African Rights vient de sortir un nouveau rapport de 23 pages intitulé : " L’Abbé Athansase Seromba prêtre de Paroisse à Florence, en Italie " (22 novembre 1999). Il s’agit de ce fameux prêtre hutu, qui pour accomplir le génocide dans sa paroisse a écrasé les Tutsi réfugiés dans l’église en la faisant démolir par des Bulldozers. African Rights a déjà écrit au pape Jean-Paul II pour demander à l’Église catholique d’ouvrir une enquête sur Seromba et sur d’autres prêtres accusés d’avoir pris part au génocide. Ces prêtres exercent toujours leur sacerdoce, notamment en Italie. L’Abbé Seromba sous le nom de " Don Anastasio Sumba Bura " est en activité à la Chiesa dell’Immacolata e San Martino à Montughi (Florence, Italie). Extraits.

Le but était que le bulldozer démolît la tour. Mais les assaillants ne savaient pas combien de temps il allait falloir au Caterpillar pour la faire s’effondrer. Mbakirirehe [Chef de la police communale de Kivumu] dit que les agresseurs eurent recours aux fusils pour empêcher les survivants de s’échapper avant que les machines ne soient arrivées.

" Pour s’assurer qu’il ne reste pas de survivants, les autres tiraient là où passaient les Caterpillars. Quand je suis arrivé devant l’église, j’ai vu l’abbé, le bourgmestre et Seromba au balcon du premier étage, où les prêtres logeaient. Ils tiraient dans la tour de l’église. Ils voulaient faire tomber les gens qui s’étaient caché dans cette tour. Seromba était vêtu d’un pantalon noir. Ils ont tiré jusqu’à ce que le Caterpillar arrache la tour. Niyitegeka remarqua également Seromba et le bourgmestre au balcon du presbytère. Ils tiraient sur la tour pour faire descendre les réfugiés Tutsi qui s’y cachaient. Je les voyais de l’endroit où j’étais, à l’entrée de l’église. Nous attendions que l’église soit complètement détruite ".

Pour ceux qui se trouvaient à l’intérieur de la tour, il n’y avait aucun moyen de sortir. Charles [un des sept survivant des massacres] tenta de s’accrocher à la vie, mais à grand-peine.

" J’étais à côté de la cloche. Les deux chauffeurs se relayaient pour démolir la tour. Quand j’ai vu qu’elle allait tomber, je me suis assis sur une poutre et je me suis agrippé à une autre au-dessus de moi. J’avais vu des gens mourir horriblement et j’espérais donc que la poutre du dessus tomberait et écraserait mon cœur, afin que je meure rapidement. (...) La tour s’est effondrée. J e ne suis pas sûr exactement comment j’ai atterri, mais c’est là que j’ai reçu un coup de serpette. Le fils de Kabatanga, Higaniro ; son frère, Banumanye et Ndabamanuye m’ont crevé l’œil gauche et m’ont administré des coups de massue sur la tête. Ils dépouillaient aussi les commerçants de leurs possessions. "

" Il était 18:00 heures. Les tueries ont duré jusqu’à .19:00 heures, moment où tous les Interahamwe sont partis au centre commercial. Il ne restait plus que l’abbé Seromba et ses gendarmes. J’étais très affaibli par les blessures que j’avais subies, mais je pouvais encore entendre l’abbé Seromba rire fort avec les gendarmes. J’ai réussi à relever la tête avec difficulté. Je me suis résolu à appeler le prêtre, car je n’avais plus rien à perdre. J’espérais qu’il pourrait avoir un ressaisissement, et pourrait me sauver la vie. Cela revenait au même pour moi.

Je l’ai appelé et il m’a demandé qui j’étais. Je lui ai dit que j’étais Charles. "Que veux-tu que je fasse pour toi" ?, m’a-t-il demandé. Je lui ai dit : "Aide-moi à me lever". Il m’a répondu : "Comment vais-je te soulever alors que je ne suis pas médecin ? Soulève-toi toi-même". J’ai eu un peu peur d’essayer, mais après quelques secondes d’hésitation, je me suis soulevé, quoique péniblement. Quand il m’a vu me lever, il s’est sauvé vers le presbytère. Un gendarme s’est approché de moi, il a ouvert son fusil. Je suis tombé sur les cadavres et il a pensé que j’étais mort. Il m’a maudit, disant qu’il n’allait pas gaspiller ses cartouches pour rien. Il est parti achever quelqu’un d’autre. "

Seromba continua de tuer des réfugiés après que l’église ait été pulvérisée, comme en a témoigné Froduald. [ce témoin Froduald Maniraguha avait 14 ans au moment du génocide et il vivait à la paroisse de Nyange avec les prêtres. Il espérait entrer dans les ordres et jouissant de la confiance des prêtres. Son témoignage extrêmement détaillé a été entièrement corroboré par d’autres témoins] :

" Ceux qui respiraient dans les décombres de l’église étaient achevés par Kayishema et Seromba .à coups de petites houes connues sous le nom de udufuni. Je les al vus tuer les gens alors que J’étals allé récupérer les objets liturgiques restés dans les décombres. Je les voyais tuer les gens à coups de udufuni. Kayishema était vêtu de jeans et l’abbé Seromba d’un pantalon noir ; il avait laissé sa veste sur la fenêtre au moment où il tirait dans la tour. Ils étaient revenus dans le presbytère. Ils ont vu une jeune fille nommée Adrienne. Elle s’apprêtait à devenir religieuse dans la congrégation Abahire ba Nyinawajambo. Ils l’ont trouvée derrière l’étable des chèvres. Kayishema l’a amenée. Elle a supplié l’abbé Seromba de demander pardon pour elle. L’abbé Seromba lui a répondu (qu’elle ne valait pas mieux que les autres(. Kayishema l’a aussi tôt taillé en pièces dans le jardin du presbytère. Seromba était là, mais il n’a rien fait. Kayishema et Seromba ont pris le cadavre de cette fille et l’ont mis avec d’autres cadavres dans les décombres de l’église. Ce sont eux même qui l’ont transporté. Les habits de Seromba étaient maculés de sang. Je les ai vus en allant déposer les objets liturgiques que j’avais tirés des décombres. "