Michel Caignet, de son vrai nom Miguel Caignet, est né à Paris le 24 octobre 1954. A vingt ans, il rejoignit la mouvance "nationaliste-révolutionnaire". Ordre nouveau ayant été dissout en 1969, François Duprat avait créé un groupement paramilitaire, les Jeunesses d’action européenne, ainsi qu’une organisation politique, les Groupes nationalistes révolutionnaires. Duprat, qui se référait explicitement au fascisme italien et aux SA allemands, prônait un parti militarisé apportant un soutien armé au renouveau des cultures régionalistes. Il appela à voter François Mitterrand en 1974. Les GNR avaient pris la succession d’Ordre nouveau au sein d’une internationale néonazie, le Nouvel ordre européen, dirigée par l’ex-SS suisse Gaston-Armand Amaudruz, et proche du banquier suisse et exécuteur testamentaire de Joseph Goebbels, François Genoud.

Michel Caignet collabora au mensuel de Duprat, Combat européen, dont il devint le directeur. Il y débuta la campagne négationniste en France. Il se montra fasciné par les Jeunesses d’action européenne. Et fit la connaissance de Pierre Clementi, ancien chef du Parti national-collectiviste sous l’Occupation.

En 1976, les GNR fusionnèrent avec la FANE de Mark Frédériksen. La Fédération d’action nationaliste et européenne avait dix ans déjà. Elle était devenue le plus important mouvement néonazi de l’après-guerre. Elle se voulait très orthodoxe dans sa doctrine et très éclectique dans son recrutement. Frédériksen était un ancien monarchiste, et il se présenta aux législatives de 1978 sous l’étiquette Front National en Seine-Saint-Denis.

En 1978, après l’assassinat de François Duprat, qui était devenu le numéro 2 du Front National, Caignet collabora au mensuel de la Fane, Notre Europe, ainsi qu’à son supplément régional Nice enchaînée.

La FANE fut dissoute par le Conseil des ministres du 30.09.80, puis à nouveau le 23.01.85, et une troisième fois le 16.09.87, au motif des "manifestations violentes organisées par ce mouvement dont l’un des buts exprimés est l’installation d’un nouveau régime nazi, l’organisation paramilitaire de cette association et ses incitations à la discrimination raciale".

La FANE se reconstitua à travers deux structures, qui furent fondées avant même sa première dissolution, de manière à fournir les moyens d’une parfaite continuité : Les FNE (Faisceaux nationalistes européens), dont Michel Caignet était le premier trésorier et Mark Frédériksen le premier président, et le Centre de culture européenne dont Caignet est aujourd’hui encore le président et Frédériksen le trésorier. Ces deux organisations furent créées le même jour, le 9 juillet 1980, et disposent du même siège social : les bureaux de la FANE. La gémellité des structures semble correspondre à une répartition des rôles. Les FNE héritérent de la branche politique de la FANE, tandis que le Centre de culture européenne hérita de la culture et de la propagande.

Michel Caignet était rapidement devenu un homme de confiance pour Mark Frédériksen. Il fut d’abord chargé de l’organisation des "solstices", à la fois rassemblement politique et fête païenne dans la tradition SS. Puis il cumula cette fonction avec celle de "délégué général de la FANE", et de "chargé des affaires allemandes". Ceci incluait notamment les relations avec le VSBD, le groupe Hoffmann (WSG), et l’ANS-SA en Allemagne. Le nom de Michel Caignet apparaît donc dans un grand nombre d’affaires criminelles et terroristes, sans que sa responsabilité personnelle ait jamais pu être établie, simplement parce qu’il apparaissait comme le trait d’union juridiquement innocent entre des organisations criminelles.

Pour mémoire, le VSBD (Volkssozialistische Bewegung Deutschlands) fut créé en 1971 par Friedhlem Busse. Busse était un militant nazi en RDA, qui fut racheté par les services secrets de RFA où il s’établit en 1953. Malgré les protections dont il disposait, il fut condamné à six mois de prison ferme en Allemagne fédérale en 1981 pour "incitation à la haine raciale". Son mouvement fut interdit en 1982, après qu’il ait été à nouveau arrêté avec deux de ses complices, tandis que deux autres venaient d’être abattus lors d’une tentative d’attaque de banque.

Toujours pour mémoire, le Wehrsportsgruppe Hoffmann (WSG) était une organisation d’entraînement militaire fondée en 1974 par Karl-Heinz Hoffmann et comprenant 500 à 800 membres. Hoffmann fut condamné en 77 pour avoir agressé des étudiants ; en 79 pour port d’uniforme nazi ; en 86 pour deux meurtres dont celui d’un éditeur juif ; il fut en définitive condamné à 9 ans de prison ferme pour association de malfaiteurs, détention d’armes, enlèvement et tortures. Le WSG fut interdit en 1980 après la tuerie de la fête de la bière à Munich, et la saisie d’un arsenal clandestin. Ses principaux responsables furent arrêtés et condamnés pour des crimes divers, y compris attaque de banques ou d’installations militaires. Les autres s’engagèrent alors au Liban pour lutter contre Israël aux côtés de l’OLP.

Mais surtout le parcours de Michel Caignet est indissociable de l’ANS/SA (Aktionfront Nationaler Sozialisten/ Nationaler Aktivisten), principale formation nazie en Allemagne, qui rassembla les éléments des divers groupes déjà cités. Son leader historique, Michaël Kühnen, fut condamné en 1979 à trois ans de prison ferme pour apologie du nazisme. Inculpé en 1984 pour incitation à la haine raciale et propagande nazie, il s’enfuit en France, où Caignet le fit héberger. L’ANS/SA fut en définitive interdite et ses principaux responsables jugés pour avoir torturé à mort l’un de leurs dissidents. Kühnen fut, quant à lui, condamné à 3 ans et 4 mois de prison ferme. Il rédigea divers écrits théoriques en prison, dont un, Homosexualité et national socialisme, que Caignet traduisit en français et diffusa. Kühnen est mort des suites d’un sida le 25 avril 91.

Michel Caignet s’était engagé, en tant que responsable de la FANE, "à lutter sans réserve (...) aux côtés de ses camarades européens pour la sauvegarde et la renaissance de la race blanche et pour l’instauration du socialisme national".

Il participa à la réunion clandestine de l’internationale noire, le "Premier conseil fasciste", qui se tint à Paris le 26 janvier 1980, malgré la mobilisation d’un millier de CRS.

Il organisa le 22 juin 1980 une cérémonie du solstice en uniforme nazi, au château de Fougères (Poule-les-Echarmeaux), propriété du comte Philippe de Sailly-Candeau.

Si la responsabilité pénale de Michel Caignet n’a jamais pu être établie dans ces diverses affaires, il n’a pas pour autant condamné moralement ces agissements, ni considéré qu’il devait changer ses fréquentations. Au contraire, Michaël Kühnen, Jürgen Mosler et Michel Caignet fondèrent ensemble en 1986 l’Europaïsche Bewegung (EB), en français : Mouvement européen. Cette organisation internationale est implantée en Allemagne, en Belgique, au Danemark, en France et aux Pays-Bas.

Ce sont ses sections allemandes, Deutsche Alternative et Neues Front, qui ont fomenté en 1992 les émeutes raciales et les assassinats perpétrés à Cöttbus et Rostöck. Elles ont été interdites par l’Office fédéral de protection de la Constitution.

Constatant l’impunité de Michel Caignet, un groupuscule sioniste décida de faire justice lui même, l’agressa en février 81, lui dérobant des documents, et le défigurant sauvagement au vitriol.

Par ailleurs, c’est au moment de la création du Mouvement européen que Michel Caignet lança la revue homosexuelle, Gaie France Magazine, dont le titre initialement prévu était, Gaie Europe. Son idéologie se trouve dans l’exact prolongement du Centre de culture européenne créé par Caignet et Frédériksen pour continuer la propagande de la FANE. C’est pourquoi il paraît grossièrement naïf de croire que Michel Caignet aurait renié ses engagements passés, et que cette revue serait un simple média homosexuel dépourvu de références fascistes et d’objectifs antidémocratiques. L’analyse détaillée de la revue ne laisse en tout cas aucun doute possible.

Gaie France Magazine se présente sous la forme luxueuse d’un mensuel d’une centaine de pages en quadrichromie à reliure carrée. Il dispose d’une édition équivalente en portugais. Malgré son contenu néonazi, il est en vente libre en kiosque, et annonce tirer à 15.000 exemplaires.

Suite aux démarches du Projet Ornicar et à l’intervention de la CNCDH, Gaie France Magazine a été interdit à la vente au mineurs, par arrêté ministériel du 27 mai 92, pour "incitation à la pédophilie". De plus la revue a été condamnée quelques mois plus tard pour avoir publié un article violemment diffamatoire contre Thierry Meyssan, président du Projet Ornicar. Pour se soustraire à la justice, elle modifia son intitulé en mai 93, et paraît désormais sous le titre Gaie France nouvelle série. Elle est donc actuellement en vente libre. Non seulement la ministère n’intervint pas, mais la revue fut inscrite à la Commission paritaire de la presse, lui ouvrant droit au soutien de l’État accordé aux revues "éditées dans un but d’intérêt général pour l’instruction, l’éducation, l’information du public".

Michel Caignet se présente comme "traducteur". Il parle en effet couramment cinq langues. On lui doit notamment l’édition française du Livre des armes à feu de Sergio Masini. Il habite à Paris un appartement particulièrement protégé, et dispose d’un pied-à-terre à Lille. Il refuse tout contact avec la presse, et évite de rencontrer physiquement ses propres collaborateurs qu’il préfére diriger par téléphone. Il multiplie les déplacements à l’étranger, particulièrement dans les pays de l’Est, où il participe à des rencontres "nationalistes".

Bien que l’interdiction qui frappe la plupart des organisations qu’a animées ou créées Michel Caignet rende plus difficile une surveillance précise de ses activités, elles continuent parfois à faire l’objet d’indiscrétions. Ainsi Le Monde et Libération ont révélé son rôle au sein du Comité de célébration du centenaire d’Adolf Hitler en 1989.

Non, Michel Caignet n’a pas changé !

(c) Projet Ornicar, juillet/aout 1993

L’infiltration néofasciste et néonazie dans la minorité gay