Le 28 mars 1997, Jean-Louis Arajol, secrétaire général du Syndicat général de la police (SGP) convoquait la presse pour dénoncer la transformation du service d’ordre du Front national en une police parallèle menaçant l’ordre républicain. Cette initiative fut le coup d’envoi d’une première campagne conduite par le Réseau Voltaire et Initiative Républicaine. Trois semaines plus tard, à la suite des incidents de Strasbourg, le Parti radical de gauche, les Verts, et plusieurs leaders socialistes, demandaient au président Chirac de dissoudre ce qui apparaissait comme une milice. Le ministre de l’Intérieur, Jean-Louis Debré, commanditait une enquête préliminaire de ses services.
Survirent la dissolution de l’Assemblée nationale et la démission du gouvernement Juppé. L’enquête des Renseignements généraux ayant été rendue au nouveau ministre, Jean-Pierre Chevènement, celui-ci conclut qu’il était urgent de ne rien faire.
Devant la passivité des Pouvoirs publics, le Réseau Voltaire saisissait le Comité national de vigilance.
Au sein du Comité, les opposants à cette démarche demandèrent au Réseau Voltaire de réunir la documentation nécessaire à la discussion. Ce qui fut fait.
À la suite de difficiles délibérations, le Comité, réunissant des représentants de l’ensemble des organisations nationales, politiques, associatives et syndicales, de gauche, définissait une stratégie commune. Il était d’abord convenu de dissocier la question de la légalité du DPS de celle de la légalité du FN. Puis, il était admis qu’aucune mesure d’interdiction ne pouvait être prise sans une information préalable de l’opinion publique. Enfin, il était constaté que des moyens d’investigation puissants devaient être employés pour vérifier les renseignements obtenus. C’est pourquoi, le Comité s’adressa aux présidents des groupes parlementaires de gauche pour leur demander de constituer une commission d’enquête.
Devant le peu d’empressement des présidents de groupe, le Réseau Voltaire écrivit à chaque député, en décembre 1997, et, grâce à l’aide logistique de Gérard Charasse, leur remit un dossier de quatre-vingt-douze pages pour justifier de sa démarche.
Simultanément, de nombreux citoyens et associations saisissaient directement leurs députés pour leur demander de se prononcer personnellement. Signalons notamment l’action, sur le plan national : de la Fédération Léo-Lagrange, du MRAP, de SOS Racisme, de l’Union des familles laïques (UFAL). Sur le plan local : de CLERGE en Bretagne, d’Initiative Républicaine-Val-d’Oise, de la Libre Pensée des Deux-Sèvres, du Mouvement des jeunes communistes du Lot (JC), des sections de Ras l’Front à Colmar, Mulhouse, Pau, Saint-Étienne, Strasbourg et Vitrolles, du Rassemblement des citoyens toulonnais pour la démocratie (RCTD), de Vivre au présent (VAP) à Montpellier, etc.
Petit à petit, c’est une soixantaine de parlementaires qui répondit à ces appels.
Pourtant un blocage, personnellement alimenté par un ministre en exercice, empêchait toujours le dépôt d’une proposition de loi. Pour contourner cet obstacle, des attachés parlementaires socialistes tentaient d’amender la loi créant une commission de déontologie policière pour confier l’enquête à cette nouvelle instance. Opposition, publique cette fois, de Jean-Pierre Chevènement.
Excédés par ces incohérences, les députés et sénateurs Radicaux de gauche et Verts, conduits par Jean-Michel Baylet, Joëlle Dusseau et André Aschieri, déposaient, en termes identiques, une proposition à l’Assemblée et au Sénat. Après une réunion, particulièrement difficile, du Comité national de vigilance, Matignon s’assurait de la neutralité de l’Élysée et intervenait pour débloquer la situation. Le garde des Sceaux, Élisabeth Guigou, confirmait que cette proposition n’interférait dans aucune enquête judiciaire en cours. Geneviève Perrin-Gaillard et Robert Gaïa finissaient par convaincre leurs collègues socialistes de l’Assemblée et du Sénat. Une nouvelle proposition était déposée.
Le 14 mai 1997, ayant entendu le rapport de Raymond Forni, la Commission des Lois de l’Assemblée nationale se prononçait à l’unanimité pour la création d’une Commission d’enquête parlementaire. Pour ne pas avoir à voter, les députés UDF-RPR avaient discrètement quitté la salle.
Les trente membres de la commission d’enquête devraient être prochainement désignés, au sein de la Commission des Lois, et pourraient commencer leurs travaux à la rentrée. Néanmoins, la plus grande vigilance est de mise. En effet, si la commission d’enquête tardait à être constituée et à siéger, la décision de création deviendrait caduque et l’ensemble du processus devrait être recommencé.
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