La poursuite, en 2001, des contacts internationaux établis par la MILS, en France comme à l’étranger, lui a permis de constater, sans surprise, une prise en compte croissante, par les gouvernements de toutes les régions du monde, du caractère à la fois prédateur envers les individus et déstabilisateur pour les sociétés, des mouvements sectaires.

Les échanges bilatéraux aussi bien que ceux menés dans les enceintes régionales et mondiales font apparaître une vigilance générale accrue vis-à-vis des manifestations, désormais extrêmement diversifiées, des forces sectaires. Et l’emploi du mot "forces" est tout à fait approprié quand on considère la puissance, notamment financière, des plus grandes organisations sectaires qui disposent de ressources et de moyens tout simplement supérieurs à bon nombre d’Etats.

Dans le processus de globalisation croissante du monde, les recherches d’influences, voire de positions dominantes des sectes sont aussi facilement observables que préoccupantes. Elles prennent toutes les formes possibles, du lobbying que l’on pourrait qualifier de classique, aux corruptions les plus directes, des tentatives banales de défiscalisation aux mouvements illicites de capitaux (blanchiment, crime organisé ...), de l’utilisation habile d’internet à de véritables agressions, assez souvent concertées, entre plusieurs groupes, prenant la forme de diffamation, de harcèlement confinant à la persécution, de désinformation systématique.

Pour mieux induire en erreur les non avertis, les mouvements sectaires du monde entier utilisent des raisons sociales aux connotations généreuses (droits de l’homme, libertés, paix mondiale, dialogue, église, civilisation ...) et un vocabulaire en apparence élevé mais en réalité déstabilisateur : qu’on pense par exemple à ce que peut bien vouloir dire la "religion athée" que prétend pratiquer tel groupe sectaire ... sinon que sa manœuvre ultime consiste à détruire le sens lui-même de la notion de religion.

La MILS a pu constater, dans ses échanges avec des autorités de régions géographiques et de systèmes politiques très divers que beaucoup de gouvernements avaient désormais bien perçu cette tactique des mouvements sectaires qui consiste à chercher à déstabiliser les sociétés elles-mêmes en ébranlant leurs assises cultuelles, philosophiques, religieuses, morales et politiques, afin de recueillir les fruits de la confusion produite. Quand les mouvements sectaires, organisés à cet effet et compétents -il faut le dire- dans leurs menées subversives, réussissent à persuader des adeptes de l’inadéquation des institutions régissant une société au développement de celle-ci vers des "formes nouvelles" (jamais précisées plus avant), ces mouvements peuvent alors s’emparer corps et âme des individus esseulés, désorientés et les instrumentaliser pour leurs plus grands avantages.

Sous toutes les latitudes, la MILS l’a constaté, cette volonté de briser le moule socio-culturel (sous le prétexte que l’universalité de l’homme pourrait être réduite à son uniformité d’organisation et de comportement), de chercher à pulvériser hors de leurs infrastructures habituelles les individus, avec pour but de rendre ceux-ci dangereusement fragiles, isolés face aux fortes machines d’asservissement psychologique opérées par les mouvements sectaires.

A cet égard, la MILS a observé avec satisfaction que dans le monde entier, ces tentatives de destruction par les sectes des bases des sociétés elles-mêmes (culture, religions, modes de vie ...) avaient fini par provoquer des réactions de protection, à tout le moins de précaution, des principales églises elles-mêmes27, qui avaient paru un temps, décontenancées par le faux message d’une liberté d’agir absolue, derrière lequel les sectes, en réalité par nature prédatrices, fourbissaient leurs armes d’asservissement en se servant, à leur usage exclusif, de la notion de liberté. Cette mission a noté aussi que, dans des pays très différents, les pouvoirs publics avaient engagé avec les églises respectueuses des Droits de l’Homme, des concertations sur les dangers, pour les individus et les sociétés, des dérives criminelles sectaires à prétention religieuse.

Dans son dernier rapport, la Mission interministérielle de lutte contre les sectes avait traité de l’entrisme sectaire dans les organisations non gouvernementales et à travers celles-ci dans le fonctionnement même des organisations internationales. Les préoccupations croissantes de nombreux Etats membres de l’ONU dans ce domaine, ont eu des résultats bénéfiques sur le fonctionnement de l’institution puisqu’en accord avec le secrétariat général de l’ONU, la réflexion générale qui a été engagée au sein du Comité des ONG a déjà porté des fruits : ainsi, des fins de non-recevoir ont été opposées à des demandes d’accréditation d’organisations sectaires. Les problèmes d’accréditation d’ONG sectaires auprès des organisations internationales apparaissent aujourd’hui aux yeux des Etats membres loin d’être marginaux. Certains développements sectaires sont, en la matière, spectaculaires. Ils ont, bien involontairement, contribué à la réflexion : pour ne parler que de la secte Moon, par exemple, celle-ci a annoncé la création de "son" Association mondiale des ONG (WANGO) qu’elle a proposé aussitôt de mettre au service des Nations Unies tandis que son gourou, avec l’aide de diverses missions diplomatiques (Iran, Indonésie, Ouzbékistan, Comores ...), a organisé plusieurs conférences et réunions dans l’enceinte même de l’ONU.