« Dans les griffes de trois sorcières »

In the hands of the three witches
The Guardian (Royaume-Uni)

[AUTEUR] George Galloway est député travailliste de Glasgow et commentateur pour le Scottish Mail.

[RESUME] S’il existe un homme dans le monde qui souhaite plus une invasion de l’Irak que Richard Perle, le chef de l’US Defence Policy Board, c’est Oussama ben Laden.
Perle affirme que les États-Unis attaqueront l’Irak que les inspecteurs trouvent quelque chose ou non et le chef d’Al Qaïda le soutient. Jack Straw, le ministre des Affaires étrangères britannique, a beau dire que les inspections sont une chance d’éviter la guerre et que l’usage de la force devrait être soumis à une nouvelle résolution de l’ONU, Tony Blair a laissé entendre par la suite dans une conférence de presse qu’un nouveau vote du Conseil de sécurité n’aurait lieu que s’il n’y avait aucune chance qu’un des cinq membres permanent ne pose son veto.
Malgré la résolution 1441, nous sommes donc toujours au point de départ. Nous relayons les intentions de la plus droitière et de la plus belliqueuse des administrations que Washington ait connu, dirigée par le trio Cheney - Rumsfeld - Rice qui contrôle Bush comme les trois sorcières contrôlaient Mac Beth, malgré les tendances plus multilatérales du duo Powell - Blair.
La conséquence sera soixante jours de bombardement meurtriers ininterrompus pour l’Irak, suivis d’une longue occupation, d’une « normalisation » du pays à la jordanienne et d’une soumission de Bagdad à Israël. Chaque mort en Irak donnera un peu plus de poids à Oussama Ben Laden, pour qui le Royaume-Uni sera également une cible.

« Les politiciens d’Israël s’attaquent aux minorités »

Israel’s politicians target minorities
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Jonathan Cook est reporter en Israël pour le journal égyptien Al Ahram Weekly.

[RESUME] Hors d’Israël, le débat entre les partis de droite et de gauche dans ce pays semble être exclusivement centré sur le maintien ou non de Tsahal dans les territoires palestiniens. Pourtant, il existe une question tout aussi importante pour les Israéliens : comment préserver la pureté ethnique de l’État juif et comment empêcher qu’Israël soit un jour dominé par des non-juifs ?
En effet, l’élimination de Yasser Arafat et la réoccupation des territoires palestiniens entraînerait logiquement un droit à la citoyenneté pour les trois millions de Palestiniens, qui, vue leur croissance démographique, pourraient un jour dépasser numériquement la population juive, ce à quoi s’ajoute l’arrivée d’immigrés non juifs.
Face à cette situation que le Likoud et l’extrême droite jugent préoccupante, l’idée de la déportation des populations palestiniennes et des politiques racistes se sont développées. Les citoyens arabes sont désormais présentés comme un « problème » et un Conseil de la démographie a été créé afin d’accroître le taux de natalité de la population juive. De leur côté, les immigrés russes ont de plus en plus de mal à faire établir une carte d’identité « juive », nécessaire pour se marier ou être enterrer dans un cimetière de l’État. Une campagne officielle ouvertement raciste a été menée contre les immigrés non juifs qui « épousent nos femmes ».
Face à ces dérives, le Religious Action Center a lancé une campagne mettant en parallèle cette politique et celles de sociétés qui, par le passé, ont aussi rejeté les « autres » en période de crise. Peut-être que cet argument aura un impact lors de l’élection à venir.

[CONTEXTE] La déportation des Palestiniens vers une région d’Irak où la dynastie hachémite serait rétablie a été conseillée par Richard Perle à Benjamin Netanyahu, en 1996.

« Qui a dit que les Nations unies étaient meilleures que l’OTAN ? »

Who says the United Nations is better than NATO ?
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Richard Perle est le chef de l’US Defence Policy Board qui conseille Donald Rumsfeld au Pentagone. Il est rédacteur en chef du Jerusalem Post et membre de l’American Enterprise Institute for Public Policy Research. La dernière enquête du Réseau Voltaire lui était en partie consacrée : « Le Centre pour la politique de sécurité : les marionnettistes de Washington ». Cette tribune est extraite d’une intervention qu’il a prononcée lors d’un débat organisé par la Commission Trilatérale avant le sommet de l’OTAN à Prague.

[RESUME] Je suis troublé par l’affirmation selon laquelle l’ONU est la seule institution pouvant légitimer l’usage de la force. Pourquoi cette institution qui accueille des dictatures horribles serait-elle plus légitime que l’OTAN qui regroupe uniquement des démocraties libérales ? L’ajout des avis de la Syrie ou de la Chine valide-t-il plus une décision ?
L’ONU est incapable de défendre les intérêts de chacun et est en train de prendre le même chemin que la SDN, alors que l’OTAN a toutes les capacités nécessaires pour devenir une institution internationale légitime.

« L’Irak de demain a besoin des Kurdes »

L’Irak de demain a besoin des Kurdes
Libération (États-Unis)

[AUTEUR] Kendal Nezan est président de l’Institut kurde de Paris.

[RESUME] L’heure de vérité approche pour Saddam Hussein puisque le 8 décembre nous saurons si l’Irak va livrer son arsenal ou le cacher à nouveau et tenter de gagner du temps.
Si les dirigeants irakiens saisissent la chance qui leur est offerte et que l’ONU certifie que le désarmement de l’Irak est achevé, rien ne s’opposera alors à la levée de l’embargo contre Bagdad. Dès lors, qui pourra empêcher le régime irakien d’utiliser les ressources issues du pétrole pour acquérir de nouvelles armes et que deviendra la zone d’exclusion aérienne du nord du pays qui protège les Kurdes d’une nouvelle tragédie humaine ? Le désarmement de l’Irak n’amènera pas la paix dans la région tant que le régime de Saddam Hussein sera en place.
Toutefois, l’hypothèse selon laquelle la dictateur irakien cachera ses armes et entraînera la guerre est probable. Cette guerre, voulue par les Irakiens, délivrera le pays du régime le plus sanglant qu’il a connu depuis l’invasion mongole au XIIIème siècle et ses pyramides de têtes coupées. Hormis quelques milliers d’inconditionnels, personne n’est prêt à mourir pour Saddam Hussein. Une guerre de libération sera courte, c’est pourquoi il est urgent de penser au futur de l’Irak.
Il faudra réussir la paix, tâche plus difficile que de gagner la guerre. Si on laisse à Washington tout le mérite du renversement de l’actuel régime irakien, le pays et ses réserves de pétrole deviendront une chasse gardée américaine pour longtemps. Si la France et la Russie continuent de parier sur un maintien au pouvoir de l’actuel dictateur pour recouvrir leurs créances et sauvegarder leurs avantageux contrats pétroliers, ils risquent de tout perdre.
La France doit réfléchir à l’après Saddam Hussein et amorcer un dialogue avec l’opposition irakienne et notamment les deux principaux partis kurdes. En effet, ces derniers, grâce à la zone d’exclusion aérienne, sont parvenus à faire du Kurdistan une zone de paix, de démocratie et de relative prospérité. Les Kurdes sont restés très francophiles -malgré les dernières prises de positions de Paris- en souvenir du soutien du président Mitterrand à leur égard.
En aidant les Kurdes dans la réalisation de ce projet démocratique, la France défendrait ses intérêts, ferait contrepoids à la mainmise de plus en plus pesante des Américains sur la région et rétablirait son prestige moral.

« Le retour de Poindexter »

Poindexter redux
Christian Science Monitor (États-Unis)

[AUTEUR] Daniel Schorr est chroniqueur à la National Public Radio.

[RESUME] Le Total Information Awareness (TIA) sur lequel travaille le Vice-Amiral John Poindexter au sein du Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA) a mauvaise presse en raison des fantasmes orwelliens qu’il évoque. Il s’agit de la création d’une base de données centralisée de toutes les informations personnelles de la population états-unienne. Ce programme qui, d’après le Pentagone, a pour but de rassembler toutes les informations accessibles par le biais de l’informatique afin de mener la guerre au terrorisme, n’est pas rassurant vue la personnalité de son dirigeant.
En effet, John Poindexter a plus l’habitude de détruire les informations que de les rassembler puisqu’il a admis avoir détruit des preuves impliquant le président Reagan lors de l’Irangate et qu’il a été condamné à cause de cela pour parjure et obstruction à la justice avant d’être acquitté pour des questions de procédure par des juges nommé par Reagan.
La devise du TIA est « Scientia est potentia » (La connaissance c’est le pouvoir). La question est quel pouvoir, basé sur la connaissance de nos vies sommes nous prêts à donner à un destructeur de documents fédéraux protégés par Donald Rumsfeld et Newt Gingrich ?

[CONTEXTE] Récemment le Réseau Voltaire a consacré un article au TIA : « L’œil du Pentagone ».

« Combattre le SIDA avec un investissement sain »

Fighting AIDS With a Sound Investment
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Peter Piot est directeur exécutif d’ONUSIDA, le programme de l’ONU pour la lutte contre le SIDA.

[RESUME] Ce n’est pas une coïncidence si les six nations africaines qui doivent actuellement faire face à la famine (Lesotho, Malawi, Mozambique, Swaziland, Zambie et Zimbabwe) sont également très touchées par le SIDA, ces pays ayant entre le sixième et le tiers de leur population infectée. En effet, l’épidémie désorganise les économies et, notamment, les zones rurales ce qui, en combinaison avec des facteurs politiques, entraîne une crise de l’agriculture. L’ONU a dépensé 600 millions de dollars d’assistance, dont 500 rien que pour l’aide alimentaire, mais cela n’a fait qu’atténuer les symptômes.
Aujourd’hui 42 millions de personnes sont infectées dans le monde et la plupart n’ont pas accès à des traitements. L’Afrique n’est pas le seul continent touché : on note une augmentation de 25 % des infections en l’Europe de l’Est et de 10 % en Asie.
Aujourd’hui, la meilleure chose que nous puissions faire pour préserver le développement économique et humain futur est d’investir dans la lutte contre l’épidémie et dans les politiques de préventions qui, par expérience, ont toujours eu de bons résultats quand elles étaient conduites sérieusement.