Le gouvernement Bush est composé de personnalités issues du monde économique, et singulièrement des multinationales du pétrole. Dick Cheney, l’homme qui planifia la guerre du Golfe et dirigea le premier équipementier pétrolier mondial, préside à la Maison-Blanche un groupe de travail qui a fait de l’approvisionnement énergétique la priorité absolue de la politique extérieure des USA. Qualifié de "société secrète" par le Washington Post, ce groupe a hissé la construction d’un gazoduc reliant le Turkménistan à l’océan Indien au rang d’objectif stratégique justifiant le renversement du régime taliban.
Dès les premiers jours de son arrivée à la Maison-Blanche, George W. Bush a lancé des programmes et procédé à des nominations pour marquer une rupture avec la parenthèse Clinton et une continuité avec son père et prédécesseur, George Bush. En matière de politique intérieure, Petit Bush [1] a lancé son " initiative basée sur la foi " [2]. Pour la politique étrangère, le vice-président, Richard Cheney a mis en place le Groupe de développement de la politique énergétique nationale (NEPD). Sa création a été annoncée le 29 janvier 2001, soit une semaine après l’investiture du nouveau président. En mai, il a rendu un rapport intitulé Une énergie fiable, peu coûteuse et respectueuse de l’environnement pour l’Amérique du futur [3]. Mais les activités exactes de ce groupe restent mystérieuses. Ses réunions sont ultra-sécurisées et aucune minute des débats n’est fixée par écrit, de sorte que le Washington Post a pu le décrire comme " une sorte de société secrète " [4].
D’une manière générale, le gouvernement Bush est l’émanation d’un groupe de multinationales, dont chaque ministre important est issu. Plus précisément, ce gouvernement reflète prioritairement les intérêts particuliers du lobby pétrolier. Le président Bush lui-même a fait fortune en obtenant l’exclusivité de l’exploitation du pétrole du Bahrein pour la compagnie Harken Energy Corporation qu’il dirigeait, et dont Khaled Ben Mahfouz et Salem Ben Laden étaient les principaux actionnaires [5]. Robert Cheney est l’ancien patron d’Halliburton [6], le principal équipementier pétrolier au monde. Condoleezza Rice [7], la conseillère nationale de sécurité, est une ex responsable de Chevron-Texaco [8]. Gale Norton [9], la secrétaire à l’Intérieur, représente les intérêts du pétrolier BP-Amoco [10]. Etc.
La principale recommandation du NEPD est de faire de la sécurité de l’approvisionnement en énergie la priorité absolue de la politique étrangère et commerciale américaine. Il n’est donc plus possible aujourd’hui d’analyser la politique extérieure des États-Unis sans l’interpréter en fonction de cet impératif.
Or, le nouvel Eldorado de l’or noir, ce sont les gisements de la mer Caspienne. Pour les exploiter en contournant à la fois l’Iran et la Russie, l’administration Bush a décidé prioritairement de conduire à son terme la construction du pipe-line BTC (Bakou-Tbilissi-Ceyhan), qui relie la Caspienne à la Méditerranée, en traversant l’Azerbaïdjan, la Géorgie et la Turquie. En marge de cette stratégie, Chevron-Texaco a achevé le 27 novembre 2001 la construction du pipe-line Tengiz-Novorossisysk, qui permet d’acheminer le pétrole du Kazakhstan vers la mer Noire, malheureusement en traversant la Russie.
L’étape suivante consistera à acheminer le gaz du Turkmenistan vers l’océan Indien en traversant l’Afghanistan et le Pakistan. Il serait fort intéressant de connaître les travaux du NEPD à ce sujet. Mais le vice-président Cheney refuse obstinément de les transmettre au General Accounting Office (GAO), l’organisme qui recherche la documentation et conduit les enquêtes pour le compte du Congrès. Suite aux événements du 11 septembre, le GAO a provisoirement renoncé à se les procurer : toute vérité n’est pas bonne à dire [11].
[1] Les États-Uniens distinguent Little Bush (petit Bush) et Bush the elder (Bush l’aîné). L’usage du qualificatif junior est réservé aux fils portant les mêmes prénoms que leur père, ce qui n’est pas le cas d’espèce.
[2] Cf. Pour George W. Bush, la foi tient lieu de politique, in Note d’information du Réseau Voltaire n° 227-228.
[3] Reliable, Affordable and Environmental Sound Energy for America’s Future, report of the National Energy Policy Development Group http://www.whitehouse.gov/energy/Na... (Pdf : 3000 Ko).
[4] Energy Task Force Works in Secret by Dana Milbank et Eric Pianin, in Washington Post du 16 avril 2001.
[5] Cf. À qui profite le crime ? Les liens financiers occultes des Bush et des Ben Laden, in Note d’information du Réseau Voltaire n° 237.
[6] http://www.halliburton.com Avec 12,5 milliards d’euros de CA, Halliburton est le premier équipementier pétrolier mondial devant Schlumberger (10 milliards d’euros de CA).
[7] Cf. Critics Knock Naming Oil Tanker Condoleezza, by Carla Marinucci, in San Francisco Chronicle du 5 avril 2001.
[8] Mme Rice était administratice et actionnaire de Chevron jusqu’à sa nomination au Conseil national de sécurité. Chevron est la nouvelle dénomination de la firme fondée par John D. Rockefeller, Standard Oil of California dite Esso Standard. Chevron et Texaco ont fusionné, le 9 octobre 2001, http://www.ChevronTexaco.com . Avec 124 milliards d’euros de CA, la nouvelle société est la seconde multinationale US derrière Exxon-Mobil (242 milliards d’euros de CA).
[9] Gale Norton a également représenté les intérêts de Delta Oil lorsque la firme était engagée avec Unocal pour construire un pipe-line à travers l’Afghanistan.
[10] BP (British Petroleum)-Amoco est le troisième groupe pétrolier mondial avec un CA de 157 milliards d’euros http://www.bp.com . BP-Amoco a fusionné certains de ses services en Europe avec Mobil.
[11] Cf. Communiqué du 28 septembre 2001 http://www.gao.gov/press/92801stmt.pdf.
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