L’ambassadeur Swinnen a adressé à Bruxelles à plusieurs reprises des informations sur les actions et l’influence néfaste de RTLM. Il a pris conscience de l’influence néfaste de RTLM vers la fin de 1993. Il s’est plaint de ne pas disposer d’un effectif suffisant pour écouter ou traduire toutes les émissions. De nombreuses émissions ont toutefois été enregistrées et l’on a été informé de leur contenu à Bruxelles. Lorsque M. Bruno Angelet, diplomate, est venu renforcer le personnel de l’ambassade en janvier 1994, il a été chargé d’écouter RTLM et d’envoyer à Bruxelles des extraits d’émissions. L’on écoutait principalement les émissions en français et les éditoriaux, avant d’en informer Bruxelles par télex. L’ambassadeur Swinnen ne croit pas pouvoir disposer de l’enregistrement, étant donné que M. Bruno Angelet n’a pas pu repasser à sa résidence lorsqu’ils ont été évacués vers l’aéroport. (342c)

La presse a fait aussi état du problème posé par RTLM.

Le 23 février 1994, Knack a publié l’article suivant : (traduction) " Le CDR, un parti extrémiste hutu, proche de l’aile droite des fidèles du président, qui a le vent en poupe, mène une campagne agressive, soutenue en cela par la radio libre " des mille collines " dont le taux d’écoute est très élevé et qui, en diffusant les rumeurs les plus folles et les plus exagérées, est souvent à l’origine d’échauffourées et d’incidents. Les Casques bleus belges en ont eux aussi déjà été victimes à plusieurs reprises. "

Le ministre Delcroix confirme qu’il était au courant de l’influence néfaste de RTLM et déclare qu’il a entrepris différentes démarches contre cette station. (343c)

Il ajoute qu’après les événements du 6 avril, le Conseil des ministres et le cabinet restreint ont eu des discussions concernant RTLM :

" Er wordt een globale stand van zaken gegeven. Er wordt een weergave gegeven van de besprekingen in het Parlement en er wordt gesproken over de voorbereiding van de ministerraad van vrijdag. Ik kreeg de opdracht om met S drie zaken te bespreken. Ten eerste moest ik, zoals ik vroeger in deze commissie al heb verklaard, mij bezig houden met het probleem RTLM. 

Op 12 april was er opnieuw kernkabinet. Er werd door mij een stand van zaken gegeven over de rol van radio RTLM, ... " (344c)

Le Premier ministre Dehaene est, lui aussi, très formel à ce sujet : " Il est clair que nous étions conscients qu’il y avait des réactions antibelges mais on ne pouvait parler d’un climat général défavorable. Il y avait effectivement des actions menées par une minorité, qui étaient amplifiées par RTLM. " (345c)

Savait-on plus précisément en Belgique que le parti gouvernemental MRND et le président Habyarimana étaient associés à RTLM ?

À un commissaire qui lui a demandé si elle savait que le président était actionnaire de RTLM, Mme Rika De Backer répond ce qui suit : " Zowel de heer Delcroix als ikzelf hebben tegen president Habyarimana gezegd dat het zo niet verder kon. Zelf heb ik tot tweemaal toe tegen de president gezegd : " Dat is onmogelijk. " (346c)

Elle ajoute cependant que son intervention auprès du président était motivée principalement par le fait qu’elle croyait que celui-ci pouvait, en tant que président, agir pour faire cesser ces principes.

Le ministre Delcroix savait, lui aussi, qu’il y était associé, puisqu’il a posé des questions au président à ce sujet lors de sa visite au Rwanda. Cela a d’ailleurs donné lieu à quelques réactions agressives de la part du président et de son entourage. Le ministre Claes confirme que la présidence rwandaise a réagi avec nervosité : " En ce qui concerne RTLM, je dispose de plusieurs télex des ministres Delcroix et Claes et de l’ambassadeur Swinnen, dans lesquels cette affaire est exposée au président et au ministre de l’information. La présidence a d’ailleurs réagi avec une certaine nervosité aux multiples interventions de la Belgique ". (347c)... " Au cours de mon séjour au Rwanda, divers représentants de la communauté internationale m’avaient communiqué que RTLM était gérée et financée par le beau-frère du président. Je ne savais pas que le président finançait lui-même radio Kigali ". (348c)

La commission constate que les deux ministres étaient informés de l’influence néfaste de RTLM, de son attitude antibelge, de ses incitations à la haine ethnique et aux massacres et des liens que cet émetteur entretenait avec le président Habyarimana et son entourage.


Source : Sénat de Belgique