Dans le sens communément admis et dans l’usage actuellement le plus courant, le mot secte est utilisé péjorativement.

Si la commission s’arrêtait à cette vision simplificatrice, elle serait dans l’incapacité de remplir sa mission car elle prendrait le risque de porter le discrédit sur toute organisation philosophique ou religieuse ayant les caractéristiques d’une secte, même si elle ne présentait aucun danger pour ses membres, pour les tiers, pour la société ou pour la démocratie.

La commission estime donc indispensable d’établir des distinctions dans le phénomène analysé.

LA SECTE STRICTO SENSU

Dans le sens premier, retenu notamment par le Petit Robert, une secte désigne " un groupe organisé de personnes qui ont la même doctrine au sein d’une religion ".

Dans une telle acception, la " secte " est en soi respectable et traduit simplement un usage normal de la liberté religieuse et d’association garantie par nos droits fondamentaux. D’aucuns peuvent alors soutenir que certaines de ces associations sont issues de nouvelles conceptions de type philosophique ou religieux, baptisées alors de l’appellation plus neutre de " nouveaux mouvements religieux ".

Il est clair que pour la commission d’enquête, les " sectes " ou " nouveaux mouvements religieux " ne constituent pas en soi un danger et ne sont pas a priori nuisibles. La lecture des conclusions de la commission et de la liste publiée ne peut se faire qu’en ayant à l’esprit ce principe essentiel.

LES ORGANISATIONS SECTAIRES NUISIBLES

Parmi les " sectes " (ou " nouveaux mouvements religieux "), certaines, soit par leur conception philosophique de base, soit par leur organisation, soit par une évolution dérivante de leur conception, de leur comportement et de leur action, se livrent à des pratiques nuisibles ou illégales ou mettent en danger les individus ou la société, mettant ainsi en cause les principes fondamentaux garantis par la Déclaration universelle des droits de l’homme.

On pourrait alors définir l’organisation sectaire nuisible comme un groupement à vocation philosophique ou religieuse, ou se prétendant tel, qui, dans son organisation ou sa pratique, se livre à des activités illégales dommageables, nuit aux individus ou à la société ou porte atteinte à la dignité humaine.

Certaines personnes ou groupements, ayant des objectifs dans le domaine de la santé, de l’alimentation et des méthodes thérapeutiques, et sans avoir de références philosophiques ou religieuses, ont un comportement qui s’assimile à celui des organisations sectaires nuisibles.

Un certain nombre de critères de dangerosité doivent alors être définis, qui permettent de qualifier de nuisible une organisation sectaire ou de constituer des circonstances aggravantes de leur comportement nuisible, notamment :

— des méthodes de recrutement trompeuses ou abusives ;

— le recours à la manipulation mentale ;

— les mauvais traitements physiques ou mentaux (psychologiques) infligés aux adeptes ou à leur famille ;

— la privation des adeptes ou de leur famille de soins médicaux adéquats ;

— les violences, notamment sexuelles, à l’égard des adeptes, de leurs familles, de tiers ou même d’enfants ;

— la rupture imposée aux adeptes avec leur famille, leur conjoint, leurs enfants, leurs proches et leurs amis ;

— l’enlèvement d’enfants ou la soustraction à leurs parents ;

— la privation de la liberté de quitter la secte ;

— les exigences financières disproportionnées, l’escroquerie et le détournement de fonds et de biens au détriment des adeptes ;

— l’exploitation abusive du travail des membres ;

— la rupture totale avec la société démocratique présentée comme maléfique ;

— la volonté de destruction de la société au profit de la secte ;

— le recours à des méthodes illégales pour occuper le pouvoir.

LES ASSOCIATIONS DE MALFAITEURS

La commission d’enquête estime que des organisations de malfaiteurs (escrocs, blanchisseurs d’argent, trafiquants de drogue, circuits de pédophilie, etc.) utilisent ou sont susceptibles d’utiliser une façade " sectaire " ou de pseudo-mouvement religieux pour dissimuler leurs pratiques criminelles. Il ne s’agit plus alors de sectes nuisibles ou de sectes qui ont dérapé mais d’organisations de crime organisé déguisées en sectes. Il est certain que dans plusieurs pays, ce type de façade protectrice peut se révéler efficace et rentable (avantages fiscaux accordés aux églises reconnues, par exemple)


Source : Chambre des Représentants de Belgique http://www.lachambre.be