« La nécessaire cohésion »

La nécessaire cohésion
Libération (France)

[AUTEUR] Jacques Chirac est président de la République française.

[RESUME] 40 ans après le traité de l’Élysée, les gouvernements français et allemand ont tenu un conseil des ministres commun et adopté une déclaration commune témoignant de notre vision partagée de l’avenir de l’Europe.
Dans une Europe qui s’élargit, le moteur franco-allemand est plus que jamais nécessaire. Le chancelier Schröder et moi-même avons, pour cela, apporté une contribution commune au travail de la Convention pour l’avenir de l’Europe en proposant davantage de visibilité pour le Conseil européen et en confortant l’autorité de la Commission. Ces modifications institutionnelles ont pour objectif d’améliorer l’efficacité dans la réalisation des objectifs de l’Union Européenne : assurer notre sécurité, promouvoir la défense de nos intérêts et de nos valeurs démocratiques et donner à l’Europe toute sa place dans les affaires du monde.
Nous voulons mettre toute la puissance de l’Europe au service de la paix, comme en Afghanistan ou dans la crise irakienne. Nos valeurs humanistes nous dictent notre approche de la bioéthique. Notre sens de la responsabilité à l’égard des générations futures nous pousse à militer pour le développement durable et une solidarité accrue envers les pays du Sud.
Pour coordonner notre action commune, un secrétaire général pour la coopération franco-allemande, assisté d’un adjoint de l’autre pays sera nommé des deux côtés et nous accentuerons les échanges entre nos parlements. Enfin, nous lèverons les dernières barrières entre nos peuples en développant les échanges en matière d’éducation et la mobilité des travailleurs entre nos deux pays.

« Le coeur de l’unification européenne »

Le coeur de l’unification européenne
Libération (France)

[AUTEUR] Gerhard Schröder est chancelier de la République fédérale allemande

[RESUME] Il y a quelques semaines à peine, la concertation franco-allemande était décisive au sommet de Copenhague pour élargir l’Union Européenne. Le "moteur" franco-allemand faisait à nouveau preuve de son efficacité, comme il le fait depuis 40 ans et la signature du traité de l’Élysée. Il faut entretenir cette précieuse relation qui aujourd’hui nous paraît naturelle.
L’Europe a changé, elle est devenue plus pacifique, mais aussi plus différenciée. Si le "moteur" franco-allemand est encore indispensable, tous les partenaires ne nous suivent plus systématiquement. Il faut donc continuer à intensifier les relations bilatérales.
L’Allemagne et la France sont au centre des efforts pour la constitution d’une politique étrangère et de sécurité européenne commune. Dans les crises liées au terrorisme, à l’Irak, à la Corée du Nord, nos peuples peuvent compter sur leur gouvernement pour tout mettre en œuvre pour sauvegarder la paix, éviter la guerre et garantir la sécurité des citoyens. Dans le même temps, nous voulons approfondir l’union de l’Europe et nous avons fait une proposition commune à la Convention pour l’avenir de l’Europe.

« Dieu bénisse l’Amérique »

God bless America
The Guardian (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Harold Pinter est un acteur, réalisateur, metteur en scène et écrivain britannique renommé. Il s’est engagé de longue date contre l’impérialisme états-unien.

[RESUME] Harold Pinter propose un court poème en guise de tribune libre. Il pastiche les chants patriotiques états-unien faisant référence à Dieu et glorifiant l’action généreuse des États-Unis en les mettant en parallèle avec les atrocités de la guerre commise au nom de ce patriotisme bigot.

« Le pouvoir nucléaire, dans de mauvaises mains »

El poder nuclear, en malas manos
Clarìn (Argentine)

[AUTEUR] Henry Kissinger est ancien secrétaire d’État et ancien conseiller national de sécurité. Il est PDG du cabinet Kissinger Associates et président démissionnaire de la commission nationale d’enquête indépendante sur les attentats du 11 septembre 2001 (voir notre article à ce sujet).

[RESUME] Le programme nucléaire nord-coréen est une provocation directe contre le système international et pas uniquement contre les États-Unis. En effet, si un pays comme la Corée du Nord produit des armes nucléaires, les traités de non-proliférations ne valent plus rien. Plus les États nucléaires seront nombreux, plus le risque de voir ces armes tomber dans n’importe quelles mains et celui d’une catastrophe globale seront importants.
Pourtant, malgré l’aveu nord-coréen et l’expulsion des inspecteurs, la presse internationale a dénoncé le refus de négocier de George W. Bush. Ces critiquent oublient qu’une telle négociation serait une reconnaissance tacite du statut de puissance nucléaire de la Corée du Nord et un triomphe du chantage nucléaire. Nous parlons ici d’un régime belliqueux et terroriste et traiter avec lui équivaudrait à donner l’autorisation à tous les pays d’appliquer la même politique.
Il nous faut organiser une conférence internationale rassemblant les États-Unis, le Japon, la Chine, la Russie et la Corée du Sud et obtenir une déclaration commune soulignant la volonté de chacun de revenir au statu quo nucléaire antérieur. Ensuite il faut sommer Pyongyang de détruire définitivement sa structure nucléaire et, c’est alors seulement que nous pourrons amorcer des discussions sur les garanties à apporter à la sécurité de la Corée du Nord.
Dans la gestion de la crise en cours, il faut bien garder à l’esprit que les intérêts vitaux de nombreux pays se croisent dans le Nord-Est asiatique. En effet, le futur de la Corée du Nord est indissociable de celui du Sud. La Chine ne veut pas d’une Corée du Nord nucléarisé qui entraînerait la nucléarisation du Japon. La Russie ne veut pas d’une Corée réunifiée alliée de Washington ou de Pékin. Compte tenu de cette situation et de ces alliances dans cette région, les États-Unis ont donc tout intérêt à ce que l’Asie reste stable et prospère et qu’elle ne connaisse pas une nouvelle guerre. Ainsi, même si Washington veut aider à la réunification de la Corée et empêcher la prolifération nucléaire, ces objectifs doivent être atteint sans déstabiliser le Nord-Est asiatique.
Dans ce schéma, la position de la Corée du Sud est complexe. Elle considère que l’arme atomique de Pyongyang n’est pas plus dangereuse que son armée et son artillerie. Séoul estime donc que la réunification est plus importante que la dénucléarisation. En outre, du point de vue de nombreux mouvements gauchistes sud-coréens, les États-Unis ont provoqué les tensions et le programme nucléaire nord-coréen est donc justifié. Ces idées sont partiellement arrivées au pouvoir lors des dernières élections en Corée du Sud. Aujourd’hui, Séoul se pose en médiateur impartial entre les États-Unis et la Corée du Nord tout en tentant de négocier une réduction de l’influence américaine sur son sol.
Les États-Unis ne sont pas opposés à une réunification des deux Corée. Mais nous resterons intransigeant sur le fait que les États-Unis doivent rester présents pour maintenir les équilibres stratégiques en Asie et défendre la Corée. Nous sommes prêts à renégocier notre accord avec Séoul, mais nous n’accepterons jamais le programme nucléaire du Nord. Il faut que la Corée du Nord devienne un régime normal, se souciant de sa population, et accepte de signer un accord multilatéral interdisant les modifications de frontière par tout autre moyen que la négociation. Si la Corée du Nord refuse, les États-Unis devront chercher des partenaires nucléaires où ils le peuvent et garderont leur liberté d’action au cas où leur sécurité serait menacée.

« La question la plus douloureuse de la guerre »

The war’s most agonizing issue
Jerusalem Post (Israël)

[AUTEUR] Daniel Pipes est directeur du Middle East Forum et auteur de Militant Islam Reaches America. Il a récemment fondé Campus Watch une organisation dont le but est de soutenir la vision néo-conservatrice du Proche-Orient dans les universités états-uniennes. Voir à ce sujet, la dernière investigation du Réseau Voltaire : "Le Centre pour la politique de sécurité : les marionnettistes de Washington".

[RESUME] Le lendemain du 11 septembre, la police du Texas a arrêté deux musulmans indiens. Ils ont d’abord été maintenus en détention pour défaut de prolongation de visa, puis un lien avec Al Qaïda a pu être établi. L’un des deux prévenus a déclaré que s’il avait été arreté, c’est uniquement parce qu’il était musulman.
La police doit plus surveiller la population musulmane que les autres communauté aux États-Unis. Certes, tous les musulmans ne sont pas des islamistes et tous les islamistes ne sont pas des terroristes, mais tous les terroristes islamistes sont des musulmans. Si les États-Unis veulent se protéger de la menace terroriste, ils sont donc obligés de mettre de côté temporairement leur attachement aux libertés civiles.
Cette réalité doit être prise en compte par les politiciens. Ils doivent assumer publiquement les pratiques clandestines de la police. Cette attention particulière doit être menée avec finesse et tact. Ces mesures d’exception devront prendre fin avec la conclusion de la guerre au terrorisme. Durant cette période, les musulmans auront au moins la consolation de savoir qu’ils sont mieux défendus contre les terroristes.

« L’opposition du Venezuela ignore la constitution »

Venezuela’s opposition ignores the Constitution
Christian Science Monitor (États-Unis)

[AUTEUR] Francisco José Moreno est économiste politique. Il a conseillé de nombreux dirigeants latino-américains et notamment deux prédécesseurs d’Hugo Chavez. Il est président de Strategic Assessments Institute, un think tank spécialisé dans les questions de politiques économiques.

[RESUME] Ceux qui essayent de mettre fin au règne d’Hugo Chavez n’ont pas réussi à convaincre le monde qu’en enfreignant la constitution du Venezuela, ils défendaient la démocratie. En effet, comment croire une opposition qui affirme que Chavez est un dictateur totalitaire alors qu’il n’y a pas de prisonniers politiques dans le pays et que la liberté de la presse est totale ? L’opposition affirme également que son opposition à Chavez est politique et non sociale ou raciale alors que les partisans du président sont pauvres et métissés et que l’opposition est blanche et appartient aux classes moyennes ou riches. L’opposition doit enfin respecter le jeu des élections dans le pays car la popularité de Chavez ne cesse de décliner et qu’elle ne manque pas de moyens légaux pour faire chuter le président d’ici 2006.
En réalité, ce que craint l’opposition, ce n’est pas la "radicalisation" du pays, mais c’est que le Venezuela échappe au contrôle de la classe dirigeante corrompue qui a mené le pays avec des politiques ineptes, provocant ainsi l’arrivée au pouvoir de Chavez. Certains opposants au président vénézuélien sont d’anciens dirigeants du Venezuela et l’on ne peut rien attendre d’eux. Mais les opposants modérés doivent, eux, respecter la constitution et combattre Chavez démocratiquement.

[CONTEXTE] Sur la tentative de coup d’État organisée par Washington à Caracas, en avril dernier, voir notre enquête : "Opération manquée au Venezuela".