Bruce Clarke est un artiste engagé. Pour le Rwanda, il a proposé de créer un monument sur le génocide intitulé " Le jardin de la mémoire " " Ubusitani bw’urwibutso ". Le projet, qu’il veut concrétiser pour l’an 2000, est en bonne voie et serait bâti non loin de Kigali. En attendant d’en savoir plus sur cette future œuvre, il nous en explique les principes.
" Après le génocide, aucune science n’est à la hauteur pour reconstruire entièrement la rupture psychique et matérielle d’un peuple. Et l’art, diront certains, encore moins. Mais, le refus d’aborder les évènements, y compris les artistes, contribue à leur banalisation, leur oubli, voire à la négation de leur réalité. Le défi est donc posé : comment tenir compte dans une " oeuvre d’art " du poids de l’événement et au même temps créer un mémorial accessible et pudique dans sa représentation.
Le Jardin de la mémoire est une " sculpture " qui tentera de tenir compte du nombre (environ 1 million), de l’espace ou volume que représente ce nombre, de l’importance de la participation de la communauté dans la réalisation ; de la difficulté de la " représentation " d’un tel événement, ainsi que de la difficulté et de l’ambiguïté de sa non-représentation.
Il s’agit d’un jardin composé d’un million de pierres portant chacune le nom ou un signe distinctif d’un disparu, posées sur un site aménagé d’un kilomètre carré, environ. La construction du mémorial sera en elle-même un processus de remémoration et de recueillement, de catharsis. Elle se déroulera sur plusieurs jours autour du 7 avril (...) La cérémonie de commémoration consistera en la pose des pierres. Elle sera simple et sobre. La pierre, anonyme par sa matière et sa quantité, sera individualisée en l’associant à une " marque " distinctive rappelant un défunt (...) Par sa nature, le Jardin sera la plus grande création collective des temps modernes. Il sera aussi le plus grand défi de la mémoire à l’oubli. Le jardin sera par la suite, un lieu de recueillement, où les gens pourront venir se recueillir, se promener, réfléchir.(...) La présence du Jardin comme mémorial marquera le refus d’un enfouissement du génocide dans l’inconscient. Il sera la preuve " vivante " des évènements de 1994." Bruce Clarke.
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