Depuis quelques mois, la Belgique, où étaient déjà implantées des organisations criminelles de plusieurs nationalités, en particulier italienne, turque et marocaine, a vu apparaître des organisations kurde, chinoise et russe. Comme dans d’autres pays d’Europe, le défi majeur vient des mafias russes. Si, auparavant, la criminalité de la CEI n’opérait, au départ de la Belgique, que dans des réseaux de vols de voitures (avec la complicité établie de militaires russes casernés en Allemagne) et de fraudes communautaires, les services de la DEA de New York et du BKA (police criminelle allemande) ont alerté les agents belges sur l’émergence à Anvers d’une mafia juive russe dont les fournisseurs sont à Riga (Lettonie). Actifs dans tous les domaines concernant les stupéfiants, les réseaux de cette mafia auraient déjà prêté leur concours à un trafic de MDA (méthylène dioxy-amphétamine) au départ de la Lettonie et à destination du Bénélux (La Dépêche Internationale des Drogues n 16). Des enquêteurs lettons, instruisant le meurtre d’un journaliste de Riga qui s’était intéressé à cette organisation, se sont penchés sur la mafia juive d’Anvers et sur la guerre des gangs qui se déroulait dans cette ville. Elle aurait choisi en effet cette ville comme centre de recel et de blanchiment en Europe de l’ouest, prenant notamment en charge la refonte des métaux précieux et la revente des pierres taillées. C’est également à Anvers que se sont implantées des mafias chinoises. Une enquête sur un trafic limité à Amsterdam-Paris, basé tant sur les filières d’héroïne que de cocaïne, a permis de faire tomber le représentant à Anvers de la triade chinoise 14 K, un certain Fung Lai Fat, alias Andy. Connu pour ses activités dans le domaine des jeux, Andy a établi son quartier général dans le Chinatown d’Anvers et était déjà connu des services de police néerlandais pour être l’homme de main de la triade cantonaise dans la métropole flamande. En effet, les triades chinoises n’opèrent pas une nette distinction entre les différents pays du Bénélux (Pays-Bas, Luxembourg, Belgique) et réalisent des mouvements de trafic tout le long de la côte, d’Anvers à Rotterdam, sans avoir l’impression de franchir une quelconque frontière. Intercepté sur la simple dénonciation d’un revendeur, Fung Lai Fat, mettra d’abord en cause un certain Wong Ho, aujourd’hui décédé, ce qui ne permettra pas à l’enquête de remonter jusqu’au sommet de la structure de la triade. L’étude des aller et retours entre Anvers et Paris, où d’autres interpellations ont pu être opérées dans le milieu chinois, a révélé qu’un autre de ses contacts, Kwong King Sow, aujourd’hui en fuite, était lui aussi à l’origine du trafic. Après une escapade à Pékin via le Luxembourg, Kwong King Sow serait revenu sur le sol européen : cette rumeur a réduit au silence tous les témoins potentiels (correspondant de l’OGD en Belgique).

(c) La Dépêche Internationale des Drogues n° 30