En Guinée équatoriale (104), les militants des partis d’opposition sont " régulièrement passés à tabac par les redoutables ninjas, sortes de "tontons macoutes" dirigés par le propre frère du général Obiang. Ces ninjas sont formés, entraînés et équipés... par la France. Ce que M. Severo Moto, président du Parti du progrès, en exil, a dénoncé en reprochant à Paris de "participer à la formation d’escadrons de la mort au sein des forces de sécurité du général Obiang" et d’être plus intéressé par l’exploitation des gisements de pétrole et de gaz que par l’aspiration à la liberté de ses concitoyens (105) ".

Aux Comores (106), autre terrain d’investissement de prédilection des grands parrains de la Françafrique, le dictateur Djohar n’a dû son salut, en août 1991, qu’à l’intervention d’un lieutenant-colonel français. Après la tentative de coup d’Etat du 26 septembre 1992, assortie de la mutinerie d’une partie de l’armée comorienne, c’est une aide logistique française qui a permis aux forces de l’ordre présidentiel de reprendre l’initiative. Les conseillers militaires français, sous la responsabilité du colonel Pitiot, assurent désormais le commandement de fait des troupes comoriennes. Certains d’entre eux sont basés au camp de Kandani, où sont incarcérés dans des conditions déplorables plusieurs des officiers inculpés de mutinerie. Ils ne peuvent ignorer les sévices dont sont victimes les prisonniers, mais estiment, selon l’avocat des militaires emprisonnés, que " ces problèmes ne relèvent pas de leur compétence (107)".

Au Cameroun, les services de renseignement français ont décelé début février 1994 un projet de coup d’Etat, au stade ultime de se préparation, visant à déloger le président Biya. François Mitterrand a choisi d’en aviser l’ami de la famille, puis envoyé le chef de la DGSE, le général Jacques Dewattre, pour " déminer " l’armée camerounaise (108)...


104. Cf. Dossier noir n° 2, Fiche n° 6 : Criminalisation dans le bastion pétrolier : Cameroun, Tchad, Gabon, Congo, Guinée Equatoriale.

105. Ignacio Ramonet, Linceul de silence, in Le Monde diplomatique de janvier 1994.

106. Cf. Dossier noir n° 2. Fiche n° 7 : Côte d’Ivoire, Rwanda, Comores.

107. D’après Philippe Chapleau, Au-dessous du volcan, in Croissance d’octobre 1993.

108. D’après Stephen Smith, Un vacancier au pouvoir à Yaoundé, in Libération du 16/02/95.


"Présence militaire française en Afrique : dérives..." / Dossier Noir numéro 4 / Agir ici et Survie / L’Harmattan, 1995