Le Washington Post a longuement relevé, au cours de la campagne présidentielle américaine, l’engagement de nombreuses autres organisations religieuses de la droite extrême, particulièrement de l’Église de l’Unification, aux côtés du candidat Georges W. Bush. Nous apportons quelques informations complémentaires.
L’Église de l’Unification a été fondée, en 1954, par le révérend Sun Myung Moon. Son histoire controversée a été établie par une enquête d’une sous-commission du Congrès des États-Unis, en 1978 (" Investigation of Korean-American Relations " Sub-committee on International Organizations of the Committee on International relations, Chambre des Représentants, 31 octobre 1978). L’Église a été créée par les services secrets sud-coréens (KCIA), comme sous-traitants des services américains (CIA). Elle devait servir de couverture à de nombreuses activités anti-communistes, dont celles de la World Anti-Communist League (WACL), à partir de 1966. Le dispositif a été mis en place en relation avec deux milliardaires fascistes japonais, Sasakawa (le bienfaiteur de l’Organisation mondiale de la Santé) et Kodama, et la participation de la Chine nationaliste. Le révérend Moon a été présenté comme le second messie venu sur terre compléter l’œuvre inachevée de Jésus-Christ.
Au cours des années soixante-dix, l’Église de l’Unification s’est étendue à tout le " monde libre ". Elle a acquis des participations dans de nombreuses industries, notamment dans la pêche, l’armement et la presse. Elle a même disposé d’une armée privée.
En 1982-83, le révérend Moon, a été poursuivi aux États-Unis pour fraude fiscale et conspiration. Malgré le soutien du président Reagan, il a été emprisonné pendant treize mois. Ses adeptes ont dénoncé une persécution religieuse et ont obtenu le soutien de très nombreux leaders religieux de toutes confessions.
En 1984, l’Église de l’Unification a modifié sa stratégie et fait alliance avec Rome pour éradiquer la théologie de la libération en Amérique latine. Bien que les épiscopats du Honduras, d’El Salvador, du Panama et du Japon aient mis leurs fidèles en garde contre la secte, Jean-Paul II a reçu solennellement ses dirigeants, le 16 décembre 1985.
Au début des années 90, le révérend Moon, bien que viscéralement anticommuniste, prit contact secrètement avec la Corée du Nord. Il souhaitait acquérir le lieu de sa naissance. Une propriété de neuf kilomètres carrés, située à Chongchu (Pyonganpukto), aurait bénéficié de la fiction d’ex-territorialité pour 99 ans. Elle serait devenue le micro-État de l’Église de l’Unification, sur le modèle de la Cité du Vatican. Dans ce contexte, le révérend Moon eu une série d’entretiens secrets avec Kim Il Sung, en 1991, puis avec Kim Jong Il, lorsque celui-ci lui succéda. L’Église offrit divers présents aux dictateurs et investit en Corée du Nord. Selon des documents, rendus publics par la Defence Intelligence Agency en octobre 2000, des mouvements de fonds d’environ 3,5 milliards de dollars ont été observés sur les comptes de l’Église de l’Unification. Ils auraient servi à financer l’effort d’armement nord-coréen et à fournir ainsi un " ennemi " crédible aux partisans américains de la construction d’un bouclier antimissiles. Le colonel Bo Hi Park, porte-parole du révérend Moon, a opposé un démenti formel aux allégations de la DIA.
À partir de 1995, Georges Bush Sr (ancien directeur de la CIA et ancien président des États-Unis) a honoré de sa présence les principales manifestations de l’Église de l’Unification. Ainsi, assista-t-il à une cérémonie de masse, rassemblant 50 000 moonistes, à Tokyo ; ou participa-t-il à la cérémonie d’ouverture du Congrès mondial de la Fédération des familles pour la paix. Ou encore, présida-t-il, le 23 novembre 1996 à Buenos-Aires (Argentine), le dîner de lancement de l’hebdomadaire mooniste Tiempos del Mundo, avant de se rendre, en compagnie du Révérend, à Montevideo (Uruguay) pour prendre la parole devant 4 200 séminaristes japonais de la secte. Ces interventions publiques de Georges Bush Sr ont été rémunérées par l’Église de l’Unification. Le total de ces prestations, sur cinq ans, est évalué à environ 10 millions de dollars.
Au cours des dernières années, l’Église de l’Unification a affermi ses positions en Corée et au Japon, et pris le contrôle économique et politique de plusieurs États en Amérique latine et dans le Pacifique, notamment l’Uruguay, les îles Fidji et les îles Marshall.
Le 15 janvier 2001, l’Église de l’Unification a organisé la XVIIIe Conférence mondiale des médias, renouant avec un type de manifestation internationale qui avait fait son succès d’influence. L’événement, présidé par l’ancien sénateur Larry Pressler, réunissait autour du révérend Moon et de l’inévitable Alexander Haig (ancien suprême commandeur de l’OTAN et ancien secrétaire d’État américain), d’anciens présidents du Belarus (Stanislav Shuskevich), du Costa Rica (Rodrigo Carazo), du Guatemala (Ramiro de Leon Carpio), du Libéria (Dexter Tahyor), de Madagascar (Albert Zafy), des Seychelles (James R. Mancham), de l’Uruguay (Luis Lacalle), et de la Zambie (Kenneth Kaunda).
À peine investi par le Congrès, le nouvel General Attorney (Garde des Sceaux), John Ashcroft, était l’invité de marque du révérend Moon, le 20 janvier 2001, pour la plus prestigieuse soirée œcuménique que les États-Unis aient connue. Mille sept cents leaders religieux de toutes confessions étaient venus prier avec Sun Muyng Moon au Hyatt Regency Hotel, un palace situé à proximité du Capitole.
L’événement était organisé par la Fondation du Washington Times (quotidien mooniste) sous le titre : " L’Amérique ensemble, dîner pour l’unité et le renouveau ". Tout ce qui compte de prêcheurs à la mode était présent, à l’exception de Billy Graham, excusé pour raison de santé.
Parmi les intervenants, Stephen Goldsmith, ancien directeur de campagne du candidat Bush et nouveau conseiller spécial du président élu Georges W. Bush pour les initiatives religieuses, déclara que la nouvelle Administration entendait s’appuyer sur les communautés religieuses et ethniques pour donner une seconde chance à ceux que la prospérité a laissés au bord du chemin.
Le General Attorney John Ashcroft délivra une parabole sur les merveilles de la Grâce divine et chanta quelques cantiques avant d’échanger quelques mots avec les autres invités devant la presse. Diverses personnalités vinrent le féliciter pour la manière courageuse dont il avait répondu au harcèlement des démocrates qui, lors de l’audition d’investiture, le questionnèrent sans relâche sur sa vision du racisme, de l’avortement et de l’homosexualité.
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