Plusieurs témoins font remarquer qu’il n’a été et qu’il n’est mené aucune enquête sur les circonstances dans lesquelles l’avion présidentiel a été abattu le 6 avril. Quand on lui a demandé de donner un aperçu de l’ensemble des enquêtes relatives à l’attentat contre l’avion du président, le professeur Reyntjens a déclaré : " Het antwoord op uw vraag is zeer kort : geen (530b). Voor zover ik weet zijn er geen onderzoeken gedaan. De ICAO heeft geen onderzoek gedaan, hoewel de Belgische regering daarom had gevraagd. De voormalige Rwandese regering heeft niets gedaan behalve het recupereren van de twee lanceerbuizen van de SAM 16’s. Het nieuwe bewind heeft ook geen onderzoek gedaan en alleen het puin geruimd dat in de tuin van president Habyarimana lag. Burundi heeft evenmin iets gedaan, hoewel de Burundese president en twee ministers bij die aanslag zijn gestorven. Kortom, er is geen enkel officieel onderzoek gebeurd " (531b). Pour justifier l’absence de toute enquête, M. Faustin Twagiramungu, ancien Premier ministre du Rwanda, a avancé l’argument suivant : " Jamais on n’a fait allusion à la réalisation d’une enquête. La réponse du gouvernement rwandais était la suivante : " M. Habyarimana n’était pas plus important que toutes les autres personnes qui sont décédées. " C’était vrai, mais il me semble que le sens de l’État doit également prévaloir. Le gouvernement burundais a introduit une demande mais n’a pas obtenu de réponse. La famille du président Habyarimana a également introduit une demande auprès des Nations unies mais n’a pas non plus obtenu de réponse. " (532b).

M. Dismas Nsengiyaremye, ancien Premier ministre rwandais, a souligné devant notre commission l’importance d’une telle enquête : " J’ai refusé d’avoir une version. Je suis très surpris du fait qu’un événement aussi important et aussi lourd de conséquences ait été négligé à ce point. Je ne comprends pas pourquoi ni les Nations unies ni la MINUAR ni les puissances occidentales intervenues pour évacuer les ressortissants n’aient rien fait jusqu’à présent pour établir la lumière à ce sujet. Même si des problèmes existaient par rapport au président rwandais, étant donné que le président burundais a également péri, je ne comprends pas que l’on n’ait pas cherché à connaître la vérité et à informer les autorités burundaises. Pourquoi le gouvernement actuel n’enquête-t-il pas au sujet de cet événement Tout le monde se dérobe ... Je me dis que si les gens agissent ainsi, c’est qu’ils savent quelque chose. Il existe quelque part des gens qui savent et qui ne veulent rien dire. Je n’ai pas la capacité de les approcher. Une enquête pourrait toutefois être menée par les personnes plus ou moins concernées par cet attentat et qui se trouvent au plus haut niveau de l’État rwandais actuel, par les Nations unies ou par les puissances intervenues notamment pour procéder aux évacuations et qui ont certainement eu accès à certaines informations. Je demande que la lumière soit faite au sujet de cet événement. En effet, on ne pourra pas expliquer l’ampleur et la gravité du génocide si ce point n’est pas élucidé. Apparemment, nous sommes confrontés à une conspiration du silence ... " (533b).

M. Degni-Segui s’associe à cette déclaration : " Concernant l’attaque de l’avion présidentiel, c’est finalement le noeud gordien de la chose. Dès que j’ai pris mes fonctions, je me suis rendu à Genève. J’ai eu en audience l’ambassadeur de France parce que mon mandat spécifiait bien que je devais faire la lumière sur ce sujet. J’ai demandé si la France pouvait mettre à ma disposition la boîte noire de l’avion présidentiel. Il m’a dit : " J’ai compris, je vais m’en référer à mon gouvernement. " Par la suite, il m’a indiqué que le gouvernement n’avait pas cette boîte noire. Je me suis alors rendu à Kigali, où j’ai rencontré l’état-major militaire. Je leur ai demandé : " Est-ce que je peux avoir la boîte noire ? " Il y avait là quatre militaires, le chef d’état-major et d’autres. Vous savez ce qu’ils m’ont répondu Le chef d’état-major m’a dit : " la boîte noire se trouve chez les militaires. " Je lui ai dit : " Mais vous-mêmes, vous êtes des militaires. " Et finalement, il m’a dit : " On ne l’a pas, il faut voir avec la France. " J’ai donc été renvoyé de l’un à l’autre, et finalement, il y a eu un certain capitaine Baril qui a prétendu avoir la boîte vous avez dû suivre cela dans les journaux et j’ai demandé aux Nations unies de mettre à ma disposition une commission d’enquête avec un expert en balistique, en vue de faire les recherches. En effet, entre-temps, on a dit que l’OACI ne pouvait pas faire l’enquête, parce que l’avion n’était pas un avion civil, mais un avion militaire. Et il fallait donc une commission d’enquête. Je l’ai demandée aux Nations unies, et l’on m’a répondu qu’il n’y avait pas de budget pour cela. Le gouvernement rwandais m’avait demandé également de tout tenter pour faire la lumière à ce sujet. Et dans l’un de mes rapports, je rappelle justement, je tire la sonnette d’alarme, pour dire de faire vite avant qu’il ne soit trop tard. Je crains même qu’il ne soit trop tard maintenant. Si bien que, jusqu’ici, je n’ai pas accompli l’une de mes missions avant que l’on me dise de partir " (534b).

M. Van Winsen, auditeur militaire émérite au conseil de guerre, mentionne l’existence d’une enquête sur l’attentat contre l’avion, parce que " er een verband bestond tussen het neerschieten van het vliegtuig en wat er met de para’s was gebeurd voor het wachtlokaal van het kamp Kigali. " Mais : " ik heb ook geen positief resultaat bekomen ! Ik weet nog niet wat er precies is gebeurd. Ik heb wel een persoonlijke mening over de zaak, maar in het kader van het onderzoek zelf heb ik enkel twaalf of dertien hypothesen kunnen formuleren. Dat is alles. Misschien moet daaraan nog een veertiende hypothese worden toegevoegd, namelijk deze van Colette Braeckman, die oppert dat de daders zich van doel zouden vergist hebben en eigenlijk een C-130 wilden neerschieten. Deze hypothese had ik nog niet en ze werd ook geformuleerd na de periode van mijn onderzoek ". (535b)

À la fin de son enquête, M. Van Winsen a obtenu l’autorisation d’aller au Rwanda, où il a eu de nombreux contacts, notamment avec les autorités de l’époque. Sur la collaboration avec les autorités locales à cet égard, M. Van Winsen est très clair : " In mijn satellietonderzoek naar het neerschieten van het vliegtuig heb ik echter heel veel problemen gehad. Men zei mij altijd dat ik mij daar niets van moest aantrekken, dat dat mijn zaak niet was. Ik sprak dit uiteraard tegen, omdat ik precies wilde weten of er een oorzakelijk verband bestond tussen de twee. Ik vroeg dan ook om de resultaten van het onderzoek naar deze gebeurtenis. Er is echter nooit een onderzoek ingesteld, noch door de oude, noch door de nieuwe regering, noch door UNAMIR. Een Russische kolonel, wiens naam mij nu ontsnapt, heeft wel een klein onderzoek ingesteld naar de moord op de tien para’s, maar rond het neerschieten van het vliegtuig is er niets gebeurd. Toen ik ter plaatse was, had ik problemen met de mensen die het nu nog voor het zeggen hebben. Ik mocht het wrak niet zien. Ik vroeg stalen van het vliegtuig te nemen op de plaats van de inslag, om uit te maken met welk projectiel we te maken hadden, maar ik heb ze niet gekregen. " (536b) (...) " Het weigeren van medewerking, zowel van de vroegere als van de huidige Rwandese regering, als van om het even wie, doet mij denken dat er een coalitie bestond waarin men het eens was de persoon in kwestie te laten verdwijnen. Dat is een vaag idee van mij. Maar ik kan onmogelijk zeggen dat het om die groep, die nationaliteit of die vereniging gaat. Ik zie wel één zaak, dat is dat iedereen het eenparig eens is om geen onderzoek te doen. (...) Generaal Dallaire heeft echter geen onderzoek gedaan. Ik werd gewoon van het kastje naar de muur gezonden, maar ik kreeg geen toelating mijn onderzoek voort te zetten. De eenparigheid langs beide kanten doet bij mij de vraag rijzen of het geen afspraak was tussen iedereen. Ik kan tot geen ander idee komen " (537b).

La commission insiste sur l’opportunité de procéder à une telle enquête parce qu’elle est la seule possibilité que l’on ait de confirmer ou d’infirmer une ou plusieurs des hypothèses avancées. En effet, si nous avions connaissance des données relatives à l’assassinat du président, nous pourrions donner une idée et une interprétation plus claires des événements postérieurs, tant pour ce qui est de l’assassinat des Casques bleus que pour ce qui est du génocide. C’est en effet l’attentat contre l’avion présidentiel qui a constitué l’amorce de ces événements ultérieurs.

Au cours de ses travaux, la commission a pris connaissance d’un télex émanant du 15e Wing de transport de la Force aérienne, relayé par le C Ops à KIBAT II.

Ce télex, daté du 5 avril, avisait KIBAT II que le C130 qui devait arriver à Kigali le 6 avril, serait équipé de moyens de contre-mesures électroniques (ECM), en raison de la crainte d’attaques par des fusées anti-aériennes contre nos C130 en mission en Afrique.

La commission a jugé utile de vérifier s’il n’existait pas un lien quelconque entre cette crainte de menace anti-aérienne et l’attentat contre l’avion présidentiel.

Elle a entendu à cette fin le commandant De Troy de la Force aérienne (538b).

Il ressort de ce témoignage que, dans le cadre du programme d’équipement en moyens ECM de tous les C130 du 15e Wing, deux C130 en étaient pourvus à l’époque. L’un d’entre eux était réservé pour les missions à Sarajevo. Un second devenant disponible, il fut logiquement décidé de l’utiliser vers Kigali, en raison d’une menace d’attaques par des fusées anti-aériennes en Afrique, et pas spécifiquement à Kigali ou au Rwanda.


Source : Sénat de Belgique