M. Declercq est le porte-parole d’une association de soutien aux familles victimes des sectes. Cette association dénonce les dangers des associations sectaires :

 danger d’enfermement provoqué par la coupure avec la famille, les amis, le milieu professionnel et la société en général ;

 danger psychique provoqué par le sentiment exacerbé de la faute, du péché, de l’enfer, de la dépen-dance totale vis-à-vis du formateur, du gourou au sein de la secte ;

 danger financier (" dons volontaires ") ;

 danger pour la santé physique de l’adepte (manque de sommeil, ...).

L’association témoigne également de la souffrance des familles qui éprouvent souvent des difficultés à se faire entendre et aider.

Elle insiste sur le rôle essentiel de la prévention. Il y a lieu d’informer les parents concernant les mécanismes sectaires et les attitudes appropriées à adopter (une certaine sérénité aidera à briser le silence lorsque l’adepte quittera le mouvement). il faut également pouvoir aider les adeptes qui quittent la secte à retrouver un équilibre grâce à l’expérience d’autres ex-adeptes. La rapidité de discernement et d’intervention de la famille est capitale lorqu’un de ses membres adhère à un mouvement sectaire.

Un membre de la famille du témoin a adhéré à l’Eglise du Christ de Bruxelles (Boston). L’Eglise du Christ de Boston, qui compte 700 membres à Paris et 4 000 en Angleterre, est très active dans le monde étudiant. En Belgique, le nombre d’adeptes est passé d’une centaine à 60-70.

L’Eglise du Christ de Bruxelles, à l’exemple d’autres sectes, utilise plusieurs masques :

 " l’Eglise du Christ " est en réalité le nom d’une église protestante existant depuis plusieurs dizaines d’années à Laeken. L’Eglise du Christ de Bruxelles tient d’ailleurs ses réunions dans un temple protestant, rue Léon Lepage (600 000 francs de location de salle par an) ;

 un membre de l’église s’est proposé d’aider les jeunes en fin de formation - donc dans une période de fragilité - à trouver du travail et a pris contact avec diverses personnalités politiques bruxelloises. Ainsi, il a notamment obtenu un stand à la bourse du travail organisée dans une commune bruxelloise (cf. article très positif dans Le Soir du 3 juin 1995).

Lorsqu’on assiste à un culte, les gens y semblent heureux. En réalité, ils sont accaparés et culpabilisés. Si un adepte se propose de passer une soirée avec un membre de sa famille, la secte lui trouvera une autre activité (baby-sitting, etc.). Il y a rupture avec le milieu familial, les parents n’étant plus considérés que comme des géniteurs.

Chaque semaine, les adeptes versent un dixième de leur salaire et, une fois par an, vingt fois ce qui a été donné chaque semaine. Un des proches du témoin a ainsi déboursé quelque cent mille francs en six mois.

L’Eglise du Christ de Bruxelles repose sur une structure pyramydale. L’adepte est sous la dominance totale de son formateur, qui ne peut toutefois faire état d’aucune formation : il est souvent recruté dans la rue. L’adepte doit lui confier ses moindre pensées. Il doit également lui rendre bénévolement de menus services, comme, par exemple, aller faire ses courses.

Le témoin est d’avis que l’ensemble de la société a un rôle à jouer dans la lutte contre les sectes. A moyen terme, l’association de soutien souhaiterait que la fondation Roi Baudouin réunisse tous les ac-teurs concernés : familles et ex-adeptes, médecins, organismes de protection de l’enfance et des droits de l’homme, universités, le comité national des parents, les associations de familles, des juristes, les services de police et de renseignements, des représentants des administrations sociale et fiscale ...

Selon le témoin, tant les médias que les enseignants jouent un rôle essentiel au niveau de la prévention.

Au sein de la secte, on observe un enfermement collectif, destructeur de la personnalité. L’adepte d’une secte, généralement une personne fragilisée, est à la recherche de chaleur humaine.

La secte va attirer sa victime par un " bombardement d’amour ". On va lui dire qu’elle est formidable, avant de tenter de la dominer. Dans cette optique, il est dommage qu’on ne réussisse pas à communiquer ce même sentiment aux jeunes au cours de leurs études. La méthode utilisée par les sectes relève de la " pédagogie de la domestication ", décrite par le Brésilien Paulo Frere.

Le gourou est le sujet agissant, qui éduque, pense, sait, discipline, humilie. Le sentiment de culpabilité provoqué par cette pédagogie verticale, par un " savoir- pouvoir " empêche la communication. Au lieu de guérir de sa fragilité, l’adepte va s’enfoncer dans l’enfermement. Le groupe s’exclut de la société et, à la limite, s’autodétruit.

Le témoin se dit frappé par les similitudes entre les sectes et l’extrême-droite : la présence d’un führer, la pensée unique, l’abandon de l’esprit critique, l’appartenance à une élite (seule sauvée), la haine du monde extérieur.

Compte tenu de ces éléments, l’enseignement doit aller au-delà de l’information. En classe, il faut guérir les blessures, apprendre à vivre ensemble, éduquer au respect de l’autre, quel que soit son mode de vie, sa pensée, sa fragilité. Il faut éduquer à la prise de la parole, à l’écoute et à l’autonomie. En d’autres termes, des lieux d’écoute et de prise de parole entre élèves et professeurs doivent voir le jour dans nos écoles. Il s’agit de la " pédagogie de la libération ", décrite par Paulo Frere.


Source : Chambre des Représentants de Belgique http://www.lachambre.be