Présidence de M. Alain TOURRET, Président

Mme Linale est introduite.

M. le président lui rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d’enquête lui ont été communiquées. A l’invitation du président, Mme Linale prête serment.

Mme Marie-Dominique LINALE : J’ai été présidente de la MNEF de janvier 1995 à avril 1999, date des dernières élections. J’ai animé une équipe étudiante. Cette mandature s’était donnée pour objectif de renforcer et d’élargir le champ de la protection sociale étudiante.

Je suis arrivée au moment où le monde universitaire connaissait une explosion démographique alors que le système de sécurité sociale n’avait quasiment pas évolué depuis 1948. Ma première préoccupation, et celle de mon équipe, a donc été d’adapter le régime étudiant à cette évolution universitaire.

L’âge des études a augmenté et nous nous sommes battus, les étudiants étant de plus en plus âgés, pour avoir un maintien de leurs droits de 26 à 28 ans. En 1974, la fixation à 18 ans de la majorité civile n’avait pas entraîné un abaissement correspondant de l’âge de la majorité sociale, créant ainsi un décalage contre lequel la MNEF s’est également battue afin d’obtenir une harmonisation, ce fut la première mission de l’équipe que j’animais.

Au cours de cette période est apparue une forte précarisation de la population étudiante, due à la démocratisation de l’enseignement supérieur et à l’arrivée d’étudiants issus de catégories socioprofessionnelles moins favorisées. Durant ma présidence, je suis assez fière, ainsi que mon conseil, que la santé des jeunes ait fait l’objet d’un traitement spécifique dans les problèmes de santé publique. Jusqu’alors, on passait directement de la pédiatrie à la médecine du travail. Cette précarisation et cette question particulière de la santé des étudiants n’étaient guère prises en compte.

Aujourd’hui, 160 000 jeunes sont exclus du système de protection sociale. Cela ne signifie pas qu’ils sont sans droits sociaux mais que l’état de détresse sociale dans lequel ils se trouvent ne leur permet pas de connaître leurs droits. Il faut donc, de manière urgente, qu’ils puissent accéder aux soins dont ils ont besoin. Face à ce problème concernant tous les jeunes, étudiants ou en situation d’exclusion, la MNEF a fait des propositions dans le cadre de ses filiales et des réseaux de soins. C’est ainsi qu’ont été créées les Maisons des Jeunes et de la Santé (MJS), destinées à faciliter l’accès aux soins des étudiants mais aussi des jeunes exclus de la protection sociale.

Pour poursuivre l’action entreprise par ces Maisons des Jeunes et de la Santé, il faudrait que les pouvoirs publics aident le développement de ce réseau. Il serait bon qu’au sein des MJS comme au sein d’autres centres de soins, soit créée par le biais des emplois jeunes, une fonction " d’orientateur " social, qui orienterait, informerait et conseillerait les jeunes afin de leur faciliter l’accès à la protection sociale. Il est important également de soutenir et d’encourager une véritable politique de prévention en développant dans les cités universitaires des infirmeries et en redéployant par la même le système des BAPU.

Les difficultés auxquelles sont confrontés les jeunes requièrent de nouveaux modes de prise en charge des soins et notamment le remboursement à 100 % des consultations neuro-psychiatriques et des pilules mini-dosées. Dans le cadre de notre action en milieu jeune, il me paraît nécessaire que la MNEF, à l’occasion de l’expérimentation des filières et des réseaux de soins dont les MJS constituent la première étape, se saisisse de cette occasion pour développer ses interventions.

La MNEF, tout au long de son histoire, a dû s’adapter pour répondre à tous les nouveaux besoins des étudiants peu ou mal pris en charge par les pouvoirs publics, et qui résultent de l’explosion démographique. Ces nouveaux besoins concernent encore aujourd’hui le logement, les cafétérias, la culture, les loisirs. De ce point de vue, il me semble que le régime étudiant a rempli sa mission mais qu’il peut certainement mieux faire et faire des choses plus simplement, mais cela ne dépend pas de mutuelles telles que la MNEF.

La politique de diversification, décidée par les mutuelles étudiantes n’aurait pas eu lieu si les pouvoirs publics avaient pris leurs responsabilités pour répondre à l’évolution des conditions de vie des étudiants.

Des améliorations doivent être apportées notamment en ce qui concerne la situation des 18-20 ans. Le fait que ceux-ci ne soient pas affiliés au régime étudiant de sécurité sociale mais des affiliés du régime général, entraîne un double travail, effectué par les caisses nationales et par la MNEF.

Il faudrait probablement réactiver le système du fonds d’action sociale (FAS), pour le régime étudiant, prévu par la loi depuis 1948, mais qui n’est pas abondé par les caisses.

Une autre amélioration serait que le comité des sept fonctionne normalement dans toutes les sections locales mutualistes et que l’ensemble des organisations de la jeunesse réunies au sein du collectif national pour la santé des jeunes soient présentes dans les campagnes de prévention lancées par les unions départementales de la mutualité.

Pour conclure très brièvement, j’ai conçu mon rôle de présidente de la MNEF comme étant celui d’une animatrice d’une équipe au service d’un projet de développement, concernant l’accès aux soins et la santé publique. La manière dont la MNEF a été gérée s’est inscrite dans le cadre de ces objectifs. Le rôle du conseil d’administration de la MNEF, comme celui d’une caisse d’assurance maladie, était d’administrer et non de gérer. C’était là aussi une volonté des pouvoirs publics.

Tout au long de mon mandat, la MNEF est toujours restée en relation avec les pouvoirs publics, qu’elle a constamment informés sans que jamais ni ces derniers ni les tutelles, après avoir exercé différents contrôles, n’aient trouvé rien à redire. La MNEF a organisé des colloques étudiants-universités-villes au cours desquels il a été débattu des diversifications. De nombreux représentants des pouvoirs publics y assistaient et les discussions ont toujours eu lieu dans un contexte de partenariat.

Si je devais formuler une critique aujourd’hui, ce serait de ne pas avoir assez incité mon équipe et moi-même à nous former à la gestion financière car il est vrai que les militants de la MNEF ont toujours été plus intéressés par les questions sociales que par l’économie. Le conseil d’administration a débattu néanmoins de toutes les orientations générales.

M. le Président : La MNEF, durant la période où vous en avez été présidente, a fait l’objet de dysfonctionnements extrêmement graves et d’une campagne de presse virulente qui a entraîné une perte de crédibilité de l’ensemble de la mutualité étudiante. En assumez-vous une certaine responsabilité ?

Mme Marie-Dominique LINALE : J’ai sûrement une responsabilité en tant que présidente mais, aujourd’hui, j’attends toujours les conclusions des rapports de l’IGAS ou de la Cour des comptes qui mettent réellement le doigt sur ces dysfonctionnements. J’ai bien sûr une vague idée en lisant les journaux, et en raison des enquêtes qui ont eu lieu. Le rapport de l’IGF me paraît correct ; il n’a pas conclu à des détournements. J’attends celui de l’IGAS pour me faire une idée plus précise de l’étendue de mon éventuelle responsabilité et pour savoir si j’aurais dû ou non intervenir.

M. le Président : Comprenez-vous que le conseil d’administration actuel se soit constitué partie civile à la suite des différentes procédures qui ont été diligentées ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Nous en avions discuté lorsque j’étais présidente, et nous avions décidé, dans la mesure où les élections allaient se dérouler et qu’un nouveau conseil d’administration allait se constituer, que ce serait à lui de se porter partie civile, comme l’a fait la CNAM.

M. le Président : D’après ce qui nous a été rapporté, tout un système auquel vous avez participé s’est développé dans une certaine opacité. Estimez-vous avoir créé tous les moyens de la transparence ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Opacité ?

M. le Président : Je parle d’opacité dans la mesure où les décisions étaient celles du directeur général, couvertes par vous-même avec l’impossibilité pour les autres membres du conseil d’administration d’en être informés.

Mme Marie-Dominique LINALE : Toutes les décisions d’orientation qui ont été prises par la MNEF l’ont été par le conseil d’administration après avoir été discutées et présentées par le directeur général ou, selon les sujets, par d’autres directeurs. Les membres du conseil d’administration ont pu en débattre et poser des questions au directeur général avant voter.

M. le Président : Quel était le rôle du trésorier de la MNEF dans ce cadre-là ? M. Séguéla avait-il un rôle véritable ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Il accomplissait tout ce que peut faire un trésorier au sein d’une structure de ce type, il faisait la gestion des comptes, qu’il menait avec le directeur financier...

M. le Président : Autrement dit, l’ensemble du fonctionnement de la MNEF relevait-il purement et simplement du directeur général, M. Spithakis, ou aviez-vous un rôle en la matière ainsi que sur un certain nombre d’autres questions ?

Je voudrais comprendre comment fonctionnait l’organisme lui-même. Il y a un directeur général, un directeur administratif et financier, puis, il y a des élus étudiants dont vous étiez la présidente. Comment tout ceci s’articulait-il ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Outre ces deux directeurs, il y a ceux du développement, de l’assurance maladie et d’autres encore. Chaque fois qu’une décision ou qu’une orientation importante devait être prise, elle était portée devant le conseil d’administration et devant l’assemblée générale. Tout ce qui concernait le système de gestion interne de la MNEF ne dépendait pas des élus étudiants parce que nous ne pouvions pas être présents en permanence et qu’il y avait des questions qui étaient directement du ressort des directeurs.

Nous débattions des différents sujets, si nous n’étions pas d’accord nous le disions et nous n’attendions pas d’être réunis en conseil d’administration pour donner notre avis. Ces questions n’arrivaient pas devant conseil d’administration sans avoir été abordées auparavant.

M. le Président : Vous n’avez donc pas eu l’impression d’avoir été manipulée ? Vous avez le sentiment d’avoir eu la possibilité pleine et entière d’exercer l’ensemble de vos pouvoirs de présidente ?

Mme Marie-Dominique LINALE : J’ai eu la possibilité, ainsi que les autres membres de mon conseil, de prendre part à beaucoup de décisions lors de discussions et lors des conseils,.

M. le Rapporteur : En tant que présidente de la MNEF, considérez-vous normal qu’un président ne puisse pas en collaboration avec son conseil d’administration avoir l’entière responsabilité du départ ou du maintien à son poste de son directeur général ? D’après ce que nous avons vu, il semblerait qu’une autre association, Les amis de la MNEF, devait obligatoirement être consultée ou au moins donner un avis conforme pour toute question concernant le directeur général. Cela vous semble-t-il acceptable que le directeur général ne soit pas responsable uniquement devant le conseil d’administration ?

Mme Marie-Dominique LINALE : L’Association les amis de la MNEF était déjà en place lorsque je suis arrivée. Elle proposait les personnalités qualifiées qui siégeaient au conseil d’administration. Je considérais que cette association avait un rôle modérateur, parce qu’à l’époque où la MNEF avait été laissée entièrement aux mains des étudiants, on se souvient de ce qu’il en était advenu.

Pour moi, l’Association tempérait par ses positions, par son expérience et surtout par l’âge de ses membres les décisions qui auraient pu être prises. Concernant le directeur général, elle ne donnait qu’un avis ; si ce dernier était différent de celui du conseil d’administration, le conseil n’avait pas l’obligation d’y souscrire. Nous n’avons pas eu besoin que l’Association intervienne mais, pour moi, son rôle était consultatif.

M. le Rapporteur : Qui, sous votre présidence, représentait la MNEF dans les filiales et sous-filiales - Saint-Michel, Raspail Participations et Développement ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Il y avait des directeurs et certains d’entre nous. A l’UES Saint-Michel, il y avait Dominique Lévêque et moi-même. Il y a eu Olivier Spithakis. Il y avait Blandine Charrel pour Carte Jeunes SA, Laurence Pedinielli pour Main soft international. A Raspail Participations et Développement, le représentant était Philippe Plantagenest, ensuite, je ne sais plus...

M. le Rapporteur : Aviez-vous le sentiment, en tant que présidente, que le conseil d’administration et vous-même aviez une vision transparente de l’ensemble des filiales du système et de ce qui s’y passait ?

Votre niveau d’information, vous qui étiez à l’UES Saint-Michel, s’arrêtait-il à ce qui se passait dans l’UES ou aviez-vous accès à l’ensemble des informations disponibles concernant toutes les sous-filiales qu’elle regroupait ou dans lesquelles cette union avait des participations ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Je savais ce qui se passait dans l’UES Saint-Michel. J’aurais pu facilement savoir ce qui se passait dans ses filiales et sous-filiales mais, il est vrai, je me suis arrêtée à ce qui se passait au niveau de l’UES. Il n’y avait pas de blocage, j’aurais pu m’informer davantage si j’avais été plus intéressée.

M. le Rapporteur : Vous êtes en train de nous dire, finalement, que vous faisiez une confiance totale à l’action du directeur général qui dirigeait cet ensemble et que vous vous contentiez de ce qu’on vous disait ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Pas une confiance générale. Il y avait tout de même d’autres directeurs. Nous avions le même commissaire aux comptes. Il y avait M. Botton, M. Proust. De nombreux directeurs et membres de la MNEF faisaient partie de ces filiales, qui étaient des gens responsables. Ils faisaient établir des rapports d’activités qu’ils sont venus plusieurs fois présenter lors de conseils d’administration ou d’assemblées générales. Je ne faisais pas exclusivement confiance au directeur général, mais aussi à d’autres personnes. Je faisais, par exemple, confiance à Dominique Lévêque qui me faisait part des problèmes.

M. le Rapporteur : Pouvez-vous nous expliquer les conditions dans lesquelles s’est réalisé le changement de trésorier, lorsque M. Dornic est parti et que M. Séguéla est arrivé ? Le départ de M. Dornic est-il lié à la situation orageuse qui planait sur une autre mutuelle, la MISEC, dans laquelle il avait des fonctions ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Franchement, non, je ne pense pas qu’il y ait un lien.

M. le Rapporteur : L’équipe sortante a préparé l’organisation de la consultation électorale en vue de désigner le nouveau conseil d’administration.

Le code de la mutualité impose la nécessité d’avoir plusieurs sections de vote. Pourquoi, dès lors, avoir fait le choix d’une circonscription étudiants de France, qui est cent fois plus grosse que la deuxième section, qui regroupe les étudiants hors métropole ?

N’est-ce pas une façon d’empêcher les gens de présenter des listes facilement puisqu’il faut trouver soixante-cinq étudiants appartenant à vingt-deux académies différentes ...

Mme Marie-Dominique LINALE : Représentant les 4/5 des académies pour que l’ensemble des académies soit représenté.

M. le Rapporteur : N’est-ce pas un frein à l’exercice de la démocratie d’avoir organisé la consultation électorale de cette façon ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Cette question des deux sections a donné lieu à un débat.

J’avais mis en place une commission de contrôle électoral, composée de treize personnes, dont quatre personnes issues de chaque tendance qui se présentait, et qui devait décider et mettre en place tout le processus des élections. Lors de ces réunions a été débattue l’idée des sections. Les trois quart des personnes présentes ont voulu avoir deux sections de vote, l’une représentant les étudiants français résidant en France et l’autre les étudiants français résidant à l’étranger.

Je ne pense pas que ce soit un frein à la démocratie. Auparavant, nous avions huit sections de vote, et il fallait que la section arrive à déposer dans huit villes une liste qui soit, ne l’oublions pas, entièrement différente. Cela avait donné lieu à un problème d’invalidité pour une liste sur Aix-Marseille qui n’avait représenté qu’une seule ville. C’était aussi très compliqué.

Avec le nouveau système mis en place, chaque liste représente réellement les 4/5 des académies. Précédemment, lorsque nous votions par section, la personne qui, par exemple, votait à Paris sur une liste, ne retrouvait pas nécessairement la personne pour qui elle avait voté en tête de liste représentée à l’assemblée générale, puisque l’assemblée était une réunion de toutes les listes, en pourcentage.

Il m’a semblé plus simple de présenter des listes de soixante-cinq candidats répartis sur les 4/5 des académies, ce qui représentait un maximum de huit par académie. Il n’était alors pas trop difficile de constituer une liste nationale à cette condition.

Les trois quarts des membres de la commission de contrôle électoral ont voulu ce système de section. J’ai présenté cette solution au conseil d’administration qui l’a approuvée.

M. le Rapporteur : En tant que présidente, aviez-vous communication des montants des salaires des principaux cadres dirigeants salariés de la MNEF ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Je ne les connaissais pas parce que je ne me suis pas intéressée au salaire que percevaient le directeur du développement, celui de l’assurance maladie ou les autres cadres.

M. le Président : Qui décidait de la rémunération de ces cadres supérieurs ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Leur rémunération était fixée par le directeur général.

M. le Président : Le directeur général décidait de la rémunération de tous les cadres supérieurs. Qui décidait de la rémunération du directeur général ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Quand je suis arrivée, un contrat de travail avait été établi par le conseil d’administration de l’époque, comme je l’ai fait pour M. Delpy. Pour établir son contrat, j’ai demandé conseil au directeur financier et au directeur des ressources humaines. La rémunération souhaitée par M. Delpy a été présentée ensuite au conseil d’administration.

M. le Président : Aviez-vous, à peu près, connaissance de la rémunération de M. Olivier Spithakis ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Je l’ai su. Quand je suis arrivée, je m’y suis intéressée et lorsque nous avons eu des divergences, également.

M. le Président : Sur quels points aviez-vous des divergences ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Nous en avons eues de nombreuses, la dernière a été l’entrée de représentants de l’UNEF-ID dans la MNEF.

M. le Président : Des divergences politiques ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Oui, des divergences d’orientation.

M. le Rapporteur : Pour être clair, en tant que présidente, quelle était votre position concernant l’entrée de l’UNEF-ID au conseil d’administration ?

Mme Marie-Dominique LINALE : J’y étais favorable et Olivier Spithakis n’était pas tout à fait pour.

M. le Rapporteur : Il était contre, et votre position était qu’il fallait coopter...

Mme Marie-Dominique LINALE : Il fallait faire entrer au conseil d’administration de la MNEF les associations, les syndicats. La MNEF avait retrouvé une stabilité. L’UNEF-ID, avant cette période où le redressement a été entrepris, avait toujours été présente dans la MNEF ainsi que les associations. Comme nous avions une bonne année en perspective, il nous a semblé intéressant d’élargir la représentation et de faire entrer les associations et les syndicats. Nous avons commencé par le syndicat étudiant le plus important. Mais j’ai également demandé à la FAGE et à d’autres associations d’entrer au conseil d’administration de la MNEF.

M. le Rapporteur : Dans le processus électoral qui s’est déroulé et que vous avez eu la responsabilité de préparer, vous paraît-il normal qu’un seul syndicat étudiant, l’UNEF-ID, ait reçu une subvention de fonctionnement, faussant en cela le jeu ?

Mme Marie-Dominique LINALE : La subvention accordée en 1998 à l’UNEF-ID n’a pas été reconduite.

M. Bruno BOURG-BROC : Quelle était la fréquence des réunions du conseil d’administration ? Pourriez-vous, dans les grandes lignes, nous dire comment se déroulait un conseil d’administration ? Qui était présent ? Qui parlait ?

A votre connaissance, lorsque vous êtes arrivée et lorsque vous êtes partie, quels étaient les liens, institutionnels ou non, entre la MNEF et les partis politiques ou encore les syndicats ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Il y avait au moins trois ou quatre conseils d’administration par an, cela dépendait du rythme de l’actualité, des décisions et des résolutions à prendre.

M. Bruno BOURG-BROC : Les statuts prévoient-ils une périodicité minimum ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Oui. Il est prévu trois assemblées générales, mais de fait elles étaient plus nombreuses. Surtout la dernière année.

L’ordre du jour était fixé par mon bureau et moi-même en collaboration avec M. Spithakis et, par la suite, M. Delpy. Chaque administrateur avait le droit de poser des questions, en les présentant trois jours avant, comme cela est prévu dans le code. Les syndicats de la MNEF étaient représentés par deux délégués syndicaux. On commençait par un point d’actualité fait par le directeur général ou un autre directeur ; souvent même par deux points d’actualité sur les évolutions en cours. Selon le thème, les intervenants variaient : la campagne de la rentrée incombait à M. Prous, à M. Goudon revenait d’exposer la situation sur Prémuni ou les engagements informatiques. Ensuite, nous répondions à toutes sortes de questions relatives à la mutuelle, à son fonctionnement, son budget, ses orientations, ses éditions...

M. Bruno BOURG-BROC : Je me demandais si les administrateurs parlaient ou si c’était plutôt les membres de la direction générale. Les rapports étaient-ils présentés par des membres élus ou par des membres de l’administration ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Les points dont nous débattions étaient présentés, selon les cas, par la secrétaire générale ou moi-même, la trésorière ou le trésorier.

M. Bruno BOURG-BROC : Vous rédigiez le rapport ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Les résolutions étaient rédigées avec la juriste et les différents directeurs selon qu’elles concernaient tel ou tel domaine de la mutuelle. Les juristes " doublaient " notre travail, en mettant les résolutions en forme. Celles-ci étaient ensuite présentées par le président, la vice-présidente ou un autre directeur ; les administrateurs avaient tout loisir d’intervenir et de demander plus d’explications. A chaque fin d’exposé, le débat était lancé.

M. Bruno BOURG-BROC : Quelle est votre réponse à ma question sur les liens, institutionnels ou non, existant entre les formations politiques ou syndicales et la MNEF ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Nous avons toujours entretenu d’assez bonnes relations avec l’UNEF-ID, parce que notre histoire nous lie à eux, plus qu’à l’UNEF-SE, avec laquelle nous avions moins de rapports. Nous étions liés aussi avec des syndicats comme la FIDEL. En 1997, lors de nos dernières élections, nous les avons invités à nos assises. Chacun a pris la parole sur la mutualité étudiante, sur les élections. Tous les syndicats avaient été invités. Ce sont donc des rapports que l’on peut qualifier de partenariaux.

M. Bruno BOURG-BROC : Tous les syndicats ? L’UNI également ?

Mme Marie-Dominique LINALE : En 1997, elle avait été invitée mais c’est la seule formation qui n’est pas venue s’exprimer.

En tant que tels, je n’ai pas eu de rapports avec les partis politiques, à part ceux qu’une mutuelle peut entretenir avec les gouvernements successifs sur telle loi, tel projet de loi ou telle demande des pouvoirs publics concernant les étudiants. Pour ma part, je n’ai pas eu de contact personnel avec des formations politiques.

M. le Président : Avant de poursuivre, je voudrais dire, que je viens de transmettre à mes collègues copie du jugement rendu, ce jour, par le tribunal de grande instance de Paris. Celui-ci prononce la nullité de l’assemblée générale du 24 juillet 1998, alors que vous étiez donc présidente et, par voie de conséquence, de l’élection du 11 mars 1999 intervenue conformément à cette assemblée, avec exécution provisoire du jugement. Cela veut donc dire que, dès lors, de plein droit, on se retrouve dans la situation antérieure à cette assemblée générale, avec le conseil d’administration antérieur aux élections. Pouvez-vous nous faire part de vos observations ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Je n’ai pas eu connaissance du texte du jugement. Je n’ai appris cette décision que sur ma messagerie tout à l’heure. Je n’en ai pas encore discuté avec mon avocat.

M. Bruno BOURG-BROC : En droit, Madame redeviendrait présidente ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Non, peut-être pas. C’est l’ancien conseil d’administration qui revient et doit réélire un nouveau bureau.

M. le Président : C’est le conseil d’administration antérieur aux élections qui reste compétent, sous réserve des démissions qui sont intervenues.

Mme Marie-Dominique LINALE : J’avoue que je ne m’attendais pas à une annulation de la part du tribunal.

M. le Président : Il est dit " qu’une telle procédure aboutit à priver les délégués participant à l’assemblée générale de la possibilité d’une expression libre et réfléchie, telle qu’elle doit pouvoir s’exercer démocratiquement dans le cadre des associations et qu’elle est prévue dans le formalisme des dispositions statutaires, lequel ne fait que refléter ces principes démocratiques. "

M. André ANGOT : Pensez-vous que cette décision puisse entraver le fonctionnement de la MNEF, sachant que l’on nous a dit à plusieurs reprises que la MNEF reposait uniquement sur ses salariés et ses dirigeants, et que le conseil d’administration n’était au courant de rien et n’avait aucun pouvoir. Le fait qu’il n’y ait plus de conseil d’administration élu à la MNEF sera-t-il nuisible à son fonctionnement ?

Mme Marie-Dominique LINALE : L’ancien conseil d’administration est donc toujours en place. Qu’il n’ait pas de pouvoir et que la MNEF soit gérée uniquement par les salariés, je ne suis pas d’accord. Nous avons eu notre mot à dire sur de nombreux sujets, nous nous sommes engagés dans de multiples combats et d’actions. Il est vrai que nous sommes des étudiants, que nous étions plus préoccupés par les questions sociales et que nous étions loin d’être présents tous les jours à la MNEF.

Je pense effectivement que cette décision est un coup dur pour les salariés qui étaient repartis sur des bases sereines. Après la campagne de presse, un processus électoral s’était mis en place, qui se déroulait correctement et une nouvelle équipe venait de reprendre la situation.

M. André ANGOT : Cette annulation semblerait indiquer que le processus d’élection ne s’est pas déroulé tout à fait normalement.

Mme Marie-Dominique LINALE : Non, je ne crois pas, car l’annulation concerne l’assemblée générale du 24 juillet, pour des raisons de forme. En principe, une assemblée générale doit être convoquée dans les quinze jours précédant sa réunion. L’ordre du jour avait été communiqué depuis longtemps puisque cette réunion était prévue de longue date. Suite aux événements, aux démissions, suite au lancement du processus électoral, nous avions convoqué l’assemblée générale le 24 juillet, en ajoutant à l’ordre du jour le point portant sur les modifications statutaires puisque, jusqu’au 23 juillet au soir, la commission électorale avait délibéré sur le système électoral. Nous avions donc convoqué un conseil d’administration pour revoter l’ordre du jour modifié.

M. le Président : L’article 21 des statuts de la MNEF dispose que l’assemblée générale doit être convoquée au moins quinze jours avant la date de cette réunion.

Mme Marie-Dominique LINALE : Pour donner un ordre du jour.

M. le Président : Manifestement, ce délai n’a pas été respecté et le conseil d’administration a tenté de le justifier par la procédure d’urgence qui autorise un délai ramené à trois jours. Nous connaissons cela dans nos conseils municipaux. Cependant, cette règle de l’urgence, invoquée au motif de problèmes judiciaires nombreux, n’a pas été retenue par le tribunal. Celui-ci, annulant l’ordre du jour, a de fait annulé la délibération, et donc les élections.

M. Hubert GRIMAULT : Tout le monde s’accorde à dire que la MNEF et ses filiales avaient une organisation un peu complexe. Pouvez-vous nous dire, de manière simple, comment vous et le conseil d’administration suiviez l’activité de la MNEF, de ses filiales et sous-filiales ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Le point sur l’activité des filiales était fait par le directeur général en conseil d’administration. De même, les directeurs devaient fournir des rapports au conseil, et veiller à ce que tout se déroule au mieux des intérêts de la MNEF à l’intérieur de ses filiales.

M. Hubert GRIMAULT : Ma question est précise. Aviez-vous, à chaque conseil d’administration, un exposé complet de l’activité de chaque filiale et sous-filiale ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Pas à chaque conseil. Il n’y avait pas de règle établie. Si des transformations ou des évolutions apparaissaient, elles étaient portées à la connaissance du conseil d’administration, le point était fait rapidement. Nous parlions souvent des filiales en introduction, ou des points précis étaient abordés dans des questions posées par les membres du conseil d’administration ou des élus étudiants, puisque les représentants de section étaient présents, mais aucune règle ne nous imposait d’aborder le sujet des filiales à chaque conseil.

M. Hubert GRIMAULT : A l’occasion de visites à votre directeur général, vous arrivait-il de poser des questions sur l’activité des filiales ? Etait-ce une de vos préoccupations ou faisiez-vous entièrement confiance aux fonctionnaires ?

Mme Marie-Dominique LINALE : C’était une préoccupation, mais je dois avouer qu’en raison de mon âge, de mon faible niveau en matière de gestion, je ne m’y intéressais que de façon générale. Si j’avais des points d’intérêt ou des questions qui m’étaient posées même par l’extérieur, j’intervenais.

M. Hubert GRIMAULT : Ce n’était pas un de vos soucis.

Mme Marie-Dominique LINALE : Ce n’est pas tout à fait cela, mais je ne pouvais pas parvenir à tout faire et être là le plus souvent possible. Je suis étudiante dans le sud, même si je venais assez souvent à Paris, j’avoue que certaines filiales m’intéressaient, par exemple, Carte Jeunes SA, car il s’agissait d’un produit que nous utilisions nous-mêmes et les étudiants me faisaient part de leurs critiques. De ce point de vue, je peux dire que je m’y suis intéressée, mais vous dire que je m’intéressais à chacune des filiales, vraiment je ne le peux pas.

M. le Président : L’un des administrateurs nous a dit qu’il avait fait l’objet de menaces physiques pour avoir envisagé de demander la désignation d’un administrateur provisoire ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Menaces physiques ?

M. le Président : Oui. Il semblait terrorisé.

Mme Marie-Dominique LINALE : Je ne sais pas de qui vous parlez. Mais franchement, je n’ai pas entendu parler de menaces physiques. En tout état de cause, je n’étais pas présente.

Je conviens qu’il y a eu des discussions, des débats houleux entre administrateurs au sujet de la nomination d’un administrateur provisoire, la pression montait, tant parmi les salariés qu’au conseil d’administration ou à la direction générale, mais il n’y a pas eu de menaces physiques.

M. le Rapporteur : S’agissant des filiales et des sous-filiales, y avait-il des représentants du conseil d’administration, donc des élus, dans les structures dirigeantes de ces filiales et sous-filiales ou est-ce que les administrateurs du conseil d’administration de la MNEF n’allaient pas au-delà de l’UES Saint-Michel et de Raspail Participations et Développement ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Ils n’allaient pas au-delà.

M. le Rapporteur : Les organes de direction de la mutuelle étaient l’assemblée générale, le conseil d’administration, le bureau, la présidente, les Amis de la MNEF, et l’on nous a parlé du comité consultatif. Vous connaissez cette structure ?

Mme Marie-Dominique LINALE : J’ai rencontré ses membres. Nous avions des réunions deux fois par an. J’avais la chance de bien m’entendre avec M. Leberre et Mme Devaux qui en font partie et qui sont les fondateurs du régime étudiant de sécurité sociale. Il nous arrivait de déjeuner ensemble et de parler des orientations de la MNEF. J’ai, pour ma part, souvent eu recours à eux, pour leur demander des conseils parfois personnels.

M. le Rapporteur : C’est vous qui désignez ce comité national consultatif ou est-ce des auto-désignations ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Durant mon mandat, la composition du comité est restée la même.

M. le Rapporteur : Une commission permanente de la mutuelle se réunissait le mardi. Y avez-vous participé en tant que présidente ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Elle se réunissait le mardi matin à 8 heures. J’y ai siégé mais j’ai dû abandonner parce que je ne pouvais pas être à Paris le mardi. J’ai recommencé à y participer après le départ d’Olivier Spithakis. Je venais alors à Paris en début de semaine.

M. le Rapporteur : En clair, la commission permanente a préféré continuer à se réunir le mardi, quitte à ne pas avoir la présidente, plutôt que de se mettre à sa disposition ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Le trésorier et la trésorière ainsi que le secrétaire général de l’époque et le délégué général étaient présents. Il y avait tout de même trois ou quatre étudiants, avec lesquels j’avais des contacts réguliers.

M. le Rapporteur : On nous a également parlé de deux comités exécutifs, MNEF et filiales ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Les directeurs se réunissaient pour débattre des différentes orientations avec le directeur général.

M. le Rapporteur : En tant que présidente, étiez-vous invitée à participer à ce comité exécutif filiales ou au comité exécutif MNEF ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Je pouvais y aller mais ils se réunissaient après la réunion de la commission permanente, le mardi.

M. le Rapporteur : Donc, toutes les réunions importantes avaient lieu le jour où vous ne pouviez être à Paris ?

Mme Marie-Dominique LINALE : C’était dû à mon emploi du temps.

M. le Rapporteur : Oui, mais la présidente, c’était vous !

Mme Marie-Dominique LINALE : C’était comme cela. Ces réunions concernaient les directeurs.

M. le Rapporteur : A aucun moment, il n’est venu à l’idée du conseil d’administration que les directeurs pouvaient se mettre un peu à la disposition des élus ? On aurait, par exemple, pu changer le jour !

Mme Marie-Dominique LINALE : Je vous répète que c’était leur réunion comme nous pouvions avoir entre nous la conférence des présidents en tant qu’élus. Mais un rapport du comité exécutif et du comité filiales était fait, nous pouvions y avoir accès facilement.

M. le Président : Mais vous n’aviez pas l’impression que le système tournait à l’envers ? Je m’excuse de dire cela, mais c’est ce qui ressort de votre audition. Nous avons l’impression d’un navire ivre dont vous ne pouviez tenir le gouvernail, alors même que vous en étiez la présidente.

Mme Marie-Dominique LINALE : Ce n’est pas que je ne pouvais pas tenir le gouvernail, c’est que j’ai été présente sur ce que je pouvais.

M. le Président : Et vous n’avez pas eu envie de donner votre démission en disant que vous ne contrôliez plus ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Non, je n’ai pas eu l’impression de ne pas contrôler. J’avais un rôle bien défini de gestion du conseil d’administration et des assemblées générales ; je m’occupais de santé, des orientations de la politique de santé, d’actions sociales, que ce soit à Paris ou dans le sud. Lorsque je redescendais, je menais des actions. J’ai monté moi-même des opérations avec les directeurs. J’en ai pris la responsabilité pour certaines villes.

Pour moi, je menais les actions que je devais mener. Je rendais un service aux étudiants. Je créais des produits pour eux. Il y avait des services. La MNEF représentait quelque chose, dans les domaines de la santé, des aides, etc. C’est ma vision. Je gérais mon conseil d’administration.

M. Jean-Pierre BAEUMLER : Madame, nous vous avons écouté avec beaucoup d’attention et vous nous avez fait part de ce qu’a été votre action, de ce qu’étaient votre rôle et vos responsabilités qui, je pense que vous en avez conscience, étaient importantes. Aujourd’hui, vous avez pris un peu de recul. Pourriez-vous nous dresser le bilan de ces cinq années de présidence ? Peut-être pourriez-vous faire état de regrets, d’erreurs que vous auriez pu commettre dans l’exercice de ces responsabilités ? Plus généralement, quel jugement portez-vous sur ce qui a été appelé l’affaire de la MNEF ?

Perceviez-vous une indemnité qui vous dédommageait du temps que vous consacriez à la MNEF ? Vos frais de fonction étaient-ils pris en charge ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Comme je le disais précédemment, mon seul regret est de ne pas nous avoir tous poussé à aller plus loin dans notre formation, et par là, de nous être intéressés davantage à tout ce qui touchait aux filiales, à la gestion. Nous avions des formations assez diverses et à notre jeune âge, je ne sais pas si l’on est conscient du degré de responsabilité qui repose sur nos épaules.

M. le Président : Quelle formation avez-vous suivie ?

Mme Marie-Dominique LINALE : J’ai une formation en géographie. J’ai travaillé dans des directions départementales de l’agriculture. J’ai toujours plus ou moins travaillé pour payer mes études. Si nous avions été mieux formés, nous aurions peut-être pu être plus au fait de certaines choses, et certains auraient été plus intéressés par l’activité de l’ensemble de la structure de la MNEF.

M. le Président : Un étudiant est-il vraiment capable d’être président de la MNEF ? C’est la question que nous devons nous poser.

Mme Marie-Dominique LINALE : La question ne se pose pas ainsi. Avec le recul, je pense qu’il faut définir ce poste de président étudiant. Nous sommes étudiants, c’est-à-dire que nous devons suivre un cursus, arriver à finir nos études tant bien que mal, et plutôt mal lorsqu’on a ce genre de poste à responsabilité, même si l’on ne peut pas être là tous les jours car ce n’est pas le but. On ne peut pas nous demander d’être là tous les jours et de poursuivre nos études.

M. André ANGOT : Dans ce cas, il ne faut pas en prendre la responsabilité.

Mme Marie-Dominique LINALE : Si, il faut la prendre parce que c’est intéressant. C’est une expérience formidable. On sort du monde associatif, on peut réaliser pleins de choses. Mais je pense qu’il faut redéfinir ce poste de président, les responsabilités qui s’y attachent, sa mission pendant le temps qu’il peut consacrer à la mutuelle.

M. le Président : Nous nous posons la question de savoir si, à vingt-deux ou vingt-trois ans, sans aucune expérience de la vie des affaires, de la gestion, de la comptabilité, on peut se retrouver à la tête d’une mutuelle qui gère des centaines de millions de francs, dont le capital est de plusieurs milliards de francs, qui emploie 700 salariés et qu’en théorie, vous dirigez en tant que présidente.

M. Bruno BOURG-BROC : Pardonnez mes propos mais avez-vous pris conscience que cette expérience que vous venez d’évoquer, fructueuse pour vous d’une certaine façon, pourrait peut-être un jour vous mener en prison ?

Mme Marie-Dominique LINALE : J’en aurais pris la responsabilité. Si cela me mène en prison... je ne sais pas quoi vous répondre ; je n’ai pas ce sentiment, je ne me suis même pas posé la question. Ou alors, je ne me suis pas du tout aperçue de mon erreur et du fait que je prenais une orientation complètement fausse.

M. Bruno BOURG-BROC : Ce n’est pas un souhait de ma part.

M. le Président : Ne soyez pas terrorisée par la question qui vient de vous être posée. Je dis cela à mon collègue parce qu’il a prononcé des mots durs.

Mme Marie-Dominique LINALE : La question se pose en raison de la responsabilité pénale liée à ce poste. Le président a une responsabilité pénale. Je me suis effectivement posée la question, j’ai couru chez un avocat.

Mais, pour revenir à la question initiale, je pense que nous pouvons tenir ce poste, en tout cas tel que je l’ai défini, en séparant bien les rôles car, à mon avis, on ne peut pas être à la tête d’une mutuelle et gérer les salariés. Nous n’en avons ni le temps, ni la carrure, ni l’expérience. La séparation qui existait me convenait, car je n’avais pas les capacités pour le reste. Pour moi, la présidence s’occupait des orientations dans le domaine médical, de la santé et autres et apportait un service à l’étudiant pour faciliter ses conditions de vie, etc. De ce point de vue, je pense que nous étions les mieux placés puisque nous nous sommes étudiants. Je ne crois pas que ce soient les salariés de quarante ans qui puissent définir nos besoins.

M. le Président : Il y avait une seconde partie à la question de M. Baeumler, concernant l’indemnité que vous perceviez et la prise de charge de vos frais.

Mme Marie-Dominique LINALE : Je percevais une indemnité et mes frais étaient pris en charge - mes déplacements, mes billets d’avions et les repas que je pouvais faire dans le cadre de ma fonction.

M. le Président : Quel était le montant de cette indemnité ?

Mme Marie-Dominique LINALE : En fin de mandat, elle était de 10 200 F, au départ elle était de 6 000 F.

M. le Président : Vous ne touchiez aucune autre indemnité ? Vous avez dit que vous aviez un poste à UES Saint-Michel, pour lequel vous ne touchiez pas d’autre indemnité ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Non, pas du tout. Les mandats que nous avions en tant que représentants MNEF n’étaient pas indemnisés.

M. le Président : Il n’y avait qu’une seule indemnité ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Tout à fait.

M. le Président : Nous avons reçu, tout à l’heure, les délégués et le directeur de la MGEL qui estiment qu’il ne doit pas y avoir d’indemnisation. Qu’en pensez-vous ?

Mme Marie-Dominique LINALE : Je pense qu’à la MNEF, aucun d’entre nous n’aurait accepté, et ne se serait investi comme il l’a fait, sans une indemnité.

M. le Président : Leurs frais réels sont remboursés mais il n’ont pas d’indemnité complémentaire assimilable, en quelque sorte, à un salaire.

Mme Marie-Dominique LINALE : Peut-être, mais pour payer mes études, j’ai toujours dû travailler dans différentes administrations. J’avais obtenu un poste de " pionnicat " que j’ai dû quitter parce que je ne pouvais pas tout faire. Sans cette indemnité, nous sommes nombreux dans ce cas, nous n’aurions pas pu occuper ce genre de poste à responsabilité, qui demande de venir souvent à Paris, ce qui occasionne toujours des frais que l’on se fait rembourser, qu’on le veuille ou non. Je ne conçois pas que l’on ne puisse pas nous rémunérer un minimum.

M. le Président : C’est votre position.

M. Pierre LASBORDES : J’ai une question assez simple. Quel est le chiffre d’affaires de la MNEF pour 1998 et la valeur du capital immobilier ? Un ordre de grandeur ?

Mme Marie-Dominique LINALE : On gère à peu près 300 millions de francs. La valeur du capital immobilier, je ne saurais vous le dire, même en vous donnant un ordre de grandeur.

M. le Rapporteur : Le rôle de cette commission est de faire la lumière sur un certain nombre de choses qui se sont passées, mais également de faire des propositions. Dans le fonctionnement que vous nous décrivez, à vous entendre, j’ai l’impression que tout se passait comme si vous étiez la représentante du comité consultatif social auprès du directeur général.

Finalement, le directeur général dirigeait la " boutique ", et vous, les représentants étudiants, étiez là pour essayer d’avoir quelques idées sur le plan social, d’améliorer la condition de vie étudiante. Mais, en fait, vous n’aviez pratiquement aucun poids sur l’activité réelle, le fonctionnement et la diversification de la mutuelle.

Les rapports que nous avons étudiés montrent que la liquidation des prestations aux étudiants fonctionnait bien, il n’y avait pas de problème à ce niveau, mais vous n’aviez pas vraiment de prise sur tout le reste : les filiales et le système capitalistique qui s’est mis en place au-delà de UES Saint-Michel et de Raspail Participations et Développement.

Mme Marie-Dominique LINALE : Nous avions une emprise. Nous avons donné notre avis. A une époque, nous étions d’accord pour que la MNEF s’occupe du problème du logement des étudiants car il y avait des carences dans ce domaine.

M. le Rapporteur : Mais y avait-il des carences au niveau de l’imprimerie des étudiants, au niveau des voyages en bateau des étudiants ?

Mme Marie-Dominique LINALE : L’imprimerie était l’outil technique de la MNEF. Elle servait à la mutuelle elle-même, pas aux étudiants directement.

Nous nous sommes battus sur de nombreuses propositions en conseil d’administration avec le directeur général. Sur nos propositions, il a mis en place des choses avec les pouvoirs publics ou avec les autres directeurs. Nous nous sommes beaucoup battus avec le directeur du développement pour mettre en place de nombreuses actions. Ce rôle était pour nous très important.

M. le Président : Avez-vous envisagé de vous séparer du directeur général et de rompre son contrat de travail pour faute ? Vous étiez présidente et en aviez, par conséquent, le pouvoir.

Mme Marie-Dominique LINALE : La seule fois où je l’ai envisagé c’était lorsque nous avons eu des divergences d’opinions. Nous en avons débattu.

M. le Président : Vous avez toujours eu le sentiment qu’il agissait pour le bon fonctionnement de la MNEF ?

Mme Marie-Dominique LINALE : J’ai toujours eu le sentiment qu’il allait dans le sens des étudiants et de la MNEF.

M. le Président : C’est votre position. Je vous remercie, même si cela a été un peu dur pour vous par moments.


Source : Assemblée nationale (France) : http://www.assemblee-nationale.fr