« Un moment pour la vérité »

Moment for truth
Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] Frank J. Gaffney Jr est président du Center for Security Policy, le think tank qui rassemble les principaux « faucons » états-uniens. Le Réseau Voltaire lui a consacré une enquête : « Le Centre pour la politique de sécurité : les marionnettistes de Washington ».

[RESUME] Lors de sa conférence de presse aux Açores, le président George W. Bush a constaté l’incapacité de l’ONU à désarmer l’Irak et a précisé que nous étions à un moment de vérité. Nous sommes également à un moment pour la vérité concernant la vraie nature de l’ONU.
Le processus à l’ONU a ralenti l’action des États-Unis et a contraint la première puissance mondiale à aller mendier un soutien à la Guinée et à l’Angola, montrant que cette organisation est dirigée par des intérêts particuliers et non par les valeurs les plus élevées. Le coût réel de cette prétention de l’ONU à légitimer l’action états-unienne se mesurera en vies, américaines, alliées et irakiennes, dans le conflit à venir. En effet, grâce au processus à l’ONU, le despote irakien a eu plus de temps pour se préparer : il est maintenant en mesure de détruire les puits de pétrole, de causer des morts en masse et de provoquer une crise humanitaire que les libérateurs auront à gérer et dont ils seront peut-être quand même blâmés. Saddam pourrait peut-être même mener une attaque préventive sur nos forces dans la région, ses voisins ou sur nous sur le territoire.
Et tout ça pour quoi ? Qu’avons-nous gagné à subordonner la sécurité nationale états-unienne aux diktats du Conseil de sécurité ? Nous avons investi beaucoup de temps et de capital à négocier alors que la France et les autres pays qui protègent Saddam Hussein continuent d’insister sur le fait que sans une autre résolution que la résolution 1441, toute action contre l’Irak serait illégale. Cette affirmation risque même d’avoir, jusqu’à notre victoire en Irak, un fort impact dans le monde.
Il semble que beaucoup de pays, et tous les bureaucrates de l’ONU, voient cette organisation comme un moyen de contrôler la puissance américaine et non un outil pour faire face aux menaces du XXIème siècle. Le président a cependant affirmé qu’il associerait l’ONU à la reconstruction de l’Irak. Cela peut être un bon moyen de partager les dépenses de la reconstruction et de prouver que les États-Unis ne veulent pas créer une colonie en Irak. Toutefois, si l’ONU joue un rôle au-delà des questions humanitaires, elle pourrait gâcher la possibilité d’installer la liberté dans le pays.
George W. Bush a engagé la nation dans la libération de l’Irak. Il doit aussi dire la vérité concernant l’ONU : notre implication dans cette organisation dépendra de nos impératifs de sécurité et de notre constitution, pas des règles d’une organisation corrompue et inefficace.

« Il est temps pour la France de jeter sa politique arabe »

It’s time for France to dump its PAF policy
Gulf News (Dubaï)

[AUTEUR] Amir Taheri est journaliste iranien et rédacteur en chef du journal français Politique Internationale. Il est expert du cabinet Benador Associates à New York.

[RESUME] L’attitude de la France dans la crise irakienne est motivée par la traditionnelle « politique arabe de France » (PAF). Ainsi, la campagne de Jacques Chirac pour empêcher ou au moins retarder le renversement de Saddam Hussein n’est pas liée à son amitié de 28 ans avec le dirigeant irakien, mais à une vision politique, fruit de l’héritage gaulliste.
Après la guerre des six jours en 1967, De Gaulle avait acquis la certitude que la France pouvait contrebalancer le poids de l’Allemagne en Europe et de l’axe anglo-américain sur les relations atlantiques en ayant une relation privilégiée avec les pays arabes. C’est cette conviction qui l’avait conduit a présenté les juifs comme un peuple « sûr de lui et dominateur » et à décréter un embargo sur les armes en direction d’Israël, ce qui avait poussé au rapprochement de Tel-Aviv et Washington. Jacques Chirac a prolongé cette politique en aidant le programme nucléaire irakien quand il était Premier ministre en 1974-76 et en menant aujourd’hui une guérilla diplomatique pour empêcher la guerre.
Le gaullisme est également une doctrine nationaliste, bonapartiste et anti-américaine qui s’appuie beaucoup sur l’image de l’homme fort ou « homme providentiel ». Or Saddam Hussein et beaucoup de dirigeants de régimes autoritaires arabes correspondent assez à ce profil. C’est aussi ce qui explique que la PAF n’a pas beaucoup de retombées économiques positives. L’achat de produits français est plus conçue comme un acte politique que comme une action économique normale. Les dirigeants économiques français ont donc plus pris l’habitude de tenter de séduire les « hommes forts » des régimes arabes plutôt que de vanter leurs produits. Ces pratiques ont également terni leur réputation dans le monde arabe.
Pendant la cohabitation, la PAF a dû être abandonnée par Jacques Chirac, mais depuis 2002, le président français l’a reprise en nommant Dominique de Villepin au ministère des Affaires étrangères. Les contacts avec les régimes arabes autoritaires ont donc repris et ce d’autant plus facilement qu’en France également l’État domine l’économie. Plus Paris libéralisera son économie, plus il a de chance d’abandonner aussi la PAF. La PAF a aussi poussé la France à négliger les nouvelles sources d’approvisionnement pétrolières pour se concentrer sur les sources venant d’États voyous comme la Libye, l’Irak et l’Iran.
La PAF est une chimère construite sur le mythe du caractère monolithique de la nation arabe. La France doit abandonner cette politique pour être plus pragmatique et plus consciente de ses intérêts.

« Pourquoi la gauche est nonchalante concernant le 11 septembre »

Why the Left is nonchalant about September 11
Jerusalem Post (Israël)

[AUTEUR] Daniel Pipes est directeur du Middle East Forum et auteur de Militant Islam Reaches America. Il est collaborateur de Benador Associates et a fondé Campus Watch, une organisation dont le but est de soutenir la vision néo-conservatrice du Proche-Orient dans les universités états-uniennes. Voir à ce sujet, l’investigation du Réseau Voltaire : « Le Centre pour la politique de sécurité : les marionnettistes de Washington ».

[RESUME] Les marxistes soutiennent Saddam et dénigrent la menace d’Al Qaïda car cette attitude renforce leurs fantasmes anti-capitalistes.
L’extrême gauche est indifférente face aux horreurs du 11 septembre et celles commises par Saddam Hussein. Ainsi, le compositeur allemand Karlheinz Stockhausen a présenté le 11 septembre comme la plus formidable œuvre d’art du cosmos, le professeur marxiste de l’université de Columbia Eric Foner s’est demandé publiquement si « ce qui était le plus effrayant était l’horreur qui a touché New York ou la rhétorique apocalyptique de la Maison Blanche » et, enfin, Norman Mailer a qualifié les kamikazes du 11 septembre de « brillants ». Plus récemment, on a pu noter que les millions de manifestants anti-guerre n’avaient pas un mot de sympathie pour les Irakiens qui souffrent.
Cette attitude a été expliquée par Lee Harris dans un article paru dans un numéro récent de la Policy Review. Les marxistes ont cru que l’appauvrissement des travailleurs entraînerait la révolution inévitable, or il n’y a pas eu d’appauvrissement des travailleurs dans leurs pays riches. Plutôt que de renoncer au marxisme, ils ont transformé leurs théories en les transférant aux pays pauvres qui seraient appauvris par les pays riches et qui se révolteront tôt ou tard contre l’Occident. Malheureusement pour eux, la seule révolution anti-occidentale dans le tiers-monde en cinquante ans fut la révolution des militants de l’Islam, en Iran, en 1979.
Le 11 septembre est donc perçu comme le début d’une nouvelle ère révolutionnaire. L’extrême gauche s’est mise à admirer les militants de l’Islam et Saddam Hussein, espérant qu’ils feraient entrer le monde dans l’ère socialiste, montrant ainsi sa banqueroute intellectuelle.

« Un espoir sur le volcan »

Un espoir sur le volcan
le Monde (France)

[AUTEUR] Michel Rocard est ancien Premier ministre socialiste français (1989-1991). Il est président de la commission de la culture au Parlement européen.

[RESUME] Malgré les divisions entre nos gouvernements, la politique étrangère commune est peut-être en train de naître. En effet, il est frappant de constater la convergence de vues des opinions publiques européennes. Les membres du Parlement européen ont pris conscience, à l’occasion de la crise irakienne, de la nécessité d’une politique étrangère commune.
Il est remarquable de voir que le différend qui a surgi entre l’Allemagne, la Belgique et la France d’une part et les cinq membres de l’Union Européenne signataires de la « lettre des huit » (Danemark, Espagne, Grande Bretagne, Italie et Portugal) a plus à voir avec la création d’une politique commune par rapport aux États-Unis et à la légitimité de la France et de l’Allemagne à la conduire qu’avec la réalité du désaccord euro-américain. Les deux groupes sont d’accords sur le fait :
 Que Saddam Hussein est un criminel de guerre dangereux.
 Qu’il a tenté par le passé d’acquérir des armes de destruction massive.
 Qu’on ne peut pas lui faire confiance.
 Que le désarmement de l’Irak et l’éviction de Saddam Hussein sont des conditions de la consolidation de la paix dans la région.
L’Europe ayant manifesté son inquiétude concernant les frappes unilatérales et sur le fait que les inspections et la pression internationale aurait pu suffire, les éléments d’une diplomatie européenne aurait pu être :
 Une menace militaire sur l’Irak pour qu’il respecte ses engagements.
 Le maintien de la pression jusqu’à ce que l’Irak n’ait plus de armes de destruction massive.
 L’efficacité de cette diplomatie réside dans le fait qu’elle n’exclut pas la guerre, mais la fait dépendre de l’existence d’un doute sur la dangerosité de l’Irak
La France a défendu cette position, mais a eu le tort de ne pas y associer l’UE. L’Allemagne a eu le tort d’annoncer trop tôt qu’elle ne participerait pas à une action militaire faisant ainsi échouer une pression militaire nécessaire. Enfin, la lettre des huit a été écrite pour contester l’apparent leadership franco-allemand sur la politique étrangère de l’Union. Vu la situation actuelle, la Convention européenne court à un échec assuré si elle ouvre le débat sur la politique étrangère de l’UE. D’autant plus que les États-Unis chercheront à élargir le fossé entre ceux qui les ont suivis et les autres, alors même que leur refus du multilatéralisme risque de s’étendre à tous les domaines. Le monde est en outre sur un volcan financier.
Cette crise montre que la question de la politique étrangère est pour longtemps à l’ordre du jour. Il faut une Europe réconciliée avec elle-même, puis avec les États-Unis. Heureusement, les opinions publiques comprennent cette urgence.

« L’Europe, combien de divisions ? »

L’Europe, combien de divisions ?
le Figaro (France)

[AUTEUR] Michel Barnier est commissaire européen français chargé de la politique régionale et Président du groupe défense de la Convention européenne.

[RESUME] Les différentes réunions du Conseil de sécurité où siégeaient cinq États européens ont montré les divisions de l’Europe concernant l’Irak et le rapport aux États-Unis alors que leurs intérêts auraient dû converger sur deux principes simples : le désarmement de l’Irak et le respect de la légalité internationale.
Faudra-t-il bientôt parler d’Europe au pluriel et Donald Rumsfeld a-t-il exprimé, en parlant de vieille et nouvelle Europe, un dessein stratégique : diviser l’Europe pour que l’Amérique puisse mieux régner ?
La crise actuelle pose une question fondamentale : l’Europe peut-elle rester unie à 25 ou 30 membre ? L’heure est venue en Europe d’avoir un profond débat sur les raisons et les conséquences de la réunification du continent européen. J’espère que l’élargissement entraînera la création d’une union d’États et de peuples déterminés à vivre ensemble pour construire un espace de paix, de liberté et de solidarité. Je suis convaincu que les pays de l’Est vont renforcer l’Europe et assurer à l’Union le supplément de croissance qui lui fait défaut.
En réalité, la vraie division de l’Europe n’est pas entre l’Est et l’Ouest , ni entre le Nord et le Sud, mais entre les pays qui veulent approfondir l’intégration politique et ceux qui ne le souhaitent pas. C’est pourquoi il faut plus de souplesse dans l’UE et il ne faut pas que la Convention européenne impose des mécanismes obligatoirement unitaires. Il faut permettre à ceux qui le peuvent et le veulent de former une avant-garde. C’est par ce moyen que se constituera un embryon de politique étrangère et de défense commune. En tirant des leçons de nos divisions sur l’Irak nous devons préparer les procédures et les instruments qui permettront à la famille européenne de gérer sa diversité.

« A côté de l’Union européenne, un cercle de pays amis »

A côté de l’Union européenne, un cercle de pays amis
le Monde (France)

[AUTEURS] Chris Patten est commissaire européen britannique chargé des relations extérieures. Romano Prodi est président de la Commission européenne.

[RESUME] Zoran Djindjic, homme courageux, a été tué parce qu’il affrontait le crime organisé et l’extrémisme politique. L’Union européenne aidera Belgrade de son mieux et ne permettra pas que l’assassinat d’un seul homme réduise à néant les efforts accomplis en Serbie-Monténégro. Ce pays a pris la voie de l’UE et l’Union l’aidera, financièrement, à établir une gouvernance plus forte et réformatrice.
L’élargissement est l’outil de politique étrangère le plus efficace que nous ayons mis sur pied, mais cette stratégie ne peut continuer indéfiniment et il faudra poser des limites aux frontières de l’Europe. Il faut donc trouver un moyen de diffuser nos valeurs et la prospérité sans proposer l’adhésion à l’Union. C’est pourquoi la Commission européenne va proposer aux ministres des affaires étrangères européens la création d’un cercle de pays amis autour de l’Union qui pourront profiter des intérêts économiques de la plus grande zone de libre échange du monde sans participer aux institutions de l’UE. Pour pouvoir en bénéficier, ils devront partager nos valeurs et mener des réformes de grandes ampleurs, avec l’aide de l’UE.
Cette politique devrait permettre de renforcer les liens entre l’UE et ses voisins, de diffuser nos valeurs et de créer un espace de stabilité.

« La victoire au Kosovo »

The Victory In Kosovo
The Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Bajram Rexhepi est Premier ministre du gouvernement de coalition au Kosovo.

[RESUME] Il y a des moments dans l’histoire où le monde doit faire face à une vieille question : faut-il s’unir et affronter le mal ou fermer les yeux et espérer que tout ira pour le mieux ?
Nous, Kosovars, avons été confrontés à Slobodan Milosevic, un dictateur cruel et couard, brutalisant les civils, violant les Droits de l’homme et utilisant les bonnes intentions de la communauté internationale pour gagner du temps et continuer à exercer son règne de terreur. Pendant dix ans nous avons souffert de sa brutalité. Le Conseil de sécurité de l’ONU ne s’accordait pas sur ce qu’il fallait faire, mais notre voix a finalement été entendue et une coalition renversa le dictateur.
Nous, Kosovars, savons que la paix n’est pas simplement l’absence de guerre et que quand les hommes n’ont pas de liberté et de dignité, il n’y a pas de paix. Il ne peut y avoir de compromis avec le mal et nous, Kosovars, sommes aux côtés des forces de la liberté, avec l’Amérique, contre Saddam Hussein, en souvenir de vos sacrifices pour la cause de la liberté humaine.

« L’Afghanistan a besoin d’être désarmé »

Afghanistan needs to be disarmed
International Herald Tribune

[AUTEUR] Said Tayeb Jawad est chef de cabinet du président afghan Hamid Karzai.

[RESUME] La conférence de Bonn de l’année dernière qui avait organisé le gouvernement post-Taliban avait promis le « retrait de toutes les unités militaires de Kaboul ». Cependant, cette résolution n’a jamais été appliquée et on continue de voir des bandes armées dans les villes.
Les Afghans en ont assez de cette situation et ces groupes armés peuvent à nouveau transformer le pays en un endroit dangereux et explosif. La violence de ces milices ouvre la voie au fondamentalisme et à la dictature, comme en 1992, en poussant une population modérée à chercher refuge chez des groupes comme les Talibans.
Les Afghans ne demandent pas des écoles ou des hôpitaux à Hamid Karzaï, ils demandent que les seigneurs de guerre soient désarmés. Mais ils ne peuvent pas parvenir seuls à ce désarmement. Ils ont besoin de l’aide des États-Unis et des autres pays. Le problème est présent à Kaboul et plus encore dans les provinces, là où nous n’avons pas les moyens de faire régner l’ordre.
Il faut que le mandant de l’International Security Assistance Force soit étendu afin qu’elle puisse défendre la loi et désarmer les milices comme cela a été fait au Kosovo.