La séance est ouverte à 12 h 35.

La Présidente, Mme Craft (parle en anglais) : Conformément à l’article 37 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite le représentant de la République arabe syrienne à participer à la présente séance.

Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.

Les membres du Conseil sont saisis des documents S/2019/961 et S/2019/962, qui contiennent les textes de deux projets de résolution. Le Conseil est prêt à voter sur les projets de résolution dont il est saisi.

Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil qui souhaitent faire une déclaration.

M. Heusgen (Allemagne) (parle en anglais) : Je voudrais présenter brièvement le projet de résolution S/2019/961 au nom des corédacteurs, à savoir la Belgique, l’Allemagne et le Koweït.

La situation humanitaire désastreuse en Syrie nous a poussés à élaborer et à proposer ce projet de résolution. Ce matin encore, nous avons entendu parler des souffrances humaines dans le pays (voir S/PV.8696) dans le témoignage personnel d’une victime de la violence. Il y a encore plus de 11 millions de personnes en Syrie qui ont besoin d’une aide humanitaire, dont au moins 4 millions dépendent du mécanisme transfrontalier que le Conseil a décidé de créer il y a quelque temps en adoptant la résolution 2165 (2014). La sombre situation humanitaire nous a amenés à proposer le renouvellement du mécanisme transfrontalier.

Lors de nos discussions et de notre travail sur le texte, nous avons consulté tout le monde et proposé plusieurs versions. Nous avons reçu plusieurs demandes ; certains voulant inclure cinq points de passage au lieu de quatre et d’autres, seulement deux. La proposition dont le Conseil est saisi est fondée sur la réponse aux besoins humanitaires du peuple syrien. Nous comprenons que deux points de passage sont absolument essentiels. Il y en a un troisième, vers l’Iraq, dont le Bureau de la coordination des affaires humanitaires et l’Organisation mondiale de la Santé disent avoir besoin pour acheminer le matériel médical en Syrie. S’agissant du quatrième point de passage, qui n’a pas été utilisé au cours des 18 derniers mois, nous avons décidé de réexaminer la possibilité de le rouvrir dans six mois si le besoin s’en fait sentir. Nous étions également disposés à réduire la durée du renouvellement pour le faire passer de 12 à six mois, après quoi, si le Conseil estimait que la situation s’était suffisamment améliorée pour mettre fin au mécanisme, nous suivrions sa recommandation.

J’engage instamment nos collègues à voter pour ce projet de résolution afin de mettre fin aux souffrances de la population syrienne et de répondre aux besoins des 4 millions de personnes dont le sort dépend de la décision du Conseil.

M. Nebenzia (Fédération de Russie) (parle en russe) : La Fédération de Russie votera contre le projet de résolution S/2019/961 de la troïka humanitaire relatif au mécanisme d’assistance transfrontalière en Syrie.

Ce projet de résolution, qui a été renouvelé année après année, est obsolète et ne tient pas compte des changements survenus en Syrie depuis 2014, lorsque la résolution 2165 (2014) a été adoptée. À l’époque, le mécanisme a été créé dans l’urgence quand, en toute objectivité, il n’y avait pas d’autres moyens d’acheminer l’aide humanitaire dans les régions de la République arabe syrienne qui n’étaient pas sous le contrôle du Gouvernement.

Les autorités syriennes ont maintenant repris le contrôle de la majeure partie de leur territoire, de sorte que l’assistance transfrontière à ces régions n’est plus nécessaire. Le point de passage de la frontière avec la Jordanie n’est plus utilisé depuis juillet 2018. Selon les rapports de l’ONU, les livraisons qui transitent par le poste de contrôle à la frontière iraquienne sont insignifiantes et pourraient être effectuées par les postes officiels, contrôlés par l’armée syrienne, voire depuis le territoire syrien lui-même. Soit dit en passant, je voudrais signaler à mon collègue allemand que, selon les informations contenues dans le rapport du Secrétaire général sur l’aide humanitaire à la Syrie (S/2019/949), ce sont 1 million de personnes, et non 4 millions, qui recourent à l’aide transfrontière.

Je tiens également à rappeler au Conseil qu’un paragraphe clef de la résolution 2165 (2014), sur l’accès direct des organismes humanitaires de l’ONU à la zone d’opérations, n’a jamais été appliqué depuis que la résolution a été adoptée. Les militants qui contrôlent toujours certaines zones de la Syrie ne permettent pas au personnel humanitaire d’y accéder, préférant contrôler eux-mêmes le processus d’acheminement et de distribution de l’aide. Conséquence : une part
importante de cette aide n’est pas utilisée comme prévu. Je le répète : le mécanisme avait vocation à être une solution temporaire d’urgence. Compte tenu de la situation désastreuse à l’époque, il a permis de fournir une aide humanitaire en fonction des notifications fournies, à un moment où, conformément au droit international – à savoir à l’article 70 du Protocole additionnel I aux Conventions de Genève et à l’annexe I de la résolution 46/182 de l’Assemblée générale – , l’aide humanitaire devait être fournie avec le consentement des autorités officielles du pays bénéficiaire.

Au vu de la situation actuelle en Syrie, il est impératif que nous revenions aux paramètres établis pour l’aide humanitaire. Le deuxième alinéa du projet de résolution proposé par les co-rédacteurs évoque un ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la Syrie. En l’espèce, il est important de prendre également en considération les vues énoncées par Damas, au nom du pays bénéficiaire, dans une lettre datée du 10 décembre, adressée au Secrétaire général adjoint Mark Lowcock par M. Faisal Mekdad, Vice-Ministre des affaires étrangères de la République arabe syrienne, lettre que j’ai dans la main et qui expose clairement la position du Gouvernement syrien, pour lequel il est inacceptable de maintenir le mécanisme sous sa forme actuelle. Nous ne pouvons pas tous faire fi de la position du pays bénéficiaire.

Le projet de résolution proposé initialement par la troïka humanitaire suggérait que le texte en soit renouvelé automatiquement chaque année, sans être réexaminé ou adapté. Il contenait, et contient toujours, des dispositions qui n’ont rien à voir avec le volet humanitaire. À notre avis, cette approche est dictée par des motifs purement politiques. Nous avons fait part de nos préoccupations générales autour du texte dès le premier cycle de consultations. Lorsque nous avons constaté qu’il n’était pas possible de retravailler le document qui nous était présenté, nous avons proposé notre propre version de la résolution. Notre projet de résolution (S/2019/962) se concentre exclusivement sur les aspects humanitaires, et suggère d’éliminer les postes-frontières non utilisés. Je tiens en particulier à souligner quelque chose que nous avons dit à plusieurs reprises, à savoir que notre document proroge effectivement le mécanisme transfrontière. Nous n’y étions pas favorables dans le passé, mais nous ne l’avons pas bloqué, car nous avions conscience des besoins humanitaires de la population syrienne. Cette année, nous sommes prêts à l’appuyer. Il permet à l’aide humanitaire d’accéder au nord-ouest de la Syrie, où cette aide est encore indispensable. De notre côté, nous avons fait l’effort de répondre aux préoccupations de nos collègues.

En réponse, nous avons reçu une deuxième version du texte de la troïka humanitaire, puis une troisième, qui comportaient encore des dispositions déconnectées de la réalité objective. Cette approche nous semble injuste. Nous sommes dans l’obligation de nous répéter une nouvelle fois, puisque nos arguments n’ont manifestement pas été entendus par nos collègues durant l’étape préparatoire du vote d’aujourd’hui. Cela étant, il nous semble que nos arguments ont été délibérément ignorés. Guidés par des objectifs humanitaires, nous sommes d’accord pour étendre le mécanisme d’assistance transfrontière jusqu’aux zones où il est nécessaire. Une prorogation de six mois nous permettra à tous de réfléchir à ce que nous pouvons et devons faire pour garantir une utilisation efficace de cette aide humanitaire. Il ne faut pas que cela serve de prétexte à ceux de nos collègues qui sont tout prêts à bloquer la fourniture d’aide humanitaire au nom du calendrier imparti au mécanisme.

Pour toutes les raisons que je viens de citer, nous ne pouvons pas appuyer le projet de résolution de la troïka humanitaire, et nous appelons donc tous ceux qui souhaitent véritablement préserver l’aide humanitaire en Syrie, plutôt que poursuivre des objectifs politiques, à appuyer notre projet.

La Présidente (parle en anglais) : Je vais maintenant mettre aux voix le projet de résolution publié sous la cote S/2019/961, déposé par l’Allemagne, la Belgique et le Koweït.

Allemagne, Belgique et Koweït : projet de résolution

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 2042 (2012), 2043 (2012), 2118 (2013), 2139 (2014), 2165 (2014), 2175 (2014), 2191 (2014), 2209 (2015), 2235 (2015), 2254 (2015), 2258 (2015), 2268 (2016), 2286 (2016), 2332 (2016), 2336 (2016), 2393 (2017), 2401 (2018) et 2449 (2018) et les déclarations de sa présidence des 3 août 2011 (S/PRST/2011/16), 21 mars 2012 (S/PRST/2012/6), 5 avril 2012 (S/PRST/2012/10), 2 octobre 2013 (S/PRST/2013/15), 24 avril 2015 (S/PRST/2015/10), 17 août 2015 (S/PRST/2015/15) et 8 octobre 2019 (S/PRST/2019/12),

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la Syrie, ainsi qu’aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies,

Soulignant que plus de 11,1 millions en Syrie ont besoin d’assistance humanitaire et que le mécanisme transfrontières demeure une solution temporaire d’urgence permettant de répondre aux besoins d’aide humanitaire des populations auxquelles il est impossible d’accéder dans le cadre des opérations menées en Syrie,

Rappelant que toutes les parties doivent respecter les dispositions du droit international humanitaire sur la question et les principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence, soulignant qu’il importe, dans le cadre de l’aide humanitaire, de défendre les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, et rappelant qu’il importe également que les convois humanitaires parviennent à leurs destinataires,

Considérant que la situation humanitaire catastrophique qui règne en Syrie continue de faire peser une menace sur la paix et la sécurité dans la région,

Soulignant que l’Article 25 de la Charte des Nations Unies fait obligation aux États Membres d’accepter et d’appliquer ses décisions,

1. Exhorte toutes les parties à garantir qu’une aide humanitaire plus efficace et respectueuse des principes établis sera fournie durablement à la Syrie en 2020 ;

2. Exige de nouveau que toutes les parties, en particulier les autorités syriennes, s’acquittent sans délai des obligations que leur impose le droit international, notamment, selon les cas, le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, exige également qu’elles appliquent sans délai l’ensemble des dispositions de ses résolutions sur la question, notamment les résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014), 2258 (2015), 2332 (2016), 2393 (2017), 2401 (2018) et 2449 (2018), et réaffirme que certaines des exactions commises en Syrie pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ;

3. Décide de prolonger l’application des mesures prises aux paragraphes 2 et 3 de sa résolution 2165 (2014), à l’exclusion des dispositions concernant le point de passage de Ramta, pour une période de six mois reconductible une fois, sauf décision contraire de sa part ;

4. Exige que toutes les parties accordent aux convois humanitaires des entités des Nations Unies et de leurs partenaires d’exécution, notamment ceux qui transportent des fournitures médicales et chirurgicales, un accès sûr, durable et sans entrave à toutes les zones et populations recensées dans le cadre de l’évaluation des besoins réalisée par les entités des Nations Unies dans toutes les régions de la Syrie ;

5. Déclare de nouveau qu’en l’absence de règlement politique du conflit syrien, la situation continuera de se dégrader et exige à nouveau que toutes les dispositions de la résolution 2254 (2015) soient appliquées sans délai pour faciliter une transition politique conduite par les Syriens et prise en main par eux, conformément au Communiqué de Genève et comme énoncé dans les Déclarations du Groupe international de soutien pour la Syrie, en vue de mettre un terme au conflit, et souligne une fois encore que c’est au peuple syrien qu’il appartient de décider de l’avenir de son pays ;

6. Demande aux organismes humanitaires des Nations Unies d’améliorer la surveillance de l’acheminement et de la distribution des envois de secours des Nations Unies et de leur livraison sur le territoire syrien, et prie le Secrétaire général de mener, dans un délai de six mois à compter de l’adoption de la présente résolution, un examen indépendant des opérations humanitaires dans le cadre desquelles les organismes des Nations Unies franchissent les lignes de front et les frontières, dont il rendra compte par écrit, en y incluant des recommandations sur les moyens de renforcer encore le Mécanisme de surveillance des Nations Unies, ainsi que sur la nécessité d’autoriser à nouveau l’utilisation du point de passage de Ramta afin que l’aide humanitaire puisse être acheminée aux populations qui en ont besoin par les voies les plus directes, en tenant compte des vues des parties intéressées, notamment les autorités syriennes, les pays voisins de la Syrie concernés et les organismes humanitaires des Nations Unies et leurs partenaires d’exécution, et se déclare prêt à envisager d’autoriser la réouverture du point de passage de Ramta sur la base de ces recommandations ;

7. Prie le Secrétaire général de lui faire chaque mois le point de la situation et de lui soumettre régulièrement, et au moins tous les 60 jours, un rapport sur l’application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014), 2258 (2015), 2332 (2016), 2393 (2017), 2401 (2018) et 2449 (2018) et celle de la présente résolution ainsi que sur le respect de leurs dispositions par toutes les parties concernées en Syrie, et le prie également de continuer de lui faire part, dans ses rapports, de l’évolution d’ensemble de l’accès des agents humanitaires des Nations Unies à travers les frontières et les lignes de front, et de lui communiquer des informations plus détaillées sur l’aide humanitaire fournie dans le cadre des opérations humanitaires transfrontières des entités des Nations Unies, comme l’autorisent la résolution 2165 (2014) et la présente résolution, y compris le nombre de bénéficiaires, les lieux de livraison de l’aide dans les districts et le volume et la nature des marchandises livrées ;

8. Réaffirme qu’en cas de non-respect de la présente résolution ou des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014), 2258 (2015), 2332 (2016), 2393 (2017), 2401 (2018) et 2449 (2018), il prendra d’autres mesures, en vertu de la Charte des Nations Unies ;

9. Décide de rester activement saisi de la question.

Il est procédé au vote à main levée.

Votent pour :Belgique, Côte d’Ivoire, République dominicaine, Guinée équatoriale, France, Allemagne, Indonésie, Koweït, Pérou, Pologne, Afrique du Sud, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, États-Unis d’Amérique

Votent contre :Chine, Fédération de Russie

La Présidente (parle en anglais) : Le résultat du vote est le suivant : 13 voix pour et 2 voix contre. Le projet de résolution n’est pas adopté en raison du vote négatif d’un membre permanent du Conseil.Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil qui souhaitent faire une déclaration.

M. Aljarallah (Koweït) (parle en arabe) : Nous regrettons que le Conseil de sécurité n’ait pas pu adopter le projet de résolution S/2019/961, présenté par la troïka humanitaire à des fins exclusivement humanitaires, et qui visait à proroger le mécanisme transfrontière d’acheminement de l’aide humanitaire en Syrie. Nous espérons que les négociations pourront se poursuivre sur le renouvellement de ce mécanisme, parce qu’il n’y a pas d’autre option, et que 4 millions de personnes en dépendent.

Avant de conclure, étant donné que c’est la dernière séance à laquelle l’État du Koweït participera durant son mandat au Conseil de sécurité, nous tenons à remercier tous les membres du Conseil d’avoir, ces deux dernières années, collaboré avec nous dans le cadre de nos efforts pour nous acquitter de notre responsabilité au regard du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Nous souhaitons par ailleurs plein succès aux cinq membres entrants – l’Estonie, le Niger, Saint-Vincent-et-les Grenadines, la Tunisie et le Viet Nam – élus pour un mandat de deux ans au Conseil.

Mme Cedano (République dominicaine) (parle en espagnol) : La République dominicaine a voté pour le projet de résolution S/2019/961, présenté par les co-rédacteurs chargés du dossier humanitaire et consacré au renouvellement, pour une période de 12 mois, du mécanisme transfrontière en République arabe syrienne, dont dépend la survie de millions de Syriens. Nous constatons avec une immense tristesse que le projet de résolution n’a pas été adopté. Le même cas de figure s’était produit il y a exactement trois mois (voir S/PV.8623), lorsqu’un projet de résolution (S/2019/756) qui cherchait à protéger la population civile d’Edleb contre les attaques et les souffrances n’avait pas été adopté non plus. Nous prenons acte des efforts inlassables déployés par l’Allemagne, la Belgique et le Koweït pour unifier le Conseil sur un projet de résolution crucial pour la vie de millions de civils. Nous nourrissons la même aspiration et avons activement oeuvré dans ce sens. Cela étant, nous sommes convaincus que le Conseil peut encore placer la survie de populations qui espèrent notre aide au centre de ses décisions, aussi réaffirmons-nous être disposés à rechercher un moyen de sortir de cette regrettable situation.

Mme Gueguen (France) : La France regrette profondément que le projet de résolution porté par les co-plumes humanitaires et soutenu par 13 des 15 membres du Conseil de sécurité n’ait pas été adopté, parce que la Russie, suivie par la Chine, a choisi d’utiliser son veto et de mettre en péril l’appui humanitaire international à la Syrie, et la survie de millions de personnes. C’est irresponsable et sinistre.

L’aide humanitaire transfrontalière est une question vitale pour les 4 millions de Syriens qui en dépendent. Faut-il encore le rappeler : il n’y a aujourd’hui pas d’alternative à l’aide transfrontalière pour apporter chaque jour une assistance vitale aux centaines de milliers de personnes dans le besoin dans les régions concernées, notamment à Edleb, parce que le régime syrien continue d’instrumentaliser l’aide humanitaire à des fins politiques et d’empêcher que tous ceux qui souffrent et sont dans le besoin y aient un accès égal.

La France appelle l’ensemble des membres du Conseil de sécurité à faire preuve d’unité et de responsabilité et à poursuivre le dialogue pour renouveler ce mécanisme indispensable, comme le demandent le Secrétaire général lui-même, mais aussi les agences humanitaires et les pays de la région. Un renouvellement pour six mois uniquement ne ferait pas de sens en termes de planification des opérations humanitaires, qui ont besoin de prévisibilité et de stabilité pour être préparées et conduites de manière efficace et dans la durée.

S’agissant des points de passage, je tiens à nouveau à rappeler l’importance cruciale que revêt le point de passage d’Al‑Yarubiyah : il permet d’acheminer 40 % des médicaments pour les opérations humanitaires dans le nord-est. Les autorités iraquiennes plaident elles aussi en faveur de son maintien. On sait les enjeux politiques et militaires à ce stade du conflit en Syrie, mais il faut cesser de politiser et d’instrumentaliser l’aide humanitaire. Ne prenons pas la population syrienne en otage et remettons-nous au travail.

Mme Wronecka (Pologne) (parle en anglais) : La Pologne a voté pour le projet de résolution publié sous la cote S/2019/961 et regrette qu’il n’ait pas été possible de parvenir à un consensus. Nous avons voté pour, afin d’exprimer notre ferme appui au renouvellement du mécanisme, qui permet aux fournitures humanitaires d’entrer en Syrie, apporte une aide à ceux qui en ont un besoin urgent et facilite la prestation des services de base. Sans ce mécanisme, il serait impossible de prêter une assistance vitale à des millions de personnes et d’atteindre celles qui sont dans le besoin. Je tiens à remercier les co-rédacteurs, la Belgique, l’Allemagne et le Koweït, de leurs efforts inlassables au cours des négociations.

M. Popolizio Bardales (Pérou) (parle en espagnol) : Le Pérou partage le diagnostic et la préoccupation de l’ONU concernant la grave crise humanitaire qui continue de sévir sur une grande partie du territoire syrien. C’est pourquoi nous appuyons toute initiative qui contribue à protéger sa population. Nous remercions les délégations allemande, belge et koweïtienne, en leur qualité de co-rédacteurs des résolutions sur les questions humanitaires en Syrie, des efforts infatigables qu’elles ont déployés pour parvenir à un compromis acceptable pour tous les membres du Conseil concernant le projet de résolution (S/2019/961) mis aux voix ce matin.

Nous nous félicitons également de la transparence et de l’ouverture qui ont caractérisé ce processus de négociation complexe auquel nous avons participé de manière constructive afin de préserver un système dont dépend la vie de millions de personnes. L’action du Pérou sur cette question et sur d’autres points de l’ordre du jour du Conseil de sécurité vise principalement à garantir la protection des civils conformément au droit international humanitaire. Cette approche, qui se reflète dans le contenu et les dispositions du projet de résolution, a motivé notre vote pour celui-ci.

C’est pourquoi le Pérou regrette vivement qu’il n’ait pas été possible d’adopter le projet de résolution présenté par les co-rédacteurs, que nous considérons comme équilibré, opportun et indispensable. Nous réaffirmons que le Conseil, et ses membres permanents en particulier, doivent retrouver leur unité sur cette question très sensible. C’est là un impératif si nous voulons nous acquitter des lourdes responsabilités qui nous ont été confiées.

M. Zhang Jun (Chine) (parle en chinois) : La Chine a toujours attaché une grande importance à la situation humanitaire en Syrie, appuie les efforts menés par la communauté internationale pour accroître l’aide humanitaire au peuple syrien et soutient le travail du Bureau de la coordination des affaires humanitaires et d’autres organismes humanitaires internationaux. Elle fournit également à la Syrie des denrées alimentaires, des médicaments, des services publics, d’éducation et de formation ainsi que d’autres formes d’assistance par des voies multilatérales et bilatérales, étant déterminée à améliorer la situation humanitaire dans le pays et à alléger les souffrances du peuple syrien.

En ce qui concerne la création d’un mécanisme syrien de secours humanitaire transfrontière, la Chine a toujours eu des réserves. Nous avons toujours dit que toute opération devait se faire dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des pays concernés. Le Gouvernement syrien est responsable au premier chef de l’amélioration de la situation humanitaire en Syrie. Aussi la priorité doit-elle être accordée à la fourniture d’aide humanitaire depuis l’intérieur du pays. L’aide humanitaire transfrontière est un mécanisme de secours extraordinaire adopté dans des circonstances bien particulières. Elle doit être évaluée en temps utile à la lumière de l’évolution de la situation sur le terrain. Ce mécanisme doit donc être ajusté à terme.

Dans le même temps, les opérations humanitaires transfrontières doivent également respecter strictement le droit international et les principes directeurs des Nations Unies en matière d’aide humanitaire, et s’appuyer sur les résolutions du Conseil de sécurité. Il est essentiel de renforcer la surveillance générale et de garantir l’équité, la neutralité, la crédibilité et une plus grande transparence. Les opérations de secours pertinentes doivent être coordonnées avec le Gouvernement syrien afin d’empêcher que les secours ne tombent entre les mains d’organisations terroristes ou ne soient détournés à d’autres fins.

La Chine s’efforce activement de promouvoir un consensus sur la question de l’aide humanitaire transfrontière en Syrie entre toutes les parties. Nous déplorons que les parties ne soient pas parvenues à un accord sur la prorogation du mécanisme. Pour les raisons susmentionnées, la Chine a été contrainte de voter contre le projet de résolution publié sous la cote S/2019/961.

En ce qui concerne les divergences entre les parties sur la question humanitaire syrienne, elles doivent être réglées fondamentalement par le biais du processus politique syrien. Nous exhortons les parties à oeuvrer sans relâche au renforcement de la confiance mutuelle et de la coopération afin de créer conjointement des conditions favorables à un règlement politique global de la question syrienne.

La Présidente, Mme Craft (USA) (parle en anglais) : Je vais maintenant faire une déclaration en ma qualité de représentante des États-Unis.

Je suis assise ici en état de choc. Les conséquences du veto de la Fédération de Russie et de la Chine au projet de résolution publié sous la cote S/2019/961 seront désastreuses. Cette décision est irréfléchie, irresponsable et cruelle. À l’heure actuelle, 4 millions de personnes en Syrie dépendent du mécanisme d’assistance transfrontière de l’ONU pour recevoir des médicaments,
des abris et de la nourriture. Rien ne justifie qu’un membre du Conseil de sécurité réduise les moyens dont disposent les civils syriens vulnérables pour obtenir une aide vitale.

Après la décision d’aujourd’hui, nous ne devons pas perdre de vue la raison pour laquelle le peuple syrien a besoin de ce mécanisme transfrontière. Le fait indéniable est que Bashar Al‑Assad a choisi d’affamer son propre peuple pendant des années afin de le forcer à se soumettre à son autorité. Chaque jour qui passe, Damas manque à la responsabilité fondamentale qui incombe à tout gouvernement de promouvoir et de protéger la paix, la prospérité et la santé de ses propres citoyens. Les choix du régime, et ces choix seuls, expliquent pourquoi l’ONU, les partenaires humanitaires et le Conseil de sécurité ont dû agir en 2014 et chaque année qui ont suivi, afin d’autoriser l’ONU à utiliser quatre points de passage en Syrie pour l’acheminement de l’aide à des millions et des millions de personnes dans le besoin.

Le mécanisme transfrontalier du Conseil de sécurité est vraiment l’une des questions les plus importantes que le Conseil supervise chaque année en raison de son impact immédiat et direct. Nous pouvons voir de nos propres yeux que ce mécanisme sauve chaque année un nombre incalculable de vies syriennes. Et chaque année, depuis l’adoption de la résolution 2165 (2014), nous avons mis de côté nos divergences politiques et voté, en dépit des quelques abstentions russes, pour le renouvellement de ce mécanisme qui sauve des vies.

Le renouvellement de la résolution 2165 (2014) a été une parfaite illustration de nos valeurs communes et de notre engagement collectif envers les millions de Syriens qui dépendent de l’aide humanitaire vitale fournie par l’ONU. En pourvoyant aux besoins des malades et des personnes affamées, nous avons tous surmonté nos différences politiques pour montrer au monde que nous sommes capables de faire ce qu’il faut. Malheureusement, pour la quatorzième fois, la Fédération de Russie a renoncé à cet engagement. Nous devons être conscients des conséquences directes de cette décision. La vie de millions de civils innocents syriens est aujourd’hui en péril, au plus fort de l’hiver. Les votes de la Russie et de la Chine démontrent leur volonté de fermer les yeux sur les conditions brutales que le régime de Bachar Al‑Assad continue d’imposer à son propre peuple et indiquent que ces deux pays facilitent ouvertement la poursuite par le régime d’une victoire militaire, tout en prétendant appuyer la résolution 2254 (2015).

Je reprends à présent mes fonctions de Présidente du Conseil.

Je vais maintenant mettre aux voix le projet de résolution publié sous la cote S/2019/962, déposé par la Fédération de Russie.

Fédération de Russie : projet de résolution

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions sur la question,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la Syrie, ainsi qu’aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies,

Notant que le poste frontière de Ramta avec la Jordanie établi par sa résolution 2165 (2014) n’est pas opérationnel depuis le mois de juillet 2018,

Notant également que le Gouvernement de la République arabe syrienne a repris le contrôle de zones situées au sud-ouest et au nord-est de la Syrie, notamment le long de ses frontières avec la Jordanie et l’Iraq,

Soulignant que le mécanisme de surveillance à la frontière a été mis en place comme solution temporaire d’urgence pour répondre aux besoins humanitaires des populations auxquelles il était impossible d’accéder en empruntant les routes franchissant les lignes de conflit,

Soulignant qu’il importe de continuer à surveiller rigoureusement le caractère humanitaire des envois de secours de l’ONU et leur acheminement en Syrie et engageant l’ONU et ses partenaires d’exécution à prendre de nouvelles mesures pour intensifier l’acheminement humanitaire dans l’ensemble du pays, en particulier dans les zones difficiles d’accès,

Rappelant qu’il faut que toutes les parties respectent les dispositions du droit international humanitaire sur la question et les principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence, soulignant qu’il importe, dans le cadre de l’aide humanitaire, de défendre les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, et rappelant qu’il importe également que les convois humanitaires parviennent à leurs destinataires,

Soulignant que l’Article 25 de la Charte des Nations Unies fait obligation aux États Membres d’accepter et d’appliquer ses décisions,

1. Exhorte toutes les parties à garantir qu’une aide humanitaire plus efficace et respectueuse des principes établis sera fournie durablement à la Syrie ;

2. Décide de prolonger les mesures prévues aux paragraphes 2 et 3 de sa résolution 2165 (2014), à l’exclusion de leurs dispositions concernant les postes frontière de Yaaroubiyé et de Ramta, pour une nouvelle période de six mois, à savoir jusqu’au 10 juillet 2020 ;

3. Exige que toutes les parties accordent aux convois humanitaires des entités des Nations Unies et de leurs partenaires d’exécution, notamment ceux qui transportent des fournitures médicales et chirurgicales, un accès sûr, durable et sans entrave à toutes les zones et populations recensées dans le cadre de l’évaluation des besoins réalisée par les entités des Nations Unies dans toutes les régions de la Syrie, en particulier celle d’Edleb ;

4. Demande aux organismes humanitaires des Nations Unies d’améliorer la surveillance de l’acheminement et de la distribution des envois de secours de l’ONU et de leur acheminement sur le territoire syrien ;

5. Demande également à tous les organismes humanitaires des Nations Unies et à leurs partenaires d’exécution de veiller à la bonne immatriculation des véhicules acheminant l’aide humanitaire dans le cadre des opérations transfrontières autorisées par la présente résolution ;

6. Prie le Secrétaire général de lui faire chaque mois le point de la situation et de lui soumettre, avant la fin juin 2020, un rapport sur l’application de la présente résolution, et le prie également de continuer à faire le point, dans ses rapports, sur l’évolution d’ensemble de l’acheminement humanitaire de l’ONU à travers les lignes de conflit et les frontières et à y fournir des informations détaillées sur l’assistance humanitaire fournie dans le cadre des opérations humanitaires transfrontières de l’ONU, y compris le nombre de bénéficiaires, les lieux de distribution et la nature des articles distribués, ainsi que sur la liste des organisations et des acteurs intervenant dans l’acheminement et la distribution de l’aide humanitaire ;

7. Réaffirme qu’en cas de non-respect de la présente résolution, il prendra d’autres mesures, en vertu de la Charte des Nations Unies ;

8. Décide de rester activement saisi de la question.

Il est procédé au vote à main levée.

Votent pour :Chine, Côte d’Ivoire, Guinée équatoriale, Fédération de Russie, Afrique du Sud

Votent contre :République dominicaine, France, Pérou, Pologne, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, États-Unis d’Amérique

S’abstiennent :Belgique, Allemagne, Indonésie, Koweït

La Présidente (parle en anglais) : Le résultat du vote est le suivant : cinq voix pour, six voix contre et quatre abstentions. Le projet de résolution n’a pas été adopté parce qu’il n’a pas obtenu le nombre de voix requis.

Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil qui souhaitent faire une déclaration après le vote.

M. Pecsteen de Buytswerve (Belgique) : Nous souscrivons pleinement à la déclaration faite par l’Allemagne au nom des trois co-plumes avant le vote. Permettez-moi, Madame la Présidente, de faire quelques remarques additionnelles.

Je voudrais commencer par remercier les États Membres qui ont voté en faveur de notre projet de résolution (S/2019/961). Si la qualité du travail du Conseil doit se mesurer au nombre de vies sauvées, alors aucune autre résolution n’est plus importante que celle sur le mécanisme transfrontalier. Comme nous le savons tous, grâce à ce mandat, 4 millions de personnes reçoivent de l’aide humanitaire, et cette aide compte pour 41 % de l’aide totale fournie à la Syrie. En tant que co-plume du dossier humanitaire pour la Syrie au Conseil, nous avons suivi un processus inclusif et transparent depuis plus d’un mois. Nous sommes parvenus à un texte de compromis équilibré, épuré et strictement humanitaire tenant compte des différents points de vue exprimés au sein du Conseil.

Par ailleurs, le projet de résolution sur le renouvellement de l’aide transfrontalière, tel que proposé par les co-plumes, reflète exactement la situation
sur le terrain en Syrie. Il tient compte d’une situation humanitaire qui n’a pas changé et qui reste désastreuse pour des millions de Syriens. Aucun acteur syrien n’est actuellement en mesure de fournir l’aide humanitaire dans toutes les régions périphériques du pays où les besoins sont les plus grands.

C’est un jour triste pour le Conseil et pour le peuple syrien. En tant que co-plume, nous continuerons à nous engager dans la poursuite d’une solution permettant la continuation de cet important mécanisme. Des millions de personnes en dépendent, mais nous ne pouvons pas faire de compromis sur l’essentiel.

Mme Pierce (Royaume-Uni) (parle en anglais) : Je me fais l’écho de la déclaration prononcée par le représentant de la Belgique. C’est un jour triste, malheureux et vraiment tragique pour le peuple syrien. C’est un jour qui, je l’espère, ne se répétera jamais au Conseil. Je voudrais dire à nouveau au Ministre du Koweït combien nous apprécions les efforts que sa délégation a déployés dans ce sens, et je suis désolée qu’il ait dû assister à ce résultat.

Le Royaume-Uni a voté deux fois aujourd’hui. Nous avons voté pour le premier projet de résolution (S/2019/961), car l’assistance transfrontalière des Nations Unies reste essentielle pour les 4 millions de personnes qui dépendent de cette aide vitale, aussi indispensable aujourd’hui qu’en 2014, lorsque la résolution a pu être adoptée pour la première fois et, jusqu’à présent, renouvelée chaque année.

La Fédération de Russie et la Chine n’ont donné aucune explication crédible à leur veto ou à leur tentative cynique de marquer des points politiques en présentant un second projet de résolution (S/2019/962) qui réduit de moitié le nombre de points de passage et la durée des mesures prises. Rien ne saurait justifier leur attitude. De fait, le Secrétaire général a indiqué que la situation humanitaire se dégradait plus encore, alors qu’elle était déjà extrêmement difficile dans toute la Syrie, où plus de 11 millions de personnes continuaient d’avoir besoin d’aide. Personne ne peut donc prétendre que la situation s’améliore sur le terrain.

J’ai écouté très attentivement la déclaration du représentant de la Russie, et je l’ai entendu dire que sa délégation était motivée « exclusivement par les aspects humanitaires ». Même si cela ne m’étonne guère, cette déclaration est d’une hypocrisie à couper le souffle. Le veto sur le premier projet de résolution et la présentation d’un second projet ne sont pas des actes qui répondent aux préoccupations humanitaires. Ils ne répondent pas à la demande écrite officielle que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a adressée au Conseil. Ils n’aident pas les millions de citoyens syriens dont la vie est aujourd’hui menacée, et ils n’aident certainement pas l’ONU ou la cause du multilatéralisme. La responsabilité incombe à présent aux autorités syriennes et russes. Elles sont désormais responsables des personnes dont la vie est en jeu. J’espère que les contribuables russes se montreront généreux.

Le Royaume-Uni a voté contre le texte de la Russie, car nous refusons de négocier sous la menace sur une proposition cynique qui permettrait de sauver moins de vies que nécessaire, d’après nos informations et celles de l’ONU. Mais il est important, même à ce stade, de nous tourner vers l’avenir, compte tenu du nombre de vies qui restent en jeu. Le Royaume-Uni espère donc que le Conseil pourra surmonter ce triste épisode et reprendre les discussions afin de trouver une solution productive et efficace qui réponde aux besoins de l’OCHA avant le 10 janvier 2020, date à laquelle le mandat du mécanisme transfrontalier prendra fin.

J’ai déjà dit au Conseil que la Russie ne devrait pas jouer à pile ou face avec la vie des populations. Quatre millions de vies sont en jeu, et nous ne devons pas oublier cet élément essentiel alors que nous essayons de régler cette situation épouvantable.

M. Heusgen (Allemagne) (parle en anglais) : Je serai bref puisque je ne peux que me faire l’écho de ce qui a été dit plus tôt par mes collègues belge et britannique. C’est un jour très triste pour le peuple syrien et pour le Conseil de sécurité, et la Chine et la Russie en portent une énorme responsabilité. Nous entrons dans la période des fêtes de fin d’année, et 4 millions de personnes en Syrie ne savent pas si l’an prochain, au-delà du 10 janvier 2020, elles seront encore en mesure de recevoir de la nourriture, de nourrir leurs bébés ou d’obtenir des médicaments.

Nous sommes allés très loin, et avons essuyé beaucoup de critiques. On nous a demandé pourquoi ne pas mettre cinq ou quatre, et pourquoi être prêts à mettre six plus six, etc. Nombreux sont ceux qui nous ont beaucoup critiqués autour de cette table, mais nous étions prêts à faire des compromis. Nous avons essayé de rallier tout le monde. Mon collègue russe a fait une proposition, en disant qu’elle était à prendre ou à laisser. Est-ce là la diplomatie russe – ne pas être prêt à négocier, ne rien céder et se contenter de dire que c’est à prendre ou à laisser ? Quant à sa remarque à mon endroit,
selon laquelle ce ne sont pas 4 millions de personnes qui souffrent, mais 1 million seulement, n’est-ce pas là le comble du cynisme ?

Mon collègue chinois a dit sans ambiguïté que la Chine appuyait le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA). L’OCHA a demandé ce projet. Il a même demandé plus que ce que nous avons proposé. Comment a-t-il pu voter contre cela ? Je demande à nouveau aux représentants de la Russie et de la Chine de ne pas décevoir la population syrienne. Nous sommes prêts à travailler d’arrache-pied pour veiller à ce que, après le 10 janvier 2020, les personnes qui souffrent aient toujours la possibilité de survivre.

Mme Wronecka (Pologne) (parle en anglais) : Notre décision de voter contre le projet de résolution S/2019/962 est motivée par la profonde conviction que les méthodes peu constructives utilisées pour un document aussi important ne sont pas conformes aux normes les plus strictes que le Conseil de sécurité doit incarner. Le projet présenté par le représentant de la Russie ne remplit pas les conditions nécessaires pour fournir une assistance humanitaire vitale au peuple syrien.

M. Djani (Indonésie) (parle en anglais) : Ma délégation prend la parole après le vote sur les projets de résolution S/2019/961 et S/2019/962, relatifs au mécanisme transfrontière.

L’Indonésie a voté pour le projet de résolution S/2019/961, présenté par les co-rédacteurs chargés du dossier humanitaire, car le texte résultait d’efforts fouillés visant à rapprocher les positions divergentes des membres du Conseil de sécurité. Ce projet est le reflet d’un compromis pour répondre aux préoccupations soulevées. À cet égard, nous remercions les co-rédacteurs d’avoir facilité le processus. Nous apprécions également les efforts qu’a fournis la Russie en présentant le projet de résolution S/2019/962, sur le renouvellement du mécanisme, dans le but d’améliorer l’aide humanitaire à la Syrie. Toutefois, ma délégation estime que ce projet n’a pas été examiné de manière exhaustive par tous les membres du Conseil et qu’il ne répond pas pleinement aux exigences des 4 millions de personnes dans le besoin.

Ma délégation regrette profondément que nous n’ayons pas pu nous mettre d’accord sur une solution aujourd’hui. Comme je l’ai indiqué dans mes déclarations d’hier (voir S/PV.8694) et de ce matin (voir S/PV.8696), la vie de civils est en jeu et c’est à nous qu’il incombe de régler sans délai cette question urgente. On peut dire que nous sommes tous aussi mécontents les uns que les autres. Mais ce n’est pas du bonheur des membres du Conseil qu’il s’agit. Il en va principalement de la vie de 4 millions de personnes qui ont besoin d’une aide humanitaire vitale. Je n’ai pas de formule magique à proposer pour sortir de cette impasse, parce que ce n’est pas de cela que nous avons besoin. Ce qu’il nous faut, en tant que membres du Conseil, c’est une formule simple, ancrée dans un dialogue sincère, axée sur des objectifs purement humanitaires, et qui évite de politiser la question. Ce qu’il nous faut, c’est une résolution qui garantisse l’accès de l’aide humanitaire – une résolution simple, un morceau de papier qui nous charge d’oeuvrer pour l’humanité.

L’Indonésie est prête à appuyer activement la poursuite de notre objectif commun : sauver la vie des Syriens. Ils sont innocents, ils sont apolitiques et ils ont besoin que nous les aidions sincèrement. Le sujet n’est pas clos. Nous devons continuer à travailler dans l’intérêt du peuple syrien. Le sujet ne doit jamais être clos dès lors qu’il s’agit de sauver des vies. J’appelle tous mes collègues, membres du Conseil, à continuer à s’employer à cette noble entreprise. Le peuple syrien a besoin de nous tous.

M. Van Shalkwyk (Afrique du Sud) (parle en anglais) : L’Afrique du Sud est extrêmement déçue que le mandat du mécanisme transfrontière d’aide humanitaire à la Syrie n’ait pas pu être renouvelé aujourd’hui. Durant les négociations, la position de l’Afrique du Sud était, et elle est toujours, que nous devons veiller au renouvellement de ce programme d’aide humanitaire conçu pour sauver des vies. L’Afrique du Sud a voté pour les deux projets de résolution (S/2019/961 et S/2019/962) dans un effort visant à atteindre cet objectif, car il reste impératif d’apporter une assistance vitale au peuple syrien.

Le regrettable résultat d’aujourd’hui, ou plutôt l’absence de résultat, est une preuve accablante de notre incapacité à nous acquitter de notre responsabilité en tant que Conseil de sécurité. Il souligne une fois de plus que nous devons évaluer les processus de prise de décisions du Conseil, en particulier la nécessité d’un vote affirmatif de tous les membres permanents. Nous exhortons toutes les parties à poursuivre leurs efforts et leurs consultations afin de veiller à ce que le mandat d’aide transfrontière soit renouvelé avant le 10 janvier 2020.

M. Zhang Jun (Chine) (parle en chinois) : Dans ma déclaration tout à l’heure, j’ai présenté la position de la Chine concernant le projet de résolution S/2019/961 relatif à la question humanitaire syrienne. Je tiens à souligner que la Chine rejette catégoriquement les accusations infondées portées contre elle par les États-Unis d’Amérique et d’autres pays. Il est notoire que la Chine a toujours engagé les parties au dialogue et à la consultation, dans un esprit constructif et responsable. Nous n’avons cessé d’appeler les parties concernées à prendre des mesures proactives pour forger le consensus. Nos préoccupations sont parfaitement justifiées et légitimes. À l’instar des positions de n’importe quel autre pays, notre position est incontestable. Nos décisions de vote indépendantes sont prises sur la base de nos positions de principe et n’ont pas à faire l’objet d’accusations de qui que ce soit.

La situation actuelle en Syrie résulte précisément d’actions malavisées de certaines parties. Alors c’est elles qui devraient réellement réfléchir à leurs propres actions et être invitées à répondre à toutes les questions posées. Si elles sont véritablement préoccupées par la situation humanitaire en Syrie, et par la Syrie en général, pourquoi n’ont-elles pas voté pour le projet de résolution déposé par la Russie ? Elles ont eu amplement l’occasion de faire la preuve concrète de leur engagement envers le peuple syrien. Cela montre une fois de plus leur hypocrisie lorsqu’elles disent se soucier de la situation ou vouloir lui prêter attention. Elles se livrent à une politique typique de deux poids, deux mesures, illustration concrète de la politisation des questions humanitaires.

M. Nebenzia (Fédération de Russie) (parle en russe) : Nous sommes profondément déçus du vote sur le projet de résolution S/2019/962, consacré au mécanisme transfrontière d’aide humanitaire. Ma collègue britannique a évoqué une hypocrisie stupéfiante, et je suis bien d’accord avec elle. Cela étant, nous avons un point de vue différent quant à savoir qui, ici, a fait preuve d’hypocrisie. Mon collègue allemand, comme il en a maintenant l’habitude, a tenté de nous faire une leçon de morale sur la diplomatie aujourd’hui, et nous a reproché de ne pas vouloir faire de compromis. Nous avons déjà fait un compromis important sur le projet de résolution mais, pour une raison qui nous échappe, ce geste n’a pas été apprécié. On exige de nous de faire compromis après compromis pour revenir essentiellement au même texte établi par les co-rédacteurs du projet de résolution S/2019/961, qui était d’entrée de jeu inacceptable pour nous. Nous l’avons dit sans détour dès le début, mais, pour une raison ou une autre, les co-rédacteurs n’y ont pas cru.

En fait, ce que nous avons observé aujourd’hui, c’est l’application de la politique de deux poids, deux mesures par ceux qui se prétendent les gardiens humanitaires du bien-être du peuple syrien. Nous étions disposés à proroger le mécanisme et, comme beaucoup l’ont dit, à y consentir rapidement afin d’assurer l’acheminement de l’aide aux Syriens dans les régions où cette assistance était véritablement indispensable. Dans le même temps, nos collègues qui n’ont de cesse d’accuser la Russie de bloquer ces efforts et qui parlent de normes élevées et de nobles principes d’humanité, ont eux-mêmes enterré le mécanisme, en présentant des arguments qui sont injustifiables et ne résistent pas à la critique.

Je voudrais poser une question rhétorique au Conseil. Qui a gagné aujourd’hui ? Personne. Qui a perdu ? Ces mêmes Syriens dont se préoccuperaient tant ceux qui ont bloqué notre projet de résolution aujourd’hui. Nous avons déjà expliqué pourquoi nous avions proposé de réduire le mandat du mécanisme transfrontière et le nombre de points de passage. Mais le plus important, et je tiens à le souligner, c’est que nous étions prêts à proroger le mécanisme. Que l’on n’essaie pas de dire le contraire. Le peuple syrien auquel l’aide humanitaire est destinée comprendra-t-il le fond de nos divergences ? Six ou 12 mois – quelle est la différence pour eux ? Nous n’acceptons pas les reproches qui nous sont adressés aujourd’hui. Que nous reprochent-ils ? Est-ce parce qu’ils n’ont pas accepté notre projet de résolution prorogeant le mécanisme transfrontière ? Ce sont eux qui ont privé les Syriens du mécanisme d’aide humanitaire transfrontière. Alors, qu’ils ne viennent pas rejeter la faute sur nous !

Que vont-ils dire à la presse lorsqu’ils quitteront la salle aujourd’hui ? Que la Russie a enterré le mécanisme transfrontière ? Ou vont-ils claironner leur histoire dans leurs médias ? Mais comment expliqueront-ils le fait qu’ils ont voté contre le projet de résolution russe, qui prévoyait la prorogation de la fourniture de l’aide humanitaire aux personnes dans le besoin en Syrie par le biais du mécanisme transfrontière ? Hélas, il est évident pour nous que certains de nos partenaires ont d’autres objectifs que des objectifs humanitaires. Ils ne cessent de politiser encore et encore le dossier humanitaire. La Russie continuera d’apporter une aide humanitaire au peuple syrien et d’oeuvrer à la reconstruction du pays, qui a été en grande partie détruit par l’ingérence étrangère.

La Présidente, Mme Craft (USA) (parle en anglais) : Je vais maintenant faire une déclaration en ma qualité de représentante des États-Unis.

Aujourd’hui, les États-Unis d’Amérique ont voté contre le projet de résolution (S/2019/962), présenté par la Fédération de Russie, car il fait fi de nos valeurs et de nos principes. Il va à l’encontre des recommandations du Secrétaire général, du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et des organisations non gouvernementales internationales, mais aussi et surtout, il constituait depuis le début une tentative malhonnête de mettre à mal le fonctionnement de ce mécanisme transfrontière vital pour les civils syriens. L’objectif de la Russie aujourd’hui était simple. Elle voulait marquer des points politiques. Elle ne s’intéressait qu’à créer un spectacle public et à ternir la crédibilité du Conseil de sécurité. Pour la Russie, il ne s’agissait pas de sauver des vies syriennes. De fait, son texte n’a jamais été conçu pour être un compromis de bonne foi. Depuis le début, la Russie a adopté une approche cynique à l’égard de son projet de résolution qui était à prendre ou à laisser. Elle a échoué aujourd’hui, parce que l’échec était le résultat qu’elle recherchait sur la question de l’aide humanitaire vitale à la Syrie. Je voudrais que ce fait soit clairement consigné dans le procès-verbal. La Russie a proposé un projet de résolution voué à l’échec, parce qu’elle préfère voir les civils syriens mourir de faim plutôt que de décevoir Bashar Al‑Assad.

Les États-Unis ont demandé que cinq points de passage soient autorisés pour une période de 12 mois. Cette position était fondée sur les valeurs qui sont les nôtres, à savoir que nous avons une obligation envers les moins fortunés de nos frères et soeurs. Nous voulions qu’une plus grande partie de l’aide des Nations Unies soit acheminée à un plus grand nombre de Syriens par les voies d’accès les plus directes possibles. L’OCHA a également appuyé l’ajout d’un cinquième point de passage à Tell Abiad sur la même base humanitaire et la même évaluation des besoins. Nous avons bataillé pour que quatre des points de passage restent ouverts afin que l’ONU puisse acheminer plus facilement une aide ô combien nécessaire. Nous étions prêts, à contrecoeur, à faire un compromis pour autoriser trois points de passage pendant 12 mois afin de préserver un flux d’aide raisonnable, mais ce compromis n’était pas suffisant pour la Fédération de Russie ou pour la Chine.

Les vetos de la Fédération de Russie et de la Chine sur le projet de résolution des co-rédacteurs (S/2019/961) montrent que leur engagement sur cette question n’a jamais été sincère. Pour elles, il n’a jamais été question de sauver des vies ni de mettre en place le mécanisme des Nations Unies. Aux membres du Conseil qui affirment que la situation humanitaire en Syrie a changé et que le mandat transfrontière doit refléter ce changement, je pose la question suivante : des millions de Syriens pourront-ils être nourris si l’on ferme l’accès à leur seule source de nourriture ? Les femmes, les hommes et les enfants malades pourront-ils être soignés si l’on ferme l’accès à leur seule source de médicaments ? Les réponses vont de soi.

Ce qui n’est pas clair, c’est de savoir comment le mandat du Conseil en matière de maintien de la paix et de la sécurité pourra être promu par les veto d’aujourd’hui. Voilà une explication que les Russes doivent au Conseil, au peuple syrien et à la communauté internationale. Nous savons qu’aucune réponse crédible ne viendra de ceux qui ont choisi de refuser l’aide à des millions de Syriens dans le besoin. L’issue du vote d’aujourd’hui est pour nous une déception amère, mais je veux maintenant m’adresser directement au peuple syrien. Les États-Unis restent engagés à les aider. Nous nous engageons à défendre ceux qui n’ont pas voix au chapitre, à nourrir ceux qui ont faim et à veiller à ce que les personnes déplacées et les orphelins reçoivent l’aide humanitaire dont ils ont besoin pour survivre. Nous sommes le plus important donateur humanitaire au monde, allouant 10,5 milliards de dollars au peuple syrien, et nous continuerons de l’aider. Nous sommes fiers de notre position de principe qui est d’aider tous les Syriens dans le besoin. Nous continuerons à braquer les projecteurs sur ceux qui choisissent de ne pas leur tourner le dos. Nous allons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour appuyer l’aide humanitaire fondée sur des principes.

Pour terminer, je tiens à être absolument claire. Oui, aujourd’hui est un jour très triste. Cependant, le vote d’aujourd’hui n’est pas une fin en soi. Nous n’avons pas fini de discuter de ces questions. Nous continuerons de tout faire pour trouver une solution pour le peuple syrien. Nous ne cesserons jamais de défendre ceux qui sont privés de nourriture et de médicaments. Et aujourd’hui, nous gardons l’espoir inébranlable qu’une solution sera trouvée pour le peuple syrien, qui a plus que jamais besoin de nous.

Je reprends à présent mes fonctions de Présidente du Conseil.

Je donne maintenant la parole au représentant de la République arabe syrienne.

M. Falouh (République arabe syrienne) (parle en arabe) : Ma délégation regrette une fois de plus l’obstination de certains membres du Conseil de sécurité, notamment les co-rédacteurs sur les questions humanitaires, qui s’entêtent à poursuivre une approche non constructive. Cette approche est reflétée dans le projet de résolution publiée sous la cote S/2019/961 dont le contenu s’écarte des objectifs humanitaires déclarés.

Hélas, ils continuent d’adopter une approche déséquilibrée pour rédiger et soumettre ces projets de résolution, faisant fond sur la surenchère à laquelle se livre le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) chaque fois qu’il est question de renouveler la résolution sur le mécanisme transfrontière. Les représentants de l’OCHA manipulent les données et les statistiques, fermant les yeux sur les défauts et les aspects négatifs qui émaillent ces processus et qui, à ce jour, contribuent à ce que l’assistance tombe entre les mains de groupes terroristes armés et ne parvienne pas à ceux qui en ont besoin. Telle est la situation actuelle à Edleb et ses environs, que contrôle le groupe terroriste du Front el-Nosra. La survie de ce groupe dépend de l’appui du régime turc – ce régime agresseur – et de sa mainmise sur l’aide humanitaire acheminée à partir du territoire turc.

Par leur comportement, les corédacteurs se sont écartés dangereusement et de façon inédite de la réalité. Ils se sont pliés à la volonté et à la pression du régime turc. Dans la première version du projet de résolution S/2019/961, ils ont voulu ajouter un nouveau poste frontière, qui aurait été utilisé, bien entendu, pour appuyer les objectifs de l’agression militaire du régime turc contre mon pays.

En termes plus clairs, j’affirme que le régime terroriste turc – un régime agresseur qui a facilité l’entrée de combattants terroristes étrangers en Syrie et qui continue de diriger et d’appuyer les activités criminelles du Front el-Nosra, une organisation terroriste, à Edleb – veut aujourd’hui que l’ONU paie les pots cassés pour ses actes d’agression dans le nord-est de la Syrie. C’est un exemple parmi tant d’autres du comportement erratique des auteurs de ce projet de résolution.

Nous voudrions poser à ces délégations la question suivante. Si elles prétendent vouloir aider le peuple syrien, pourquoi ont-elles gardé le silence et fermé les yeux face au pillage des puits de gaz et de pétrole en Syrie et à leur occupation par les forces américaines ? Ceux qui souhaitent aider le peuple syrien doivent être honnêtes et courageux et exiger que les Syriens soient autorisés à récupérer les ressources que les terroristes et la soi-disant coalition mondiale ont pillées et détruites.

Mon gouvernement rejette le projet de résolution S/2019/961, soumis par les corédacteurs de textes ayant trait aux questions humanitaires, dans son intégralité, en raison de ses défauts fondamentaux, tant sur la forme que sur le fond. Nous avons expliqué ces défauts dans une lettre datée du 15 décembre, adressée par le Vice-Ministre des affaires étrangères à M. Mark Lowcock, et dans une adressée hier par la Mission permanente de mon pays au Secrétaire général et au Président du Conseil de sécurité, en réponse au soixante-quatrième rapport sur la question humanitaire en Syrie (S/2019/949), ainsi que dans la déclaration que nous avons prononcée hier à la séance du Conseil de sécurité (voir S/PV.8694).

Nous tenons à souligner que le centre de l’action humanitaire en Syrie est la capitale, Damas. Il s’agit d’un principe clef du respect de la souveraineté nationale. Toute autre approche ne peut être considérée que comme une nouvelle tentative pathétique visant à violer la souveraineté nationale de la Syrie et à saper le statut politique de l’État syrien.

Nous appelons les États Membres qui se sont engagés à respecter le droit international et à maintenir la paix et la sécurité internationales à éviter toute politisation de la question humanitaire. Nous leur demandons également d’appuyer le rôle et le statut du Gouvernement syrien en tant que principal et véritable partenaire dans les domaines humanitaires et de développement. Nous appelons tous les États Membres à rejeter les conditions et les diktats politiques imposés par certains gouvernements, dans le but d’entraver les efforts de reconstruction, de relèvement et de retour des déplacés. Surtout, nous demandons aux membres du Conseil, en particulier aux corédacteurs, d’oeuvrer a la levée immédiate des mesures unilatérales coercitives imposées au peuple syrien. Ces mesures constituent une peine collective, dont les conséquences négatives démentent les affirmations de ceux qui les imposent, qui prétendent servir les intérêts et le bien-être de la population.

Mon gouvernement remercie tous ceux qui se sont opposés à l’adoption du projet de résolution S/2019/961, soumis par les corédacteurs de textes ayant trait aux questions humanitaires, afin de sauvegarder les principes du droit international et énoncés dans la Charte des Nations Unies, au premier rang desquels
figure le respect de la souveraineté des États et des règles régissant l’action humanitaire.

Pour terminer, je voudrais rappeler à toutes les personnes présentes dans cette salle, sans exception, que pour mettre fin aux conséquences humanitaires imposées par le terrorisme à mon pays et appuyer le processus politique en cours, il faudra adopter une approche différente, qui va au-delà de l’aide humanitaire et qui permet de lever les restrictions imposées à la République arabe syrienne et de lancer un véritable processus de reconstruction et de relèvement dans les secteurs économique, industriel, agricole, des investissements et des services. Le comble de l’hypocrisie, c’est que certaines personnes viennent au Conseil pour parler d’une crise humanitaire en Syrie, tout en mettant en oeuvre des politiques de peine collective, de blocus, d’agression et d’occupation militaire à l’encontre du peuple syrien.

La Présidente (parle en anglais) : La représentante du Royaume-Uni a demandé la parole pour faire une nouvelle déclaration.

Mme Pierce (Royaume-Uni) (parle en anglais) : Je serai brève. J’ai l’habitude d’intervenir dans cette salle lorsque des critiques sont faites à l’encontre du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, pour défendre la branche humanitaire de l’ONU, dont les membres se soucient bien plus du peuple syrien que de leur propre gouvernement et travaillent dans des circonstances extrêmement difficiles pour sauver des vies humaines. Je pense que nous devons tous leur rendre hommage pour cela.

La Présidente (parle en anglais) : Quels que soient les résultats des votes d’aujourd’hui, il est clair que le Conseil de sécurité est déterminé à aider le peuple syrien et à sauver des vies humaines. La présidence travaillera en étroite collaboration avec les corédacteurs en vue de poursuivre les négociations au cours des prochains jours et pour parvenir à une solution que nous pouvons tous appuyer.

Étant donné qu’il s’agit de la dernière séance du Conseil pour le mois de décembre, je voudrais exprimer les sincères remerciements de la délégation des États-Unis aux membres du Conseil, en particulier mes collègues les Représentants permanents, à leurs équipes et au Service du secrétariat du Conseil de sécurité pour tout l’appui qu’ils nous ont apporté.

Au début du mois, j’avais dit que le thème de notre présidence était de nous tourner vers l’avenir, vers l’année 2020, et de réfléchir à ce que nous devrions faire en tant que Conseil pour rendre le monde meilleur. Je salue le travail effectué par mes collègues à cette fin, et nous nous réjouissons à la perspective d’une nouvelle année pleine de potentiel au sein du Conseil. Toutefois, nous n’aurions pas pu accomplir notre tâche sans le travail acharné, l’appui et les contributions positives de toutes les délégations et des représentants du Secrétariat, notamment les fonctionnaires des services de conférence, les interprètes, les rédacteurs de procès-verbaux et les agents de sécurité.

Alors que notre présidence touche à sa fin, je suis certaine de me faire l’interprète de tous les membres du Conseil en souhaitant bonne chance à la délégation vietnamienne pour le mois de janvier. Je voudrais, au nom du Conseil, exprimer mes sincères remerciements aux cinq membres sortants : la Côte d’Ivoire, la Guinée équatoriale, le Koweït, le Pérou et la Pologne. Au cours des deux dernières années, ces pays et leurs équipes ont fait partie de la famille du Conseil de sécurité. Leur présence et leurs contributions positives au cours de leur mandat au Conseil de sécurité méritent d’être saluées, et ils nous manqueront.

La séance est levée à 13 h 40.

Source : Onu S/PV.8697