« Avec les États-Unis en Irak, l’inspecteur en armement de l’ONU cherche un rôle global »

With U.S. in Iraq, UN weapons inspector seeks global role(Canada)
Cet article est tout d’abord paru dans le Wall Street Journal (États-Unis)

[AUTEUR] Hans Blix est président exécutif de l’United Nations Monitoring, Verification and Inspection Commission.

[RESUME] Depuis le 11 septembre, le danger que représente la prolifération des armes de destruction massive est perçu sous l’angle de la menace que représenterait leur possession par des groupes terroristes. Les États-Unis et leurs alliés ont montré qu’ils étaient prêts à gérer ce risque militairement. Ils ont éliminé le régime brutal irakien qui ne pourra pas relancer son programme d’armement, s’il en avait eu un.
On peut se demander aujourd’hui comment seront gérés les autres cas. Contrairement à ce qu’on entend beaucoup, le principal risque ne vient pas des groupes terroristes, mais des États dans un contexte international où les efforts conjoints de lutte contre la prolifération appartiennent au passé.
En Irak, l’International Atomic Energy Agency a mené des inspections qui ont rassuré sur les capacité de l’Irak à développer des armes nucléaires, mais l’United Nations Monitoring, Verification and Inspection Commission (UNMOVIC) n’est pas parvenue à faire de même en ce qui concerne les capacités chimiques et biologiques. Les États-Unis ont préféré attaquer militairement. Dans le domaine nucléaire, les inspections permettent d’avoir des certitudes sur le long terme, mais pas dans le domaine chimique et biologique. Toutefois, une action armée et une occupation militaire, en plus de leur coût, ne permettent pas plus de s’assurer sur le long terme du non-développement des armes de destruction massive.
Les inspections nécessitent de la patience, de la persistance et de l’indépendance vis-à-vis des États. C’est en agissant de la sorte qu’on peut freiner la diffusion de ces armes au Proche-Orient, dans la péninsule coréenne, et ailleurs. L’UNMOVIC a acquis une grande expérience dans ce domaine et le Conseil de sécurité doit renforcer son mandat.

« La légitimité pour réussir »

The Legitimacy to Succeed
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Michael Steiner est représentant spécial du secrétaire général de l’ONU au Kosovo.

[RESUME] La plupart des commentaires sur l’après-guerre en Irak oublient que les entreprises de reconstruction ne sont jamais faciles. Même la combinaison d’une grande puissance militaire et de grands moyens financiers ne garantit pas le succès.
Avant le début de la guerre, le Kosovo a été vu comme un test pour analyser l’aptitude de l’ONU à reconstruire des sociétés frappées par la guerre. L’ONU a été critiquée par ses détracteurs, pourtant elle est en train d’organiser un système démocratique et un gouvernement indigène multiethnique, de construire une force de police et un système judiciaire et de reconstruire une économie. Aujourd’hui le système scolaire accueille 420 000 écoliers et 30 000 étudiants et le taux d’élucidation des crimes est de 75 %, ce qui est mieux que dans certains pays d’Europe.
Les agences de l’ONU ont une expertise unique pour répondre aux urgences humanitaires et sont plus efficaces que les nations agissant seules. Cependant elles ont besoin de la sécurité et du soutien financier que les membres de l’ONU peuvent leur apporter. L’ONU peut donner une légitimité à la reconstruction parce que ses membres représentent un large champ de valeurs et de systèmes politiques.

« Les amis des terroristes doivent payer le prix »

Terrorists’ Friends Must Pay a Price
Wall Street Journal (États-Unis).

[AUTEUR] Paul Bremer III est l’administrateur états-unien à Bagdad. Il a été ambassadeur spécial chargé de la lutte antiterroriste sous l’administration Reagan et directeur du cabinet Kissinger Associates. Le Wall Street Journal choisit aujourd’hui de reproduire cette tribune du 5 août 1996 avec le sous-titre « Ce que le président Clinton aurait dû faire ». Cette tribune faisait suite à un attentat contre des soldats américains en Arabie saoudite, le 12 juin 1996, et à l’explosion du vol 800 de la TWA, le 17 juillet (la thèse de l’attentat n’a jamais été formellement prouvée). La page éditoriale du Wall Street Journal est dirigé par Max Boot du cabinet de relations publiques Benador Associates.

[RESUME] Si le président Bill Clinton veut être sérieux dans son combat contre le terrorisme, il doit rassembler le National Security Council et leur tenir ce discours :
Les États-Unis ne doivent pas faire de concession avec le terrorisme et nous devons montrer que les pays qui soutiennent le terrorisme et les terroristes eux-mêmes ne seront jamais à l’abri. J’ordonne que les mesures suivantes soient prises :
 Le directeur du FBI doit doubler en deux mois le nombre de ses informateurs sur les terroristes basés aux États-Unis.
 La CIA doit restaurer les postes budgétaires de la lutte antiterroriste.
 L’Attorney général doit faire expulser des États-Unis toutes personne suspectée d’implication dans le terrorisme.
 Le département d’État doit restaurer le poste d’ambassadeur spécial chargé de la lutte antiterroriste et me proposer trois candidats dans les 24 heures.
 Le département d’État doit avertir la Libye, la Syrie, l’Iran et le Soudan qu’ils doivent mettre fin à leur soutien au terrorisme, expulser les terroristes vivant sur leur territoire et cesser de chercher à développer des armes de destruction massive sous peine d’être frappés. Dans le cas de la Libye, de la Syrie et du Soudan, le Pentagone doit me fournir une liste de cibles dans les 48 heures.
 Le secrétaire d’État doit prévenir ses homologues en Europe et au Japon du contenu du message à l’Iran et leur faire comprendre qu’ils doivent cesser de soutenir politiquement et commercialement Téhéran.
 Le secrétaire d’État doit prévenir Gerry Adams qu’il n’est plus le bienvenu aux États-Unis tant que le Sinn Fein/IRA poursuivra des actes terroristes.
Je ne veux pas de discussion sur ce sujet hors de la Maison-Blanche et que les États-Unis parlent par leurs actes et non leurs discours.

« L’échec de Bush en Irak »

Bush’s failure in Iraq
Boston Globe (États-Unis)

[AUTEUR] Joe Lieberman est sénateur démocrate du Connecticut et candidat à l’investiture démocrate à l’élection présidentielle.

[RESUME] Quelques semaines après une victoire militaire brillante en Irak l’administration Bush échoue à assurer la paix dans le pays. Le désordre se répand et elle tente de contrôler les réserves pétrolières tout en laissant sans surveillance des endroits où on suspecte la présence d’armes de destruction massive. J’ai soutenu la guerre, mais on mesure une victoire à la paix qui en résulte et pour l’instant l’administration commet beaucoup d’erreurs. Malgré mes avertissements, elle ne semble pas avoir préparé l’après-guerre et n’a pas tiré les enseignements de Kaboul. Ces erreurs sont :
 L’administration Bush n’a pas sécurisé des sites abritant des armes de destruction massive et les troupes chargées de conduire des recherches ne sont pas équipées avec le matériel nécessaire.
 L’administration Bush ne gère pas convenablement l’industrie pétrolière irakienne. Il aurait fallu que la gestion du pétrole soit confiée à une administration intérimaire comprenant des Irakiens et des responsables internationaux au lieu de la confier à des responsables états-uniens.
Ces erreurs vont approfondir la méfiance du reste du monde vis-à-vis des intentions US. Il faut démontrer au monde qu’il s’agit d’une libération et non d’une occupation et ne pas se contenter de le dire.

« Le contre-coup de la bombe d’Al Qaïda »

Al Qaeda’s Bomb Backfire
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Nawaf Obaid est analyste saoudien sur les questions pétrolière et de sécurité.

[RESUME] La vraie cible des attentats de Riyad étaient les liens économiques et sécuritaires de la famille royale saoudienne avec le reste du monde, mais cette attaque pourrait au contraire les renforcer.
D’après les services de renseignements saoudiens, les attentats auraient été orchestrés par Khaled Jehami, le « chef des opérations saoudiennes » d’Al Qaïda. Il a raté plusieurs attentats contre les administrations et les infrastructures saoudiennes avant de s’en prendre aux Occidentaux expatriés, cibles plus faciles permettant, d’après les analyses des terroristes, de saper les investissements et l’influence étrangère en Arabie saoudite et de faire échouer le plan de modernisation du pays.
L’analyse des terroristes est erronée et ces attaques ont, au contraire, entraîné la condamnation unanime d’Al Qaïda par les Saoudiens et privé l’organisation terroriste et le clergé extrémiste de son soutien populaire. Cette attaque est sans doute la conséquence de la traque dont est victime Al Qaïda et qui pousse cette organisation à commettre des actes désespérés qui la délégitiment. Ces attentats révèlent à la population qu’Al Qaïda ne mène pas une guerre de libération, mais s’attaque à le modernité. Il faut que le partenariat Américano-saoudien contre le terrorisme soit renforcé pour que le sang versé ne l’ait pas été en vain.

« Les Saoudiens peuvent-ils couper les liens avec le terrorisme »

Can the Saudis sever ties to terror ?
Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] Clifford D. May est ancien correspondant à l’étranger et à Washington du New York Times. Il est président de la Foundation for the Defense of Democracies, un think tank néo-conservateur créé après le 11 septembre 2001 par [James Woolsey].

[RESUME] Les Saoudiens sont à la fois les alliés et les ennemis d’Al Qaïda.
Le Wahhabisme soutient l’idéologie jihadiste d’Al Qaïda et Al Qaïda n’a pas attaqué de Saoudiens, mais des Occidentaux vivant dans le royaume. Toutefois, Al Qaïda présente également les responsables saoudiens comme des hypocrites trahissant les idéaux wahhabites.
Ces attaques démontrent qu’Al Qaïda et les autres groupes jihadistes haïssent les Américains pour ce qu’ils sont et non pas pour ce qu’ils font. En effet, ces attaques ont lieu alors que les États-Unis annoncent le départ de leur troupe d’Arabie saoudite, demandent la levée des sanctions contre l’Irak et défendent la « feuille de route » pour créer un État palestinien. Al Qaïda s’en moque et s’en prend aux « infidèles ». Ces attaques pourraient affecter les complexes relations entre les Saoudiens et Al Qaïda. Le prince régent Abdallah a condamné le terrorisme et les idéologies qui les soutiennent, ce qu’est pourtant le wahhabisme, dont Ben Laden ne fait qu’appliquer la finalité logique.
Pendant longtemps, les Saoudiens ont à la fois dépensé des millions de dollars pour se présenter comme des ennemis du terrorisme et des milliards de dollars pour développer le wahhabisme partout dans le monde. Les Séoud vont sans doute chasser les cellules d’Al Qaida du royaume, mais ils vont se diviser sur la question des limites à apporter au clergé wahhabite.

[CONTEXTE] Contrairement à ce qu’affirme Clifford D. May, les Saoudiens ont été bien plus sévèrement touchés que les Occidentaux dans les attentats de Riyad qui ont fait 34 morts (dont sept États-uniens) et plus de 200 blessés. En outre, ces attentats étaient dirigés contre les instructeurs de la Garde nationale et non contre « les Occidentaux ».

« La vraie Arabie saoudite »

The Real Saudi Arabia
Wall Street Journal (États-Unis).

[AUTEUR] Stephen Schwartz est l’auteur de The Two Faces of Islam : The House of Sa’ud from Tradition to Terror. Il dirige le programme Islam et Démocratie de la Foundation for the Defense of Democracies, un think tank néo-conservateur créé après le 11 septembre 2001 par [James Woolsey].

[RESUME] Les attentats de Riyad montrent à nouveau que les Saoudiens ne font rien contre l’extrémisme, mais les États-Unis persistent à nier l’implication du royaume dans le terrorisme.
Malgré les demandes états-uniennes pour plus de sécurité antiterroriste et la venue de Colin Powell, les Saoudiens n’ont rien fait pour intensifier le combat antiterroriste. Al Qaïda bénéficie d’énormes ressources dans la hiérarchie cléricale et l’État. La secte wahhabite appelle à la violence contre tous les non-wahhabites et incite à la lutte contre nos troupes. L’Arabie saoudite est l’un des États les plus répressifs du monde et une conspiration terroriste massive ne peut pas y avoir lieu sans complicité en haut lieu.
Al Qaïda a été vaincu dans de nombreux pays du monde, mais tout reste à faire dans son pays d’origine où les prêcheurs de la haine continuent d’appeler à la destruction de l’Amérique sans être inquiétés. L’attentat visait Vinnell Corp. qui entraîne la garde national du prince régent Abdallah, le seul membre de la famille en faveur de la réforme. Cet attentat pourrait être lié à la tendance dure de la famille royale dirigée par le ministre de l’intérieur le prince Nayef.
Il faut en finir avec la situation saoudienne et [George W. Bush] doit exiger de l’Arabie saoudite qu’elle cesse de soutenir le terrorisme.

« L’Afrique est proche d’un nouveau génocide »

Africa is on the verge of another genocide
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Gareth Evans est président de l’International Crisis Group. Il est ancien ministre des Affaires étrangères australien (1988-1996). Il a été rapporteur sur les questions de sécurité du Forum économique mondial de Davos.

[RESUME] Après que 800 000 personnes aient été massacrées au Rwanda, il y a neuf ans, et malgré les appels à ce qu’une telle situation ne se reproduise plus, un nouveau génocide africain se profile dans la riche province de l’Ituri (République démocratique du Congo).
Dans cette région de cinq millions d’habitants, les Hemas, minoritaires mais exerçant le pouvoir depuis l’époque coloniale, coexistent avec les Lendus. Les Hemas ont bénéficié de l’appui des troupes ougandaises et possèdent toutes les mines d’or de la région. Après le retrait des troupes ougandaises, ils ont pris Bunia, la capitale de la province, avec l’aide du Rwanda. Malgré la présence des troupes de l’ONU, ils ont commencé à faire fuir les Lendus.
Il est important que l’Ouganda et le Rwanda, qui bénéficient de l’aide britannique, cessent de se mêler des affaires de l’Ituri. Il faut que l’ONU ait des moyens que, pour l’instant, Washington refuse de lui donner. De son côté, l’ONU n’a pas encore démontré son efficacité et a semblé davantage préoccupée par le sort de son personnel que par celui des populations civiles congolaises. Le Conseil de sécurité doit déployer une force multinationale en Ituri pour stabiliser la situation.
La France a déjà affirmé qu’elle était prête à envoyer des troupes si elle ne le faisait pas seule. C’est une bonne nouvelle, mais il faut agir vite.

« Un président pour l’Europe ? Oui, mais... »

Un président pour l’Europe ? Oui, mais...
Le Monde (France)

[AUTEUR] Michel Barnier est commissaire européen français chargé de la politique régionale et président du groupe défense de la Convention européenne.

[RESUME] Les travaux de la Convention européenne ne sauraient se résumer à la seule question de la création ou non d’un poste de président du Conseil européen. Il s’agit néanmoins du point névralgique de cette discussion institutionnelle. Ce poste risquerait d’entraîner une confusion vis-à-vis de la Commission européenne et de son président ou vis-à-vis du futur ministre des Affaires étrangères, mais il existe des raisons pour demander une présidence plus stable du Conseil européen dans une Europe à 25 ou à 27.
Pour ma part, je pense qu’une présidence européenne n’est ni possible, ni souhaitable pour l’instant, mais que cela pourrait changer. Aujourd’hui, l’Union européenne dispose d’un pouvoir législatif partagé entre le Parlement européen et le Conseil et d’un pouvoir exécutif partagé entre la Commission et le Conseil. Ce système est peu lisible, mais il pousse à la coopération entre des organismes représentant des intérêts différents. Cette coopération est plus que nécessaire avec l’arrivée de dix nouveaux membres. Il faut donc garder ce pouvoir partagé encore dix ou vingt ans pour enraciner la confiance de tous les partenaires dans le système communautaire.
J’espère toutefois qu’un jour, une unification du pouvoir exécutif sera rendue possible par une européanisation des mœurs politiques. Les États devront parler d’une seule voix. Il faudra alors unifier les postes de président de la Commission européenne et du Conseil européen et donner à cette désignation le caractère le plus démocratique possible.