaa Altalli de son exposé.

Il y a quelques mois, nous avons tous ressenti une note d’espoir – pour le peuple syrien frère en particulier, et pour la communauté internationale tout entière – une note d’espoir suscitée par l’accord sur les listes définitives concernant la Commission constitutionnelle et la tenue à Genève de sa première série de réunions, prises en main et dirigées par la Syrie et facilitées par l’ONU. Il s’agit là d’un jalon essentiel dans le processus de paix, qui jette également les bases d’autres étapes très importantes, telles que prévues à la résolution 2254 (2015) – notamment la rédaction d’une nouvelle Constitution et la tenue d’élections libres et ouvertes à tous en Syrie, en vertu de ladite Constitution, sous la supervision de l’ONU et auxquelles participeraient tous les Syriens, y compris ceux qui résident à l’étranger.

En dépit des difficultés rencontrées lors du deuxième cycle de réunions de la Commission constitutionnelle, liées à un désaccord sur l’ordre du jour dû à des divergences d’opinion sur les priorités et les détails, nous continuons d’espérer que, grâce à l’appui de l’Envoyé spécial Pedersen, les parties syriennes parviendront à un accord sur la question, avant de s’entendre sur la constitution syrienne et d’autres éléments politiques évoqués dans la résolution 2254 (2015). Nous appelons les parties syriennes à être attentives aux intérêts du peuple syrien frère et à ne pas ménager leurs efforts pour veiller à concrétiser ses aspirations légitimes par le truchement d’un accord politique entériné par tous les pans de la société syrienne. Un tel accord permettrait de préserver l’unité, l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie.

Il est normal qu’il existe des opinions divergentes entre les diverses parties prenantes qui souffrent depuis huit ans d’un conflit acharné et sanglant. C’est naturel et prévisible. Toutefois, ce qui nous préoccupe, c’est que l’accélération des développements militaires sur le terrain nuit au processus politique, et aux travaux de la Commission constitutionnelle en particulier. Le processus politique doit s’accompagner de mesures de confiance entre les parties afin d’assurer sa viabilité et son succès. La plus importante de ces mesures consiste à réaliser des progrès réels et tangibles sur la question des disparus et des détenus. Les organisations internationales compétentes doivent être autorisées à visiter les prisons et les centres de détention. Nous notons ici que le Conseil de sécurité a, en juin dernier, adopté la résolution 2474 (2019), sur les personnes portées disparues en temps de conflit armé, laquelle doit être mise en oeuvre dans toutes les zones de conflit dans le monde, y compris en Syrie. Nous réaffirmons l’importance de traduire en justice les responsables de crimes graves commis en Syrie et de veiller à ce qu’aucune injustice ne reste impunie, car une paix durable ne saurait être instaurée sans justice.

En ce qui concerne l’accélération des opérations militaires dans le nord-ouest de la Syrie, ce qui nous préoccupe le plus est l’intensité de l’escalade, qui ne fera qu’entraîner un plus grand nombre de victimes civiles. C’est pourquoi nous condamnons à nouveau la prise pour cible de civils innocents par quelque partie que ce soit, notamment les attaques menées par des groupes terroristes désignés en tant que tels par le Conseil de sécurité contre les populations civiles et dans des zones peuplées. Dans le même temps, nous réaffirmons que les opérations, même si elles sont menées à des fins antiterroristes, ne dispensent nullement leurs acteurs, comme toute autre partie au conflit, des obligations qui leur incombent en vertu du droit international, notamment le respect des principes de distinction, de proportionnalité, de précaution et de protection des civils et des installations civiles.

Nous rappelons l’avertissement lancé par l’ONU selon lequel toute opération militaire de grande envergure dans la province d’Edleb pourrait entraîner la pire catastrophe humanitaire du XXIe siècle. À cet égard, nous réclamons de toute urgence l’instauration d’un cessez-le-feu sur tout le territoire syrien, comme le prévoient les résolutions pertinentes du Conseil de
sécurité, en particulier la résolution 2401 (2018). Dans ce même contexte, nous condamnons les attaques répétées d’Israël contre la souveraineté et le territoire de la Syrie, qui constituent également des violations de la Charte des Nations Unies, du droit international et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment la résolution 350 (1974) sur le désengagement entre les parties israélienne et syrienne. À propos des violations israéliennes, je tiens à réaffirmer que le Golan est un territoire arabe syrien occupé par Israël, la Puissance occupante. La saisie et l’annexion de territoires par la force sont inacceptables et contreviennent à la Charte des Nations Unies, aux principes du droit international et aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment la résolution 497 (1981).

Pour terminer, étant donné qu’il s’agit de la dernière séance prévue sur le processus politique syrien à laquelle l’État du Koweït participe en tant que membre du Conseil de sécurité, je voudrais saisir cette occasion pour rendre hommage à M. Pedersen pour les efforts qu’il a déployés depuis sa prise de fonctions au début de l’année. Nous l’assurons du plein appui de l’État du Koweït, qui se poursuivra même après la fin de notre mandat au Conseil. Nous lui souhaitons plein succès dans sa difficile mission de facilitation d’un processus politique visant à rétablir la stabilité et la sécurité en Syrie, pays arabe frère ayant une histoire et une culture millénaires pour lesquelles nous éprouvons une affection, une appréciation et un respect des plus profonds.

Par ailleurs, je m’en voudrais de ne pas remercier tous les membres du Conseil de l’accueil cordial qu’ils nous ont réservé hier et des éloges qu’ils ont adressés à mon pays, le Koweït, pour le rôle qu’il a joué tout au long de son mandat de deux ans en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité. Nous sommes extrêmement reconnaissants du soutien et de la coopération que nous avons trouvés dans cette salle et qui nous ont permis de travailler ensemble pour atteindre nos objectifs communs.

M. Schulz (Allemagne) (parle en anglais) : Je voudrais tout d’abord remercier l’Envoyé spécial Pedersen et Mme Altalli de leurs exposés.

Nous sommes profondément déçus de constater que le régime syrien a, lors de la dernière réunion de la Commission constitutionnelle, déployé une fois encore sa stratégie d’obstruction, d’atermoiement et de jeux tactiques. C’est d’autant plus décevant que le premier tour a été plus réussi que beaucoup ne l’avaient espéré. Hélas, c’est un comportement que nous avons trop souvent observé ces dernières années : le régime orchestre des discussions artificielles sur les points de l’ordre du jour afin d’éviter tout débat réel sur le fond. Cela va malheureusement de pair avec les déclarations répétées de Bashar Al‑Assad, dans lesquelles il se dissocie de la Commission constitutionnelle. Aussi demandons-nous instamment au régime syrien de cesser ses pratiques obstructionnistes et de s’engager enfin pleinement en faveur du processus constitutionnel.

La situation actuelle montre que la création de la Commission constitutionnelle n’est qu’un premier pas vers une solution politique du conflit syrien. Nous restons néanmoins convaincus que ses réunions peuvent contribuer à instaurer une certaine confiance et, par conséquent, ouvrir la voie à un processus politique plus large, comme énoncé dans la résolution 2254 (2015). Pour ce faire, cependant, toutes les parties doivent y participer avec le sérieux qui s’impose.

La création de la Commission constitutionnelle n’est pas en soi la transition politique qui a été demandée dans la résolution 2254 (2015) et le Communiqué de Genève de 2012 (S/2012/522, annexe). Nous avons besoin d’un véritable processus politique sous les auspices de l’ONU qui conduira à un changement réel en Syrie et à un ordre d’après-conflit qui réponde aux espoirs légitimes du peuple syrien en matière de paix et de sécurité.

L’Allemagne est le deuxième plus grand donateur bilatéral en termes d’aide humanitaire à la Syrie. Toutefois, en ce qui concerne la question de la reconstruction, nous restons fidèles à notre position. L’Allemagne et les autres États membres de l’Union européenne ne contribueront à la reconstruction de la Syrie que lorsqu’une transition politique globale, véritable et inclusive sera fermement engagée.

L’exposé de Mme Altalli nous a tristement rappelé que chaque fois que nous parlons du conflit syrien, nous ne devons pas oublier ses causes profondes. C’est avant tout la politique de violence, de répression et de persécution sanglantes menée par le régime syrien qui a provoqué ce conflit, et cette politique continue de faire obstacle au retour des personnes déplacées et des réfugiés syriens. Le régime syrien a arbitrairement détenu des dizaines de milliers de Syriens innocents, simplement parce qu’ils ont osé faire usage de leur liberté d’expression. Il a torturé à mort des milliers de Syriens innocents, simplement parce qu’ils ont osé demander une réforme politique et la liberté en Syrie. Qualifier de terroristes
de simples citoyens afin justifier leur arrestation et leur torture est tout simplement révoltant.

Les arrestations arbitraires, la torture, les violences sexuelles, les disparitions forcées et les exécutions extrajudiciaires de détenus se poursuivent, même dans les régions dites réconciliées. Le recours systématique par le régime syrien aux pires méthodes de torture est écoeurant – même les enfants continuent de figurer parmi les victimes. Le régime syrien doit mettre fin à de tels actes immédiatement.

Depuis notre séance du début du mois d’août consacrée à la question des détenus et des personnes portées disparues (voir S/PV.8593), il n’y a malheureusement pas eu de progrès pour mettre fin à ces violations les plus graves des droits de l’homme. Bien au contraire, ces derniers mois, des informations crédibles ont de nouveau fait état d’une augmentation du nombre de détenus transférés à la tristement célèbre prison militaire de Sednaya pour y être exécutés sans procès équitable. Dans le même temps, le groupe de travail d’Astana sur les détentions et les enlèvements dans le cadre du conflit syrien n’a malheureusement pas été en mesure de s’entendre sur un échange de prisonniers et n’a pas avancé sur la question. Il est néanmoins essentiel de réaliser des progrès significatifs sur cette question si l’on veut renforcer la confiance. C’est pourquoi le régime syrien doit enfin informer les familles des dizaines de milliers de disparus du sort de leurs proches, accorder à l’ONU ou au Comité international de la Croix-Rouge un accès inconditionnel à tous les lieux de détention sous son contrôle, permettre aux personnes en détention d’avoir accès à des soins médicaux et libérer tous les prisonniers politiques et les personnes détenues arbitrairement, à commencer par les mineurs incarcérés et les malades. Nous demandons également à la Russie et à l’Iran d’user de leur influence sur Damas à cet égard.

J’en viens maintenant à la situation à Edleb. Nous sommes profondément préoccupés par les attaques militaires en cours, notamment les frappes aériennes, dans la zone dite de désescalade d’Edleb, et nous redoutons fortement une éventuelle offensive militaire de grande envergure à Edleb et alentour. Nous réitérons notre appel en faveur d’un cessez-le-feu véritable et durable, de la protection des civils et du respect du droit international humanitaire. Nous condamnons les récentes frappes aériennes et terrestres menées par les forces du régime syrien et leurs alliés, qui ont fait de nouvelles victimes civiles.

Les frappes contre les civils et les infrastructures civiles sont inexcusables ; elles constituent une violation du droit international et doivent faire partie de l’enquête de la Commission d’enquête. Le régime syrien et ses alliés doivent respecter les obligations qui leur incombent en vertu du droit international et protéger les civils et l’infrastructure civile.

Nous sommes préoccupés par la présence et les attaques à Edleb de Hayat Tahrir al-Cham et d’autres groupes terroriste que l’ONU a désignés comme tels, et nous convenons qu’il faut s’attaquer au rôle que jouent les organisations terroristes dans cette ville. Toutefois, la lutte contre le terrorisme ne justifie pas les attaques aveugles contre les civils et les infrastructures civiles.

Je voudrais dire un dernier mot sur la situation dans le nord-est de la Syrie. Le risque d’une nouvelle déstabilisation de l’ensemble de la région persiste, et nous appelons donc tous les acteurs dans le nord-est à mettre immédiatement en oeuvre un cessez-le-feu durable et à cesser toutes les opérations militaires. Nous sommes préoccupés par l’utilisation accrue d’engins explosifs improvisés dans les quartiers résidentiels et les marchés locaux, attaques perpétrées essentiellement dans des zones contrôlées par les forces turques et des groupes armés affiliés. Nous déplorons les pertes en vies humaines et condamnons fermement toute attaque aveugle contre des civils.

Le risque que l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL) réapparaisse et commette des actes terroristes dans la région et au-delà reste bien réel. Nous sommes déterminés à assurer la défaite de l’EIIL et d’autres groupes terroristes que l’ONU avait désignés comme tels.

Nous rejetons également toute réinstallation de réfugiés syriens dans le nord-est de la Syrie – ou dans toute autre partie de la Syrie, en fait – qui ne serait pas un retour volontaire, sûr et digne dans leurs foyers de ces réfugiés ou qui violerait les droits de la population locale.

Nous restons préoccupés par la détérioration de la situation humanitaire dans le nord-est de la Syrie et nous réitérons notre appel à toutes les parties pour qu’elles garantissent un accès humanitaire sûr et sans entrave à tous les Syriens qui en ont actuellement besoin.

Mme Gueguen (France) : Je remercie M. Geir Pedersen et Mme Rajaa Altalli pour leurs exposés et je tiens en particulier à saluer Mme Altalli pour son engagement sans faille pour faire entendre la voix de la société civile syrienne, la voix de la majorité silencieuse qui souffre, et la voix des femmes qui doivent être entendues et pouvoir participer aux discussions et aux décisions concernant leur pays à égalité avec les hommes.

Je souhaite revenir sur deux points. Premièrement, sur le terrain, il faut un gel des fronts. C’est essentiel pour assurer un répit à une population exténuée et exsangue. La France est extrêmement préoccupée par la reprise des frappes du régime et de ses alliés dans le nord-ouest, qui montre à présent les signes d’une offensive d’ampleur, et a déjà fait 16 victimes civiles dans la journée d’hier. Nous continuons de suivre la situation de près et mettons vivement en garde contre une telle offensive. Celle-ci ne fera que renforcer le groupe terroriste Hayat Tahrir al-Cham, contre lequel nous devons unir nos efforts. Je souhaite donc réitérer clairement l’appel à la cessation des hostilités que la France a lancé déjà à de nombreuses reprises dans cette enceinte.

Alors que l’hiver s’installe, l’offensive va susciter une catastrophe humanitaire contre laquelle les Nations Unies ont maintes fois mis en garde. À cet égard, je réitère comme je l’ai fait déjà hier, que la France condamne fermement les frappes indiscriminées contre les civils et les infrastructures civiles, notamment les infrastructures médicales. La guerre a ses règles qui doivent être respectées. La lutte contre le terrorisme est une priorité, mais elle ne saurait justifier des violations du droit international humanitaire. Pour être efficace et produire des résultats durables, la lutte contre le terrorisme doit se faire dans le respect du droit. Celui-ci s’impose à tous. C’est un impératif moral, légal et opérationnelle.

Nous restons vigilants s’agissant de la situation au nord-est, où il est impératif que les hostilités ne reprennent pas. La reprise des combats remettrait en cause les résultats obtenus par la coalition internationale, avec ses partenaires locaux, au prix de nombreux sacrifices. Cela ne pourrait par ailleurs que renforcer Daech et créer là aussi les conditions d’une nouvelle crise humanitaire. La France s’inquiète également de la dégradation de la situation dans le sud-ouest, un an et demi après sa reconquête par le régime. La situation sécuritaire continue de s’y dégrader mois après mois, avec une instabilité chronique qu’illustre la hausse des attaques et des assassinats. La situation humanitaire ne s’y est pas non plus améliorée : les services publics restent quasi- inexistants et le régime syrien continue d’imposer des restrictions injustifiables à l’accès humanitaire. La France appelle ce Conseil à se montrer particulièrement vigilant à l’égard de l’évolution de la situation.

Mon deuxième point concerne le processus politique. Il est plus que jamais urgent de le remettre sur les rails en vue de la pleine mise en oeuvre de la résolution 2254 (2015). Les entraves du régime syrien à la poursuite des travaux de la Commission constitutionnelle sont inacceptables. Cette obstruction est contraire aux règles de procédures précédemment agréées par les parties sous l’égide de l’Envoyé spécial de l’ONU, M. Geir Pedersen. Elle confirme une fois de plus que le régime continue de refuser de s’engager réellement et de bonne foi dans un processus politique, après plus de huit ans de guerre destructrice. Nous soutenons l’Envoyé spécial et l’engageons à poursuivre ses efforts actifs en faveur d’un déblocage de la situation. Les garants d’Astana doivent également faire pression sur le régime. Enfin, si la prochaine session de la Commission devait se dérouler comme la précédente, nous appelons l’Envoyé spécial à l’indiquer clairement au Conseil à l’occasion de sa prochaine intervention.

Comme M. Geir Pedersen l’a souligné dans son exposé, la Commission constitutionnelle n’est qu’un élément d’un processus plus large visant à mettre en oeuvre l’ensemble des éléments de la résolution 2254 (2015). La France réaffirme son plein soutien aux efforts de l’Envoyé spécial en ce sens. Nous l’encourageons à progresser en parallèle sur la mise en place d’un environnement sûr et neutre, indispensable pour la tenue d’élections crédibles sous la supervision de l’ONU, élections auxquelles devront participer tous les Syriens, y compris les réfugiés et les déplacés. Ce n’est qu’en garantissant ces conditions de sécurité et de neutralité que les Syriens pourront se réapproprier leur avenir lors des prochains scrutins.

Des progrès doivent également être réalisés en matière de libération des détenus. L’absence de progrès sur les détenus lors de la dernière réunion des garants d’Astana souligne une fois encore la nécessité de changer d’échelle et de méthode et de laisser la main à l’ONU. Il faut entendre les demandes pressantes de la population qui ose surmonter sa peur en descendant de nouveau dans les rues de Deraa pour la libération des siens et ne pas oublier comment le conflit syrien a commencé au début de l’année 2011.

Sans avancée crédible, les positions de la France et de l’Union européenne sur la reconstruction et sur les sanctions resteront inchangées. I1 restera également illusoire d’envisager le retour digne, sûr et volontaire des réfugiés sans un accord global comprenant de réelles garanties politiques et de sécurité, sans lesquelles les
réfugiés craindront trop pour leur vie. II est enfin essentiel de garantir l’accès sûr et sans entrave de l’ONU pour observer et accompagner les retours sur le terrain, ce qui n’est pas le cas jusqu’à présent.

II est de notre intérêt à tous de remettre la Syrie sur le chemin de la paix et de la stabilité. Pour avancer, nous avons besoin des efforts de tous et de récréer de l’unité au sein du Conseil. La France appelle l’ensemble des membres du Conseil à faire preuve d’unité et de responsabilité afin d’avancer sur le chemin d’un règlement politique et de répondre aux immenses besoins humanitaires de la population syrienne en soutenant le projet de résolution renouvelant le mécanisme d’aide transfrontalière présenté par les corédacteurs humanitaires.

Mme Pierce (Royaume-Uni) (parle en anglais) : Je remercie une fois encore l’Envoyé spécial pour tout le travail accompli par son équipe et je remercie Mme Rajaa Altalli d’être présente dans la salle aujourd’hui et de nous avoir fait part de son histoire. Je suis vraiment désolé pour les souffrances qu’elle et sa famille ont vécues.

Comme d’autres, nous remercions l’Envoyé spécial pour ses efforts inlassables visant à instaurer la paix en Syrie, mais la rupture des pourparlers lors de la deuxième réunion de la Commission constitutionnelle est extrêmement décevante. Comme nous le savons tous, pour que ces réunions tant attendues soient couronnées de succès, il faut que toutes les parties s’engagent sérieusement. Nous appuyons la position de M. Pedersen selon laquelle les Présidents du Gouvernement et de l’opposition doivent s’entendre sur un ordre du jour avant qu’une troisième réunion de la Commission puisse être convoquée. Nous regrettons les tentatives des autorités syriennes de poser des conditions dont l’inutilité est généralement reconnue afin de bloquer à dessein les pourparlers. Nous demandons à ces autorités de respecter les règles de la Commission et de reprendre les négociations.

Nous sommes également préoccupés par le fait que les autorités syriennes semblent se dissocier de la Commission constitutionnel dans des déclarations officielles et dans les médias, laissant entendre que la délégation syrienne représente « le point de vue du régime syrien mais n’est pas le régime lui-même ». Je voudrais donc demander au représentant syrien de dissiper ces préoccupations en réaffirmant au Conseil que sa délégation à la Commission constitutionnelle est bien la « délégation du Gouvernement ».

Nous comprenons que M. Pedersen n’est pas en mesure de communiquer tous les détails des négociations et des progrès réalisés en vue de la réouverture des pourparlers au cours de ses exposés, notamment en raison des contraintes de temps, mais nous pensons qu’il serait utile d’envisager d’autres moyens par lesquels M. Pedersen pourrait tenir le Conseil informé des détails.

Je remercie encore une fois Mme Altalli de son exposé et je voudrais revenir sur ce qu’elle nous a dit. Le Royaume-Uni a toujours indiqué clairement que le processus politique devait être représentatif d’un échantillon large et diversifié de la société syrienne. Nous devons garder à l’esprit qu’un règlement politique en Syrie va bien au-delà de la Constitution. Il est essentiel que tous les éléments de la résolution 2254 (2015) soient mis en oeuvre en même temps. Il s’agit notamment de créer des conditions propices au retour des réfugiés, de préparer des élections libres et régulières en 2021 et de libérer les détenus.

Par conséquent, nous sommes vivement préoccupés par les informations concernant l’arrestation de 174 personnes qui sont rentrées à Homs en provenance du camp de déplacés de Roukban, alors qu’elles avaient reçu l’autorisation des autorités syriennes et des garanties qu’elles ne seraient pas persécutées. Les autorités syriennes et la Russie doivent être fidèles à leur parole et tenir les promesses qu’elles ont faites.

En ce qui concerne la torture, je ne pense pas que je pourrais m’exprimer mieux que le représentant allemand. Il s’agit de cas vraiment horribles. Ils sont inacceptables et doivent cesser.

Nous appuyons les efforts que déploie l’Envoyé spécial pour faire avancer tous les autres volets du processus politique. Je tiens à réaffirmer que le Royaume-Uni n’envisagera pas de fournir une aide à la reconstruction sans qu’un processus crédible, effectif et véritablement politique soit fermement engagé.

Je voudrais passer maintenant à la situation à Edleb. Nous restons extrêmement préoccupés par la poursuite des frappes aériennes dans cette région. Nous prenons note des informations du 2 décembre concernant les attaques contre les marchés de Saraqeb et de Maarret el-Nouman, qui ont fait au moins 14 morts parmi les civils. Les attaques contre des hôpitaux, comme celle menée dans le camp de déplacés d’Al‑Qah le 20 novembre, et d’autres infrastructures civiles sont inexcusables et vont à l’encontre des Conventions de Genève et du droit international humanitaire. En outre,
il est incroyable que les autorités syriennes mènent d’autres attaques de ce type étant donné les enquêtes en cours de la Commission d’enquête. Le Royaume-Uni attend avec intérêt que la Commission d’enquête fasse le point de la situation au Conseil.

Nous nous félicitons du fait que le cessez-le-feu dans le nord-est de la Syrie continue, dans l’ensemble, de tenir, mais nous sommes préoccupés par les informations faisant état d’une attaque près d’une école à Tell Rifaat, contrôlée par les Unités de protection du peuple kurde, qui a fait au moins 10 morts, dont huit enfants. Nous appelons toutes les parties concernées à respecter le cessez-le-feu et leurs obligations envers les civils en vertu du droit international humanitaire.

Je voudrais dire quelques mots à propos des réfugiés syriens. Les Syriens ont le droit de regagner leurs foyers volontairement, en toute sécurité et dans la dignité, conformément au droit international humanitaire. Nous appuyons l’évaluation de l’ONU selon laquelle les conditions en Syrie ne sont pas encore propices à un retour en toute sécurité et dans la dignité.

Enfin, le Royaume-Uni, en tant que membre de la Coalition mondiale contre Daech, est fier du rôle qu’il a joué dans la lutte couronnée de succès pour la libération des territoires contrôlés par Daech en Syrie et en Iraq. Nous restons déterminés à assurer la défaite de Daech sur le long terme. Il reste beaucoup à faire, et nous ne pouvons pas perdre de vue la menace que ce groupe représente, même sans territoire. Il faut éliminer l’idéologie dangereuse et très répandue de ce groupe.

M. Trullols Yabra (République dominicaine) (parle en espagnol) : Nous remercions l’Ambassadeur Pedersen de son exposé et nous réaffirmons notre plein appui aux efforts qu’il déploie pour promouvoir le rapprochement, la réconciliation et le dialogue entre le Gouvernement syrien, l’opposition et la société civile. Nous sommes conscients des obstacles et des défis énormes qu’il a fallu surmonter pour en arriver à la situation actuelle. Nous l’exhortons à continuer d’avancer, sans faillir, sur cette voie – où il a fallu parfois faire des virages serrés – vers un renouveau politique global en République arabe syrienne, qui redonnera à un peuple déchiré par neuf ans de conflit l’espoir d’un avenir meilleur.

Nous saluons la participation à la présente séance de Mme Altalli, dont les points de vue, en tant que femme et militante, confirment le rôle important que les femmes peuvent et doivent jouer dans le processus politique en Syrie.

La République dominicaine regrette que l’organe restreint n’ait pas pu parvenir à un accord sur l’ordre du jour de ses délibérations dans le cadre de la deuxième réunion de la Commission constitutionnelle. Nous espérons que très bientôt, les deux parties pourront s’entendre sur des points communs pour orienter leurs discussions et organiser un nouveau cycle de réunions. Nous appuyons les mesures qui doivent être prises immédiatement à cette fin, que l’Ambassadeur Pedersen vient de présenter.

Pleinement convaincus que le processus syrien doit être un processus politique pour les Syriens et par les Syriens, nous estimons qu’en tant que garant de la mise en oeuvre de la résolution 2254 (2015), le Conseil de sécurité a la responsabilité de continuer à exhorter les parties à faire preuve du plus haut degré d’engagement et de souplesse possible afin de contribuer à sa pleine mise en oeuvre. Après tant d’années d’attente, et tant de méfiance mutuelle, il est impératif que le Gouvernement et l’opposition puissent se présenter à ces réunions avec tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de leurs fonctions, en partant du principe que nous sommes arrivés à un point de non-retour dans le processus de paix en Syrie. Il faut leur apporter un appui ferme.

Qu’il me soit permis de mettre en exergue quelques points très spécifiques en ce qui concerne la question qui nous occupe aujourd’hui.

Premièrement, nous réitérons notre conviction que ce conflit très complexe ne peut être réglé que sur la base du dialogue et de négociations politiques. Il n’y a pas de solution militaire qui pourrait ouvrir la voie à une réconciliation nationale durable à l’avenir.

Deuxièmement, à mesure que le processus politique se renforce et avance, il est essentiel de renforcer la confiance des Syriens grâce à des gestes sincères de la part toutes les parties concernées. Le respect des accords de cessez-le-feu, la suspension de toutes les détentions arbitraires, y compris celles des agents sanitaires, et la libération des personnes détenues arbitrairement sont quelques-unes des mesures qui doivent se poursuivre. Nous saluons les progrès réalisés par le groupe de travail dans le cadre du processus d’Astana, et nous l’exhortons à viser des résultats plus ambitieux dans ce domaine.

Troisièmement, ma délégation estime que les retours de réfugiés doivent se faire dans le respect des
normes établies au niveau international et être effectués volontairement et dans la dignité et la sécurité. Les réfugiés doivent être autorisés à retourner dans leur lieu d’origine ou dans le lieu de leur choix ; leurs besoins fondamentaux en matière de subsistance et de papiers d’identité doivent être satisfaits ; et il faut leur offrir des perspectives d’un meilleur avenir dans leur pays.

Étant donné que cette séance est la dernière prévue dans le programme de travail de décembre, je voudrais remercier très sincèrement les délégations de la Côte d’Ivoire, de la Guinée équatoriale, du Koweït, de la Pologne et du Pérou pour leur excellent travail en tant que membres non permanents du Conseil et pour leur esprit de collaboration et de camaraderie, ainsi que la Présidente pour le professionnalisme et la transparence avec lesquelles elle a dirigé nos travaux. Je les remercie et les félicite tous.

M. Van Schalkwyk (Afrique du Sud) (parle en anglais) : Je voudrais tout d’abord remercier l’Envoyé spécial Pedersen de son exposé sur la situation politique en Syrie. Nous saluons ses efforts résolus et ceux de son Bureau dans le cadre de l’exécution de son mandat. Nous remercions également Mme Rajaa Altalli de son exposé et de sa déclaration.

Lors de la dernière séance d’information du Conseil sur la situation politique en Syrie (voir S/PV.8664), l’Afrique du Sud a accueilli avec satisfaction le lancement de la Commission constitutionnelle et la tenue de sa première réunion à Genève, et a exprimé l’espoir qu’elle permettrait de réaliser des progrès tangibles vers un processus d’élaboration de la Constitution, en toute bonne foi. Nous nous félicitons de la convocation de la deuxième session de pourparlers de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle, et nous notons la nécessité de mettre en place les éléments constitutifs afin de pouvoir progresser sur les questions de fond. Nous encourageons toutes les parties à réaffirmer leur attachement à la Commission constitutionnelle en tant qu’élément efficace et essentiel du processus politique syrien. En outre, ma délégation exhorte les parties à faire tous les efforts pour oeuvrer de concert, avec l’appui de l’Envoyé spécial, afin de convenir, avant le début de la prochaine série de pourparlers, d’un ordre du jour réaliste pour guider les travaux de la Commission. Bien que la Commission constitutionnelle soit un élément d’un processus politique plus vaste conçu pour ramener la paix et la stabilité en Syrie, il s’agit d’un élément essentiel qui doit être soutenu.

S’agissant des autres éléments du processus politique, et en tant que moyen de soutenir le processus de la Commission constitutionnelle, il est nécessaire d’instaurer la confiance entre les différentes parties et communautés. Les mesures à prendre cet égard, à tous les niveaux de la société et du Gouvernement, notamment la libération des détenus civils, contribueront à la guérison et à la réconciliation. Nous, Sud-Africains, savons que la confiance entre les parties constitue une composante essentielle de toute négociation, et nous espérons que les mesures qui font fond sur ces principes bénéficieront à tous. La seule solution à long terme à la crise actuelle en Syrie passe par un dialogue sans exclusive dirigé par les Syriens, qui reflète la voix du peuple syrien et qui protège les droits universels et les intérêts fondamentaux de l’ensemble de la société syrienne. À cet égard, nous appelons toutes les parties à mettre pleinement en oeuvre la résolution 2254 (2015) en tant que feuille de route aux fins d’une solution politique à long terme en Syrie.

L’Afrique du Sud est d’avis qu’on ne peut remédier aux crises politiques et humanitaires en Syrie indépendamment l’une de l’autre. La poursuite de la violence et la détérioration de la situation humanitaire nuisent au processus politique. De la même manière, des progrès dans la sphère politique appuieront les efforts visant à faire en sorte que tous les Syriens puissent vivre dans un environnement sûr, sécurisé et prospère, exempt de violence et de terrorisme. Le Conseil s’est réuni hier (voir S/PV.8694) pour débattre de la situation humanitaire en Syrie et pour essayer de parvenir à un consensus sur le renouvellement de l’aide transfrontalière. Nous rappelons à tous les membres du Conseil leur obligation de défendre les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et l’impératif moral qu’ils ont d’atténuer les souffrances du peuple syrien. L’Afrique du Sud demande à tous les membres du Conseil de tout mettre en oeuvre pour trouver un compromis et atteindre le consensus afin que le mandat de ce programme d’assistance humanitaire vital soit renouvelé.

M. Zhang Jun (Chine) (parle en chinois) : Je tiens tout d’abord à remercier l’Envoyé spécial Pedersen de son exposé. La lumière du soleil derrière moi m’empêche de le voir distinctement. Toutefois, j’espère que la lumière est le signe d’un avenir plus brillant pour le processus politique en Syrie.

La création de la Commission constitutionnelle est un bon point de départ pour le processus politique syrien, l’organe élargi et l’organe restreint composé
de 45 membres ayant tout les deux entamé leurs travaux dans les délais, à la fin octobre notamment. La Chine se félicite de cette évolution, et salue les efforts de médiation de l’Envoyé spécial Pedersen et la participation constructive de toutes les parties syriennes. Dans le même temps, des divergences subsistent entre les parties syriennes au sein de la Commission constitutionnelle. Bien que cela soit inévitable, nous espérons que toutes les parties continueront à dialoguer par l’intermédiaire de la Commission constitutionnelle afin de renforcer la compréhension et la confiance mutuelles.

La Chine soutient l’Envoyé spécial Pedersen dans ses efforts pour faire fond sur les résultats déjà obtenus, conformément au principe d’un processus dirigé et contrôlé par les Syriens et à la résolution 2254 (2015), ainsi que pour continuer de faire avancer le processus politique syrien. Il faudrait prêter une attention particulière à la préservation de l’indépendance des travaux de la Commission constitutionnelle – il ne doit y avoir ni ingérence étrangère ni imposition d’un calendrier arbitraire. La souveraineté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale de la Syrie doivent être pleinement respectées et les demandes légitimes du Gouvernement syrien doivent être exaucées. La Syrie ne doit être ni divisée ni fragmentée. Nous attendons des membres de la Commission constitutionnelle qu’ils placent l’intérêt de la Syrie et de son peuple au-delà de tout et qu’ils participent au dialogue avec une volonté politique et un esprit de compromis.

La Chine se félicite du nouveau cycle du dialogue d’Astana organisé la semaine dernière à Nour-Sultan par la Russie, l’Iran et la Turquie, et espère qu’il aidera les parties syriennes à aplanir leurs divergences et à construire le consensus.

L’élimination des forces terroristes est un prérequis sécuritaire nécessaire pour que les Syriens puissent retourner dans leur pays et retrouver une vie pacifique et ordonnée. Les pays doivent continuer d’agir conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et au droit international. Ils doivent aussi respecter des normes uniformes en luttant contre toutes les formes de terrorisme. La question des combattants terroristes étrangers en Syrie est passée au premier plan – Edleb est devenu un terreau fertile pour le terrorisme, le risque que le terrorisme se propager partout dans le nord-est de la Syrie s’accroît, et la résurgence de l’État islamique est encore possible. Ces faits nouveaux menacent la paix et la sécurité en Syrie, au Moyen-Orient et dans le monde. Toutes les parties doivent s’abstenir de mesures qui compromettent les gains obtenus dans la lutte contre le terrorisme et s’efforcer plutôt d’oeuvrer de concert et d’envisager sérieusement les moyens de traduire les terroristes en justice. Nous recommandons au Secrétariat de suivre de près l’évolution de la lutte antiterroriste en Syrie et l’afflux des terroristes dans ce pays, tout en procédant à la création d’une base de données sur les terroristes et en communiquant en temps voulu des informations pertinentes aux pays concernés afin qu’ils puissent créer les conditions nécessaires à la prochaine étape du règlement de la question des combattants terroristes étrangers, ainsi que d’autres problèmes.

Tout en promouvant le processus politique syrien, la communauté internationale doit aussi s’efforcer d’améliorer la situation économique et humanitaire en Syrie au moyen d’efforts visant à atténuer la crise humanitaire dans le pays de manière globale, objective et équilibrée. La Syrie souffre actuellement de sanctions économiques, de pénuries de pétrole, d’une infrastructure endommagée ou délabrée et d’un manque de ressources nécessaires à la reconstruction, ainsi que d’autres difficultés, qui ont tous exacerbé la crise humanitaire sur le terrain et eu une incidence extrêmement négative sur la vie des Syriens.

Le grand nombre de réfugiés a aussi exercé une pression économique et sociale sur les pays voisins de la Syrie et est devenu un facteur de déstabilisation dans la région. Aucune condition politique préalable ne doit être imposée à l’octroi de fournitures humanitaires à la Syrie. Les opérations de secours humanitaires en Syrie doivent être menées en communication et en coordination accrues avec le Gouvernement syrien et dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du pays.

La Chine tient à réaffirmer son appui au processus politique en Syrie et est prête à jouer un rôle constructif dans le rétablissement rapide de la paix, de la stabilité et du développement dans ce pays. Dans le même temps, toutes les parties doivent faire un effort concerté pour contribuer au processus politique syrien, aider à instaurer la confiance mutuelle et oeuvrer au même objectif par le biais du compromis. La Chine n’est pas d’accord qu’on tienne des discussions sur la question des droits de l’homme en Syrie au Conseil de sécurité ou qu’on utilise les questions relatives aux droits de l’homme pour faire pression sur la Syrie ou pour porter des accusations contre elle. De telles actions ne sont ni conformes au mandat du Conseil de sécurité ni propices
à l’instauration d’un climat favorable à la promotion du processus politique syrien.

Mme Wronecka (Pologne) (parle en anglais) : Je tiens tout d’abord à remercier l’Envoyé spécial Geir Pedersen de son exposé détaillé. Je remercie aussi Mme Rajaa Altalli, Cofondatrice et Codirectrice du Centre pour la société civile et la démocratie de sa contribution.

La Pologne a souligné à maintes reprises que toute solution durable au conflit en Syrie passe par une transition politique véritable et négociée par les parties syriennes dans le cadre du processus de Genève mené sous l’égide de l’ONU. Nous sommes d’accord avec l’Envoyé spécial que l’avenir de la Syrie appartient aux Syriens et à eux seuls. Les travaux de la Commission constitutionnelle peuvent à cet égard constituer le début d’un processus constructif. Nous engageons instamment toutes les parties, notamment les autorités de Damas, à participer de bonne foi aux travaux de la Commission constitutionnelle. Dans ce contexte, je voudrais également souligner l’importance que revêt la société civile dans le processus de réalisation d’une paix et d’une justice durables dans tout pays.

Toutes les parties au conflit doivent adopter des mesures de confiance. À cet égard, je voudrais souligner à nouveau que la guerre en Syrie a infligé des souffrances indicibles à l’ensemble du pays. Des milliers de personnes restent en détention arbitraire. En outre, des milliers d’autres sont toujours portées disparues et leurs proches sont privés de toute information sur leur sort, comme l’a mentionné l’intervenante. Nous appelons à la libération de ces personnes, en particulier les enfants, les femmes et les personnes âgées. Des progrès dans ce domaine permettraient de renforcer la confiance entre les parties et de renforcer les efforts déployés pour parvenir à une paix durable en Syrie. C’est l’une des mesures de confiance les plus importantes.

Les groupes les plus vulnérables en Syrie, notamment les personnes handicapées, les personnes âgées, les femmes et les enfants, doivent bénéficier d’une protection spéciale. À cet égard, comme nous en avons discuté hier avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (voir S/PV.8694), nous condamnons toute attaque contre les installations médicales et leur personnel partout en Syrie. Le droit international humanitaire est très clair à ce sujet. Il exige de toutes les parties au conflit qu’elles fassent bien la distinction entre civils et combattants et mettent tout en oeuvre pour épargner les civils, en tout temps, dans le cadre de leurs opérations militaires.

Je voudrais rappeler que nous appuyons pleinement le droit au retour en toute sécurité des réfugiés syriens qui ont fui leur foyer. Nous estimons qu’une solution durable doit garantir la sécurité d’un retour durable, digne et librement consenti, des Syriens dans leur pays d’origine, dans le respect du droit international et du principe de non-refoulement. Nous craignons que les conditions du rapatriement volontaire des réfugiés syriens, telles que définies par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, ne soient pas réunies. De surcroît, nous réaffirmons que nous ne serons disposés à contribuer à la reconstruction de la Syrie que lorsqu’une transition politique globale, véritable et inclusive, négociée par les parties syriennes au conflit sur la base de la résolution 2254 (2015) et du Communiqué de Genève (S/2012/522, annexe), aura réellement été amorcée.

Comme c’est probablement la dernière fois que je prends la parole sur la question de la Syrie pendant le mandat de la Pologne au Conseil de sécurité, je voudrais remercier M. Pedersen de ses efforts inlassables et l’assurer du plein appui de mon pays, même une fois qu’il aura quitté le Conseil. Je voudrais également dire que siéger au Conseil de sécurité a été un honneur, un privilège et une expérience unique et enrichissante. Je voudrais remercier mes collègues du Conseil de leur appui, de leur amitié et de leur excellente coopération. Je voudrais remercier la Division des affaires du Conseil de sécurité de son aide inestimable. Nous remercions également tout particulièrement les interprètes, le personnel de sécurité et les ingénieurs. Nous avons tous travaillé extrêmement dur au cours des deux dernières années. Je remercie aussi mes collègues de la Mission polonaise de leur appui et de leur excellent travail au Conseil de sécurité, et je salue leur engagement et leur dévouement. Enfin, je souhaite plein succès et bonne chance aux nouveaux membres du Conseil de sécurité.

M. Djani (Indonésie) (parle en anglais) : C’est une belle journée ensoleillée ; il est regrettable que M. Heusgen ne soit pas ici pour voir les rideaux tirés.

Sur une note plus sérieuse, nous remercions l’Envoyé spécial Geir Pedersen de son exposé circonstancié et Mme Rajaa Altalli de sa présence parmi nous aujourd’hui.

Ma délégation suit de près l’évolution des travaux de la Commission constitutionnelle dirigée et contrôlée
par les Syriens, avec l’aide de l’ONU. La création de la Commission, l’adoption par consensus d’un code de conduite et d’un ensemble de règles de fonctionnement initiales, ainsi que l’accord sur l’organe restreint chargé de la rédaction, sont en effet des avancées louables. Nous constatons que la deuxième réunion de la Commission constitutionnelle, tenue en novembre dernier, ne s’est pas vraiment déroulée comme prévu. Nous regrettons évidemment qu’il n’ait pas été possible de convoquer une réunion des 45 membres siégeant à l’organe restreint chargé de la rédaction. Toutefois, ma délégation estime que cela fait partie d’un processus continu qui est loin d’être facile, comme nous le savons tous. Des désaccords surgiront toujours dans ces processus, mais le plus important est que le dialogue et les consultations entre les parties concernées se poursuivent. Le compromis et la souplesse sont nécessaires. Avec de la patience, l’objectif d’un résultat final qui soit bénéfique au peuple syrien peut être atteint. Cela doit être l’objectif premier. L’Indonésie souhaite sincèrement que les deux Coprésidents du Gouvernement et de l’opposition s’entendent bientôt sur l’ordre du jour et avancent dans la préparation de la prochaine réunion. Je voudrais insister sur trois autres points pertinents.

Premièrement, il est essentiel que la communauté internationale, en particulier les membres du Conseil, continue d’appuyer les travaux de la Commission constitutionnelle. Il s’agit notamment de soutenir les efforts déployés par l’Envoyé spécial Geir Pedersen pour faciliter le processus, notamment la réalisation d’un consensus entre les membres de la Commission. Nous espérons que ces derniers pourront se concentrer sur leur travail, sans ingérence extérieure inutile qui serait susceptible de compromettre le processus en cours. Nous sommes d’accord avec ce que M. Pedersen a déclaré, à savoir que la Commission constitutionnelle doit être encouragée à chaque instant. Ces paroles ne sont pas faciles à entendre, et il ne s’agit pas là d’une tâche aisée. Le succès de la Commission constitutionnelle à ce stade est important pour renforcer la confiance, qui est indispensable sur cette question, et, comme l’a également indiqué M. Pedersen, pour ouvrir à terme la voie à des processus politiques plus larges qui, nous l’espérons, profiteront au peuple syrien. Nous, membres du Conseil, devons continuer d’appuyer cet effort.

Deuxièmement, l’Indonésie rappelle qu’il importe que toutes les parties réaffirment leur ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de la République arabe syrienne. Il s’agit d’une base nécessaire pour faire avancer le processus politique dans le cadre de la résolution 2254 (2015).

Troisièmement, en l’absence d’une solution politique, la situation en Syrie continuera de se détériorer, et nous ne devons pas laisser cela se produire. De nombreux membres du Conseil ont exprimé leurs graves préoccupations face à la situation humanitaire en Syrie, nous exhortant à mettre immédiatement fin aux souffrances des civils dans le besoin. Encore une fois, le règlement durable de la crise ne sera possible que grâce à un processus politique inclusif dirigé par les Syriens, qui réponde aux aspirations légitimes du peuple syrien. Seuls les Syriens pourront décider de leur avenir.

Nous nous félicitons des différents dialogues en faveur du processus politique facilité par l’ONU en Syrie. Nous nous félicitons également de la participation des diverses parties prenantes qui désirent voir régner la paix dans cette région. Cette approche constructive doit se poursuivre et être renforcée. La communauté internationale a son propre rôle à jouer pour aider la Syrie à surmonter la crise, et le Conseil a également la responsabilité de contribuer à alléger les souffrances des millions de civils en Syrie. J’espère que nous nous acquitterons de cette responsabilité aujourd’hui en adoptant le projet de résolution sur le mécanisme transfrontalier. Inshallah.

Par ailleurs, nous voudrions faire écho à la déclaration de Mme Wronecka. Je ne sais pas si le moment est bien choisi, mais on m’a informé qu’il s’agissait de la dernière séance du Conseil prévue, du moins je l’espère. La présente séance étant la dernière séance publique du Conseil prévue pour cette année, l’Indonésie tient à remercier tous ses collègues et les membres sortants – la Côte d’Ivoire, la Guinée équatoriale, le Pérou, la Pologne et son voisin dans la salle, le Koweït – de leur solide coopération et de leur ferme attachement au maintien de la paix et de la sécurité internationales. Nous avons travaillé en étroite collaboration au cours de l’année écoulée, et ce fut un grand plaisir de travailler avec tous les représentants permanents, le personnel des missions, les experts et les coordonnateurs politiques, qui ont beaucoup fait pour remplir le mandat et poursuivre la quête du Conseil consistant à garantir la paix et la sécurité. Une fois encore, nous présentons nos meilleurs voeux à tous nos collègues. Nous attendons avec intérêt, à compter du 1er janvier, de travailler aux côtés des membres nouvellement élus. Joyeux Noël et bonne année à toutes et tous.

M. Pecsteen de Buytswerve (Belgique)  : Je voudrais tout d’abord remercier l’Envoyé spécial Pedersen pour son exposé. Nous soutenons son travail et son engagement afin de trouver une solution politique en Syrie. Je remercie également Mme Rajaa Altalli.

Je vais intervenir sur deux points, d’abord sur la Commission constitutionnelle et les mesures de confiance. Une nouvelle dynamique semblait se mettre en place dans le dossier politique, depuis la création de la Commission constitutionnelle. Il y avait l’espoir qu’après neuf ans de conflit, la Syrie fasse un premier pas vers la paix. La Belgique regrette que la deuxième session de la Commission n’ait pas réussi à se mettre d’accord sur l’ordre du jour. Le Gouvernement syrien semble démontrer peu d’intérêt pour un processus inclusif. Nous espérons que les parties saisiront l’occasion d’une nouvelle session de la Commission constitutionnelle à Genève prochainement. La bonne foi des autorités syriennes sera évaluée sur la base des résultats.

En effet, les travaux de la Commission peuvent constituer un premier pas dans le processus politique, uniquement si les parties sont pleinement engagées dans le processus. Nous appelons les États ayant de l’influence à l’égard des autorités syriennes à exercer cette influence. Cela dit, le processus politique ne se limite pas à la Commission constitutionnelle. La Belgique attache beaucoup d’importance à la justice transitionnelle. Il appartient aux différentes parties de trouver une compréhension commune des faits, dans la transparence et l’égalité, afin que la réconciliation puisse avoir lieu. La réconciliation n’est pas un processus isolé, c’est la fin d’un chemin long et ardu, que les parties doivent parcourir ensemble – un processus dans lequel la confiance doit s’établir. L’Envoyé spécial nous rappelle chaque mois l’importance de la mise en place de ces mesures de confiance. Des milliers de Syriens continuent d’être arrêtés et détenus arbitrairement. Nous appelons à nouveau la Syrie à prendre en compte l’importance cruciale de ce dossier, comme signe de bonne foi.

Deuxièmement, la réalité de la situation sur le terrain est sombre. Dans le nord-est, des milliers de personnes déplacées lors de l’incursion turque le sont toujours. Dans le nord-ouest, des rapports nous parviennent, indiquant une nouvelle offensive lancée à Edleb encore, ce matin même, après que l’on a déjà pu constater une augmentation de l’intensité de la violence début décembre. Nous appelons toutes les parties à instaurer avec urgence un cessez-le-feu à l’échelle nationale, comme le prévoit la résolution 2254 (2015). Le Gouvernement syrien a une obligation particulière dans la mise en place, dans le pays, d’un environnement sûr, stable et calme. L’absence de conflit armé doit être garantie. Cela implique aussi la protection des droits légaux, et l’absence de poursuites, de répression et d’enrôlement forcé dans l’armée.

M. Ipo (Côte d’Ivoire) : Ma délégation salue la tenue de cette séance d’information consacrée aux derniers développements du processus politique en République arabe syrienne et félicite M. Geir Pedersen, Envoyé spécial du Secrétaire général, pour son exposé circonstancié. Nous remercions également Mme Rajaa Altalli, membre de la société civile syrienne, pour son exposé.

Ma délégation se félicite à nouveau du lancement, le 30 octobre à Genève, des travaux de la Commission constitutionnelle, accueillie favorablement par l’ensemble de la communauté internationale, 20 mois après le Congrès du dialogue national syrien de Sotchi du 30 janvier 2018, ayant décidé de la mise en place de ladite Commission. Ces avancées, résultant des efforts de médiation et de bons offices de l’Envoyé spécial, et qui ont permis la conclusion d’un accord entre le Gouvernement de la République arabe syrienne et la Commission de négociation syrienne sur la composition de la Commission constitutionnelle, constituent des signaux fort encourageants et une lueur d’espoir pour la relance du processus de paix.

Ma délégation note également avec satisfaction la tenue, le 11 décembre, à Nour-Soultan, du quatorzième cycle des pourparlers d’Astana, qui a réuni les garants du processus d’Astana, à savoir l’Iran, la Russie et la Turquie, le Gouvernement syrien et l’opposition, ainsi que la Jordanie, le Liban, l’Iraq et les Nations Unies, en qualité d’observateurs. Dans la déclaration conjointe qui a sanctionné cette rencontre, les garants du processus d’Astana confirment leur engagement continu envers la souveraineté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale de la Syrie. Ils expriment en outre leur préoccupation face à la hausse des activités terroristes dans la province d’Edleb, ainsi que leur volonté de coopérer pour éliminer les groupes terroristes en Syrie, y compris l’État islamique, le Front El-Nosra et les autres groupes désignés comme terroristes par les Nations Unies.

Ma délégation note avec regret les difficultés rencontrées lors des discussions qui ont eu lieu à Genève, le 29 novembre, au cours de la deuxième session de la
Commission constitutionnelle, et la non-tenue de la réunion du comité des 45 membres, faute d’accord entre le Gouvernement et l’opposition sur l’ordre du jour. Dans ce contexte, la Côte d’Ivoire exhorte toutes les parties à continuer de travailler de façon constructive à la poursuite des pourparlers. En outre, ma délégation appelle tous les acteurs régionaux et internationaux à maintenir leur engagement et leur soutien continu au processus politique. Elle exhorte les parties au conflit à la cessation des hostilités sur l’ensemble du territoire syrien, à la poursuite des mesures de confiance telles que la libération réciproque ou unilatérale des détenus, ainsi que la protection des civils dans la zone de désescalade d’Edleb et dans la région environnante.

La Côte d’Ivoire appelle les parties syriennes à privilégier la voie du dialogue et l’intérêt du peuple syrien, et à reprendre les travaux de la Commission constitutionnelle en vue d’élections justes, crédibles et transparentes, gage de paix et de stabilité durables en Syrie et dans la région. Aussi exhorte-t-elle le Conseil de sécurité à apporter son plein soutien aux efforts de l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Geir Pedersen, en vue d’un règlement politique du conflit syrien, conformément aux dispositions pertinentes de la résolution 2254 (2015).

Puisque c’est la dernière séance publique programmée à laquelle ma délégation prend part avant le terme du mandat de mon pays, qu’il me soit permis d’exprimer, au nom du Représentant permanent de la Côte d’Ivoire auprès de l’Organisation des Nations Unies, l’Ambassadeur Léon Adom, du Président de la République, S. E. M. Alassane Ouattara, et du Gouvernement et du peuple ivoiriens, notre profonde gratitude aux membres du Conseil de sécurité pour le soutien inestimable dont la Côte d’Ivoire a bénéficié durant ces deux années. Nos vifs remerciements s’adressent également au Secrétaire général, M. António Guterres, et à tous les membres du Secrétariat pour leur précieux concours tout au long de ce mandat, et notamment à l’occasion de la présidence ivoirienne du Conseil de sécurité, au cours du mois de décembre 2018. Je ne saurais terminer sans exprimer notre très haute appréciation de la fructueuse collaboration entre ma délégation et les autres membres sortants du Conseil, de même que sans adresser mes voeux de plein succès aux membres entrants. La Côte d’Ivoire, qui a eu l’honneur de participer aux travaux du Conseil de sécurité durant ces deux dernières années, entend continuer de partager son expérience, ses valeurs et ses principes dans d’autres instances des Nations Unies.

M. Popolizio Bardales (Pérou) (parle en espagnol) : Nous nous félicitons de la convocation de la présente séance d’information, et remercions Mme Altalli et M. Pedersen de leurs exposés complets et éclairants ce matin. Nous saluons le travail intensif et toujours prudent dont s’acquitte M. Pedersen pour parvenir à rapprocher les parties d’un règlement politique sans exclusive. Les répercussions du conflit syrien sur la population et sur la stabilité régionale nous amène à réaffirmer l’urgente nécessité d’avancer dans le cadre du processus lancé par l’ONU. Le Communiqué de Genève (S/2012/522, annexe) et la résolution 2254 (2015) doivent continuer de guider nos efforts.

Nous sommes, par conséquent, préoccupés par les faits nouveaux décrits ce matin par l’Envoyé spécial, qui mettent en évidence le peu de progrès réalisés lors du deuxième cycle des travaux de la Commission constitutionnelle, en raison d’un manque apparent de volonté de la part du Gouvernement syrien. Cette situation ne va pas dans le sens des grands espoirs nourris par la communauté internationale en ce qui concerne les travaux de la Commission, dont il est attendu qu’elle rédige une nouvelle Constitution qui jettera les bases politiques et institutionnelles d’une paix durable.

Nous notons qu’il est urgent d’enregistrer des résultats tangibles à cet égard, car tout nouveau retard dans le règlement des questions de base, telles que l’adoption de l’ordre du jour et du programme de travail de la Commission, aurait une incidence négative sur la crédibilité du processus. Nous encourageons les parties, en particulier les autorités syriennes, à faire preuve de souplesse et d’un véritable engagement, afin de trouver des points de convergence qui permettront d’instaurer un meilleur climat d’entente. Nous notons le rôle central joué par l’Envoyé spécial dans ce domaine, en tant que facilitateur et créateur de consensus, et soulignons le large appui que la communauté internationale doit, de ce fait, lui accorder.

Nous considérons qu’il est essentiel que dans le cadre des efforts déployés au sein de la Commission constitutionnelle, nous encouragions l’adoption de mesures de confiance qui contribueront à créer un environnement plus favorable à la réconciliation syrienne. Concrètement, nous attendons des progrès plus importants dans l’identification des personnes portées disparues, la remise des dépouilles mortelles et la libération des détenus et des disparus. Faire face à la situation grave dans laquelle se trouvent les millions de réfugiés et de déplacés constitue un autre grand défi
à relever. Cela requiert non seulement des ressources financières, mais surtout une volonté politique pour leur garantir un retour sûr et digne dans le respect des paramètres internationalement acceptés.

Nous soulignons également la nécessité d’éviter une escalade du conflit qui hypothéquerait les chances de parvenir à un règlement politique. Les perspectives de réalisation d’une paix durable en Syrie, notamment par la mise en place de la Commission constitutionnelle susmentionnée, dépendent dans une large mesure de la capacité d’empêcher qu’Edleb ne devienne le théâtre d’une nouvelle catastrophe humanitaire.

Nous réaffirmons le plein attachement du Pérou à la souveraineté, à l’intégrité territoriale et à l’unité de la Syrie. À cet égard, toute détente ou tout autre accord devra toujours être provisoire et ne devra jamais conduire à une partition de facto du pays. Il en va de même de la présence des forces étrangères.

Comme l’ont fait certains de mes collègues avant moi, nous présumons que cette séance est probablement la dernière du mois sous la présidence des États-Unis et marque la fin de notre mandat au Conseil de sécurité. Dans ce contexte, je tiens à vous féliciter, Madame la Présidente, ainsi que toute votre équipe, du brio avec lequel vous avez conduit nos travaux en décembre. J’adresse également nos meilleurs voeux de succès à la délégation vietnamienne pour sa future présidence en janvier, ainsi qu’aux membres nouvellement élus qui rejoindront le Conseil en 2020, à savoir l’Estonie, le Niger, la Tunisie et Saint-Vincent-et-les Grenadines. Le Pérou tient à remercier tous les membres du Conseil de sécurité ainsi que le Secrétariat de leur appui de tous les instants, ainsi que de leur coopération et de leur amitié tout au long de ces deux années intenses d’efforts communs au service du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Ce fut un privilège pour le Pérou de participer au Conseil de sécurité.

M. Esono Mbengono (Guinée équatoriale) (parle en espagnol) : Nous remercions les États-Unis d’avoir organisé la séance d’aujourd’hui et les félicitons de leur présidence en décembre. Nous remercions également l’Envoyé spécial Geir Pedersen de son exposé sur le processus politique en République arabe syrienne. Nous l’assurons une fois de plus de notre plus haute considération pour les efforts admirables qu’il déploie en sa qualité de facilitateur de la Commission constitutionnelle. Nous remercions également Mme Rajaa Altalli de son exposé.

En ce qui concerne les travaux de la Commission constitutionnelle à Genève, la République de Guinée équatoriale déplore l’absence de progrès depuis le premier cycle de discussions et encourage les différentes délégations à surmonter les divergences qui ont empêché l’adoption de l’ordre du jour de la deuxième réunion à la fin du mois de novembre. Dans ce contexte, la convocation d’un troisième cycle de négociations s’avère indispensable pour obtenir des résultats positifs et tangibles qui répondent aux intérêts et aux aspirations du peuple syrien.

Le Gouvernement de la République de Guinée équatoriale se veut optimiste et espère qu’un terrain d’entente pourra être trouvé pour surmonter les désaccords entre les parties. Il nourrit l’espoir que celles-ci participeront objectivement aux travaux de la Commission. Nous rappelons la nécessité d’éviter toute ingérence extérieure, car il s’agit d’un processus pleinement souverain et syrien qui doit être régi par la quête du consensus exclusivement entre les parties nationales réunies à Genève. Si l’on veut que le processus politique progresse de manière décisive, aucune force ne doit tenter de saper le processus de réconciliation du peuple syrien et la modification de sa Constitution.

Nous convenons que la menace d’une ingérence extérieure va clairement à l’encontre de la résolution 2254 (2015). À cet égard, mon gouvernement continue de se féliciter des bons offices prodigués par l’ONU et du rôle de chef de file qu’elle joue pour appuyer ce processus et mettre fin aux tentatives de blocage des travaux de la Commission. Nous réaffirmons une fois encore que la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale de la République arabe syrienne doivent être pleinement respectées tout au long de ce processus. Nous nous félicitons de la déclaration conjointe de la quatorzième série de consultations des garants d’Astana, qui se sont dit déterminés à appuyer les travaux de la Commission et à régler d’autres questions clefs qui permettraient de rétablir la paix et la stabilité en Syrie.

Nous devons être conscients du fait que la Commission doit travailler de manière constructive. Cela exige de toutes les parties qu’elles agissent afin d’éviter que les tensions dans le nord-ouest n’entravent ses efforts. Par ailleurs, nous soulignons à nouveau l’importance des mesures de confiance comme moyen de dynamiser le processus politique. Comme nous n’avons eu de cesse de le répéter, la libération réciproque à grande échelle des détenus et des personnes enlevées
pourrait à n’en pas douter constituer un pas en avant important à cet égard.

Dans un autre ordre d’idées, et à la suite de mes collègues qui m’ont précédé, je crois comprendre, d’après le programme de travail de ce mois-ci, que c’est la dernière séance ordinaire à laquelle la délégation de la République de Guinée équatoriale participe en tant que membre non permanent de cet auguste organe. À cet égard, nous voudrions remercier les délégations de la République française, du Royaume-Uni, de la République populaire de Chine, de la Fédération de Russie et des États-Unis d’Amérique de leur dévouement sans faille à préserver le rôle actif qui revient au Conseil de sécurité dans la promotion de la paix et de la sécurité internationales, ainsi que le prévoit la Charte des Nations Unies. Nous remercions également tous nos collègues membres non permanents, y compris ceux que nous laissons derrière nous, qui, de par leur volonté constructive, ont contribué et continuent de contribuer à l’action importante des membres permanents.

Aux nouveaux membres non permanents qui prendront leurs fonctions le 1er janvier, nous adressons nos voeux de succès dans leurs mandats respectifs. Nous quittons le Conseil avec l’espoir que ses membres continueront d’oeuvrer dans un esprit de consensus et de sagesse pour régler les conflits et les menaces les plus graves auxquels notre monde bien-aimé est actuellement confronté.

Nous remercions tout le monde, y compris le personnel du Secrétariat et de la Division des affaires du Conseil de sécurité, ainsi que les interprètes et les préposés aux salles de conférence, de nous avoir fourni l’appui nécessaire et de nous avoir beaucoup appris. Je m’en voudrais de ne pas remercier également le personnel diplomatique et les experts personnels et locaux de la Mission permanente de la Guinée équatoriale pour le travail, les contributions et les sacrifices qu’ils ont consentis pour notre pays ici à New York, d’autant plus que la Guinée équatoriale n’avait jamais auparavant accompli un mandat au Conseil. Nous en sommes très fiers.

Enfin, je voudrais dire qu’à l’approche de la fin de notre mandat au Conseil de sécurité, ces deux dernières années, la Guinée équatoriale a essayé avec beaucoup de fierté, de volonté et de détermination d’être à la hauteur de la confiance que le monde a placée en nous, de servir, et d’être utile au monde et à l’humanité dans notre quête d’une paix et d’une sécurité pérennes et de contribuer aux efforts de règlement pacifique des conflits et des différends afin de faire du monde un endroit meilleur pour nous tous. Tout cela est inspiré par le caractère pacifique et solidaire et le dévouement du peuple et des institutions de la Guinée équatoriale, et surtout par la volonté politique et la philosophie politique de S. E. Obiang Nguema Mbasogo, Président de la République de Guinée équatoriale, au nom duquel je réitère nos remerciements à tous les départements de l’ONU pour leur coopération.

M. Nebenzia (Fédération de Russie) (parle en russe) : Nous remercions M. Geir Pedersen, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, de son exposé détaillé. Nous avons écouté avec intérêt ses idées sur la méthodologie à suivre pour faciliter un règlement syrien. Nous avons également écouté la déclaration de Mme Rajaa Altalli.

La Russie reste attachée au principe de la recherche d’un règlement pacifique de la crise syrienne par des moyens politiques et diplomatiques. Dans le but de faire avancer ce processus, la Commission constitutionnelle a été créée sous les auspices de l’ONU et a commencé ses travaux le 30 octobre à Genève. Sa création et le lancement de ses travaux, avec l’aide précieuse de la réunion tenue dans le cadre du processus d’Astana, sont des réussites indéniables pour le peuple syrien. Comme l’a noté l’Envoyé spécial, personne ne s’attendait à ce que le travail de la Commission soit facile. Pour la première fois, les deux camps opposés en Syrie sont venus à la table des négociations, où ils discuteront de l’avenir de leur pays, un avenir qui prendra en compte les intérêts de tous les secteurs de la société syrienne. C’est une grande responsabilité et une tâche difficile. Au cours du deuxième cycle de dialogue à Genève, les parties ont tenté de s’entendre sur les principales approches à adopter dans le cadre de leurs futurs efforts. Nous espérons que les vues divergentes qu’ils ont exprimées leur permettront de mieux préparer la prochaine réunion.

Nous pensons qu’il est contre-productif de dramatiser la situation et de pointer du doigt des coupables. Il est important de donner aux Syriens la possibilité de comprendre comment procéder pour parvenir à un accord entre eux. Le principe central des travaux de la Commission constitutionnelle est énoncé dans la résolution 2254 (2015) et présuppose la facilitation d’un processus politique dirigé et pris en charge par les Syriens eux-mêmes. L’Envoyé spécial doit les aider dans cette tâche, et nous sommes à notre tour prêts à appuyer ses efforts. Nous ne devons ni faire
pression sur les Syriens ni imposer à leurs efforts des délais irréalistes. Ils s’engagent dans un dialogue sur des questions fatidiques qui ne peuvent être résolues du jour au lendemain. Quant à nous, nous encouragerons une approche constructive de la part de toutes les parties. À cette fin, nous poursuivons notre collaboration dans le cadre d’Astana avec nos partenaires d’Iran et de Turquie. Les 10 et 11 décembre, à Nour-Soultan, nous avons participé à la quatorzième réunion internationale sur la Syrie, une réunion tenue dans le cadre du processus d’Astana, avec la participation constructive des délégations iraquienne, jordanienne et libanaise en qualité d’observateurs. La réunion a abouti à l’adoption d’une déclaration commune que les membres connaissent peut-être. Il a également été souligné que toutes les activités des pays garants d’Astana seront fondées sur le respect le plus strict de la souveraineté, de l’indépendance, de l’unité et de l’intégrité territoriale de la République arabe syrienne.

Outre le volet politique, les discussions d’Astana portent sur d’autres aspects de la situation en Syrie, tels que le renforcement des mesures de confiance et la situation humanitaire, notamment l’acheminement de l’aide humanitaire dans toute la Syrie sans discrimination, sans politisation ni imposition de conditions préalables. Le groupe de travail de la réunion tenue dans le cadre du processus d’Astana poursuit ses efforts pour assurer la libération des personnes détenues de force. À cet égard, nous voudrions souligner un élément que beaucoup ont négligé, à savoir que le 21 novembre, les autorités syriennes, avec la médiation du personnel militaire russe, ont libéré 120 détenus dans le cadre d’un important acte humanitaire visant également à renforcer la confiance. La tournure positive que prennent aujourd’hui nos efforts en vue de trouver un règlement politique crée les conditions propices à l’adoption de mesures concrètes pour la fourniture d’une assistance humanitaire globale dans le cadre de la reconstruction de la Syrie après le conflit.

Nous tenons à souligner que des représentants du Gouvernement syrien et de la société civile, ainsi que de l’opposition syrienne, y compris la partie de celle-ci qui contrôle les groupes armés, participent tous aux travaux de la Commission constitutionnelle. Cela signifie que tous ceux qui ont un véritable intérêt dans le processus de détermination de l’avenir politique de la Syrie ont rejoint ce processus pacifique. Et pourtant, le peuple syrien continue d’être menacé par des voyous et des terroristes éhontés tels les militants de Hayat Tahrir al-Cham, que le Conseil de sécurité a désigné comme une organisation terroriste, et qui se sont retranchés dans Edleb. Les terroristes en Syrie doivent être éliminés une fois pour toutes.

Nous tenons à souligner une fois de plus que la Syrie est l’un des États clefs du Moyen-Orient et fait partie intégrante du monde arabe. Elle ne peut pas être artificiellement arrachée de son contexte régional. À cet égard, nous demandons instamment le rétablissement de Damas dans la famille des pays arabes dès que possible, ce qui contribuera à rétablir l’harmonie entre les Arabes et à améliorer la situation au Moyen-Orient. C’est un processus naturel et objectif qui progresse malgré l’opposition extérieure. Nous invitons tous ceux qui souhaitent réellement que la paix soit rétablie en Syrie à se joindre à nos efforts dans un esprit constructif.

Pour terminer, je voudrais remercier ceux de mes collègues qui quittent le Conseil de sécurité – dont la séance d’aujourd’hui sera pour beaucoup la dernière, ou du moins la dernière de ce cycle – pour leur collaboration au cours des deux dernières années. Nous avons beaucoup voyagé et accompli beaucoup de choses. Je tiens également à les remercier pour leur amitié et à leur souhaiter plein succès. Et je souhaite à tout le monde du bonheur pour Noël et le Nouvel An.

La Présidente (États-Unis) (parle en anglais) : Je vais maintenant faire une déclaration en ma qualité de représentante des États-Unis.

Je remercie Mme Altalli d’avoir partagé son histoire personnelle avec le Conseil de sécurité aujourd’hui. Il est vraiment important que le Conseil entende parler de son travail et de celui des autres défenseurs des droits de l’homme qui travaillent en prenant de grands risques personnels. Leurs efforts au nom de tous les Syriens sont courageux et des plus utiles. Nous apprécions et soutenons profondément les voix des représentants de la société civile syrienne, en particulier en ce qui concerne le rôle des femmes dans le processus politique. J’aimerais également remercier l’Envoyé spécial Pedersen pour son exposé d’aujourd’hui et pour son leadership cette année.

Grâce à la détermination de l’Envoyé spécial Pedersen, à la volonté des parties syriennes de faire un pas en avant et au soutien de la communauté internationale, en particulier du groupe restreint que forment la Turquie et la Russie, nous avons assisté à une percée politique notable après près de deux ans de négociations. Après le lancement réussi en octobre de la Commission constitutionnelle, les États-Unis et de nombreux membres du Conseil ont estimé qu’il existe
une dynamique propice à la création d’un ensemble de réformes constitutionnelles, conformément à la résolution 2254 (2015). Toutefois, la délégation du régime d’Assad a entamé le deuxième cycle de négociations avec des conditions préalables, ce qui a bloqué tout progrès. L’appel du régime à un accord sur un ensemble de piliers nationaux ne représentait pas seulement une propagande éhontée, il violait également l’esprit du règlement intérieur de la Commission constitutionnelle et entravait le travail d’une importante initiative diplomatique, une initiative soutenue par les États-Unis, nos partenaires du groupe restreint et le groupe Astana.

Au cours de la nouvelle année, le Conseil doit appuyer pleinement les efforts déployés par l’Envoyé spécial pour faciliter les travaux de la Commission. En signe de soutien, les États-Unis demandent au Bureau de l’Envoyé spécial de diffuser des résumés écrits officiels de la dernière série de réunions de la Commission tenues en novembre. Nous demandons que des rapports similaires soient publiés après toutes les réunions à venir. Avec des rapports écrits, le Conseil peut soutenir les efforts de l’Envoyé spécial Pedersen pour demander des comptes aux représentants et, nous l’espérons, mettre fin à l’obstruction et aux retards. Toutefois, si Damas ne prend pas au sérieux les travaux de la Commission constitutionnelle, le Conseil doit réexaminer si le Comité est un mécanisme viable pour la mise en oeuvre des réformes auxquelles appelle la résolution 2254 (2015). Au-delà de la question de la Commission, nous espérons qu’en 2020, des progrès seront accomplis en ce qui concerne deux objectifs spécifiques de la résolution 2254 (2015), pour faire avancer le processus politique, à savoir un cessez-le-feu à l’échelle nationale et la libération unilatérale immédiate des détenus civils, notamment les femmes, les enfants et les personnes âgées.

Le régime d’Al‑Assad et ses soutiens – la Russie et l’Iran – doivent s’engager en faveur d’un cessez-le-feu immédiat à l’échelle nationale. Cette semaine, les hostilités en cours continuent de faire des morts parmi les civils et de déstabiliser la région et risquent de réduire à néant tous les progrès réalisés par la Commission constitutionnelle. Il ne doit pas y avoir d’offensive de Noël à Edleb, et toutes les attaques contre des civils ou des infrastructures civiles doivent cesser.

Les États-Unis appellent également le régime d’Al‑Assad à libérer immédiatement et unilatéralement les civils qu’il détient toujours dans des centres de détention et des prisons sans motif valable et qui sont même soumis à des actes de torture. En ce moment, nous exposons dans le hall de notre Mission permanente des photographies prises par le Réseau syrien pour les droits de l’homme pour rendre hommage à plusieurs des quelque 128 000 Syriens qui ont été détenus illégalement et, dans de nombreux cas, torturés et tués par le régime d’Al‑Assad. Je voudrais revenir brièvement sur l’une des histoires humaines qui se cachent derrière les images affichées à nos fenêtres.

Leila, une auxiliaire médicale du Croissant-Rouge arabe syrien, a été abattue par un tireur embusqué du Gouvernement puis arrêtée – pas une fois, mais deux fois – pour avoir fourni un appui matériel à des terroristes. Elle a fait l’objet de passages à tabac quotidiens dans les prisons du régime. Quel était son crime ? Elle prodiguait des soins médicaux à des personnes blessées tout en manifestant pacifiquement en faveur de la réforme. C’est tout simplement révoltant.

Malheureusement, l’histoire de Leila n’est que trop courante, et bien que des personnes comme elle continuent d’apporter avec dévouement une assistance médicale à tous ceux qui en ont besoin, elles ne peuvent pas retourner en Syrie en toute sécurité par crainte d’être prises pour cible par le régime. Nous exigeons la libération massive des personnes détenues arbitrairement. Je tiens à dire clairement aujourd’hui qu’il n’y aura pas de paix durable tant que le régime ne changera pas son comportement inhumain et destructeur à l’encontre du peuple syrien et que des mesures de responsabilisation n’auront pas été mises en place.

Les États-Unis sont fermement convaincus que la réalisation de ces objectifs au cours des 12 prochains mois permettra de réaliser des progrès importants en vue de mettre fin au conflit et d’instaurer une paix pérenne et négociée. Nous nous réjouissons à la perspective d’oeuvrer aux côtés de tous les membres du Conseil pour atteindre ces objectifs et faire avancer tous les aspects de la résolution 2254 (2015) au cours de l’année à venir.

Je reprends à présent mes fonctions de Présidente du Conseil.

Je donne la parole au représentant de la République arabe syrienne.

M. Falouh (République arabe syrienne) (parle en arabe) : Je remercie l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, M. Geir Pedersen, de son exposé.

Il y a quelques jours, le quatorzième cycle de réunions du processus d’Astana s’est tenu. Le
communiqué final a réaffirmé le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’unité de la Syrie, ainsi que la coopération avec le Gouvernement syrien jusqu’à l’élimination des groupes terroristes présents sur son territoire. Le communiqué a également rejeté la saisie illégale de champs pétrolifères en Syrie et a réaffirmé le droit de la Syrie d’en reprendre possession. Tout en remerciant les deux garants – la Russie et l’Iran – et l’État hôte, le Kazakhstan, de leur contribution au succès de ce cycle de réunions, nous réaffirmons la nécessité pour toutes les parties de respecter les résultats du processus d’Astana, notamment en éliminant les groupes terroristes armés, en mettant un terme à toutes les formes de présence militaire illégale et en appuyant le processus politique. Nous déplorons que jusqu’à présent, le régime turc n’ait guère manifesté de l’intérêt à honorer honnêtement et sérieusement ces engagements.

Le 29 novembre, le deuxième cycle de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle s’est achevé, sans aucune réunion entre les parties au dialogue inter-syrien. En outre, il n’y a pas eu d’accord sur l’ordre du jour. Cela est déplorable, et la responsabilité revient à la délégation de ce que l’on appelle le Haut Comité des négociations, qui s’est présentée à ces discussions avec tout un éventail de conditions préalables caractérisées par l’entêtement, la désinformation, des atermoiements et des violations du mandat, des principes et du règlement intérieur de la Commission constitutionnelle sur lesquels les parties s’étaient mises d’accord.

La délégation du « Haut Comité des négociations » s’est également présentée à ces réunions alors qu’était en cours une campagne médiatique hostile, qui va à l’encontre de ce qui avait été convenu dans le code de conduite. Il est très clair que l’objectif de cette délégation était d’entraver sérieusement le lancement des travaux de la Commission dès le départ et de déformer les faits en accusant les autres parties de le faire. Les Gouvernements de certains États ont fait preuve de complicité dans le cadre de cette campagne médiatique montée de toutes pièces. J’en veux pour preuve les déclarations de leurs responsables et la manière dont leurs médias nationaux ont présenté les événements relatifs au deuxième cycle de réunions, pour inciter la délégation de ce qui est connu sous le nom de Haut Comité des négociations à continuer sa campagne de désinformation et à adopter une position hostile à l’égard des autres membres de la Commission constitutionnelle. Bien entendu, je parle de ces mêmes gouvernements qui sont hostiles à la Syrie depuis neuf ans.

Malgré tout cela, la délégation nationale syrienne a résisté à ces manoeuvres flagrantes et indignes et a continué de respecter les principes de coopération, dans un esprit constructif. Nous avons appris des membres de la délégation nationale syrienne qu’ils avaient proposé à plusieurs reprises d’entrer dans la salle de réunion afin que les deux parties puissent présenter leurs positions. Toutefois, l’autre partie a rejeté cette proposition et s’est entêtée à imposer des conditions préalables et à présenter des vues et des références dont il était clair qu’ils lui avaient été imposées d’avance.

La vision de la délégation nationale syrienne visait à renforcer la confiance entre les parties au dialogue et à créer une occasion de discuter de tout ce qui a trait à l’avenir de la Syrie. À cet égard, nous avons appris que les idées des membres de la délégation nationale syrienne, qu’ils ont présentées avec beaucoup d’ouverture et de transparence, sur la base des piliers nationaux appuyés par tous les citoyens syriens, notamment le rejet du terrorisme, de l’extrémisme et de la violence ; le rejet de toute présence, agression ou occupation étrangère ; et la lutte contre les effets néfastes de l’embargo économique imposé au peuple syrien. À cet égard, nous rappelons que la délégation nationale syrienne dispose d’assez de liberté et de souplesse pour prendre les décisions qui s’imposent dans le cadre de consultations intenses et sérieuses entre ses membres, afin de parvenir à des positions et de présenter des perspectives constructives pour régler toute question dont la Commission constitutionnelle est saisie.

Ma délégation a écouté avec grand intérêt l’exposé de l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Geir Pedersen. À cet égard, la République arabe syrienne réaffirme la nécessité d’appuyer les efforts déployés par M. Pedersen pour faciliter les travaux de la Commission, garantir son indépendance et veiller à ce qu’elle soit exclusivement contrôlée et dirigée par les Syriens, et d’appuyer les deux coprésidents de la Commission constitutionnelle pour qu’ils puissent diriger les réunions de manière efficace, conformément aux paramètres convenus et aux dispositions clefs du règlement intérieur.

Nous avons entendu les déclarations des représentants de certains États membres du Conseil de sécurité, notamment les États-Unis d’Amérique, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne, qui reflètent clairement une politique interventionniste en ce qui concerne des questions intérieures syriennes. Il est clair que les gouvernements de ces pays, ainsi que le régime au
pouvoir en Turquie et d’autres parties ne cesseront pas de s’ingérer de façon flagrante dans les affaires syriennes, soit en continuant de soutenir le terrorisme de Hay’at Tahrir el-Cham’ à Edleb et en offrant une couverture à ses parrains, soit en menant une intervention militaire directe contre des territoires syriens ou en imposant des sanctions économiques unilatérales au peuple syrien. Ce que nous voulons, c’est que tous cela soit bien compris par tous ici, à savoir que ces gouvernements ne cesseront pas de jouer de tels rôles négatifs et qu’ils continueront d’exercer des pressions politiques et économiques sur la Syrie.

Les membres du Conseil doivent garder à l’esprit que celles et ceux qui s’attaquent au Gouvernement syrien ici au Conseil de sécurité sont les représentants d’États dont les forces armées occupent des parties du territoire syrien et dont les Gouvernements imposent un embargo économique oppressant au peuple syrien, empêchent la reconstruction et la guérison, entravent le retour volontaire des réfugiés et des déplacés dans leurs foyers, occupent les puits de pétrole et de gaz en Syrie, et affirment ouvertement qu’ils aiment beaucoup le pétrole syrien, qu’ils ont mis la main dessus et qu’ils en feront ce qu’ils voudront. Alors, peut-on raisonnablement s’attendre à quelque chose de positif de la part de ces derniers ou du régime turc en termes de construction de l’avenir de la Syrie et de garantie du bien-être et de la sécurité du peuple syrien ?

Pour terminer, je voudrais réaffirmer que la République arabe syrienne a toujours appliqué et continuera d’appliquer une politique nationale indépendante fondée sur la défense des intérêts du peuple syrien, de ses convictions et de sa souveraineté. C’est ce qui nous pousse chaque fois à demander que certains pays membres du Conseil de sécurité cessent de l’utiliser comme un outil pour exercer des pressions sur la Commission constitutionnelle et lui permettent de travailler de façon indépendante afin que les Syriens soient rassurés quant à leur Constitution et à leur avenir.

La séance est levée à 12 h 10.

Source : Onu S/PV.8696