Dès sa création en octobre 1998, la MILS s’est rapprochée des autres structures publiques européennes traitant des problèmes sectaires. Elle n’a eu d’ailleurs aucune difficulté à le faire puisque ses homologues ou quasi homologues européens souhaitaient, à l’évidence, développer des échanges d’informations et d’expériences. Entamées sur le mode bilatéral, ces relations n’ont pas tardé à prendre un caractère multilatéral tant il est apparu évident aux partenaires européens qu’ils étaient confrontés non seulement aux mêmes genres de dérives et problèmes sectaires mais aux mêmes acteurs internationaux du sectarisme.
Spontanément, une concertation régulière entre membres de l’Union européenne s’est organisée dans le cadre des enceintes internationales (ONU, OSCE, Conseil de l’Europe notamment). Très vite, les pays candidats à l’Union se sont joints à leur tour à l’exercice, et sans que l’on puisse parler de véritable coordination intraeuropéenne en matière de lutte contre les dérives sectaires, un comportement convergent de vigilance s’est peu à peu manifesté parmi les partenaires.
Dans ce contexte, l’invitation faite par la MILS d’organiser à Paris en juin 2001 une réunion de travail sur les activités illégales des organismes à caractère sectaire en Europe a été bien reçue.
Durant deux journées, vingt-deux pays ont ainsi pu mettre en commun leurs réflexions, expériences et interrogations sur les problèmes liés au sectarisme, dans l’esprit de la Recommandation 1412 sur les "Activités illégales des sectes" adoptée le 22 juin 1999 par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe à l’unanimité de ses membres.
Bien que les situations nationales apparaissent parfois assez différentes, des échanges de vues très libres et très approfondis ont permis à l’ensemble des délégations de constater que les méfaits sectaires concernaient aussi bien les droits fondamentaux de la personne humaine que le fonctionnement général des sociétés.
Les origines administratives et professionnelles très diverses, et très complémentaires, des participants ont permis de mieux comprendre, de saisir avec plus d’acuité, l’attitude doublement prédatrice des mouvements sectaires vis-à-vis des individus comme des sociétés elles-mêmes.
Les travaux ont fait apparaître un très grand nombre de "portes d’entrée" qui ouvrent accès aux manifestations des organisations sectaires. Sans qu’il soit possible d’en dresser une liste exhaustive puisque les champs d’activité des sectes se diversifient constamment, tirant notamment profit des nouveautés intervenant dans tous les domaines (y compris ceux des sciences), les discussions ont fait apparaître qu’outre les atteintes aux droits de la personne, les implications sectaires concernaient un très vaste champ d’activités. Ont ainsi été étudiées les questions fiscales et l’utilisation de masses d’argent considérables conférant pratiquement à certains grands mouvements sectaires le statut "d’Etats sans territoire" disposant de plus de pouvoirs que bien de véritables Etats. Il a été constaté que l’utilisation de ces masses d’argent considérables donnait naissance à tout un arsenal d’activités licites ou illicites visant toutes (et réussissant assez souvent dans des pays aux structures fragiles) à exercer des influences durables, à atteindre des positions de force.
Des échanges ont eu lieu sur la politique d’investissements industriels ou commerciaux des groupes sectaires, sur leurs prétentions fiscales, sur leur politique financière y compris leurs attaques en bourse contre leurs "cibles", les placements offshore, le blanchiment et, dans certains cas, les liens établis avec les milieux du crime organisé, la corruption érigée en système, les financements politiques, les fausses aides au développement ou les aides au développement payées en retour d’influences consenties, certaines recherches scientifiques (clonage, s’agissant, par exemple, des Raëliens, armes biologiques ou chimiques, dans la secte Aum). Les travaux ont aussi mis en lumière la judiciarisation croissante, à la mode nord-américaine, des relations des citoyens avec les structures publiques, administratives ou parlementaires, menaçant parfois d’engorger complètement le fonctionnement judiciaire lui-même ou celui des médiateurs, comme c’est le cas dans certains pays de l’ex URSS.
L’entrisme sectaire dans les ONG et à travers elles dans les organisations internationales a fait l’objet d’intéressants échanges. Il est ainsi apparu que cet entrisme n’existait pas que dans des organisations planétaires comme l’ONU mais aussi avec des succès certes divers, dans les organismes européens comme le Conseil de l’Europe, l’OSCE ou même le Parlement européen.
La constitution, sur internet, de réseaux sectaires agissant de concert, a été longuement évoquée. Si dans les années passées, les sectes semblaient avoir pris une sérieuse avance sur le net, notamment aux Etats-Unis avec la prise de possession par la Scientologie du Cult Awareness Network (CAN, association jusqu’alors anti-sectaire), il semble qu’avec l’arrivée de nombreux sites opposés au sectarisme et les concertations et interconnexions qu’ils établissent entre eux, un certain équilibre tende à s’instaurer.
Les délégations se sont également entretenues des questions de formation professionnelle ou de réglementation en matière de psychothérapie, deux domaines de prédilection des sectes et dans lesquels les législations européennes varient grandement.
Les diverses législations associatives ont été comparées et les délégations ont pu échanger sur l’éventualité d’une législation européenne régissant de futures associations de droit européen.
Parce qu’en matière de problèmes sectaires, les partenaires européens constatent la particularité des positions américaines et entretiennent avec les Etats-Unis des relations non exemptes de difficultés, un certain nombre d’intervenants ont traité de la nécessité d’échanges européens plus approfondis sur la question.
Enfin, diverses formes d’éventuelles coordinations et collaborations administratives entre partenaires ont commencé à être envisagées et il a été décidé de poursuivre les réflexions dans ce domaine.
A l’issue de cette réunion, la première du genre, les participants se sont félicités dans leur communiqué commun d’avoir pu présenter les uns aux autres leurs réalités et préoccupations nationales, à l’évidence diverses mais non divergentes, en matière de sectarisme. Les 22 délégations sont convenues que les dangers évidents que faisaient courir aux personnes et aux sociétés elles-mêmes ces mouvements fondamentalement prédateurs, humainement comme financièrement, nécessitaient des échanges constants entre elles. Plusieurs pays se sont proposés pour l’organisation de prochaines rencontres.
A la suite de cette réunion, la MILS qui ne peut que se réjouir de la dynamique européenne ainsi engagée a été invitée par plusieurs partenaires à participer à des séances de travail associant organismes publics et initiatives privées. D’ores et déjà, elle a répondu favorablement à plusieurs sollicitations et continuera naturellement dans cette voie.
Ainsi, à l’invitation de l’Institut slovaque chargé des relations entre l’Etat et les religions, la MILS a-t-elle participé, au quatrième trimestre 2001, à deux réunions organisées à Bratislava sur le sectarisme.
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