« La nouvelle guerre des mots des militaires »

The Military’s New War of Words
Los Angeles Times (États-Unis)

[AUTEUR] William M. Arkin est analyste en questions militaires, rédacteur du site internet The U.S. Military Online.

[RESUME] Donald Rumsfeld s’est engagé dans une guerre de l’information. Elle a pour but d’influencer les ennemis irakiens, comme c’est toujours le cas dans une guerre, mais également les États-uniens.
L’année dernière, il a créé au Pentagone le Bureau d’influence stratégique (OSI) qui avait pour fonction de désinformer les groupes terroristes et de développer la propagande militaire états-unienne. Les premières cibles de ce bureau étaient les médias étrangers et principalement ceux du Proche-Orient mais, la mondialisation de l’information étant ce qu’elle est, les médias américains en auraient aussi été les victimes. Devant les protestations, Rumsfeld a déclaré qu’il y avait un malentendu, que le Pentagone ne mentirait jamais aux citoyens américains et l’OSI a été abandonné.
Toutefois, depuis le premier octobre, c’est l’US Strategic Command qui a pris le relais et qui est désormais à la pointe de la guerre de l’information. Cette mission comprend, outre la guerre aux médias et aux moyens de communication irakiens : la gestion de l’information publique, les efforts pour contrôler les sources des médias et la manipulation de l’opinion publique. Afin d’assurer cette mission, l’état-major a désormais une stratégie inter-armée de désinformation de l’opinion publique, valable aussi bien en temps de guerre qu’en temps de paix.
Cette stratégie est une conséquence directe de l’impression chez les militaires d’avoir perdu la guerre de l’information lors de la guerre en Afghanistan à cause d’Al Jazirah et de la vision particulière de la guerre de l’information qu’a développé Donald Rumsfeld. Le secrétaire à la Défense souhaite contrôler au maximum ce que le public états-unien verra et lira. Ainsi, les journalistes en Irak seront escortés par des militaires et ne pourront que répéter la propagande du Pentagone.

[CONTEXTE] La dissolution du Bureau d’influence stratégique (OSI) et son remplacement par une unité spécialisée au sein de l’US Strategic Command n’est qu’un jeu d’écriture. En effet, le Strategic Command a absorbé le Space Command, dont des personnels avaient été détachés pour former l’OSI, de sorte que la nouvelle unité d’influence est composée des mêmes officiers que précédemment. Seule la dénomination et la localisation ont changé.

« Un ami en Algérie »

A friend in Algeria
The Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] Abdelaziz Bouteflika est président de l’Algérie.

[RESUME] Les Américains ont été surpris de voir l’Algérie figurer parmi les premiers pays à apporter leur soutien aux États-Unis après le 11 septembre. Pourtant, les Algériens connaissent l’horreur du terrorisme et ont réussi à le réduire fortement sur leur territoire. L’Algérie est à la pointe du combat contre le terrorisme en Afrique et tente d’organiser le continent dans cette lutte. Ainsi, sous ma présidence, 49 pays africains ont signé la convention d’Alger pour la lutte et la prévention contre le terrorisme qui a pour but de coordonner les efforts de chacun contre ces groupes. Ces efforts ont, d’ores et déjà, été salués par le président Bush et par le secrétaire d’État.
Nous sommes en train d’éradiquer le terrorisme dans notre pays et de poser les bases d’une vraie démocratie multipartite qui peut être un modèle pour notre région. Nous sommes en train d’investir et de multiplier les échanges avec les États-Unis. Nous pouvons, grâce à cela, devenir le premier producteur de pétrole du continent. Il nous reste un long chemin à faire mais, avec l’aide de Washington, nous pouvons construire un monde plus prospère et plus paisible.

« Les cassettes d’Oussama »

The Osama diaries
The Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] Oliver North est un chroniqueur régulier du Washington Times. Il est fondateur et président d’honneur de la Freedom Alliance. Il a été un des hommes clefs de l’Irangate et de l’organisation et du financement par l’argent de la drogue des Contras au Nicaragua. La dernière enquête du Réseau Voltaire lui était en partie consacrée : « Le Centre pour la politique de sécurité : les marionnettistes de Washington ».

[RESUME] La dernière cassette d’Oussama Ben Laden diffusée par Al Jazirah, le média préféré d’Al Quaïda, nous prouve qu’il est toujours en vie et confirme ce que nous avons toujours dit : la guerre au terrorisme sera longue et il est nécessaire de créer de nouvelles règles pour le combattre. Dès lors, il peut paraître surprenant de voir les Démocrates qui ont mené une guerre contre la législation pour la sécurité de la patrie venir reprocher à l’administration Bush de ne pas lui avoir encore apporté la tête de Ben Laden sur un plateau.
La protection des citoyen états-uniens réclame pourtant plus que de tuer simplement le mollah Omar ou Ben Laden et la prochaine étape de cette guerre est de désarmer le dictateur fasciste irakien. En effet, Saddam Hussein a tenté d’assassiner l’ancien président Bush et l’émir du Koweït en 1993, il soutient les groupes terroristes musulmans radicaux et aide les familles des kamikazes palestiniens. Tous ces éléments sont bien la preuve que ceux qui croient que la guerre au terrorisme sera gagnée dès l’élimination de Ben Laden sous-estiment fortement le danger que représente le despote de Bagdad, et les États-Unis sont prêts à tout mettre en œuvre pour éliminer cette menace.
Cette idée, exprimée par le président Bush lors du sommet de l’OTAN, à Prague, n’a pas plu aux politiciens libéraux et aux dirigeant socialistes-pacifistes européens. Mais, contrairement à eux, les États-Unis se moquent de la façon dont ils sont vus à Bagdad, à Damas et à Téhéran et si Saddam Hussein n’a pas compris le message, peut-être que ses généraux l’ont bien reçus : « appelez votre agent de voyage ».

« Frapper l’Irak, caresser la Corée du Nord »

Striking Iraq, Stroking North Korea
Los Angeles Times (États-Unis)

[AUTEUR] Jay Taylor est chercheur associé au John Fairbank Center for East Asian Research de la Harvard University et ancien assistant du sous-secrétaire d’État pour le renseignement et la recherche dans l’administration Reagan.

[RESUME] La crise irakienne sera réglée d’ici quelques mois, soit par une guerre, soit par la menace couplée à la diplomatie. Cette situation nous conduit à nous demander pourquoi les États-Unis et leurs alliés ne règlent pas la menace encore plus importante que représente la Corée du Nord.
Face à ce pays, l’administration Bush reste calme et s’est contentée, en accord avec ses alliés régionaux, de stopper les aides pétrolières vers Pyongyang. Pourtant, la Corée du Nord a bien plus les moyens que l’Irak d’infliger des morts et des destructions aux États-Unis et à ses alliés. En effet, d’après la CIA, Pyongyang pourrait en 2015, disposer des capacités pour bombarder les villes états-uniennes avec des missiles nucléaires, ce dont l’Irak ne sera pas capable.
Pour convaincre l’opinion publique, George W. Bush a exagéré les mauvais traitements que Saddam Hussein inflige à son peuple alors que le sort des Nord-Coréens est bien pire. La guerre en Irak est présentée comme une partie de la guerre au terrorisme alors que la Corée du Nord finance des groupes terroristes en Corée du Sud, est liée aux narcotrafiquants et a produit de faux dollars américains.
En réalité, Bush a bien compris que la bonne solution face à Pyongyang était la dissuasion en partenariat avec les alliés états-uniens régionaux, tout en profitant de chaque ouverture diplomatique pour essayer d’ouvrir un peu ce régime hermétique. Si Bush n’a pas la même stratégie, qui serait pourtant payante, vis-à-vis de l’Irak c’est parce qu’il estime qu’une guerre contre Saddam Hussein serait facilement gagnée et sera un succès reconnu pour sa stratégie des frappes préventives.
Colin Powell a déjà réussi à faire admettre à Bush que les inspections de l’ONU devaient d’abord reprendre, espérons que le président finira par adopter la même attitude envers l’Irak qu’envers la Corée du Nord.

« Un écho obsédant »

A Haunting Echo
Los Angeles Times (États-Unis)

[AUTEUR] Shlomo Avineri est professeur de sciences politiques de la Hebrew University de Jérusalem.

[RESUME] Les citoyens israéliens ont des sentiments complexes vis-à-vis d’une intervention américaine en Irak. D’un côté, ils aimeraient voir disparaître le dictateur irakien et ses armes de destruction massive. De l’autre, ils craignent qu’une attaque contre Bagdad pousse Saddam Hussein à bombarder Israël, comme il l’a fait en 1991 mais cette fois ci en utilisant les gaz. Les Israéliens comprennent que l’Europe qui a vécu deux guerres mondiales, veuille promouvoir le dialogue et éviter la guerre et ils comprennent même la position de Schroeder qui a affirmé que son pays ne joindrait pas une coalition contre l’Irak, même si elle était dirigée par l’ONU, car ils préfèrent une Allemagne pacifique que belliqueuse.
Toutefois, les Israéliens ne peuvent pas oublier ce qui arrive quand on ignore trop longtemps la menace que représente un dictateur mégalomane et, même si Saddam Hussein n’est pas Hitler, il existe un certain nombre de parallèles entre eux. Aujourd’hui, tous ceux qui rechignent à attaquer l’Irak ont la même attitude que ceux qui, en prônant le dialogue avec les nazis dans les années 30, ont permis l’ascension d’Adolf Hitler et la Seconde Guerre mondiale. Si la France et le Royaume-Uni avaient attaqué l’Allemagne en 1936, même sans mandat de la Société des nations, bien des catastrophes auraient été évitées, même si cela aurait entraîné la mort de biens des Allemands innocents.
Saddam Hussein a déjà tenté d’envahir deux pays voisins, a bombardé Israël et il traite les Kurdes de façon pire encore qu’Hitler ne traitait les juifs en 1936. De plus, Saddam Hussein possède des armes dont Hitler n’aurait même pas rêvé.
Israël sait qu’un monde sans Saddam Hussein serait un monde plus sûr.

« L’Amérique et l’Iran sont alliés »

America and Iran are allies
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] David Phillips est associé du Council on Foreign Relations à New York et conseiller au département d’État des États-Unis. Il est membre du Preventive Diplomacy Program du Center for Strategic and International Studies.

[RESUME] L’Iran et les États-Unis ont une cause commune, désarmer l’Irak et renverser Saddam Hussein, et des intérêts communs pour le futur de l’Irak, maintenir l’intégrité territoriale du pays et empêcher des règlements de compte qui pourraient déstabiliser toute la région.
Bien que l’Iran se soit déclarée "activement neutre" dans le conflit à venir, elle pourrait aider une coalition internationale dirigée par les États-Unis en laissant accès à son espace aérien, en fournissant des informations sur les armes irakiennes. Elle peut également récupérer et soigner les aviateurs américains qui s’écraseraient en Iran ou soigner, dans ses hôpitaux bien équipés, les soldats états-uniens touchés par les gaz de combat irakien.
En échange, les États-Unis pourrait faire profiter Téhéran de leur bouclier contre les scuds de Bagdad et cesser de faire obstruction à l’entrée de l’Iran à l’OMC, cette entrée pouvant, de plus, favoriser l’ouverture de l’Iran sur le monde. Des discussions pourraient s’ouvrir par la suite entre Washington et Téhéran concernant l’attitude du Hezbollah vis-à-vis de l’Amérique et le programme nucléaire iranien.
Les durs du régime des ayatollahs pensent qu’après l’Irak, les États-Unis s’en prendront à l’Iran. Pourtant, les États-Unis ne sont pas concernés par les affaires intérieures iraniennes et Washington estime que c’est seulement par la réforme que viendra l’évolution de l’Iran.

« L’espoir qu’inspire l’OTAN »

The Hope That NATO Inspired
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Petar Stoyanov a été président de la Bulgarie (1997-2002). Il est directeur du Centre Petar Stoyanov pour le dialogue politique, à Sofia, et a récemment été résident du German Marshall Fund of the United States.

[RESUME] Pour les nouveaux membres de l’OTAN, l’entrée dans l’Alliance représente un espoir. Je suis de ceux qui ont vu l’Occident, malgré ses imperfections, comme un modèle de liberté individuelle et économique et qui ont souffert de ne pas être libérés plus tôt du joug du communisme.
L’extension de l’OTAN doit se baser sur des fondations morales solides et, depuis le 11 septembre, il est important d’étendre les frontières du monde libre.

« La ligne de Bush est claire : la guerre »

La ligne de Bush est claire : la guerre
Libération (France)

[AUTEUR] Sami Naïr est député européen du Pôle républicain.

[RESUME] Bush veut la guerre et sa position diplomatique est claire : « avec l’Amérique ou contre l’Amérique ». Selon cette logique, on ne peut être que des supplétifs ou des ennemis des États-Unis. Cette vision, et l’objectif belliqueux, qui en découle ont été soutenus très subtilement par Colin Powell à l’ONU en maintenant cette idéologie dans des termes diplomatiques.
En effet, malgré le retour des inspecteurs, rien ne change avec la résolution 1441. Les États-Unis continueront de faire pression sur ces derniers et, s’ils ne trouvent rien, comme c’est probable, Condoleezza Rice en conclura comme elle l’a déjà affirmé que cela prouvera que Saddam Hussein cache son programme d’armement et qu’il faut l’attaquer.
L’impérialisme déchaîné des États-Unis n’est malheureusement pas conjoncturel. Il est bien le signe d’une radicalisation de Washington vis-à-vis du reste du monde et d’une volonté d’en finir avec les États arabes qui ne lui sont pas inféodés. Ainsi, on discute déjà dans l’administration Bush d’un futur État fédéral en Irak, ce qui transformerait le pays en un client faible et miné par ses contradictions. Cette situation déstabilisera toute la région et marginalisera encore plus la Syrie et l’Arabie saoudite (dont certains à Washington préparent le démantèlement).
A terme, c’est l’ensemble de la route du pétrole jusqu’à la mer Caspienne que les États-Unis veulent contrôler, dominant ainsi l’approvisionnement en pétrole de la Chine. Cet objectif nécessite une guerre en Irak, qui semble aujourd’hui inévitable, et qui suscitera une haine farouche d’un monde arabo-musulman, humilié une fois de trop, vis-à-vis des États-Unis.
Par leur politique, les fondamentalistes américains, qui inspirent Bush, et les partisans de Ben Laden auront gagné : le choc des civilisations aura bien lieu.