Ce chapitre, basé sur la documentation recueillie par des historiens concernant le développement du Rwanda pré-colonial, va dans plusieurs directions. D’une part, il souligne la diversité " ethnique " fondée en partie sur le statut professionnel et en partie sur la relation patron/dépendant, mais aussi sur l’ascendance Hutu/Tutsi. D’autre part, il rappelle que jusqu’à l’apparition des descriptions écrites réalisées par les premiers voyageurs européens, l’individu s’identifiait par rapport à son clan plutôt que par son appartenance ethnique et que cette description des groupes dits ethniques est le fait de ces voyageurs. Comme dans bon nombre de régions d’Afrique, en l’absence de sources écrites, de vestiges archéologiques, etc., les données historiques fiables antérieures au milieu du XIXe siècle sont chose rare.

La plupart des historiens s’accordent à dire que les premiers habitants du Rwanda vivaient de la chasse et de la cueillette et habitaient les forêts. Leurs descendants modernes sont les Twas qui ne constituent plus aujourd’hui qu’une faible minorité. Leur arrivée remonte à 2000 avant J.-C. Outre la chasse, ils pratiquent la poterie et la vannerie. Vers l’an 1000 après J.-C., l’arrivée de paysans, les Hutus, les contraignit à se déplacer. Cette migration s’inscrivait dans le cadre de l’expansion bantoue qui, dans le cas du Rwanda, peut être située des savanes du Cameroun actuel jusqu’à la région des Grands Lacs. Ces paysans ont défriché les forêts et cultivé le sol volcanique sombre et fertile (Vansina, 1962 et de Heusch, 1966).

Les agriculteurs immigrés d’expression bantoue cultivaient le sorgho, élevaient du bétail et des abeilles, chassaient et développèrent des industries villageoises. Ils portaient des peaux de chèvre et des vêtements tannés. Ils s’organisèrent en lignages et en clans placés sous le commandement de chefs de lignage et de chefs de clans (d’Hertefelt, 1962). Les Hutus ont cohabité avec les Twas et ont troqué des peaux et de la viande contre du sel et des objets en fer.

Au XVe siècle, une grande partie des Hutus étaient organisés en mini-États contrôlés chacun par un clan dominant et composés de plusieurs lignages sous l’autorité d’un lignage dirigeant (qui, au fil du temps, devint une dynastie) avec à sa tête un mwami (chef ou roi) qui était un chef temporel et spirituel chargé de faire tomber la pluie (Vansina, 1962). Il semblerait que certains lignages avaient déjà acquis du bétail à cette époque et que l’on avait assisté à l’émergence de plusieurs États avant l’immigration des Tutsis (principalement le clan Nyiginya ). Kagame (1972) estime qu’à ce stade, sept grands clans avaient un statut pré-Nyiginya .

Le Rwanda actuel, considéré comme une entité géopolitique composée de plusieurs mini-États, émergea d’après les historiens entre le XIe et le XVe siècle, en grande partie sous l’effet de l’immigration et l’implantation d’éleveurs tutsis. À partir du XVe siècle environ, le nombre d’éleveurs augmenta considérablement dans les États existants.

Les Tutsis semblent appartenir à un mouvement migratoire plus vaste d’éleveurs vers le sud dans la région des Grands Lacs (Bauman, 1948 ; d’Hertefelt, 1962). Les avis divergent sur la question de savoir si l’immigration vers le Rwanda a été graduelle ou soudaine. Mais au fil du temps, les Tutsis s’implantèrent à la fois par voie de conquête et d’assimilation (Lemarchand, 1970 ; d’Hertefelt, 1962 ; Kagame, 1972 ; Vansina, 1962 ; Ogot, 1984 et Reyntjens, 1985).

Il convient de distinguer deux phases d’interaction entre Hutus et Tutsis. L’immigration des Tutsis dans les zones hutues aurait commencé, selon les descriptions, par une infiltration graduelle et pacifique. Des têtes de bétail étaient échangées contre des produits agricoles et ces échanges constituèrent la base des échanges sociaux. Cependant, la coexistence pacifique était généralement suivie de conquêtes qui débouchaient sur le placement des territoires conquis sous l’administration directe et le régime militaire des Tutsis (Lemarchand, 1966 ; Vansina, 1962). Cette phase a été suivie d’un processus visant à acquérir le contrôle direct des facteurs de production, en ce compris la restriction graduelle de l’accès au sol, au bétail et au travail (C. Newbury, 1974 ; d’Hertefelt, 1962 et Vidal, 1969).

Pendant une période de 400 ans, toute une série d’unités politiques hutues ont donc été réduites au rang d’entités administratives et les Hutus se sont transformés en ce qui serait décrit plus tard comme une catégorie " ethnique " (Lema, 1993). L’on entend souvent dire qu’il y a environ 20 générations, l’est du Rwanda était sous la domination politique d’un clan tutsi, le clan Nyiginya . Au fil des siècles, ce clan forma un noyau étatique qui s’élargit vers l’ouest jusqu’à couvrir la plupart du territoire actuel (D. Newbury, 1987). L’histoire des territoires périphériques diffère dès lors de celle du centre du pays. Le Rwanda est donc un pays caractérisé par de fortes variations régionales. Ce sont surtout les régions du nord, les actuelles préfectures de Gisenyi et Ruhengeri, ainsi que certaines parties du sud-ouest qui se situent hors du noyau étatique rwandais.

Dans la foulée, les Hutus ont assimilé les Tutsis qui ont repris à leur compte la langue parlée par les Hutus (kinyarwanda) et intégré les traditions et les cultes hutus. De plus, ils partagent les mêmes collines il n’y avait pas de ségrégation , les mariages interethniques étaient fréquents et les membres des deux ethnies portaient les mêmes noms (Lemarchand, 1970 ; Rennie, 1972 ; Oliver, 1977 et Reyntjens, 1985).

Durant la période pré-coloniale ou avant le XIXe siècle, les Tutsis, les Hutus et les Twas correspondaient globalement aux catégories professionnelles. Les éleveurs de bétail, les soldats et l’administration étaient majoritairement aux mains des Tutsis tandis que les Hutus étaient les paysans. Les Twas ont été marginalisés et souvent maltraités par les autres ethnies. Les Hutus et les Tutsis sont plus difficiles à distinguer et les individus pouvaient changer de catégorie au gré de leur bonne fortune. Bien que la domination des premiers Tutsis Nyiginya soit indéniable, une série d’institutions ont fait office de médiateur dans les relations sociales, en particulier le système des clans qui sous-tendait l’ensemble de la société rwandaise. Dix-neuf clans comprenaient les membres des trois groupes ethniques. D’aucuns affirment que jusqu’environ la moitié du XIXe siècle, l’appartenance au clan a en fait primé l’appartenance au groupe ethnique (tutsi, hutu, twa) (d’Hertefelt, 1971 ; D. Newbury, 1980 ; C. Newbury, 1978).

Les premiers voyageurs européens qui arrivèrent dans le centre du Rwanda observèrent une stratification socio-économique et " ethnique " entre Tutsis, Hutus et Twas. Les Tutsis étaient décrits comme une ethnie distincte par son origine, ses activités économiques, son statut social et son apparence physique, bien que partageant le même langage, la même religion et les mêmes lieux d’implantation que les Hutus (von Götzen, 1895 ; Kandt, 1921). Cette description des " groupes ethniques " rwandais basée en partie sur la méthodologie indigène , soutenue et diffusée par les étrangers, agents coloniaux, ethnologues, anthropologues, historiens, etc., finit par représenter la vision qu’a l’Occident du peuple rwandais. Or, il s’avère que les Rwandais s’identifient plus volontiers en fonction de leur identité personnelle qu’en fonction de leur appartenance au clan. Plusieurs études de David Newbury ont montré que si les termes " Hutu " et " Tutsi " existaient durant la période pré-coloniale, ils n’avaient toutefois pas la même signification qu’aujourd’hui et que le sens de l’identité " ethnique " varie d’un endroit à l’autre et d’une époque à l’autre. Il n’existe aucune définition universelle de l’identité ethnique qui puisse s’appliquer à toutes les régions à la fois (D. Newbury, 1979, 1980 ; C. Newbury, 1988).

Le processus de fusion des mini-États en un Rwanda unifié a duré plusieurs centaines d’années. L’État Nyiginya dans l’est du Rwanda commença une lente expansion par voie de conquête et en monnayant sa protection contre un tribut. Il faut attendre la seconde moitié du XIXe siècle pour voir apparaître le Rwanda comme pays unifié sous le mwami Kigeri Rwabugiri. Sous son règne, le mwami était la source et le symbole de toute autorité dans un État politiquement centralisé. Certains États plus petits conservèrent leur autonomie jusqu’en 1910-1920. Tel fut par exemple le cas de la région septentrionale à proximité de Ruhengeri, qui n’a été intégrée dans la monarchie rwandaise que sous le régime colonial allemand. Il a fallu plusieurs expéditions militaires des Schutztruppe allemandes assistées de Tutsis du centre du Rwanda entre 1910 et 1912 pour défaire les Hutus du nord connus sous le nom de Kiga , causant ainsi un fort ressentiment envers les Tutsis et les Hutus du sud, appelés Banyanduga , qui les avaient accompagnés (Dorsey, 1994 ; Waller, 1993). Aujourd’hui, les Rwandais du nord constituent donc une sous-culture distincte dans laquelle les contacts avec les Tutsis ont été moins fréquents et la conscience d’un passé pré-tutsi plus aiguë que dans les autres parties du Rwanda (Lemarchand, 1970 et 1995).

Le règne de Rwaburigi ou Kigeri IV dura de 1860 à 1895, soit juste avant l’arrivée du colonialisme européen, et marque un grand tournant dans l’histoire du Rwanda. Rwabugiri passa outre des contraintes traditionnelles et accrut les prérogatives du trône. Il est considéré comme le dernier grand réformateur et souvent qualifié de grand roi guerrier. Sa politique intérieure poursuivait un double objectif, à savoir la centralisation du pouvoir et l’extension des structures politiques centrales vers la périphérie du royaume. Dans le domaine de la politique extérieure, il mena une série de campagnes militaires dirigées contre les mini-États hutus dans l’ouest et dans l’est du Rwanda qu’il finit par annexer à son royaume. Les parties situées au nord et au sud-ouest conservèrent par contre un large degré d’autonomie. Pour saper le pouvoir héréditaire détenu par les anciennes familles tutsies, Rwabugiri limogea les officiels en place et nomma des hommes qui dépendaient directement de lui, notamment dans les régions qui avaient joui d’une certaine indépendance, renforçant ainsi les ressources matérielles à la disposition de la monarchie (Dorsey, 1994).

Ce qu’il faut retenir des efforts de développement de l’État sous le règne de Rwabugiri, c’est qu’ils ont renforcé la conscience des différences " ethniques " au Rwanda. C. Newbury explique :

" Avec l’arrivée d’autorités centrales, les critères de distinction ont été modifiés et accentués, dès lors que les catégories hutues et tutsies ont admis les nouveaux accents hiérarchiques associés à la proximité de la cour centrale, la proximité du pouvoir. Plus tard, lorsque l’arène politique s’est élargie et que l’activité politique a gagné en intensité, ces classifications se sont de plus en plus stratifiées et rigidifiées. Plus qu’un véhicule dénotant la différence culturelle par rapport aux Tutsis, l’identité hutue finit par être associée puis assimilée à un statut inférieur " (C. Newbury, 1988).

Relations patron/dépendant

Le ciment qui a uni la population est l’institution du ubuhake une relation fortement personnalisée entre deux individus de statut social différent (Maquet, 1954). Cette relation patron/dépendant implique des liens réciproques de loyauté et d’échange de biens et services. Elle fournissait une place, un statut, dans un système hiérarchique. Le patron était généralement Tutsi, mais le dépendant pouvait être un Hutu ou un Tutsi de statut social inférieur. Une même personne pouvait être à la fois patron et dépendant. Même les patrons Tutsis de Hutus pouvaient être dépendants d’un autre Tutsi. En théorie, la seule personne qui n’était pas un dépendant dans ce système était le mwami lui-même. Donc, la plupart des Tutsis étaient dépendants et certains Hutus étaient patrons. Au sommet de la pyramide, il y avait toujours un Tutsi et au bas de la pyramide un Hutu et/ou un Twa. Cette relation institutionnalisée a été renforcée sous le régime colonial et n’a été abolie qu’à la fin des années ’50 (Saucier, 1974 ; C. Newbury, 1988).

Le système ubuhake et l’ordre social qui va de pair ont prédominé dans le centre du Rwanda où l’influence tutsie était la plus forte. Dans les régions à domination hutue dans le nord et le sud-ouest, plusieurs systèmes se sont développés, basés pour la plupart sur des baux à ferme ou sur la donation de produits agricoles. Les patrons étaient souvent Hutus ; dans le nord, tous les patrons étaient Hutus (d’Hertefelt, 1962 ; Vansina, 1962). Cependant, la prédominance du bétail comme forme de richesse utilisable signifiait que les chefs de bétail sont parvenus à dominer le centre du Rwanda. Mobiliser une armée nécessitait du capital, qui se présentait uniquement sous la forme de têtes de bétail ; or les Tutsis contrôlaient le bétail. Dans ces régions, les Hutus avaient presque tous le statut de dépendant.

L’ubuhake (et d’autres formes de relation patron/dépendant telles que l’uburetwa ) a eu des effets importants : 1) en institutionnalisant les différences économiques entre les Hutus en majorité cultivateurs et les Tutsis éleveurs de bétail ; 2) en servant d’instrument de contrôle qui a fait des Hutus des dépendants socio-économiques et politiques et des Tutsis des patrons ; et 3) en conduisant à un processus d’amalgame " ethnique ", en particulier chez les Hutus. Il en a résulté une dichotomie " ethnique " hutue-tutsie qui s’inscrivait dans le prolongement du processus socio-économique et politique engendré par l’extension et l’occupation tutsies (Lema, 1993).

Plusieurs historiens mettent cependant en doute que la relation patron/dépendant ait été une pierre angulaire de la formation sociale traditionnelle hutue-tutsie, étant donné que les clans rwandais se composaient de plusieurs castes et ethnies. Ils font remarquer que les 19 clans les plus importants comprennent aussi bien des Hutus que des Tutsis (Vidal, 1985 ; d’Hertefelt, 1971 ; C. Newbury, 1987 ; D. Newbury, 1980). Par exemple, les Hutus ne partageaient pas le sentiment d’appartenance à un peuple ou une identité. À cet égard, le système a plutôt débouché sur une différenciation et une stratification économique entre les différentes professions.

Groupes ethniques dans le Rwanda pré-colonial

À la fin du XIXe siècle, le mwami , dirigeant de l’État rwandais, possédait l’ensemble des terres et du bétail. Il régnait en despote mais s’entourait d’un conseil politique de grands chefs et d’un conseil permanent appelé abiru (spécialistes du rite) qui le conseillait sur les obligations divines liées à sa charge (Vansina, 1962). Selon les 500 ans de la chronologie mwami , tous les bami (pluriel de mwami ) étaient Tutsis (Kagame, 1957 ; Vansina, 1962). Aucun d’eux n’était marié à une femme Hutue, ce qui a toute son importance puisque la reine mère jouait un rôle capital dans la société traditionnelle. Il semblerait que les grands chefs aient également été Tutsis (Lema, 1993) tandis que les spécialistes du rite qui composaient l’abiru étaient des Hutus s’inspirant des anciens rites hutus (de Lacger, 1939 ; Vansina, 1962).

Le mwami faisait office de juge et de cour suprême dans la société rwandaise traditionnelle. Les cours inférieures étaient la cour administrative et la cour militaire. La cour administrative tranchait les litiges relatifs à l’occupation du sol et était dirigée par le chef de terre tandis que la cour militaire, présidée par le chef de l’armée, tranchait les litiges relatifs au bétail. Le mwami et tous les chefs d’armée étaient Tutsis, de même que la quasi-totalité des chefs de bétail (Vanhove, 1941). Quant à l’armée, bien que composée sur une base multi-" ethnique ", elle était clairement stratifiée de manière à ce que tous les postes soient attribués par ordre décroissant d’importance aux Tutsis, aux Hutus et enfin aux Twas pour les grades inférieurs. Il n’y avait donc pas de partage du pouvoir dans les activités de l’armée : le commandement, comme la plupart des autres institutions de l’État, était mono- ou uni-ethnique tutsi (Lema, 1993 ; Adekanye, 1995).

Vers la fin du XIXe siècle, plusieurs régions du royaume rwandais avaient développé une structure administrative complexe et hautement organisée englobant les provinces, les districts, les collines et les quartiers (Vansina, 1962). Les provinces étaient normalement administrées par les hauts chefs ou les commandants d’armée qui étaient toujours des Tutsis. Les districts étaient administrés par deux chefs désignés par le mwami : un chef du bétail ayant la charge de collecter les impôts auprès des pasteurs et un chef de terre ayant la charge de collecter les impôts auprès des agriculteurs (Pagès, 1933 ; de Lacger, 1939 ; Kagame, 1952 et Maquet, 1961). Les chefs de bétail étaient normalement Tutsis et les chefs de terre Hutus (Kagame, 1957 et 1975). Les districts étaient divisés en collines administrées par des chefs chargés de transmettre les taxes aux deux chefs de district. Le Rwanda n’avait pas et n’a toujours pas de villages au sens de concentration d’habitat (C. Newbury, 1978). La colline était l’unité administrative de base et comptait non pas un mais trois chefs, à savoir :

le chef des pâturages (toujours un Tutsi) chargé de délimiter les droits de pâturage ;

le chef de terre (presque toujours un Hutu) chargé des problèmes d’agriculture et des taxes foncières ; et

le chef des hommes (généralement un Tutsi) qui collectait les impôts et qui était une espèce d’agent de recensement pour les abagaba , les recruteurs de l’armée du mwami (Kagame, 1975).

Les trois fonctions étaient souvent enchevêtrées : une même personne pouvait remplir les trois fonctions mais sur des collines différentes. Ou elle pouvait n’en remplir qu’une seule ou deux. (Les paysans jouaient sur les rivalités entre chefs, caractéristique essentielle de la survie des paysans, qui disparut à la suite des réformes du gouverneur Voisin à la fin des années 1920. Depuis ces réformes, chaque colline doit être administrée par un seul chef) (Prunier, 1995).

Il s’ensuit que l’État rwandais se transforma en structure dominée par les Tutsis, construite pour asseoir leur pouvoir politique. Les Hutus ne participaient à l’administration qu’aux niveaux intermédiaire et inférieur. Ils recevaient les ordres et les normes, ils n’arrêtaient pas les normes. Il n’y a donc guère de marge d’intégration " ethnique " dans les échelons supérieurs de l’appareil de l’État (Lema, 1993).


Source : Sénat de Belgique