La commission estime que, d’un point de vue technico-militaire, si la préparation du contingent belge de paracommandos qui devait participer à l’opération de maintien de la paix MINUAR a été rapide, elle fut déficiente. Cela s’est manifesté dans la quasi-totalité des domaines.

le logement des troupes belges n’était pas réglé au moment de leur départ pour Kigali. Le Force Commander, le général Dallaire, voulait les disséminer dans un maximum d’endroits ; au lieu d’être cantonnées, par compagnie, en quelques endroits, elles furent logées dans quatorze cantonnements, ce qui a eu des conséquences graves sur la sécurité et a, par ailleurs, réduit le nombre d’hommes disponibles pour effectuer les missions dont KIBAT était chargé ;

même si l’on tient compte de la courte période de préparation, les hommes que l’on a envoyés dans le cadre de KIBAT I auraient dû être mieux préparés ; ce manque de préparation portait tant sur la connaissance de la situation au Rwanda que sur la sensibilisation au caractère de maintien de la paix de l’opération ; l’officier de renseignements de KIBAT I qui était responsable sur le terrain de la collecte des informations n’avait pas été préparé à sa mission ni formé à cet effet, même s’il a effectué un excellent travail sur le terrain. Par ailleurs, les règles d’engagement n’ont pas été expliquées de manière suffisamment intelligible, bien qu’elles aient été élaborées avec la collaboration des autorités militaires belges ;

l’armement des troupes belges de la MINUAR était trop léger, surtout pour pouvoir faire face à un éventuel scénario catastrophe ; alors que les directives des Nations unies n’excluaient pas que l’on emporte des mortiers et un armement lourd, KIBAT est parti avec des armes légères, si l’on excepte les six blindés CVRT, qui étaient toutefois en très mauvais état après leur transfert de Somalie et qui n’étaient d’ailleurs pas destinés aux opérations ; les munitions pour les deux CVRT, qui étaient équipés d’un canon de 30 mm, faisaient défaut ; il en allait de même pour les projectiles de l’arme antichar MILAN ;

la quantité et la distribution du matériel de transmission et de communication ne satisfaisaient pas aux exigences de la mission à accomplir ; un matériel radio militaire portable et autonome faisait plus particulièrement défaut, ce qui a notamment eu pour effet que le lieutenant Lotin n’a pu entrer en contact avec sa chaîne hiérarchique dès qu’il s’est éloigné des ses véhicules. De plus, la Force et le Secteur ne disposaient que d’un système Motorola civil, qui ne permettait pas d’entrer directement en communication avec les échelons inférieurs de KIBAT ;

le mandat a été mal interprété ; les autorités militaires qui avaient préparé l’opération en Belgique étaient convaincues, à tort, que la MINUAR pourrait consigner des armes de sa propre autorité ;

le conseiller en droit des conflits armés de KIBAT I n’est arrivé qu’après le déploiement des troupes belges à Kigali et il était, en outre, insuffisamment préparé à sa tâche ;

le manque d’un plan d’évacuation et de directives en cas de graves difficultés.

La commission estime que la responsabilité de cette préparation défectueuse incombe à l’ensemble de la hiérarchie militaire, et plus particulierement à l’état-major général et au C Ops, à l’état-major de la force terrestre, à la brigade paracommando (formation et préparation des hommes) et au SGR. En ce qui concerne les responsables au C Ops et à l’état-major général, on renvoie au point 4.5.


Source : Sénat de Belgique