Présidence de M. Laurent FABIUS, Président
M. Guy CANIVET est introduit.
M. le Président lui rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d’enquête lui ont été communiquées. A l’invitation du Président, M. Canivet prête serment.
M. le Président : Monsieur le premier président, je suis très heureux de vous accueillir. La commission vous est très reconnaissante de venir devant elle, juste après - le hasard fait bien les choses - avoir remis à Mme Guigou votre rapport sur des sujets qui nous intéressent
M. Guy CANIVET : Merci de me recevoir.
Je dois, tout d’abord, indiquer que je ne suis pas un expert des questions pénitentiaires. J’ai, en ce domaine, l’expérience des magistrats qui ont entretenu des rapports fonctionnels avec les prisons. Au début de ma carrière, j’ai été juge d’instruction et dans le cadre de ces fonctions j’ai régulièrement rendu visite aux personnes placées en détention provisoire à la maison d’arrêt locale. Récemment, premier président de la cour d’appel de Paris, j’ai eu à accompagner, coordonner et animer l’activité des magistrats des juridictions du ressort chargés de l’application des peines, à m’assurer que les juges des enfants, juges d’instruction et président de la chambre d’accusation procédaient aux visites que leur impose le code de procédure pénale, enfin, à exercer les pouvoirs conférés par les textes aux chefs des cours d’appel sur les établissements pénitentiaires situés dans leur ressort.
Il me faut aussi rappeler que la mission confiée par Mme la garde des sceaux au groupe de travail que j’ai présidé n’avait pas pour tâche d’évaluer la situation pénitentiaire. L’objet de ce groupe était de réfléchir à l’instauration d’un contrôle externe sur les établissements pénitentiaires, ce qui est différent, même si, lors des cinq mois durant lesquels nous avons travaillé, nous n’avons pas manqué d’examiner dans une certaine mesure le contexte pénitentiaire pour apprécier la nécessité et les modalités d’un contrôle externe sur les prisons.
Ces réserves étant faites, je risquerai, si vous le permettez, trois remarques préliminaires.
En premier lieu, rien dans les constatations de notre groupe de travail ne conduit à mettre en doute la qualité, la disponibilité et le sens du service public des personnels pénitentiaires, qu’il s’agisse des agents de direction, d’encadrement, de surveillance ou des personnels socio-éducatifs. Il faut insister sur ce point : si une réforme doit intervenir, elle ne se fera pas contre eux, mais avec eux. Une des priorités de toute réforme pénitentiaire serait de rétablir dans l’exercice professionnel de ces agents la sérénité, la considération et la fierté nécessaires à l’accomplissement de la fonction sociale considérable qu’ils assument. On se rend parfaitement compte de la difficulté de leur tâche lorsque l’on visite les prisons. Par ailleurs, il ne faut pas méconnaître que ces personnels ont une mission essentielle de sécurité des établissements placés sous leur surveillance, mission qui intéresse directement l’ordre public et qu’ils assument bien.
La deuxième remarque soulignera le caractère superficiel et épisodique de l’intérêt de l’opinion pour les prisons. A de longues périodes d’indifférence succèdent des accès paroxystiques d’intérêt provoqués par des incidents ou des situations plus ou moins dramatiques et médiatisées. On semble alors découvrir la situation des prisons et on impute sa médiocrité à l’administration. L’indifférence revenue, sans amélioration sensible de la situation, laisse des traumatismes graves chez ces personnels injustement mis en cause ou dévalorisés. Pourtant, une réforme pénitentiaire requiert de la constance et de la continuité, de l’opiniâtreté, une action planifiée, en profondeur, à long terme, en vue d’une normalisation progressive de la situation des prisons.
Ma troisième remarque est l’absence de transparence des prisons. Ce n’est pas une mise en cause de l’administration mais la constatation d’un état de fait. Dans une prison, jamais on ne dit spontanément ce qui se passe et les révélations ne seront que partielles, tronquées, faussées, parfois manipulées. Il faut faire très attention. Visiter une prison, s’entretenir avec les détenus et avec le personnel pénitentiaire est une démarche professionnelle. La simple visite d’une prison ne peut pas donner une idée exacte de ce qui s’y passe réellement. La prison est difficile à observer, à connaître et à comprendre. Il faut se garder des observations et des conclusions hâtives et des opinions définitives.
Les constatations préalables de la commission que j’ai présidée sont au nombre de trois. Elles portent sur la carence du droit en prison, sur l’absence de lisibilité de la politique pénitentiaire et sur l’insuffisance des moyens donnés à l’administration des prisons.
S’agissant de la carence du droit en prison, nous avons d’abord relevé l’absence d’organisation logique du droit pénitentiaire, l’irréalisme des textes et le manque d’effectivité des garanties qu’il prévoit.
Tout d’abord, en examinant le droit de la prison, on est frappé par le non-respect de la hiérarchie des normes. Il nous a semblé, à cet égard, que quelques principes simples, évidents des libertés individuelles et collectives sont ignorés. Le droit pénitentiaire méconnaît que la liberté est la règle et sa restriction l’exception, que toute restriction de liberté doit être prévue par la loi et répondre aux principes de nécessité et de proportionnalité, que le droit s’applique en prison comme ailleurs, enfin que le détenu reste un citoyen.
Au regard de ces principes fondamentaux, le droit pénitentiaire manque d’organisation logique.
De nombreuses libertés sont supprimées ou restreintes par de simples règlements. On autorise autrement que par la loi des restrictions importantes aux libertés individuelles. La vie des prisons, le statut des détenus sont essentiellement réglés par voie de circulaires dont les prescriptions excédent manifestement l’interprétation de la loi ou du règlement.
Enfin, les règlements intérieurs sont très variables d’un établissement à l’autre, différents à l’intérieur d’établissements de même catégorie. De sorte que ce qui est autorisé ou toléré ici est interdit ailleurs sans vraiment que l’on en comprenne les raisons.
Deuxième aspect, le droit de la prison n’est pas réaliste dans sa formulation. De nombreuses interdictions ou prescriptions ne sont, en réalité, pas applicables parce que trop rigoureuses, en matière de visite, de correspondance par exemple. L’administration pénitentiaire se donne une marge de tolérance ou d’adaptation qui est perçue comme arbitraire et parfois injuste par les détenus. Dans d’autres cas, c’est l’administration elle-même qui n’a pas les moyens de respecter le règlement. Quand on examine les exigences du code de procédure pénale, en matière d’hygiène par exemple, et que l’on visite certaines prisons, la Santé, entre autres établissements, on mesure le fossé qui sépare les exigences réglementaires de leur mise en _uvre pratique. Il en résulte une incertitude tant pour l’administration que pour les détenus sur ce qui est impératif, possible ou interdit.
Il faut, en troisième lieu, évoquer l’ineffectivité du droit de la prison. Les détenus ne peuvent utilement faire valoir leurs droits contre l’administration. Les textes du droit pénitentiaire ne sont pas toujours disponibles en détention, en l’état il n’existe pour les détenus aucun dispositif d’accès au droit, pas de permanence d’avocats dans les prisons. Par ailleurs, les recours contre les décisions des juges de l’application des peines, ou celles de l’administration qui font grief sont inexistants ou ineffectifs alors que ces décisions ont un retentissement important sur leur vie. Ainsi, le recours contre les sanctions disciplinaires ouvert, en 1996, par un arrêt du Conseil d’Etat, ne permet pas de faire statuer la juridiction administrative dans des délais compatibles avec la situation du détenu. Lorsque le juge se prononce, la sanction est exécutée depuis longtemps et même, le plus souvent, le détenu a été libéré. La décision d’annulation de la sanction n’a manifestement aucune portée pratique. Pour restaurer une effectivité du droit en prison, il faudrait organiser les recours aussi bien judiciaires - contre les décisions du juge de l’application des peines - qu’administratifs, selon des modalités prenant en compte l’urgence et même les adapter spécialement à la situation des détenus qui, en cas de contestation, espèrent une décision rapide. On pourrait, par exemple, prévoir la possibilité de suspendre l’exécution de la décision administrative contestée ou édicter des injonctions immédiatement exécutoires à l’administration en cas de non respect d’une obligation positive. Voilà, très schématiquement, ce que l’on observe au sujet du droit de la prison et qui nous a conduit à proposer le vote d’une grande loi pénitentiaire à partir de laquelle serait reconstruit l’appareil réglementaire qui régit le fonctionnement des établissements et fixe le statut des détenus.
L’examen critique de la politique pénitentiaire soulève une question simple : la prison pour quoi faire ? Il semble bien que la réponse ne soit pas certaine. Elle mériterait en tout cas d’être précisée tant au niveau national qu’à l’échelon de chaque établissement. Au sens de notre groupe de réflexion, il serait nécessaire de définir des objectifs précis de l’emprisonnement, aussi bien en ce qui concerne la fonction de la peine privative de liberté que ses conditions d’exécution en termes d’hygiène, de conditions de la vie carcérale, de réduction de la violence, de prévention des suicides et automutilations, de réinsertion sociale, de préparation à la sortie. Il nous semble que des objectifs clairs et précis devraient être définis et assignés pour la réinsertion des condamnés, la prévention de la récidive et que la réalisation de ces objectifs soit périodiquement vérifiée ou évaluée. Alors pourraient être objectivement appréciées l’utilité de la peine d’emprisonnement et la performance du système pénitentiaire qui, actuellement, reposent plus sur des a priori, des pétitions de principe, voire sur des utopies ou des idées fausses.
J’en viens aux moyens de l’administration pénitentiaire. L’état des prisons n’est manifestement pas digne de notre société. Il est indispensable d’améliorer la situation de nombreux établissements, ne serait-ce que pour rendre admissibles les conditions alimentaires ou d’hygiène les plus élémentaires et respecter la dignité des détenus. Il n’est, par exemple, pas supportable que dans certains établissements, ils vivent à quatre par cellule au mépris de l’intimité la plus primaire.
Enfin, et surtout, il faut améliorer l’emploi, la mobilisation des personnels pénitentiaires et valoriser leurs missions. La réforme des prisons exige un effort important de la gestion des ressources humaines et l’introduction d’un véritable dialogue social à tous les niveaux, central, régional et au sein des établissements. Il faudrait, par exemple, responsabiliser les chefs d’établissement, leur donner plus d’autonomie et les moyens de conduire une politique locale, de mobiliser les personnels sur des objectifs expliqués, débattus, suivis et évalués.
En ce qui concerne le contrôle extérieur sur les établissements pénitentiaires, il doit, d’abord, être rappelé qu’il n’existe actuellement aucun contrôle général extérieur à l’administration sur les établissements pénitentiaires avant d’indiquer, brièvement, les propositions que nous avons faites à Mme la ministre de la Justice pour l’instauration d’un tel contrôle.
Les contrôles extérieurs mis en _uvre actuellement sont d’ordre administratif et judiciaire.
Les premiers sont exercés par des administrations techniques. Ils concernent la sécurité des bâtiments, l’hygiène, le travail pénitentiaire, la santé ou l’éducation. Chaque administration dispose de son propre système de contrôle. Plus ou moins régulièrement faits, en fonction des moyens disponibles, ces contrôles manquent d’efficacité, surtout dans la mesure où ils prennent trop largement en compte la spécificité pénitentiaire. La démarche est faussée par le présupposé selon lequel en prison la réglementation ne s’applique pas comme ailleurs, donc, sans aucune raison objective, l’application des règlements est considérablement relativisée, réduite, parfois inexistante. Or, il faudrait que ces contrôles techniques s’opèrent en prison comme ailleurs.
La seconde catégorie de contrôles est celle de l’autorité judiciaire. Là réside un malentendu. L’autorité judiciaire n’exerce pas un contrôle général sur le fonctionnement des prisons. Chaque magistrat spécialisé ne les visite qu’en fonction de sa propre mission : le juge des enfants pour vérifier les conditions de détention des mineurs relevant de sa juridiction, le juge d’instruction relativement aux détentions provisoires qu’il a ordonnées, le président de la chambre d’accusation sur la situation des personnes provisoirement détenues eu égard à l’instruction dans laquelle elles sont mises en examen (longueur de la détention, nombre d’auditions par le juge d’instruction, etc.), le juge d’application des peines pour l’individualisation de la peine, les magistrats du parquet pour le respect de l’ordre public. Chacun de ces magistrats ne retire donc de ses visites qu’une vision partielle de la prison et ne dispose d’ailleurs pas des pouvoirs et moyens d’un contrôle général. D’une manière générale, ils peuvent visiter l’établissement, accompagnés du directeur mais ils ne sont autorisés à s’entretenir avec les détenus dans leur cellule que si des raisons de sécurité ne l’empêchent pas. En dehors des enquêtes judiciaires consécutives à la commission d’infraction, l’autorité judiciaire ne dispose pas de réels pouvoirs d’investigation au sein des prisons. Il n’y a donc pas de véritable contrôle de l’autorité judiciaire. L’article D. 179 du Code de procédure pénale précise toutefois qu’un "rapport conjoint du premier président et du procureur général rend compte chaque année au ministre de la justice du fonctionnement des établissements pénitentiaires de leur ressort et du service assuré par le personnel de ces établissements". En général, les chefs de cour ne le font pas ou se satisfont d’un rapport formel parce qu’ils ne disposent ni des moyens ni des prorogatives qui leur permettraient de procéder à un examen en profondeur des prisons de leur ressort. En outre, l’administration pénitentiaire n’a, jusque-là, guère manifesté d’intérêt pour ces rapports lorsqu’ils sont faits et en ce cas ils ne sont suivis d’aucun retour. Par conséquent, ce type de mission, dont l’utilité a, semble-t-il, été perdue de vue, n’a pas tendance à se développer.
Or il existe des raisons de principe pour instaurer un véritable contrôle extérieur sur les prisons. Ne serait-ce que parce que lorsqu’une personne se trouve dans un milieu clos, totalement dépendant d’une administration, il est indispensable de vérifier que cette dernière n’abuse pas de son pouvoir. Cette exigence concerne au premier chef les prisons.
Les préconisations du Conseil de l’Europe insistent tout spécialement sur la nécessité de l’instauration d’un tel contrôle qui est, d’ailleurs, effectivement prévu dans tous les grands systèmes pénitentiaires européens : britannique, néerlandais ou nordique.
S’agissant des modalités du contrôle extérieur, notre groupe de travail en a distingué trois fonctions essentielles. La première est le contrôle strictement compris, c’est-à-dire la vérification ou l’inspection des prisons, sur le modèle pratiqué par le Comité de prévention de la torture du Conseil de l’Europe et destiné à s’assurer, par des moyens appropriés et contraignants, que l’administration remplit correctement sa mission à l’égard des détenus et ne pratique à leur égard aucun traitement contraire à la dignité. Cette fonction serait assurée par un service de "contrôle général". La deuxième est l’apaisement par la médiation, c’est-à-dire le traitement des requêtes individuelles des détenus contre l’administration et le règlement des litiges de la vie pénitentiaire. Il faut, pour décrisper la vie en prison, qu’existe un médiateur pénitentiaire pour traiter des conflits entre le détenu et l’administration et éviter les réactions de soumission ou de révolte. La troisième est une fonction d’observation : dans tous les grands systèmes pénitentiaires, il existe un regard extérieur sur la prison assuré par des personnes, mues par un esprit civique particulier, qui acceptent de participer à la vie pénitentiaire, de rencontrer des détenus en détention pour être, à l’extérieur, les garants du traitement digne et correct de ces détenus.
Pour qu’un tel contrôle extérieur soit effectif, il doit être exercé, dans toutes ses modalités, par des organes indépendants de l’administration, dotés de moyens et pouvoirs suffisants.
Il convient, en outre, de mettre en cohérence l’ensemble des ces contrôles administratifs ou judiciaires existants, cohérence que nous proposons d’assurer de deux manières : au niveau national, en donnant au contrôleur général la mission de rassembler tous les contrôles techniques et de les évaluer afin de pousser les administrations à mieux exercer les missions spécifiques dont elles sont chargées en prison, au niveau local, en confrontant annuellement, au sein d’une commission d’établissement, le rapport d’activité du chef d’établissement avec tous les contrôles techniques réalisés localement, c’est-à-dire dresser un bilan et tirer les conséquences de l’action en prison de toutes les administrations extérieures : santé, éducation, travail, hygiène, etc.
M. le Président : Merci, monsieur le premier président, pour cette intervention qui, tout comme votre rapport, est tout à fait remarquable.
Il s’est trouvé que Mme Guigou a demandé un rapport au groupe de travail que vous présidiez, il y a de cela huit mois. Vous l’avez remis, il y a quelques jours. Il est vrai que de nombreuses initiatives convergent et c’est une bonne chose. Je crois toutefois que c’est la première fois que vous vous exprimez directement sur ce rapport et votre intervention n’en est que plus intéressante. L’amélioration du fonctionnement des prisons est nécessaire, tant pour les détenus que pour les surveillants. L’état d’esprit des travaux de notre commission ne consiste pas du tout à prendre parti pour les uns ou les autres. Au contraire, si nous sommes capables d’améliorer à la fois le droit et la réalité, ce sera positif pour les détenus, pour les surveillants et l’administration pénitentiaire. Cela étant dit, j’ai deux questions à vous poser.
Il existe une commission de déontologie de la sécurité dont la compétence a été étendue aux établissements pénitentiaires. C’est évidemment un dispositif beaucoup plus réduit dans son ambition que vos propositions. Est-ce un bon système ou votre proposition doit-elle venir s’y substituer ? Comment prévoir l’articulation des dispositifs ?
Dans votre étude, vous citez des expériences étrangères. Tel ou tel exemple vous paraît-il particulièrement digne d’intérêt et pouvant être appliqué en France ?
M. Guy CANIVET : Je ne sais si la création de ce groupe de travail sur les prisons était une proposition de substitution à l’extension de la compétence du Conseil supérieur de la déontologie de la sécurité à l’administration pénitentiaire. En tout cas, il est assez vite apparu que les deux voies étaient indépendantes. Nos propositions visent à créer un contrôle extérieur non seulement déontologique mais général sur les prisons. Certes, il nous était, en outre, demandé de déterminer les conditions dans lesquelles pourraient s’appliquer les dispositions d’un code de déontologie des personnels pénitentiaires en cours d’élaboration. Nous n’avons pas estimé nécessaire de créer un organe spécifique à l’administration pénitentiaire pour appliquer ces règles. Notre constat est simple : ou les violations des dispositions du code de déontologie sont des infractions pénales, auquel cas elles sont traitées par les parquets, ou elles sont des manquements disciplinaires, auquel cas elles sont à dénoncer à l’autorité administrative pour être traitées comme tels.
Les propositions que nous avons formulées ne sont donc ni antagonistes ni destinées à se substituer à la compétence du Conseil supérieur de la déontologie de la sécurité sur les personnels de l’administration pénitentiaire. Dans l’ensemble, ces personnels souhaitent relever de ce Conseil dans un esprit de normalisation de leur mission, afin d’être traités comme des forces de sécurité. Je ne sais pas - et il ne m’appartient pas de le dire - si la nature des missions exercées par ces personnels relève de la sécurité publique. Mais, si tel est le cas, il n’y a pas d’obstacle à les faire entrer dans le champ de compétence du Conseil. Nos propositions ne sont pas alternatives, elles sont au contraire complémentaires.
J’en viens à votre deuxième question. Du point du vue du contrôle extérieur, l’exemple des systèmes pénitentiaires étrangers est assez intéressant, notamment celui de tous les pays nordiques. On peut classer le dispositif néerlandais dans cette catégorie. Le système britannique est aussi une référence intéressante. Nos visites des prisons néerlandaises ont révélé, comme cela apparaît dans les études sur les systèmes pénitentiaires des pays nordiques, la recherche d’une vie pénitentiaire sans tensions, décrispée. Il existe effectivement dans ces établissements une sérénité, des rapports apaisés que l’on ne retrouve pas dans les établissements pénitentiaires en France, d’abord pour des raisons évidentes d’équipement. Aux Pays-Bas, on applique une doctrine simple : un détenu par cellule, ce qui a provoqué une évolution considérable pour mettre la capacité pénitentiaire en conformité avec cette exigence. Désormais, cette règle ne soulève aucune difficulté d’application puisque le parc pénitentiaire est suffisant et permet une souplesse de gestion. Le fait de visiter une prison où chaque détenu dispose d’un espace d’intimité personnelle avec une cellule équipée d’un sanitaire complet, contribue à apaiser considérablement la vie pénitentiaire. Ainsi est évitée la promiscuité qui pourrit les prisons françaises et introduit des rapports de conflits, de domination, d’abus et de violence.
La décision d’introduire en France cette règle d’un détenu par cellule équipée d’un sanitaire complet contribuera, me semble-t-il, à transformer en profondeur la vie pénitentiaire, d’autant plus que cette situation nouvelle obligera l’administration à recréer, pendant toute la journée, une vie collective pour occuper des détenus, par le travail, la culture, le sport, dans des espaces collectifs prévus à cette fin, ce qui n’est actuellement pas le cas.
La seconde constatation assez forte réside dans le fait que dans les prisons néerlandaises, chacun est à sa place. Les surveillant autant que les détenus connaissent précisément leurs droits et leurs obligations. Le surveillant connaît le champ de son autorité, le détenu celui de sa liberté. C’est là un élément fondamental lié à une réglementation pénitentiaire très pragmatique et des mécanismes d’interprétation par une autorité extérieure dont l’autorité est incontestée.
Le règlement intérieur de la prison est un guide très concret des comportements. En cas de difficultés, les détenus comme l’administration peuvent saisir une "commission des plaintes", constituée de citoyens chargés de régler les différends mineurs entre l’administration et les détenus. Les décisions de cette commission peuvent faire l’objet de recours devant une instance nationale. En définitive, ce dispositif évite les situations d’affrontement en rendant plus faciles la fonction des uns et le comportement des autres.
M. le président : Vous préconisez la rédaction d’un droit pénitentiaire, sous la forme d’une loi qui se déclinerait par des décrets. Sans faire de juridisme, dans votre esprit, revient-il au parlement d’édicter ces règles d’une façon générale ou précise ou celles-ci peuvent-elles être arrêtées d’une autre façon ?
M. Guy CANIVET : Indépendamment de la question constitutionnelle de répartition entre le domaine de la loi et du règlement, il a semblé à la Commission que l’autorité d’une administration qui détient des citoyens est plus solide et légitime si les principes et les conditions générales de l’incarcération sont fondés sur la loi. Il nous a, en effet, semblé essentiel que, dans ses grandes lignes, le régime de la détention ne repose pas seulement sur le règlement. Les restrictions aux libertés qui ne sont pas la conséquence directe de l’emprisonnement doivent procéder d’une norme supérieure. À l’intérieur même de la prison, il reste au détenu des espaces de liberté : correspondance, accès à l’information, pratique religieuse, droit d’association, droit à l’enseignement. C’est à la loi d’apprécier les restrictions nécessaires à ces libertés. En outre, il serait salutaire d’ouvrir un débat démocratique sur les prisons afin que la représentation nationale détermine les conditions de la privation de liberté, les moyens en équipement et en personnels dont disposent les prisons, que la représentation nationale dise aussi, entre sécurité, prévention et réinsertion, quelles sont les missions prioritaires de l’administration pénitentiaire et quel est le statut du détenu.
M. le Rapporteur : J’ai lu avec attention votre rapport tel qu’il nous a été remis, il y a quelques jours.
Vous avez déclaré ne pas être un expert et que l’intérêt de la société, et donc des magistrats pour la prison était épisodique. Or, nous sommes deux corps responsables de la prison : nous, législateur, et vous, magistrats. En tant que législateur, nous devrons vraisemblablement - selon les propos de notre président, que vous avez appuyés fermement - mettre en place une loi qui organise la vie en prison et l’enfermement. Mais il m’a semblé - et je vous prie de m’excuser pour ce terme un peu fort - que vous " dédouaniez " les magistrats de leur rôle dans cette affaire. Vous précisez qu’il existe de nombreux contrôles au sein de l’administration pénitentiaire, mais que chacun reste à sa place : les juges d’instruction qui envoient en détention des prévenus, les juges de l’application des peines, dont il faudra très vraisemblablement revoir les missions pour leur donner un vrai rôle de magistrat avec des décisions judiciarisées, et les procureurs de la République qui doivent normalement assurer les visites régulières des établissements pénitentiaires.
Vous soulignez dans votre rapport que ces visites sont aléatoires ; certains les effectuent, d’autres non. Vous soulignez également l’exemple néerlandais marqué par un numerus clausus dans les établissements pénitentiaires. Nous avons commencé à travailler sur le numerus clausus en France, au moins pour les prévenus. Il nous a fallu cinq ans pour aboutir à une proposition qui apparaîtra dans le texte sur la présomption d’innocence et l’administration pénitentiaire a demandé entre trois à cinq ans pour l’appliquer. Les magistrats que nous avons rencontrés et certaines personnes de l’administration pénitentiaire entendues lors du débat sur la présomption d’innocence déclarent " rendez-vous compte ! Il va falloir gérer les entrées et les sorties ". La réticence est très forte de la part des magistrats et singulièrement des magistrats instructeurs. Ils estiment qu’il leur appartient de décider de la détention provisoire et que c’est à l’administration pénitentiaire de s’organiser pour l’accueil des prévenus. Avez-vous le sentiment qu’un tel état d’esprit peut changer ?
M. Guy CANIVET : Je n’ai vraiment pas voulu dire que l’intérêt des magistrats pour la prison était épisodique. Le rapport indique que les visites et contrôles effectués par certaines catégories de magistrats restent insuffisants, notamment dans les grands centres.
J’ai l’expérience des fonctions de juge d’instruction dans une petite ville de province, où la prison était située à proximité du palais de justice. Je m’y rendais naturellement une fois par mois pour visiter les détenus que j’avais placés en prison. C’était une démarche nécessaire et facile. Il est clair qu’un juge d’instruction parisien qui souhaiterait procéder à l’identique devrait, une fois par mois, se rendre à la Santé, Fresnes et Fleury-Mérogis, ce qui est impossible.
Le juge de l’application des peines aurait pu se trouver, selon les souhaits de l’époque, investi d’une fonction générale de contrôle de l’administration pénitentiaire. Or, on n’a jamais clairement pris parti et assigné au juge de l’application des peines une mission de contrôle général de la vie pénitentiaire. On ne l’a jamais dit et on ne lui a jamais donné les moyens de le faire. Ces juges s’intéressent à la prison, où ils se rendent pour présider les commissions d’application des peines et où ils sont investis d’une mission d’individualisation de la peine mais les pouvoirs qui leur ont été attribués aux termes de l’article D 176 du Code de procédure pénale : vérifier les conditions dans lesquelles les condamnés exécutent leur peine, ne leur permettent pas d’exercer un vrai contrôle sur le fonctionnement de la prison.
S’il est vrai que les magistrats n’ont pas manifesté un intérêt suffisant pour les conditions de détention ou le fonctionnement des prisons - je ne dirai pas le contraire et ne cherche pas à les défendre au nom d’un corporatisme excessif - je souligne qu’il n’y a pas de position claire sur leur mission ni de pouvoirs suffisants pour l’exercice d’un contrôle effectif... On n’a jamais dit à une catégorie de juges qu’ils avaient un pouvoir général du contrôle des établissements pénitentiaires.
Le second aspect de votre question est très intéressant, dans la mesure où il s’agit de renverser une logique. Il est exact que la décision d’un juge de placer en prison ne tient aucun compte des capacités d’exécution de sa mesure. On place en détention sans limite de capacité des établissements et l’on demande à l’administration pénitentiaire d’exécuter ! Un directeur de maison d’arrêt vous dira qu’il lui est impossible de refuser une incarcération. Lorsqu’il reçoit une personne placée sous mandat de dépôt, il est obligé de l’écrouer. S’il n’y pas de problème pour les établissements pour peines - dans la mesure où les flux sont gérés par transferts d’autres établissements - les vraies difficultés se situent dans les maisons d’arrêt où les flux sont impossibles à maîtriser. Le principal problème de l’administration pénitentiaire porte en effet sur les maisons d’arrêt, précisément parce qu’elle ne maîtrise pas les entrées et les sorties, qu’il en résulte une surpopulation entre des détenus que l’on ne connaît pas et à l’égard desquels, pour cette raison, on applique des dispositions de sécurité maximales.
Peut-on introduire une nouvelle logique ? Il faudrait confronter localement les impératifs de gestion de l’administration pénitentiaire, les considérations d’ordre public, le niveau de la délinquance, la ressources en matière de peine de substitution et déterminer, en considération de l’ensemble de ces facteurs, les conditions pertinentes de la décision d’emprisonnement. C’est une approche qui n’existe pas mais qui mériterait d’être tentée.
Une méthode approchante existe dans les contrats locaux de sécurité où l’on confronte l’opinion du parquet et des autorités locales sur la possibilité, à moyens constants, d’intervenir pour traiter telle catégorie de délinquance. Il faudrait étendre cette démarche en considération des ressources pénitentiaires.
M. Robert PANDRAUD : Monsieur le premier président, compte tenu du manque de temps, je n’ai pas lu avec toute l’attention nécessaire votre rapport, mais je me joins au Président pour vous complimenter pour cette synthèse. Cependant, un seul petit regret tout à fait égoïste : vous avez un peu défloré les travaux de notre commission d’enquête et je ne souhaite pas que cette commission se transforme en une analyse critique de votre rapport. Il faut se résigner à ce que les instructions de l’exécutif soient plus rapides que les voies de la procédure parlementaire.
Dans votre rapport, vous vous interrogez pendant quelques pages sur le personnel de l’administration pénitentiaire. Vous lui avez rendu hommage, mais subsiste un problème : les agents de l’administration pénitentiaire sont quasiment condamnés à la prison à perpétuité ! Vous entrez dans l’administration pénitentiaire, vous y terminerez votre carrière. N’y aurait-il pas un moyen de décloisonner cette administration par des formations communes, par exemple, à toutes les fonctions de sécurité ? Ne pourrait-on prévoir, après un certain nombre d’années de carrière, des passerelles entre différents corps ? Ne peut-on concevoir, comme à l’armée, des possibilités de carrière plus courtes ? Passer trente-sept ans et demi dans un établissement pénitentiaire, quelle que soit la place occupée, ne va pas sans conséquences.
Je vous pose la question, car tout reposera en définitive sur le comportement du personnel de l’administration pénitentiaire. Le législateur ou l’autorité réglementaire pourra prendre telle ou telle directive, mais toute réforme dépend de ce qui se passe à la base. Il en va de même pour le contrôle des magistrats. C’est un peu en fonction des conjonctures locales que les réformes se font dans de bonnes ou mauvaises conditions et l’on ne peut jamais systématiser.
Deuxièmement, je pense que la nomination d’une autorité indépendante participe d’une école d’irresponsabilité. Qu’elle soit indépendante de l’exécutif, je veux bien, qu’elle soit indépendante du parlement me paraît déjà bien plus douteux, car le contrôleur devra établir un rapport annuel et demandera des crédits, nous plaçant ainsi dans une situation tout à fait inconfortable. Ce contrôleur et ses assistants feront appliquer le droit dans l’établissement, mais que diront-ils en cas d’évasion ? Il arrive que des détenus s’évadent et, en ce cas, le garde des sceaux est interpellé.
Troisièmement, il existe des rébellions ou des mouvements divers en prison, venant aussi bien des personnels que des détenus. Qui sera responsable du rétablissement de l’ordre ? ÊEtre responsable de l’ordre signifie faire appel aux forces de l’ordre pour rétablir ou maintenir l’ordre. Vous savez comme moi que ce n’est jamais facile et les conditions d’utilisation de la force en droit français sont, en prison, plus répressives qu’elles ne le sont habituellement. Allons jusqu’au bout de la logique et envisageons la décision d’ouverture du feu. Ne pensez-vous pas qu’elle ne peut dépendre que d’une autorité légitime ministérielle sous la responsabilité du parlement ? Un de mes professeurs de droit pénal avançait qu’il ne pouvait imaginer qu’une seule personne indépendante et qu’elle ne pouvait être que le premier président de la cour de cassation, promu aux échelons les plus élevés de la Légion d’honneur, sans charges de famille et totalement asexué ! Ne connaissant pas encore de personne répondant à ce profil, je me méfie beaucoup de l’indépendance ; je préférerais que la fonction soit assurée par une personne dépendant du ministre responsable devant le législateur ou désignée par le parlement.
M. Guy CANIVET : Le premier président décrit par M. Pandraud ne me correspond en aucun point ! Je vous rassure.
Les conditions qui ont présidé à la création de notre groupe de travail par Mme la ministre de la justice étaient antérieures aux événements récents. C’était au mois de juillet dernier et la décision a été prise au sein du Conseil national de l’administration pénitentiaire. Mme la ministre a estimé nécessaire, à un certain moment, d’examiner l’instauration d’un contrôle extérieur renforcé sur les prisons.
Sur le statut des surveillants, j’aurai une grande difficulté à répondre à la question, faute de connaissances suffisantes. Selon ce que je crois savoir, l’administration pénitentiaire aura à affronter, non pas une situation de vieillissement ou de carrières trop longues de ses agents, mais, au contraire, une situation inverse : on va recruter un grand nombre de surveillants au cours des prochaines années et se posera alors le problème de l’expérience et de la formation de ces jeunes agents. Cela crée une vraie difficulté. Dans les établissements que nous avons visités, nous avons bien compris que le bon surveillant était celui qui, doté d’un peu d’ancienneté, était capable, par son assurance et son expérience, d’avoir une autorité personnelle acceptée par les détenus, alors qu’une partie des difficultés rencontrées actuellement résulte de jeunes surveillants ne possédant pas une expérience suffisante pour exercer leurs fonctions avec l’autorité et l’assurance nécessaires.
Ma deuxième remarque vise à souligner que l’administration pénitentiaire a déjà, me semble-t-il, la possibilité de diversifier les fonctions de ses agents, entre les postes de pure surveillance et les emplois plus administratifs, dans les greffes par exemple. Il existe, en outre, des possibilités assez larges de promotion interne.
S’agissant des autorités dont nous proposons la création - que ce soit le contrôleur général, le médiateur ou les comités de délégués du médiateur - nous avons veillé à ne leur conférer aucun pouvoir qui se substitue à celui de l’administration. En aucun cas, ces personnes ne pourront se substituer à la direction dans l’administration et la gestion de l’établissement et, par conséquent, ils ne pourront interférer sur la sécurité, a fortiori s’opposer à l’usage de la force nécessaire pour ramener l’ordre dans un établissement en rébellion.
Enfin, ainsi que nous le relevons dans le rapport, le fondement législatif de l’usage des armes à feu en prison serait à revoir.
M. Hervé MORIN : En vingt ans, la durée des peines prononcées a globalement doublé, puisque la durée moyenne de détention, d’un peu plus de deux mois en 1975, est passée à quatre mois et demi en 1995. Comment expliquer cette évolution ? Par des lois plus dures, par les décisions des magistrats ou par une société qui demande des peines plus lourdes ?
Lors de son audition, le bâtonnier Teitgen a regretté que la sanction pénale ait perdu une partie de sa signification, notamment que la peine ait perdu sa vocation pédagogique, compte tenu du rythme considérable de l’activité des tribunaux correctionnels, qui peuvent rendre 30 ou 40 jugements dans la journée. Pour lui, de toute évidence, les condamnés perdent ainsi le sens de leur condamnation.
Enfin, troisième question, quel est votre sentiment sur la réduction du nombre des libérations conditionnelles ? Il existe des raisons économiques que nous connaissons bien. Toutefois, au-delà, peut-on déceler une modification des mentalités des magistrats et de l’administration pénitentiaire, une partie des libérations conditionnelles étant prononcée par le garde des sceaux ?
M. Guy CANIVET : L’allongement des peines résulte, en premier lieu, d’une transformation de la délinquance. Les cours d’assises, par exemple, sont occupées à 80 % par des infractions sexuelles, qui engendrent des condamnations plus longues. Sans doute, le premier facteur tient-il dans une transformation de la criminalité. De la même façon, on note une transformation de la population pénale. La population pénale traditionnelle de délinquants a changé et l’on compte davantage d’inadaptés sociaux aux comportements gravement perturbés qui vont jusqu’aux troubles psychiatriques. Il faudrait examiner l’alourdissement des charges et du climat des prisons en raison des déséquilibres psychiatriques dont sont atteints une grande partie des détenus.
En ce qui concerne la perte de signification de la sanction, le bâtonnier Teitgen se fonde sur ce qui se passe à Paris et dans les grands centres. Dans les villes de province, la justice pénale est moins contrainte par des impératifs de production. Il est exact que les juridictions de Paris, de Bobigny ou de Créteil sont confrontées à des problèmes d’ordre public et de délinquance violente imposant la nécessité de juger vite, dans des audiences surchargées mais ce phénomène ne représente qu’une partie de la justice pénale. Il faudrait aussi examiner le fonctionnement des tribunaux correctionnels en province qui me semble caractérisé par une plus grande sérénité. Le journal Libération paru hier reproduit une délibération des magistrats de Lyon qui refusent précisément de s’engager dans cette logique d’une justice à la chaîne pour les infractions d’importance moyenne. L’autorité judiciaire prend en compte et réagit à la préoccupation de qualité de la justice pénale.
S’agissant de la libération conditionnelle, M. Farge vous répondra, mais les programmes de libération anticipée sont indispensables pour assurer le fonctionnement équilibré d’une prison. Le détenu ne peut être totalement privé d’espoir. La libération conditionnelle est une institution fondée sur le retour à la vie sociale. Peut-être conviendrait-il d’en assouplir les conditions ou d’imaginer d’autres formes de libération anticipée.
Mme Christine BOUTIN : Monsieur le premier président, au début de votre propos, vous avez rappelé la difficulté pour des non-professionnels de bien comprendre le fonctionnement d’une prison lors d’une visite. Or, nous allons tous être amenés à visiter les prisons et nous ne sommes pas professionnels. Je souhaiterais que vous précisiez votre pensée.
M. Guy CANIVET : C’est un peu à cette fin que j’ai risqué cette réflexion. C’est l’une des limites de l’exercice des magistrats qui visitent des établissements. Le grand danger est une visite superficielle qui ne livre qu’une impression. Les experts - par exemple les personnes du Comité de prévention contre la torture - savent très bien où aller, que voir et comment visiter une prison. Avant de se rendre dans un établissement, il faut préparer, avec des professionnels, une grille de vérification, une méthode d’investigation et une technique d’entretien.
Il faut, par exemple, imposer à l’administration de s’entretenir avec les détenus dans des conditions de confidentialité et de confiance, afin que le détenu sache qu’il peut tenir des propos libres, exprimer sa pensée, ses revendications ou éventuellement ses plaintes sans redouter de réactions de l’administration devant laquelle il se retrouvera seul la visite terminée. Enfin, il ne faut pas hésiter à aller au-delà de ce que l’on montre, c’est-à-dire voir dans les cellules de mise à l’isolement, les cellules disciplinaires, à vérifier la situation des personnes qui s’y trouvent, etc.
Deux exemples illustrent la nécessité d’un savoir-faire : il s’est produit, durant plus de deux ans, des faits graves à la prison de Beauvais alors que magistrats, visiteurs de prison, commission de surveillance, ont fréquenté ou visité l’établissement sans rien déceler. Durant longtemps à Fleury-Mérogis, des faits graves de sévices sur des transsexuels se sont perpétués. C’est finalement le Comité de prévention contre la torture qui les a découverts grâce à la technique d’investigation et au professionnalisme de ses membres. L’opacité ne correspond pas à une volonté de dissimulation de l’administration, mais contrairement à une idée reçue, la direction ne sait pas nécessairement tout ce qui se passe dans l’établissement. Pour de multiples raisons, détenus et surveillants peuvent choisir de se taire. La prison n’est pas un lieu où la parole circule librement.
M. le Président : La réponse est utile, car nous avons pris conscience de ces difficultés lorsque nous avons commencé notre travail. Les membres de la commission qui ont ou vont visiter les prisons le font dans l’esprit que vous avez indiqué.
M. François LONCLE : Je voudrais maintenant m’inscrire amicalement en faux contre les propos de notre collègue Pandraud. Non, je ne crois pas que votre travail très complet puisse être un handicap pour notre commission d’enquête, dans la mesure où vous auriez fait une partie du travail qui nous incombe...
M. Robert PANDRAUD : Ce n’était pas une critique
M. François LONCLE : Bien entendu. Les deux démarches sont importantes et complémentaires et s’additionneront dans le bon sens.
Je continue à m’interroger sur la nécessité d’une nouvelle législation pénitentiaire. Outre le fait que beaucoup de temps sera certainement nécessaire avant de résoudre des problèmes concrets qui se posent de manière très urgente, on sait aussi ce que peuvent valoir parfois des lois-cadres, des lois d’orientation, des lois se limitant à l’énoncé de bonnes intentions. Selon moi, l’urgence des problèmes à régler en ce domaine suppose tout autre chose qu’une nouvelle législation pénitentiaire, même si, le moment venu, il faudra essayer de donner un cadre à tout ce que nous aurons à l’esprit à l’issue de nos investigations.
M. Guy CANIVET : Dans le rapport et dans mon propos, la loi pénitentiaire n’est pas un préalable à d’autres mesures. Beaucoup de choses sont à mettre en _uvre sans délai ni condition. Il n’y a pas, à mon sens, à régler le problème de la loi avant d’entreprendre autre chose, comme, par exemple, l’amélioration de l’équipement des prisons.
M. Renaud DONNEDIEU DE VABRES : Une remarque et une question.
Au sujet des visites d’établissements que nous allons effectuer, je crois très important - vous l’avez rappelé, mais j’insiste - de se souvenir que nous n’y allons pas pour désigner à la vindicte publique un certain nombre de responsables. Nous nous y rendons pour examiner quelles nouvelles règles de droit doivent être établies et quels sont les moyens concrets, financiers et humains permettant le respect des règles de droit qui seront fixées. J’ai le sentiment d’une certaine ambiguïté dans la perception de notre travail. Les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire doivent se dire " Que va-t-il nous tomber sur la figure ? " et ressentent une injustice dans notre comportement. Notre comportement sera équilibré.
Dans les établissements pénitentiaires, chacun est privé de liberté, mais selon des situations juridiques extraordinairement différentes et avec des durées de séjour qui posent des problèmes distincts. Jugez-vous opportun une certaine spécialisation des établissements ? Pensez-vous nécessaire l’étanchéité véritable à l’intérieur des grands établissements entre des détenus relevant de régimes différents de détention ?
M. Guy CANIVET : En premier lieu, il faudrait distinguer et traiter à part les détenus atteints de troubles psychiatriques graves. Le nombre croissant de ces détenus est la conséquence d’une politique de santé publique qui impose de ne plus enfermer les personnes atteintes de tels troubles. Celles dont le comportement conduit à la délinquance vont en prison alors que la prison n’est pas adaptée à leur cas. Il faudrait donc transférer les personnes qui relèvent d’un traitement psychiatrique dans des lieux spécialisés et augmenter les capacités de tels établissements en France.
Comme dans la plupart des grands systèmes pénitentiaires, nous devrions traiter de façon distincte les détenus qui relèvent d’un traitement psychiatrique et ceux qui n’en relèvent pas.
La spécialisation pourrait, en second lieu, concerner les détenus âgés ; ceux-ci ne représentent pas des effectifs importants mais provoquent un phénomène de " gériatrie pénitentiaire ", qui pèse sur l’organisation de certains établissements. Il s’agit de personnes du troisième âge, en prison pour de longues périodes. Certaines sont atteintes d’infirmités importantes. Pour elles aussi, il y aurait lieu de prévoir des établissements spécialisés si l’on juge opportun de continuer à détenir des personnes dans une telle situation.
Une troisième catégorie concerne des détenus en fin de peine ou condamnés à de courtes peines ne présentant aucune dangerosité, ni de risque réel d’évasion. Pour eux, la diversification de traitement serait utile. Elle répondrait aux règles d’une bonne gestion, puisque les dépenses de sécurité représentent le poste budgétaire le plus important des établissements pénitentiaires. Ces personnes pourraient être incarcérées dans des établissements moins sécurisés, donc moins coûteux en construction et en gestion.
Il faudrait, encore, dans tous les cas, placer les mineurs dans des quartiers séparés.
La nécessité de séparer les détenus primaires de ceux qui ne le sont pas, comme les condamnés des détenus provisoires, est depuis longtemps objet de débat. Ces distinctions sont-elles pertinentes ? J’avoue avoir quelques difficultés à répondre ; vous rencontrerez des experts plus qualifiés sur ce sujet.
M. Louis MERMAZ : Monsieur, votre personnalité, votre autorité morale, votre fonction donnent une importance capitale à vos propos qui n’en sont que plus terrifiants. Quand on voit ce qu’est le système pénitentiaire, on imagine que les magistrats doivent faire des cauchemars la nuit quand ils ont envoyé des prévenus ayant commis des délits ou des crimes dans de telles conditions de détention.
Je me souviens, il y a quelques années, d’un jeune magistrat qui avait fait sensation puisque, ayant eu connaissance des conditions de détention au dépôt du Palais à Paris, il avait élargi des prévenus. En revanche, l’administration ne l’avait pas autorisé à visiter le dépôt. Depuis ce scandale, quelques mesures d’hygiène ont été prises en ce lieu.
Indépendamment du juge de l’application des peines et du procureur, les magistrats dans leur ensemble, dont vous avez dit qu’il leur était plus facile en province de suivre les condamnés, ont-ils encore une possibilité et une volonté de suivre le détenu jusqu’à son lieu de détention ? Une prise de conscience est-elle à l’_uvre dans la magistrature ?
Les responsabilités restent bien entendu partagées, dans la mesure où les magistrats appliquent les lois que nous votons. Si nos lois sont trop sévères et ne reflètent pas l’évolution de la société, le gouvernement et le législateur doivent commencer par s’en prendre à eux-mêmes.
Constate-t-on une prise de conscience dans la magistrature de la nécessité d’aller de plus en plus vers des alternatives à l’enfermement ? Vous avez vous-même posé la question : la prison pour quoi faire ? Pour des gens qui ne seraient pas dangereux pour la société, qui ne sont pas des criminels, auquel cas leur libre circulation poserait des problèmes évidents, les alternatives peuvent se développer. Quel est l’état d’esprit de la magistrature sur cette évolution des sensibilités ?
M. Guy CANIVET : Les juges d’instruction sont tous confrontés, je le crois, au problème moral que posent les décisions d’incarcération. Aucun juge d’instruction, quel qu’il soit, ne place en détention de gaieté de c_ur et surtout, aucun d’eux ne se désintéresse du sort des détenus dans les établissements où ils se trouvent.
La lecture de la correspondance entre la prison et les juges d’instruction révèle que ces juges portent davantage d’attention qu’on ne le dit aux traitements médicaux et aux conditions de vie des détenus. Je ne crois pas que l’on puisse dire qu’ils s’en désintéressent. L’enseignement de ces fonctions par l’école nationale de la magistrature prend largement en compte l’apprentissage de la décision d’incarcérer. Personne ne place en détention, surtout un prévenu primaire, sans se poser de questions et sans prendre un minimum de précautions élémentaires. C’est un problème de conscience personnelle. Je puis vous dire que j’ai vécu avec beaucoup de difficultés morales les fonctions de juge d’instruction que j’ai exercées pendant presque quatre ans. A l’époque, le cabinet dont j’avais la charge comptait en moyenne 70 détenus et j’étais en permanence préoccupé de la situation de ces personnes qui, par ma décision, se trouvaient en maison d’arrêt. Je ne pense pas être une exception à cet égard.
Il faut travailler inlassablement avec les magistrats pour passer de la culture de l’emprisonnement à celle des moyens alternatifs. Notre culture de juge s’est forgée à l’expérience d’une époque où tous les problèmes d’ordre public et de délinquance se résolvaient par l’emprisonnement. Depuis une vingtaine d’années, nous avons réalisé beaucoup de progrès avec l’instauration du contrôle judiciaire, des peines de travail d’intérêt général et d’autres formes de substituts à l’emprisonnement. Nous devons poursuivre cette évolution. Le comportement des magistrats n’est jamais que le reflet de l’opinion publique face à la prison. Il convient de leur faire parcourir un chemin juridique, moral, conceptuel et philosophique avec les moyens dont nous disposons : formation, réflexion collective, évaluation objective des résultats, etc.
Enfin, c’est à partir du moment où les substituts à l’emprisonnement seront crédibles tant pour le juge que pour l’opinion publique que les magistrats y auront recours. Tout un courant de doctrine vient rappeler que, pour une catégorie de délinquants, la prison est la seule solution, non pour des raisons de sécurité, mais pour des raisons pédagogiques. À un certain moment, face à un comportement de délinquant, il faut opposer la contrainte. Telle est, dit-on, la vertu pédagogique de la prison. A la violation de la loi répond la privation de liberté. Pour être précis et synthétique, je crois nécessaire une réflexion des magistrats et de l’opinion sur la prison. La loi sur la présomption d’innocence y incitera, notamment en distinguant la fonction d’instruction de la décision de détention. Une loi pénitentiaire permettrait davantage encore un débat d’opinion sur cette question.
Mme Nicole BRICQ : J’ai été très intéressée par la partie diagnostic et observation du rapport qui décrit longuement l’exemple canadien.
Ma première question porte sur l’intervention du citoyen. Le système carcéral, tel que nous le découvrons petit à petit, existe dans la mesure où la société l’accepte. Ce n’est pas uniquement une question d’intervention législative. L’exemple canadien présente le système des comités consultatifs de citoyens qui est rattaché aux services correctionnels. Curieusement, vos préconisations ne retiennent nullement cette piste, puisque vous y substituez un nouveau corps de fonctionnaires, directement rattachés au ministre de la Justice, nommés par lui et dont le déroulement de carrière est déjà prévu. Les médiateurs de prison composent donc un nouveau corps, dont on voit bien qu’il ne puisse être issu que de l’administration de la justice. Pourquoi ne pas avoir retenu cette piste au moins comme piste de travail, pour faire porter plus loin le regard du citoyen, qui me semble essentiel dans cette affaire ?
Ma seconde question porte sur une autre idée, à peine évoquée, puis oubliée. Vous avancez l’idée que la création d’un contrôle extérieur appelle une plus grande autonomie laissée aux chefs d’établissement et, là, vous proposez une idée sacrilège : la transformation des établissements pénitentiaires en établissements publics administratifs. Sitôt après, vous refermez cette voie, en précisant que telle ne serait pas votre mission. Je pense que l’idée mérite d’être développée. Plus on contrôle, plus on doit donner une autonomie parallèle. Pourquoi avez-vous si vite refermé cette porte ?
M. Guy CANIVET : L’idée d’un regard citoyen sur la prison est une idée forte et s’il vous est apparu que nous ne l’avions pas suffisamment exprimée dans le rapport, je le regrette.
Nous avons proposé des comités de délégués du médiateur qui seraient composés de citoyens qui participeraient bénévolement à la vie pénitentiaire. Je crois cette idée très féconde. Il faut que les citoyens fréquentent la prison pour voir ce qui s’y passe et soient les garants de sa transparence. C’est à partir de ce regard extérieur, de cette présence neutre, qu’un meilleur climat sera possible dans les prisons. Voilà pourquoi nous avons proposé ces comités de délégués du médiateur, citoyens présents en permanence pour être les interlocuteurs des détenus et qui joueront, éventuellement, le rôle d’intermédiaire entre ceux-ci et l’administration pour régler des conflits mineurs. Nous avons découvert cette idée en étudiant les systèmes étrangers, canadien, britannique, néerlandais et essayé de la prendre en compte.
Votre deuxième question évoque un débat intense au sein du groupe de travail. La possibilité de transformer les établissements pénitentiaires en établissements publics est déjà prévue par la loi. Il appartient au ministre de la justice d’étendre, s’il le souhaite, cette possibilité.
Il est vrai qu’il nous est apparu qu’un contrôle fort sur les prisons devait s’accompagner d’une responsabilité et d’une autonomie accrues des chefs d’établissements, ne serait-ce que pour mobiliser les personnels sur des objectifs, engager un dialogue social et une politique de gestion des ressources humaines au niveau même de la prison, enfin, avoir les moyens de procéder aux aménagements nécessaires dans les établissements. Mais cette question divise fortement les organisations représentatives des personnels pénitentiaires. Dans les annexes du rapport, figure une lettre de démission du représentant de la CGT, précisément parce que nous avons examiné la transformation des prisons en établissements publics.
Nous n’avons pas poussé plus loin la réflexion, faute d’accord entre les membres de la commission, ce que j’ai personnellement regretté.
M. Bruno LE ROUX : Je m’associe bien volontiers au concert de satisfaction et de louanges qui ont suivi la publication de votre rapport.
J’ai été rendu hier destinataire - sans doute en qualité de rapporteur du texte sur la commission de déontologie de la sécurité - d’un document d’un syndicat pénitentiaire clouant au pilori vos propositions en matière de contrôle et ramenant tout ce qui pouvait être fait de positif à la commission nationale de déontologie de sécurité.
Je partage votre avis sur la totale complémentarité de ces deux structures ; d’où ma première question. Vous avez noté que les syndicats étaient très majoritairement favorables à la commission nationale de déontologie de sécurité. Avez-vous perçu une évolution dans le travail que vous avez mené avec eux sur le contrôle et sur vos propositions ? Y a-t-il aujourd’hui des propositions moins majoritairement acquises ou des débats forts qui traversent les organisations ?
Robert Pandraud déclarait que vous aviez fait de la sous-traitance pour notre commission d’enquête. Nous avons d’autres sous-traitants, par exemple le rapport de 1989 de Gilbert Bonnemaison, que vous citez d’ailleurs et qui présentait cent propositions. C’est un rapport rédigé après les événements de l’automne 1988. Avez-vous procédé à une analyse de ces rapports précédents et des raisons pour lesquelles ils n’ont donné que peu de résultats ? Le contexte d’aujourd’hui peut-il nous laisser percevoir une mise en _uvre plus large des propositions formulées ?
M. Guy CANIVET : Lors de la création du groupe de travail, la démarche de Mme la ministre de la justice a consisté à associer à la réflexion les représentants de toutes les organisations professionnelles pénitentiaires. Je me suis donc senti l’obligation de conduire ce groupe dans sa composition initiale jusqu’au terme des propositions et j’ai beaucoup regretté de n’y être pas totalement parvenu, et ce, à mon avis, pour deux raisons. La méthode de travail collective que j’avais imaginée - beaucoup d’auditions, beaucoup de visites d’établissements, un voyage à l’étranger - supposait que chacun progresse au même rythme pour aboutir à des positions communes. Or, rapidement, certaines organisations syndicales ont pratiqué l’alternance, n’envoyant jamais la même personne aux séances, empêchant ainsi toute continuité dans la réflexion. Une autre organisation a été peu présente. L’une d’entre elles, en janvier, a fait connaître qu’elle n’estimait pas pouvoir continuer de participer aux travaux de la commission à la suite à la publication du livre du docteur Vasseur et à l’absence de réaction, selon elle satisfaisante, du ministre de la justice. Elle a, par ailleurs, exprimé sa désapprobation sur les mécanismes de médiation entre le détenu et l’administration pénitentiaire que nous avons proposés.
Une autre organisation syndicale a manifesté son opposition à l’évocation même de l’idée d’établissement public et, pour cette raison, n’a pas souhaité figurer dans la liste des membres de la commission ayant remis le rapport, tout en précisant qu’elle en partageait les conclusions. Enfin, une autre organisation qui a participé aux travaux jusqu’au bout et qui, lors de notre dernière délibération, a approuvé les propositions du rapport, a finalement fait savoir qu’elle s’en détachait pour des raisons de sécurité.
La démarche suivie visait cependant à faire émerger une position de l’ensemble du groupe, y compris les organisations professionnelles. Pour des raisons qui peuvent se comprendre, ce projet n’a pu aboutir. Il est donc nécessaire, si on veut poursuivre, d’engager un travail d’explication et de débat qui devrait permettre à l’administration pénitentiaire de progresser dans le dialogue social.
Nous avons pris en compte l’ensemble des travaux antérieurs : tous les rapports déposés comme toute la doctrine que nous avons pu trouver. L’une des richesses de ce travail est d’avoir tout exploré avant de proposer des solutions. Les raisons pour lesquelles les rapports précédents n’ont pas été suivis d’effets tiennent, me semble-t-il, à l’intérêt épisodique de l’opinion publique et, peut-être, de la représentation nationale pour les prisons. A des paroxysmes d’intérêt succèdent de longues périodes d’indifférence. Pour cette raison, je suis convaincu que le mérite d’un contrôle général indépendant sera d’instaurer une vigilance permanente et de permettre une continuité dans le suivi d’un programme pénitentiaire. Une action continue suppose la définition d’un programme et l’instauration de mécanismes veillant à sa réalisation.
M. Robert PANDRAUD : Pour assurer une meilleure concertation avec les organisations professionnelles, il conviendrait de retarder les calendriers des élections aux commissions paritaires qui constituent le plus sûr moyen de développer des propositions démagogiques.
D’élections politiques en élections professionnelles, il est très difficile de prendre des responsabilités en la matière. Dans l’année qui précède les élections aux comités paritaires, il faut attendre et voir venir !
M. Guy CANIVET : Les élections professionnelles ont eu lieu pendant les travaux de la commission.
M. le Président : Merci de votre venue et de vos réponses précises.
Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr
Restez en contact
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Subscribe to weekly newsletter