Pour rappel, tel qu’il est défini dans la résolution nº 872 du Conseil de Sécurité des Nations unies, le mandat se basait sur les accords d’Arusha conclus le 4 août 1993. À l’origine, ces accords confiaient un mandat bien plus large à ce qui s’appelait encore la force internationale neutre (FIN). Les accords d’Arusha prévoyaient que la mission de la FIN consistait à " guarantee overall security of the country " tandis que le point 3a de la résolution nº 872 qualifie le mandat de la façon suivante : " to contribute to the security of the city of Kigali, inter alia, within a weapons-secure area established by the parties in and around the city ".
Le mandat
L’historique du mandat
Le mandat des troupes de la MINUAR est donc fondé sur le point 3 de la résolution 872 approuvée par le Conseil de Sécurité des Nations unies (cf. 3.1.4 (4)).
Les États-Unis, la Grande-Bretagne et la Russie ont été d’emblée hostiles à l’opération. Petit à petit, ils y ont consenti avec réticence. Cette attitude a abouti à l’adoption d’un mandat affaibli et d’une réduction des effectifs proposés.
La Belgique ne faisait pas partie du Conseil de sécurité ; elle n’a donc pas été directement associé à la discussion relative au mandat.
Lors de son audition, le Premier ministre M. Dehaene déclare : " À ce moment, il n’était pas habituel que des pays non membres du Conseil de Sécurité s’immiscent dans les mandats. Ce n’est qu’après un certain nombre d’expériences en Yougoslavie, au Rwanda et en Somalie que certains pays ont posé des exigences vis-à-vis des Nations unies.
Ainsi, ils ont obtenus que les pays qui fournissent les troupes doivent être associés à la fixation du mandat. " (475b)
Il n’est pas inutile de rappeler ici les termes du mandat conféré par le Conseil de Sécurité à la MINUAR :
" a) Contribuer à la sécurité de la ville de Kigali, notamment à l’intérieur de la zone libre d’armes établie par les parties s’étendant dans la ville et dans ses alentours ;
b) Superviser l’accord de cessez-le-feu, qui appelle à la mise en place de points de cantonnement et de rassemblement et à la délimitation d’une nouvelle zone démilitarisée de sécurité ainsi qu’à la définition d’autres procédures de démobilisation ;
c) Superviser les conditions de sécurité générale dans le pays pendant la période terminale du mandat du gouvernement de transition jusqu’aux élections ;
d) Contribuer au déminage, essentiellement au moyen de programmes de formation ;
e) Examiner à la demande des parties ou de sa propre initiative, les cas de non-application du protocole d’accord sur l’intégration des forces armées, en déterminer les responsables et faire rapport sur cette question, en tant que de besoin, au Secrétaire Général ;
f) Contrôler le processus de rapatriement des réfugiés rwandais et de réinstallation des personnes déplacées, en vue d’assurer que ces opérations sont exécutées dans l’ordre et la sécurité ;
g) Aider à la coordination des activités d’assistance humanitaire liées aux opérations de secours ;
h) Enquêter et faire rapport sur les incidents relatifs aux activités de la gendarmerie et de la police. " (476b)
Selon le Secrétaire Général, deux des quatre fonctions que la Mission doit remplir sont donc :
" a) Contribuer au maintien de la sécurité de la ville de Kigali (...)
" c) Continuer à surveiller la situation, du point de vue de la sécurité pendant la période finale du mandat du gouvernement de transition devant aboutir aux élections ; (...) " (477b)
La sécurité de Kigali serait assurée en déployant un bataillon d’infanterie et une compagnie de véhicules blindés transporteurs de troupes pour assurer notamment la sécurité de l’aéroport, du camp du FPR, des bâtiments publics, des membres du gouvernement de transition.
À Kigali et dans la zone démilitarisée, la MINUAR devrait récupérer et vérifier les armes, installer des poste de contrôle, effectuer des patrouilles et assurer la sécurité des points de rassemblements et de cantonnement.
L’évaluation du mandat
On peut constater que ce mandat utilise des termes peu interventionnistes : " contribuer, superviser, examiner, aider, enquêter ". Il s’agit d’un mandat classique de maintien de la paix (peacekeeping).
La commission s’est penchée sur les raisons qui ont conduit à l’élaboration d’un mandat aussi faible.
On peut tout d’abord trouver une explication dans l’attitude des USA :
Quelques jours avant la décision du 5 octobre 1993, 18 Casques bleus américains ont été assassinés en Somalie. Les rebelles somaliens ont traîné les corps des soldats américains dans les rues de Mogadiscio devant les caméras de CNN. Ces images ont traumatisé l’opinion publique américaine et déterminé l’attitude du gouvernement américain.
Ils ont donc mis tout leur poids pour imposer leur point de vue au Conseil de Sécurité.
À ce propos M. Cools déclare : " Les Américains ont confirmé par après leur peu d’intérêt pour une nouvelle opération en Afrique, l’opinion publique et le congrès étant négatifs à ce sujet. En outre, le Président Clinton a défini des règles d’intervention plus strictes.
Ils proposent 500 hommes, ce qui est une misère. Les Français proposent 1 000 ce qui n’est pas beaucoup mais leur raisonnement est que si l’on demande trop, les Américains vont refuser d’intervenir.
On arrive finalement à 2 500 hommes. Une commission commune FPR-gouvernement rwandais avait assisté à une séance du Conseil de Sécurité et avait montré sa volonté d’opérer la réconciliation et de mette en oeuvre les accords d’Arusha. Ceci avait fait forte impression notamment sur les Américains qui décident de lancer une opération sur base du chapitre VI nécessitant l’accord des parties.
Je tiens à préciser que la différence entre les chapitres VI et VII ne repose pas sur le fait de faire ou non usage des armes, mais sur l’existence ou non d’un accord entre les parties. " (478b)
Dans son exécution, le mandat s’est trouvé encore affaibli par l’interprétation qui en a été faite sur place.
M. Gasana, un représentant du CRDDR (Comité pour le respect des Droits de l’Homme et de la Démocratie au Rwanda), déclare : "De janvier à mars 1994, la mise en place des institutions fut sans arrêt sabotée en sous-main par les partisans de M. Habyarimana. (...) Malgré l’évolution négative de la situation, la MINUAR fut littéralement paralysée parce qu’elle interprétait restrictivement son mandat. Le 6 avril, le plan du génocide fut déclenché et le manque de préparation des troupes ne permit pas d’y faire obstacle. " (479b)
M. Claes met en cause la responsabilité du général Dallaire. Lors de son audition, M. Claes fait référence à une lettre du 11 février 1994 qu’il adresse au Secrétaire général de l’ONU en réaction aux informations inquiétantes provenant du Rwanda : " Cette lettre indique que l’accentuation du profil politique de l’ONU doit aller de pair avec l’augmentation de la sécurité. Il est a craindre qu’à défaut d’enrayer l’évolution négative de la situation au Rwanda, la MINUAR ne puisse pas jouer son rôle dans l’application des accords d’Arusha.
Ma lettre a provoqué l’étonnement car Dallaire avait reçu l’autorisation de procéder à un désarmement plus sévère de concert avec la gendarmerie rwandaise. Il est apparu cependant que le général Dallaire ne faisait pas grand-chose dans la pratique. En d’autres mots, le courant passait mal entre l’ONU à New York et la MINUAR à Kigali. " (480b)
Pour certains cependant, le mandat donnait satisfaction.
Ainsi pour le professeur Reyntjens : "Le mandat permettait des opérations de fouille et de désarmement, mais interrogé sur ce point, New York a estimé que de telles opérations étaient offensives et donc exclues du mandat.
Le général Dallaire, le colonel Marchal et la gendarmerie rwandaise estimaient pourtant que le mandat le permettait. " (481b)
La commission se demande dès lors pourquoi le général Dallaire s’était senti obligé d’interroger New York sur l’interprétation du mandat.
M. Claes a partagé un certain moment l’avis du professeur Reyntjens : "Un élargissement du mandat n’était pas nécessaire étant donné qu’il y avait suffisamment de possibilités dans les limites des règles d’engagement. " (482b)
À d’autres moments, M. Claes, comme beaucoup d’acteurs sur le terrain, trouvait qu’il fallait le modifier. Les tentatives de M. Claes pour obtenir un élargissement du mandat seront abordées au point 3.4.3.
Le ministre de la Défense de l’époque, M. Delcroix a affirmé au Sénat, le 29 mars 1994, que sans révision du mandat de la MINUAR, la Belgique envisagerait le retrait de ses troupes (483b).
L’application du mandat sur le terrain
La commission constate que l’interprétation du mandat est assez confuse ; elle s’est dès lors demandé qu’elle en avait été la perception d’une part par les autorités militaires et d’autre part par les acteurs de terrain.
Le lieutenant-général Charlier déclare à ce propos : " Les procédures de l’ONU sont lourdes. Il est impossible de modifier un mandat. " (484b)
(...)
" Le mandat qui a été donné à la MINUAR ne couvrait pas tout ce qui était contenu dans les accords d’Arusha. " (485b)
Le colonel Marchal, quant à lui s’interroge : "Le mandat était-il adapté ? Pour nous, ce mandat est le cadre politique dans lequel nous étions placés. Ce mandat n’a pas posé problème jusqu’au 7 avril. Pour moi, ma responsabilité consistait dans ses modalités d’application. À partir du 7 avril, il y eut inadéquation entre le mandat et la situation concrète. " (486b)
Concernant la mort des dix paracommandos, le capitaine Lemaire déclare : " Pour ce qui est des fautes concernant la mort des dix paras, je pense que ce problème présente trois grands aspects. D’abord, la faiblesse du mandat c’était un mauvais choix avant de commencer la mission mais également le fait que, sur place, le 1-para a essayé de réaliser ce qu’il avait comme mandat et il a été en permanence face à un mur qui l’empêchait de le réaliser. De ce fait, à la fin des quatre mois, les gens étaient complètement démoralisés et se demandaient à quoi ils jouaient. Ils prenaient des risques, ils prenaient des armes qu’il fallait restituer le lendemain. (...) et (...) les discours du secteur et de la Force étaient : adoptez un profil bas, nous ne sommes plus en Somalie, restez calmes, restez sérieux. " (487b)
Le capitaine Lemaire s’est aussi exprimé à propos du contenu du briefing tenu à l’occasion de la relève entre KIBAT I et KIBAT II. " (...) dès le départ, on a insisté sur le fait que le mandat était limité, que nous devions éviter les écarts de conduite qui étaient apparus chez le 1-para, ainsi que les attitudes agressives vis-à-vis des Rwandais. Par ailleurs, pour utiliser des armes automatiques, il fallait des autorisations successives du bataillon, de la force et du secteur. Donc, dès le départ, on nous a dit que nous étions là un peu en observateurs de deux parties qui ont un problème à régler entre elles. " (488b)
Mme Des Forges a également eu l’occasion de s’exprimer sur l’interprétation du mandat :
" Au sujet du mandat, je suppose que les militaires voulaient être rassurés sur l’étendue de leurs pouvoirs. Si le Général Dallaire avait agi au lieu de demander, tout aurait pu être différent. Il a donné l’occasion de dire non. Pourquoi a-t-il donc posé cette question ? Peut-être parce que lors d’une première tentative, il a dû rendre les armes confisquées. " (489b)
Les ROE
La définition
Les règles d’engagement sont également définies par l’ONU , mais l’État-Major belge a participé à leur formulation définitive.
Les règles d’engagement étaient définies au moyen de six règles, dont la sixième stipulait que l’emploi, la préparation, le déplacement et le tir avec des armes étaient interdits en présence des parties en conflit (V 1372). L’autorisation d’emploi d’armes automatiques était retenue au niveau des États-Majors sur place (force ou secteur). La modification du contenu des ROE relevait de l’autorité de l’ONU. (490b)
Lors de son audition M. Brouhns déclare :
" À partir du moment où le Conseil donne la ligne du mandat, on constate que les militaires sur le terrain négocient les règles d’engagement, mais que ces dernières ne reviennent jamais au Conseil de Sécurité, ce qui me semble une erreur assez fondamentale du système. À partir du moment où vous avez un Conseil de Sécurité, un organe politique qui décide du cadre général d’une opération, que vous avez des militaires, des exécutants, qui traduisent ce mandat politique en règles d’engagement, que vous avez un secrétariat qui se prétend le gardien de la pensée de l’ONU pour l’interprétation de ces règles d’engagement, et que l’institution politique, à l’origine du mandat, ne contrôle absolument plus rien, la situation est assez malsaine. " (491b)
M. Cools a déclaré lors de son audition :
" Je rappelle qu’il y a trois niveaux dans les règles d’engagement. Le niveau des principes concerne l’utilisation de la force uniquement en cas de légitime défense. Le niveau de la traduction en termes militaires est naturellement du ressort des militaires et les diplomates en sont relativement ignorants. Le problème se situait au troisième niveau, celui de la mise en oeuvre pour laquelle il y avait deux aspects contradictoires. Le premier consistait à dire que les règles d’engagement étaient très larges alors que le second consistait à dire qu’il fallait être prudents lors de leur exécution. (...) On fait souvent une confusion entre le mandat, qui est une mission générale de maintien de la paix, et les règles d’engagement qui traitent des conditions d’utilisation de la force.
Cela n’a pas été discuté à New York mais à Kigali entre le général Dallaire et le colonel Marchal. " (492b)
Ceci est contredit par le colonel Marchal :
" La problématique suivante concerne les règles d’engagement et les autres directives données au détachement MINUAR, ainsi que ma participation au processus décisionnel. En ce qui me concerne, je n’ai pas participé à la prise de décision. J’ai, en quelque sorte, pris le train en marche. " (...) " J’étais en possession d’un brouillon des règles d’engagement et d’une copie du rapport de reconnaissance du colonel Flament grâce à mes fonctions au cabinet.
Je ne possédais pas de résumé des textes de la MINUAR ni de directives plus spécifiques quant à ma mission de commandant du détachement belge. " (493b)
Il s’avère en effet que les projets de ROE ont été adressés, par le lieutenant-colonel Kesteloot, au C ops, à destination du colonel Flamant, dans un télex daté du 29 octobre 1993.
Le colonel Flament a annoté ce télex par les mots " reçu ce matin " et " étudié par nos soins ". Il a chargé le lieutenant-colonel Briot de cette étude. C’est donc au niveau de l’état-major de l’armée belge, à travers Kesteloot, Flament, Briot et CJS que les ROE ont été discutées.
Il faut noter, que de manière inhabituelle, l’article 17, concernant les actes de violence contre les civils, étaient repris dans ce projet de ROE.
Quant au lieutenant général Charlier, il déclare : " Nous avons essayé de rendre le jargon juridique compréhensible pour les soldats qui allaient devoir appliquer les règles sur le terrain. " (494b)
L’interprétation des ROE
La commission constate qu’il n’y a pas unanimité dans l’interprétation des ROE par les membres de l’état-major.
Pour le lieutenant général Charlier : " Il est impossible d’enserrer des règles militaires dans des écrits stricts. C’est une vision de juriste. On crée ainsi paralysie et insécurité. C’est une utopie. " (495b)
Quant à savoir si des limites sont nécessaires , le lieutenant général Charlier déclare : " Un garde-fou doit exister dans la définition de la mission. Venir dire que pour pouvoir utiliser la mitrailleuse, il faut faire appel au commandant de bataillon ne correspond à aucune vision militaire. " (496b)
Le général Dallaire dans ses réponses au questionnaire soumis par le Juge-Avocat Général de la Cour militaire déclare : " La Force n’avait ni le mandat, ni l’équipement, ni la capacité, ni le soutien nécessaire pour contrôler ou influencer de telles hostilités. " (497b)
Pour le lieutenant général Berhin : " Les règles d’engagement ne sont pas si minimales qu’on veut bien le dire. Dès le moment où il est question de se défendre, elles laissent toute latitude pour le faire. C’est la mise en application de ces règles d’engagement par le Général Dallaire qui a été trop minimaliste. Même après le drame, le général Dallaire a toujours refusé de changer son interprétation. (...) Leur interprétation était trop minimaliste.
On attaque, on critique beaucoup les règles d’engagement et le mandat. Mais ce mandat et ces règles sont corrects. C’est l’application sur le terrain qui fut défaillante. " (498b)
Quant au colonel Marchal , il a déclaré en ce qui concerne les ROE, il n’en tenait pas compte " au sens propre " , qu’elles n’étaient " pas si contraignantes que cela ", que toutes les possibilités restaient ouvertes en matière d’utilisation des armes(499b).
Cependant , il a cru devoir interroger le général Dallaire sur l’interprétation de ces ROE : " Quant aux règles d’engagement , j’y ai réfléchi pour la première fois lors de la préparation de l’opération du corridor. J’ai demandé au général Dallaire l’autorisation de faire usage de toutes les armes disponibles, si nécessaire. Pour des raisons que j’ignore, j’ai reçu son autorisation pour l’emploi de mitrailleuses moyennes, mais pas pour les mitrailleuses lourdes.
Cette obligation de demander à chaque fois une autorisation pour faire usage de l’armement me paraissait impossible à tenir. J’ai décidé de ne plus demander d’autorisation concernant les règles d’engagement et, lors du briefing qui a précédé l’opération corridor, je n’ai pas hésité à recommander à mes officiers de faire usage des mitrailleuses lourdes en cas de nécessité. " (500b)
L’avis du lieutenant général Berhin rejoint celui du colonel Marchal : " Je suis d’accord avec le colonel Marchal sur sa vision des règles d’engagement car dès qu’il y a défense légitime tout est permis sauf faire usage d’une force qui dépasserait le nécessaire. " (501b)
Quant au lieutenant général Uytterhoeven, il déclare : " Nous nous opposons à l’interprétation que le général Dallaire a donné aux règles d’engagement, à savoir une intervention d’agents de police.
Les règles d’engagement ont connu une évolution exponentielle : elles devenaient de plus en plus restrictives " (502b). Il a par ailleurs ajouté que lors de la relève de KIBAT II, il a insisté pour obtenir une adaptation.
L’application sur le terrain
Le " flou ", voire les contradictions, que la commission constate dans l’interprétation des ROE par les officiers supérieurs explique certainement une partie des problèmes rencontrés par les troupes belges sur le terrain.
Selon le commandant Noens : " Het begrip rules of engagement is onvoldoende of slecht gekend bij het begin van de operatie en vooral voor het kader dient hieraan gewerkt te worden. Ik vraag dat dit opgenomen wordt in het onderricht der Wapenscholen samen met de geplande lessen in oorlogsrecht. Dit is ondertussen gebeurd. Laatste bemerking. Een VN-opdracht in de zin van Peace Keeping is geen Piece of Cake voor een parabataljon. Aan begrippen als " Show the Flag, show your smile " heeft een para op het terrein niets. Tijdens zijn opleiding en zijn verdere training in zijn eenheid wordt een paracommando op scherp gezet, tijdens zijn VN-opdracht wordt hij ontscherpt. Het ontbreekt hem immers aan een duidelijk vijandsbeeld. Bovendien heeft hij de indruk dat hij niets mag doen. " (503b)
Lors de son audition, le lieutenant Lecomte déclare : " Dans le même contexte, les directives données étaient très restrictives. Je me pose actuellement la même question que je me posais sur place. Comment peut-on être crédible sans moyens d’action ? (...) C’étaient les directives que nous avions. Nous ne pouvions quasiment jamais utiliser l’armement, c’était seulement en cas d’autodéfense. " (504b)
Quand au major Bodart, conseiller en droit des conflits armés, il déclare : " Je relève (...) le mot " impression " : ils avaient aussi l’impression d’être en vacances... Je crois qu’il y a dans le chef des déclarations spontanées a posteriori, un amalgame et une schématisation un peu trop outrancière. Je répète à nouveau que je ne sais pas évaluer la façon ni la mesure avec laquelle les informations ont été données au deuxième bataillon commando. Je lis dans un document " briefing général MINUAR, règles de comportement, généralités ", en première page, après le mandat détaillé de l’UNAMIR : " l’emploi de la force est autorisé en cas de légitime défense ". Comment peut-on interpréter cela différemment et dire : " je ne peux pas tirer, même en cas de légitime défense ? " Moi, je n’ai jamais dit : " vous ne pouvez pas tirer. (...) J’ai dit que la légitime défense restait d’application, que le droit de la guerre n’était pas quelque chose qui empêchait les gens de " tourner ", que l’on devait pouvoir faire sa mission militaire avec les attitudes tactiques et techniques propres à l’usage de ses armes et spécifiques à l’unité et qu’il y avait des règles toutes simples, comme celles de la proportionnalité ou du minimum de dégâts collatéraux, etc. Cela me paraît sans équivoque. Cela n’a rien à voir avec : " je ne peux plus rien faire, je ne peux plus tirer, même en cas de légitime défense ; qui me demandera des comptes ? " Non, on me demandera des comptes si je transgresse une règle. " (505b)
Ces interprétations varieront au cours de la mission entraînant des modifications dans les ordres du secteur et du bataillon.
Les déclarations du général-major Roman résument la situation : " Elles (les règles) n’étaient pas claires et nettes, de sorte que la réaction dépendait du caractère de chacun, ce qui est dangereux. " (506b)
Lors de son audition, le caporal-chef Pierard déclare : " (...) nous étions isolés et réagissions donc au fur et à mesure. Quand on nous tirait dessus, nous ripostions, c’est certain. " (507b)
Selon l’adjudant Boequelloen : " Je n’ai assisté à aucun cours sur le changement des règles d’engagement. " (508b) et selon le capitaine chef Pierard, " nous avons seulement eu un briefing du commandant de brigade qui est venu nous dire : " Retirez la cassette de la Somalie, le Rwanda c’est tout autre chose, ce sont des vacances que l’on vous offre. " (509b)
C’est l’impression qu’en ont retiré plusieurs familles de commandos assassinés.
La commission a demandé à l’adjudant Boequelloen et au caporal-chef Pierard si les officiers et les sous-officiers leur avaient expliqué la teneur de l’article 17 des règles d’engagement.
L’adjudant Boequelloen répond que l’" on ne pouvait pas intervenir. Nous devions adopter un profil bas " (510b) ; et le caporal-chef Pierard déclare : " nous avons reçu l’ordre formel de ne pas intervenir " (511b).
Source : Sénat de Belgique
Restez en contact
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Subscribe to weekly newsletter