La famille royale saoudienne. À droite, Saad Hariri, un prince saoudien en costume de soie.

Le « haririsme » et le complot terroriste

Par Ghaleb Kandil

Les récents développements au Liban montrent, sans l’ombre d’un doute, l’importance du soutien politique, financier et matériel accordé par le Courant du futur aux groupes terroristes et takfiristes constitués d’un mélange libano-syro-palestinien. Ces groupes extrémistes, créés par Saad Hariri, se sont transformés, ces deux dernières années, en supplétifs des forces et des pays qui complotent contre la Syrie, et en abcès menaçant la sécurité et la stabilité du Liban.
Les responsables du Courant du futur mentent effrontément lorsqu’ils expriment leur soutien à l’armée libanaise. Car la campagne de dénigrement contre l’armée est une culture encouragée et alimentée par des figures de ce courant, qui ont répandu la haine et la suspicion contre l’institution militaire, comme par exemple les députés du bloc du futur Khaled Daher, Mouïn Merhebi, Mohammad Kabbara et Nouhad Machnouk. Et après les événements d’Abra, les dirigeants du Courant du futur ont pris la tête de la campagne destinée à saper la confiance dans l’institution militaire afin de l’affaiblir, après sa décision de démanteler les groupes extrémistes qui constituent un danger pour les Libanais et leur stabilité.
Les slogans scandés à Saïda et Tripoli contre le « haririsme » reflètent la déception des groupes extrémistes vis-à-vis de ceux qui les financent et qui les ont abandonnés dès que les rapports de force ont changé en défaveur de l’un de ces principaux groupes, celui d’Ahmad al-Assir. Il est clair que le Courant du futur cherche à renforcer sa présence et son influence dans la rue, sur les cadavres de ceux qu’il a poussé dans les bras des extrémistes. Ces jeunes ont été incités à prendre les armes et à agresser l’armée par les discours et les positions politiques des chefs du Moustaqbal, comme Ahmad Hariri, Achraf Rifi, et les députés précités.
Les derniers événements ont montré que l’institution militaire jouit d’un fort soutien populaire. Les tentatives de mobiliser la rue à Tripoli et au Akkar, après la prière du vendredi, étaient un fiasco. Seuls quelques centaines d’hommes armés ont sillonné les rues, alors que l’écrasante majorité des gens sont restés chez eux.
Le véritable problème du Courant du futur, c’est son manque de crédibilité. Il prétend qu’il rejette la violence, alors qu’il soutient à tous les niveaux les groupes extrémistes et possède ses propres milices, comme les « Brigades de Tripoli », dirigées par l’officier à la retraite Amid Hammoud. Le problème est en train de s’aggraver car des groupes politiques font leur apparition dans les milieux traditionnellement favorables au Moustaqbal, dans une tentative d’en attirer partie. Ces groupes, comme la Jamaa Islamiya et le Parti de la libération islamique, ainsi que d’autres mouvements extrémistes, commencent à parrainer des milices armées.
Il est clair que le « haririsme », à travers son double discours, et son hypocrisie, a sorti de la boite de pandore un monstre qu’il sera difficile de contrôler. Aussi, la bataille contre l’extrémisme sous toutes ses formes passe par la lutte contre le Courant du futur. La période à venir sera propice aux personnalités et aux forces nationalistes arabes qui font face à ce Courant.
Le plan national qui doit être adopté pour protéger le Liban de la fitna et du terrorisme-takfiriste, doit être basé sur le renforcement des mouvements nationalistes arabes et résistants sur la scène sunnite. Ils doivent être soutenus politiquement, médiatiquement et populairement. De même, il faut soutenir l’institution militaire et l’appuyer afin qu’elle nettoie le Liban des groupuscules terroristes créés par le « haririsme » pour affronter la Résistance. Surtout que la plupart de gangs extrémistes sont liés aux qaïdistes du Front al-Nosra et à ladite « Armée syrienne libre », désormais présents au Nord, dans la Békaa et dans certains camps palestiniens et quartiers de Beyrouth et de Saïda.

La vraie révolution contre les Frères musulmans

Des millions d’Égyptiens sont descendus dans les rues du Caire et des autres grandes villes du pays, dimanche, pour réclamer la démission de Mohammad Morsi et la fin du régime des Frères musulmans. Cette mobilisation sans précédent, même lors de la révolution contre Honsi Moubarak, en janvier-février 2011, intervient un an, jour pour jour, après l’entrée en fonction de Morsi. Dans son premier communiqué, la coalition de l’opposition a estimé que le régime était pratiquement tombé et a appelé le peuple à rester dans les rues.
La place Tahrir était donc de nouveau noire de monde. Les rues du Caire sont aux mains des manifestants. Des dizaines de cortèges ont rejoint l’emblématique place Tahrir depuis différents quartiers de la capitale. En fin d’après-midi, ils se sont dirigés vers le palais présidentiel. Dans ces cortèges, toujours le même slogan : « Dégage ! », « Le Peuple veut la chute du régime ». On voit toujours beaucoup de drapeaux égyptiens et les portraits du président Jamal Abdel Nasser. Même spectacle à Alexandrie.
Les opposants réclament le départ de Morsi. Les partisans du président se trouvent, eux, non loin du palais, devant la mosquée Rabia al-Adawiyya, placée sous haute sécurité. Ce dimanche, des blocs de béton ont été installés devant chaque entrée de ce bâtiment.
Les contestataires, issus de toutes les couches de la population, s’élèvent contre un pouvoir qui veut imposer par la force son idéologie islamique, mais aussi contre la crise économique. Les réserves de devises s’écroulent, le prix des denrées alimentaires a augmenté de 10 % en un an, le pays subit des coupures d’électricité régulières et un prêt de 4,8 milliards de dollars du FMI n’est toujours pas parvenu à l’Égypte. Selon Al-Ahram, « À ce jour, il n’y a pas eu la moindre réalisation des revendications de la révolution. Aucun de ces dossiers n’a été réellement traité par la présidence ».
Par ailleurs, les révolutionnaires de 2011 ont perdu le peu de liberté d’expression qu’ils avaient acquise. De très nombreuses procédures judiciaires ont été engagées contre des journalistes et contre les médias.
En fait, les Frères musulmans ont fait illusion en parvenant au pouvoir. Ils avaient une expérience d’aide sociale aux populations défavorisées, mais en aucun cas une expérience de gestion politique et économique d’un État. Selon l’expert des médias Yasser Abdel Azizi, cité par le site Slate.fr, « Les Frères ne comprennent pas ce que pluralisme politique signifie, que ce soit sur le plan intérieur ou extérieur du pays. Les Frères croient qu’ils vont résoudre les problèmes qui émergent de leur mauvaise gestion des affaires non pas en modifiant leur politique, mais en faisant taire l’opposition ».
Jusque-là insidieuse, la mainmise générale des Frères musulmans sur tous les aspects de la vie s’affirme ouvertement à présent au sein du gouvernement. Le ministre égyptien de la Culture, Alaa Abdel Aziz, s’est donné pour tâche de « purifier » les courants culturels et intellectuels du pays pour « éliminer les mécréants et pour redonner à son peuple son identité perdue ».
L’introduction de la nouvelle pensée islamiste passe par l’exclusion puisque le ministre a écarté ceux qui ne sont pas dans le droit fil culturel des Frères musulmans. Les mesures décidées par le ministre touchent tous les secteurs : ont été limogés Inas Abdel-Dayem, directrice de l’Opéra, Ahmed Megahed, directeur de l’Organisation du Livre, et Salah Al-Meligui, directeur du département des Arts plastiques.
L’armée a choisi de se cantonner dans une stricte neutralité.

Déclarations et prises de positions

Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères
« Les opposants soutenus par l’Occident et par certains pays de la région ont déclaré qu’ils n’iraient pas à la conférence [de paix pour la Syrie] tant que le régime de Damas n’accepterait pas de capituler et tant que l’opposition ne rétablirait pas l’équilibre militaire sur le théâtre d’opérations. L’intensification des efforts visant à alimenter l’opposition en armes ne signifie qu’une chose : cette condition préalable est en fait soutenue par l’Occident et par d’autres pays qui envisagent de livrer des armes à l’opposition. Cette position va à l’encontre du concept même de la conférence, qui doit avoir lieu sans conditions préalables. »

Jean Kahwaji, commandant en chef de l’Armée libanaise
« L’armée a riposté à un groupe armé qui l’a agressée avec préméditation et cela après avoir mis en garde qu’elle répondra au feu par le feu. L’armée est une armée nationale, elle ne fait pas la différence entre une communauté et une autre. Elle appartient à tous les Libanais et elle tient à entretenir de bonnes relations avec toutes les communautés religieuses et toutes les forces politiques, à condition qu’elles respectent les lois et les institutions. J’appelle tous les Libanais à soutenir l’armée et ne pas transformer le pays en îlots d’insécurité. Toutes les forces politiques doivent soutenir et coopérer avec la troupe. »

Michel Aoun, leader du Courant patriotique libre
« Je suis hostile au principe de la prorogation des mandats dans la fonction publique. Il y a des lois qu’il faut respecter. Bien sûr je votera contre une éventuelle prorogation du mandat du général Jean Kahwaji. Si une telle loi est promulguée, je présenterais un recours en invalidation que j’ai déjà commencé à préparer. Hier, Saad Hariri a évoqué la prorogation de ce mandat. Le jeu est louche. Depuis quand aime-t-il l’armée alors que tous ses députés et son courant politique ne cessent de l’insulter ? Je ne sais pas si le général Kahwaji a donné l’ordre d’entreprendre l’opération d’Abra ou non. Le commandement a fait paraître un communiqué à 19 h, demandant aux responsables politiques de définir clairement leurs positions, alors que la bataille était déjà bien avancée. Le commandant sur le terrain s’est comporté comme doit se comporter un responsable qui voit son unité attaquée. La situation sur le terrain ne peut pas attendre les ordres du commandement. La défense est une réaction naturelle, voire obligatoire. Nous n’avons pas de différend avec le Hezbollah mais seulement avec Nabih Berry, sauf si le Hezbollah appuie aujourd’hui la prorogation du mandat de Kahwagi. Nous avons eu, avec le Hezbollah, des divergences à trois reprises : lors de Nahr el-Bared, sur le dossier des journaliers d’Électricité du Liban, et maintenant sur la loi électorale. Quand les divergences se multiplient, elles deviennent gênantes, et l’on se met en quête d’une remise en question. S’il n’en peut plus, il procède à une remise en question, il peut alors rester là où il est, comme il peut bouger. Mais il est probable qu’il bouge. »

Hassan Fadlallah, député du Hezbollah
« L’armée a conduit les opérations militaires toute seule, mais Ahmad al-Assir a attaqué nos positions et les régions où nous sommes présents. Nous n’étions absolument pas une partie prenante dans ce qui s’est passé. C’est de la pure diffamation pour saper le moral de l’armée. Nous nous sommes défendus dans les cas d’extrême nécessité, et nous n’avons pas pris part aux opérations. Le projet que concoctait Ahmad el-Assir et auquel le Courant du futur a assuré un incubateur politique menait le pays au bout du compte à la fitna. Prendre pour cible la Résistance de la sorte nous mène à la fitna et fait le jeu du projet américano-israélien. »

Abdel Rahmane Bizri, ancien chef de la municipalité de Saïda
« Saïda pourrait traverser une nouvelle épreuve, peut-être plus grave encore, s’il n’y a pas une action commune pour éviter un nouveau piège. Dans la ville, il n’y a pas de vainqueur et de vaincu. Les forces du 14-Mars étaient embarrassées et ne pouvaient pas exprimer leur vrai sentiment à l’égard de ce qui se passait. Elles ont été contraintes d’apporter une couverture, même timide, à l’armée. Mais dès que les combats ont cessé, elles se sont mis à exploiter les sentiments qui, pensent-elles, servent leurs intérêts. Toutefois, pendant la bataille, leurs positions étaient confuses et elles n’ont soutenu l’armée que tardivement. Et ce soutien semblait conditionné. »

Ahmad Nassar, mufti sunnite de Saïda
« Les appels à déserter l’armée et les appels au jihad contre l’armée sont inacceptables. Il faut ouvrir une enquête transparente et efficace qui informe les Libanais de la réalité de ce qui s’est passé et continue de se passer à Saïda. »

Saoud al-Fayçal, ministre saoudien des Affaires étrangères
« Nous ne pouvons que considérer la Syrie comme une terre occupée, ce qui nécessite une réaction internationale rapide et ferme. Le Hezbollah, les Gardiens de la révolution iraniens et l’appui illimité de la Russie en armes, tout cela contribue à massacrer les Syriens. Le régime est en train d’exterminer le peuple syrien. »

Omrane El-Zohbi, ministre syrien de l’Information
« La violence en Syrie provient des armes saoudiennes, de l’argent saoudien et de terroristes liés à l’Arabie saoudite. Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Saoud al-Fayçal, a les mains tachées de sang syrien. La diplomatie saoudienne est chancelante et elle n’a pas de place dans une solution politique en Syrie. Les propos de Saoud ne sont que rêves et illusions. »

Événements

• Selon le quotidien libanais Al-Akhbar, que le Crack des Chevaliers, la célèbre forteresse croisée du centre de la Syrie, dernier fief rebelle à l’ouest de Homs, connait de violents affrontements avec l’armée syrienne. Selon des sources militaires, la plupart des rebelles qui y sont retranchés sont de nationalité libanaise.

• Le commandement militaire états-unien a reçu l’ordre d’étudier les moyens d’augmenter l’assistance en matière d’équipement de sécurité au Liban et en Irak, a annoncé le chef d’état-major interarmes, alors que la violence en Syrie s’étend au delà des frontières syriennes, rapporte l’agence Associated Press (AP). Le général Martin Dempsey précise que cette assistance a pour objectif d’améliorer les capacités des deux pays, et pourrait se matérialiser par l’envoi d’équipes d’entraînement US ou l’accélération de la vente à l’Irak et au Liban d’armements et d’équipements. L’officier supérieur a formulé cette recommandation au Commandement central (CentCom) des armées des États-Unis, selon son porte-parole.

• Le célèbre journaliste et penseur égyptien, Mohammad Hassanein Haikal, a déclaré que la rupture des relations entre l’Égypte et la Syrie « est une décision que ne possède pas le président Mohammad Morsi et aboutit à l’éviction de l’Égypte de l’Asie et son isolement en Afrique ». M. Haikal a exprimé sa surprise de l’attaque lancée par Morsi contre le Hezbollah. « Tout le monde connait l’objectif de ce qui se passe en Syrie, a-t-il dit dans une interview télévisée. Ils veulent cueillir l’Iran sans le détruire. Le Hezbollah est menacé par l’existence de 40 000 étrangers qui combattent en Syrie. Cela ne vous a-t-il pas interpellé, alors que vous avez été interpellé par le Hezbollah ? C’est scandaleux ».

Revue de presse

As-Safir (Quotidien libanais proche du 8-Mars)
(28 juin 2013)
Aucun signe indique que la formation du nouveau gouvernement pourrait s’affranchir des conditions de part et d’autre. L’émissaire de Walid Joumblatt, le ministre Waël Abou Faour, a rencontré en Arabie saoudite en début de semaine le chef de la diplomatie saoudienne Seoud el-Fayçal ainsi que l’ancien Premier ministre Saad Hariri en présence de Ghattas Khoury et de responsables saoudiens, pour des échanges axés sur le processus de mise en place du cabinet. De retour à Beyrouth, Abou Faour a rendu visite, selon des sources informées, au président Michel Sleiman, à Nagib Mikati ainsi qu’à Tammam Salam, pour les informer de ses discussions à Riyad saoudite. Il a également eu une conversation téléphonique avec le ministre d’Amal, Ali Hassan Khalil, et avec Nabih Berry en compagnie du ministre Ghazi Aridi. Ces sources ont toutefois confié que le compte-rendu présenté par Waël Abou Faour aux responsables libanais ne laissait pas présager de possible percée. Elles ont notamment fait état d’une prise de position aussi négative que véhémente, exprimée par Seoud el-Fayçal, en rapport avec la bataille de Saïda. Ces sources concluent que jusqu’à présent, les embûches restent les mêmes, pour ne pas dire qu’elles sont encore plus compliquées. Aucun gouvernement tenant le Hezbollah à l’écart ne sera formé. Le président Berry a insisté sur ce point en présence de l’émissaire du député Joumblatt.

As-Safir (28 juin 2013)
Imad Marmal
La relation entre le général Michel Aoun et le Hezbollah traverse une phase particulièrement critique. Le Hezbollah comprend les appréhensions de son allié, mais il n’est pas disposé à y adhérer. Le parti est convaincu que la prorogation du mandat du commandant en chef de l’armée libanaise, le général Jean Kahwaji, est une nécessité à l’heure actuelle. Le Hezbollah aurait préféré que la question ne soit pas soulevée en ce moment, mais il votera en faveur du projet, sans que sa prise de position ne soit exclusivement liée à la bataille d’Abra. En effet, le parti avait pris sa décision à ce propos avant cette bataille, bien que celle-ci ait renforcé sa confiance vis-à-vis du général Kahwagi. Des sources proches du Hezbollah s’étonnent de l’escalade à laquelle s’est récemment livré le général Aoun. En effet, le parti lui avait notifié de longue date sa décision d’appuyer la prorogation du mandat du commandant en chef.

As-Safir (28 juin 2013)
Malak Akil
Ce n’est pas un simple point de détail que Michel Aoun ait émis des doutes sur l’identité de la partie qui a donné l’ordre à l’armée de prendre d’assaut le QG d’Ahmad al-Assir à Abra. En parlant du « commandant sur le terrain qui s’est comporté comme doit se comporter un responsable qui voit son unité attaquée », le général Aoun fait indirectement référence au chef du régiment des commandos de l’armée, le général Chamel Roukoz, qui est également son gendre, et qui vient en tête de liste des candidats du CPL à la succession du commandant en chef. Toutefois, le général Roukoz a peu de chances d’accéder à ce poste et la bataille est donc perdue d’avance. Le tandem chiite (Amal-Hezbollah) a riposté aux messages peu amènes que lui a adressés Michel Aoun : l’opposition à la prorogation du mandat du commandant en chef ne pourra être monnayée sur le plan chrétien, l’opinion publique chrétienne soutenant avec force l’armée et son commandant, surtout après la bataille de Saïda.

As-Safir (26 juin 2013)
Ghasseb al-Mokhtar
Des milieux du 8-Mars ont noté que le communiqué des anciens Premiers ministres comportait « plus d’une lacune politique, la plus grave étant le fait d’avoir adopté le discours salafiste-takfiriste sous la bannière duquel a combattu cheikh Ahmad al-Assir et est entré en confrontation avec l’armée, ainsi que l’allusion aux tentatives répétées de placer l’armée face aux musulmans sunnites ». Il semble que l’esprit de Fouad Siniora ait dominé ce communiqué, surtout dans sa partie « liant le démantèlement du périmètre de sécurité d’al-Assir à l’évacuation desdits appartements du Hezbollah ».
Les mêmes sources estiment que cette partie du communiqué « est en contradiction avec les propos des anciens Premiers ministres appuyant l’armée, lui assurent une couverture et mettant en garde contre la fitna entre les musulmans, car elle prend à son compte l’allégation selon laquelle l’armée est coupable de discrimination entre les régions et les communautés ». « Les anciens Premiers ministres ont commis cette faute, d’autant que trois d’entre eux appuient la Résistance et les déclarations ministérielles de cinq d’entre eux, y compris Saad Hariri, évoquent la Résistance, ajoutent les milieux précités. Comment peuvent-ils, dès lors, comparer le périmètre de sécurité d’al-Assir aux deux appartements habités par des partisans de la Résistance, dont l’un était inoccupé plusieurs jours avant la bataille d’Abra ».
Les mêmes milieux craignant une généralisation du discours sur le « désenchantement sunnite » par la bouche des anciens Premiers ministres, ce qui contribuera à exacerber les tensions et à renforcer cet état d’esprit cultivé depuis des années dans la rue sunnite. « Cela n’aide pas à réaliser ce à quoi ont appelé les anciens chefs de gouvernement, à savoir l’attachement à la convivialité islamo-chrétienne et inter-musulmane, la préservation de la paix civile, le rejet de la fitna entre les frères sunnites et chiites », commentent les mêmes milieux.
Le chef du pari al-Ittihad, Abdel Rahim Mrad, a jugé « compréhensible que de telle positions soient exprimés par Fouad Siniora et Saad Hariri, mais il est étonnant que des hommes tels que Salim Hoss, Omar Karamé et même Najib Mikati l’agréent. » « Il semble que c’est la logique de Fouad Siniora qui l’ait emporté », a-t-il dit.

As-Safir (26 juin 2013)
Au lieu de bâtir sur l’exploit réalisé par l’armée libanaise à Saïda, pour ouvrir de nouvelles perspectives sur le plan politico-sécuritaire, le Liban demeure aux prises avec un clivage aigu, qui risque de balayer cette prouesse. Cette réalité amère ne doit toutefois pas empêcher les Libanais de tirer les enseignements de ce qui s’est passé à Abra, l’armée ayant prouvé que ni la détermination ni le courage ne lui faisaient défaut. Les Libanais fondent désormais de grandes espérances sur l’armée, qui a réussi à éradiquer la tumeur maligne à Saïda. L’armée doit être à la hauteur de ces espoirs : le commandement de l’armée devrait prouver que sa décision de trancher à Saïda n’est ni une exception, ni une réaction à impulsive, mais bel et bien l’expression d’une stratégie de longue durée, d’où toute complaisance est bannie. L’armée a clairement fait comprendre qu’elle sera intransigeante sur le terrain, en se déployant dans le quartier de Leilaki (banlieue sud de Beyrouth). Elle y a même mené des perquisitions à la recherche des auteurs des tirs qui ont ponctué un accrochage entre deux familles dans ce secteur. Cette démarche est hautement significative, le Hezbollah étant le maître du jeu dans cette région.
La tentative de certains d’instrumentaliser ce qui s’est passé à Abra pour allumer un front hostile au Hezbollah, sous prétexte de rejeter la politique des deux poids, deux mesures lorsqu’il s’agit d’appliquer la loi est déplorable. Ahmad el-Assir s’est volatilisée, mais ses thèses sont restées intactes à travers les dirigeants du Courant du futur, qui ont adopté le même discours et la même rhétorique en ce qui concerne les périmètres de sécurité, sur fond d’accusations selon lesquelles le Hezbollah aurait pris part aux événements à Abra. Pourtant, Nabih Berry a catégoriquement démenti toute participation de membres du Mouvement Amal et du Hezbollah à cette bataille. Tout en soulignant le droit et le devoir de l’armée en matière de maintien de la sécurité et de la stabilité, Berry a assuré qu’aucune région n’était interdite à cette armée. « Nous l’appuyons dans ses démarches visant à réprimer toute atteinte à la sécurité, partout, jusque dans la banlieue sud de Beyrouth », a-t-il martelé.

As-Safir (25 juin 2013)
Mohammad Ballout
Un ou deux mois au plus séparent le Liban d’une conflagration totale. Telle est l’expression figurant dans un rapport sécuritaire occidental, distribué voici une semaine à toutes les sphères diplomatiques sécuritaires européennes, faisant état des développements auxquels le Liban sera confronté, dans la foulée des affrontements itinérants, les derniers en date étant ceux de Saïda ces deux derniers jours qui ont eu des répercussions sur plusieurs régions libanaises.
Un diplomate occidental interrogé par As-Safir a affirmé que, selon le rapport rédigé par des services de renseignement occidentaux, la gestion du conflit sunnite-chiite au Liban et le rationnement des heurts confessionnels qui se produisent sur des fronts distants l’un de l’autre, dégénéreront d’ici un ou deux mois en conflagration totale de grande envergure.
Les analystes des services occidentaux estiment que la crise syrienne se déplacera au Liban plus vite que prévu, précisant que le Liban en payera le prix. La même source ajoute qu’une décision régionale arabe, dont les forces motrices sont l’Arabie saoudite et le Qatar, vise à punir le Hezbollah dans le contexte de son intervention en Syrie, soulignant que des démarches ont été engagées en vue de lui faire payer le prix de la perte des investissements qataris politiques et militaires en Syrie.
Selon le rapport, l’élément à même de provoquer de façon décisive l’explosion, notamment à Tripoli et Saïda, est la capacité des groupes sunnites armés à obtenir le soutien des camps palestiniens et à mobiliser les groupes fondamentalistes qui s’y trouvent pour mener bataille contre les chiites.
Le rapport sécuritaire en question converge avec une évaluation de la situation faite par un diplomate français de retour de Beyrouth la semaine dernière, qui aurait toutefois émis quelques réserves quant à l’éventualité de voir le Liban se diriger à grands pas vers une conflagration totale, comme le croient les services de sécurité. Les analyses sécuritaires et diplomatiques occidentales conviennent que la décision de la paix ou de la guerre est tributaire de la position de la formation la plus puissante au Liban, tant sur le plan politique que militaire, en l’occurrence le Hezbollah. La manière dont ce dernier réagira militairement et politiquement ou au contraire résistera aux tentatives de l’entraîner dans une guerre confessionnelle permettra de déterminer si le Liban sera protégé ou non de la contagion du conflit syrien.
Le diplomate français affirme que, malgré l’augmentation des risques sécuritaires et l’exacerbation des conflits confessionnels, la situation est sous contrôle et le Hezbollah n’a pas pris jusqu’à l’heure la décision de transférer sur le sol libanais la bataille qu’il mène en Syrie. Selon ce diplomate, la participation du Hezbollah aux combats en Syrie a joué un rôle en accentuant la mobilisation confessionnelle et elle pourrait entraîner les Libanais à croiser le fer.
Alors que le Liban est en passe de devenir un État défaillant, personne ne parvient à juguler l’élan avec lequel il se précipite vers le gouffre.
Cependant, au bout du tunnel se profile une lueur. En effet, trois institutions libanaises tiennent toujours : 1. L’institution présidentielle qui, affaiblie, ne pourra toutefois avoir aucune influence sur les événements sans un soutien politique de taille ; 2. L’armée qui joue le rôle de pompier ambulant et qui est incapable d’intervenir de peur de provoquer une scission dans ses rangs et de perdre la couverture politique ; 3. La Banque centrale qui travaille dans des conditions extrêmement difficiles et compliquées.
Il semble que ceux qui sont intervenus dans le passé pour mettre le Liban à l’abri d’une guerre civile se rallient aujourd’hui au front qui œuvre pour y jeter l’étincelle [de la guerre civile], pour régler les comptes régionaux sur son sol, alimenter les groupes salafistes, et attiser le conflit sunnite-chiite. En l’absence d’éléments libanais internes vitaux et forts capables de contrôler et de gérer le conflit, et de désamorcer le trop-plein à travers des compromis locaux à même de conjurer une conflagration totale, il semble difficile que les prévisions des services de sécurité occidentaux se démentissent.
À en croire certaines estimations occidentales, l’ère du « consortium » —réunissant des pays européens, des pays du Golfe et de la région— qui traitait en permanence le patient libanais, touche à sa fin, certaines de ses composantes, de Doha à Taëf, œuvrant à provoquer une conflagration au Liban ayant en vue leurs propres intérêts.
Le diplomate français affirme que les Libanais ont échoué à tous les niveaux, que ce soit dans la mise en œuvre de la politique de distanciation ou dans le respect de la Déclaration de Baabda. Ils doivent par conséquent assumer leurs responsabilités afin d’éviter une nouvelle guerre régionale, car ni un nouvel Accord de Taëf, ni un nouvel Accord de Doha ne profilent à l’horizon, ni même une médiation arabe ou internationale ne semble être en perspective.

An-Nahar (Quotidien libanais proche du 14-Mars)
(28 juin 2013)
Le ministre des Affaires sociales, Waël Abou Faour, qui a eu des entretiens en Arabie saoudite à la demande du chef du Parti socialiste progressiste (PSP), Walid Joumblatt, est rentré à Beyrouth avec l’impression que les responsables saoudiens considèrent que la formation du gouvernement est une affaire interne libanaise et qu’il revient au Premier ministre désigné, Tammam Salam, de prendre les positions qu’il souhaite.
M. Abou Faour a transmis ses impressions hier à M. Salam. Des observateurs ont estimé que la position saoudienne constitue un facteur positif pour M. Salam, l’aidant à entreprendre librement ses démarches pour la formation cabinet. Le Premier ministre désigné attend toujours le président du Parlement, Nabih Berry, qui lui a promis une réponse à l’issue de leur entretien lundi dernier, après des concertations avec ses alliés du 8-Mars. Mais une source ministérielle a déclaré qu’il n’y a rien de nouveau au sujet du dossier gouvernemental et que les conditions des divers protagonistes restent les mêmes.

Al-Akhbar (Quotidien libanais proche de la Résistance)
Ghassan Seoud, (28 juin 2013)
Au Liban-Nord, il y a deux villes qui grouillent de vie : Zghorta et Kobeiyat. Les miliciens dont les actes sont justifiés par le Courant du futur sous divers prétextes, ont mis à rude épreuve la sécurité de Tripoli et la stabilité du chef-lieu du Nord. Ils planifiaient de faire la même chose dans le chef-lieu du Liban-Sud, Saïda. Ensuite, l’ancien chef militaire du 14-Mars, le député Khaled Daher, a lancé une odieuse campagne de dénigrement contre Kobeiyat. Et voilà, maintenant, que le chef militaire actuel, le général à la retraite Achraf Rifi, a lancé, mercredi, un ordre d’opération contre Zghorta.
À ceux qui encerclent sans succès Jabal Mohsen depuis deux ans, et qui y perdent à chaque confrontation le double de ceux qu’ils tuent, il explique que la force des assiégés et leurs armes viennent de Zghorta : vous perdez votre temps et votre sang si vous n’allez pas là-bas aussi, leur a-t-il dit. Malheureusement, beaucoup le croient, même si ce que dit Rifi est illogique et incroyable. Ils croient que ceux dont ils bombardent les maisons en riposte à leurs balles, acheminent leurs canons et leurs munitions de Zghorta ; et que des avions syriens, russes et iraniens débarquent tous les jours leurs cargaisons d’armes dans la réserve d’Ehden ; et que des tunnels de 20 kilomètres de long relient Jabal Mohsen à Zghorta, en passant sous les collines, les vallées et les quartiers bondés.
Une personnalité religieuse de Zghorta estime que ce qu’a fait Achraf Rifi, ce fonctionnaire à la retraite qui continue de toucher son salaire, est une mobilisation inédite contre une ville et une communauté que même les miliciens ne se sont jamais autorisés. Les habitants et les notables de Zghorta auraient pu l’ignorer si l’homme n’était pas le chef des opérations du Courant du futur et le capitaine des caïds des fronts de Tripoli.
Contrairement aux « informations » géographiques de Rifi, Jabal Mohsen et Zghorta sont séparés par un énorme bastion du Courant du futur et des groupes salafistes qui lui sont liés, appelé Qobbé. Et Qobbé n’est pas un jardin public ou un complexe sous lequel il est possible de creuser des tunnels, mais la plus grande et la plus dense zone résidentielle de Tripoli. Et entre Qobbé et Zghorta, il y a deux routes de 10 kilomètres. La première passe par la plus importante caserne de l’Armée libanaise et la seconde par la localité de Majdlaya, où les Forces libanaises se sont employées, ces trois dernières années, à renforcer leur présence.
Aussi bien les milieux populaires que les salons politiques de Zghorta ne comprennent pas où veut en venir le Courant du futur. Que font Achraf Rifi et ses camarades ? À chaque fois qu’ils perdent une bataille, leur folie augmente. Rien ne les arrête. Les héritiers de Rafic Hariri s’emploient à détruire le Liban pour revenir au pouvoir. Après avoir établi des lignes de démarcation à l’intérieur de leurs propres zones d’influences populaires, terrorisé leurs opposants, encerclé les résidences des Premiers ministres à l’aide de sit-in et de « manifestations de la colère » salafistes, créé des fronts sunnites-chiites ici et là, dans la Békaa, au Liban-Sud et dans des endroits inimaginables, les voilà qu’ils mobilisent contre l’armée l’avant-midi, et montent les sunnites contre les chrétiens l’après-midi.

Al-Akhbar (27 juin 2013)
Mayssam Rizk
Le 14-Mars a timidement condamné les agissements de cheikh Ahmad el-Assir. Ce camp politique a rejeté l’entière responsabilité des événements sur le Hezbollah. Il a placé sur un pied d’égalité l’armée et l’entreprise terroriste bâtie, deux ans durant, par Assir à Saïda au vu et au su de tous. Le 14-Mars n’a pas demandé au commandement de l’armée de frapper d’une main de fer, se contentant de réclamer une cessation des accrochages, comme s’il y avait deux groupes hors-la-loi en train de se combattre. Les alliés du Courant du futur sont désormais dans l’embarras face à leur public chrétien qui glorifie l’armée.

Al-Joumhouria (Quotidien libanais proche du 14-Mars)
Georges Soulage (25 juin 2013)
La situation au Liban glisse de plus en plus vers le chaos sécuritaire, à la lumière des répercussions de la guerre syrienne d’une part, et du vide au niveau du pouvoir politique de l’autre. Le lien entre les scènes libanaise et syrienne est de plus en plus fort sur les plans militaire et sécuritaire. Il se traduit par des combats frontaliers, des tirs d’obus dans la Bekaa, des roquettes à Beyrouth, des tensions à Tripoli et Saïda. Mais la surprise est venue de cheikh Ahmad al-Assir, qui a commis une erreur d’évaluation et un péché qui ressemble à un suicide. Alors qu’il affirmait défendre le projet de l’État et s’opposait au Hezbollah, il a ouvert le feu sur l’armée, qui symbolise l’État.
Al-Assir s’étaient bien préparé pour son combat contre le Hezbollah. Il a entrainé ses hommes après les avoir endoctriné sur les plans idéologique et sectaire, a déployé des groupes extrémistes du Front al-Nosra, a conclu des arrangements avec des mouvements terroristes à Taamir de Aïn el-Héloué, et a érigé des fortifications semblables à celles de Fateh al-Islam, à Nahr al-Bared.
Il a établi des plans, déployé des snipers dans des caches, posté en embuscade des unités équipées de lance-roquettes, et a installé un hôpital de campagne sous-terrain. Deux derniers avant les combats, il avait même ramené des chirurgiens en prévision de la confrontation à venir.
En contrepartie, le Hezbollah se préparait aussi à tomber sur al-Assir au cas où il franchirait la ligne rouge en attaquant les appartements habités par ses partisans ou s’il coupait la route menant au Liban-Sud. Surtout qu’al-Assir se préparait à attaquer lundi dernier, si le Hezbollah n’évacuait pas les appartements.
Mais la surprise est venue du fait qu’al-Assir, sentant qu’il était prêt pour la confrontation, s’en est pris à l’armée au lieu d’attaquer le Hezbollah. Il croyait qu’une attaque fulgurante et violente paralyserait l’armée et provoquerait un sursaut sunnite dans toutes les régions en signe de solidarité avec lui, et que les médiations entreraient en vigueur pour régler le problème, comme d’habitude.
L’armée aussi a été surprise et ne s’attendait pas à ce qu’al-Assir s’en prenne à elle, d’autant qu’elle lui assurait une protection depuis son apparition sur la scène, bien qu’elle ne partageât pas ses prises de positions.
Dix-sept martyrs et 100 blessés dans les rangs de l’armée en quelques heures. Cela prouve que la bataille n’avait pas lieu seulement avec al-Assir mais avec des groupes plus extrémistes et mieux entrainés, qui ont une haine envers l’institution militaire. L’armée n’avait d’autre choix que de se défendre et de protéger l’État et la population, mais aussi de changer les règles du jeu et refusant les intimidations, les compromis à la façon libanaise traditionnelle, au dépens du sang de ses martyrs.
Le Liban a échappé à la discorde et à un autre Nahr al-Bared. L’après bataille de Saïda ne sera pas comme avant, et l’armée ne sera pas un bouc émissaire et elle n’acceptera pas le déclenchement de la fitna. Elle frappera comme elle l’a fait à Saïda.
Le Hezbollah peut cueillir le fruit de sa patience et remercier al-Assir qui s’est suicidé et avec lui son mouvement, avant d’égorger les soldats de l’armée. Car il lui a évité une bataille féroce, coûteuse en hommes, et qui aurait eu de graves répercussions.

Al-Hayat (Quotidien à capitaux saoudiens, 26 juin 2013)
Des sources diplomatiques des Nations Unies à New York ont fait état de leur profonde inquiétude à l’égard des développements survenus au Liban et de l’élargissement du périmètre des violences confessionnelles en Syrie, ce qui pourrait saper la stabilité dans les pays voisins. Les sources ajoutent que la situation est suivie de près, notamment au vu des incidents sécuritaires itinérants survenant au nord, à l’est (près de la frontière syrienne) et au sud (Saïda), ce qui serait susceptible de provoquer une tension sécuritaire dans la zone d’opération de la Finul.

L’Orient-Le Jour (Quotidien libanais francophone proche du 14-Mars)
Scarlett Haddad (27 juin 2013)
Depuis lundi, les services compétents au sein de l’armée et des autres institutions de l’État, notamment la justice, s’emploient à découvrir les zones encore obscures pour avoir une vision complète de ce qui se préparait pour le Liban à travers le cheikh Ahmad el-Assir. Il s’agissait d’un plan de déstabilisation généralisée, à travers le déclenchement d’une discorde entre les sunnites et les chiites. Une source sécuritaire précise à cet égard que la dernière conférence des Amis de la Syrie à Doha a donné en quelque sorte le signal d’une action décisive, qui se préparait depuis des mois, dans le but d’entraîner le Hezbollah dans des conflits internes et de l’isoler sur la scène locale et internationale. Il fallait surtout lui faire payer le prix de la bataille de Qousseir qui a largement contribué à renverser les rapports de force entre les troupes du régime syrien et celles de l’opposition.
Dans ce cadre, cheikh el-Assir avait adressé un ultimatum pour évacuer les appartements occupés par des membres du Hezbollah à Abra depuis le début des années 90, menaçant de lancer un vaste mouvement pour les évacuer de force lundi, si rien n’était fait d’ici là. Après ce coup de force, cheikh el-Assir planifiait d’ouvrir un front entre Abra et Haret Saïda, entravant ainsi les déplacements des partisans du Hezbollah et des chiites en général, en aiguisant les dissensions confessionnelles. D’ailleurs, deux semaines auparavant, il avait fait un premier test dans le secteur en déployant ses hommes en un temps record et en étudiant les failles éventuelles de son plan d’attaque des appartements. L’élément marquant de cette « avant-première » était le déploiement simultané de membres de la Jamaa islamiya et du courant du Futur à Saïda, comme s’il s’agissait de mobiliser l’ensemble de la ville, au même moment que l’attaque des appartements, pour lancer l’étincelle d’un embrasement généralisé comme en 1975. Le Hezbollah et Amal avaient aussitôt saisi le message et compris la gravité de la situation. Ils ont alerté les autorités, qui étaient déjà d’ailleurs mobilisées. Wafic Safa et Ahmad Baalbacki se sont même rendus chez le commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwagi, pour en discuter avec lui et il a été convenu que les groupes chiites devraient rester à l’écart et n’entreprendre aucune action, ou réaction, sur le terrain.
Des contacts ont d’ailleurs été aussitôt entrepris par certaines parties politiques et certains responsables avec cheikh el-Assir pour essayer de le calmer et ce dernier a annoncé le report de cette action, d’autant, avaient dit ses adjoints, que certains membres de sa famille devaient passer les épreuves du brevet lundi. Le week-end s’annonçait donc calme. Mais el-Assir bluffait. Dimanche, voulant prendre de court l’armée, il a donné l’ordre à ses hommes d’attaquer de sang-froid le barrage militaire, faisant quatre martyrs parmi eux et déclenchant la riposte de la troupe. Cheikh el-Assir a d’ailleurs été surpris par la contre-offensive, car il croyait que l’armée n’était pas préparée à l’affrontement à cause de l’annonce du report de son mouvement. Les soldats se sont donc battus avec courage et méthode et les commandos ont été envoyés sur place en renforts.
Voyant que le plan ne fonctionnait pas comme prévu, cheikh el-Assir a appelé à l’aide les ulémas salafistes de Tripoli, lesquels, cheikh Salem Raféi en tête, ont aussitôt pris le chemin de Saïda pour tenter une médiation. Ils ont d’ailleurs rencontré des responsables militaires à Saïda proposant un cessez-le feu. Ce qui aurait signifié la consécration des lignes de démarcation et un coup porté au prestige de l’armée. Celle-ci a donc opposé une fin de non-recevoir. Cheikh el-Assir a alors sollicité l’aide des groupes palestiniens extrémistes installés dans le camp de Aïn el-Héloué, notamment Jund al-Cham et Osbat al-Ansar. Ceux-ci ont d’ailleurs répondu à l’appel, tentant d’occuper l’armée par l’ouverture d’un front à Taamir. L’armée a réagi, répondant aux sources de tirs. Les responsables locaux du Hamas ont alors tenté d’obtenir la conclusion d’un cessez-le-feu, mais là aussi l’armée a totalement refusé, poursuivant sa riposte. C’est alors que le chef du bureau politique du Hamas Khaled Mechaal et le chef de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas sont intervenus et ont contacté le président de la Chambre Nabih Berry pour l’informer que les Palestiniens n’interviendront pas dans les conflits libanais. Les groupes palestiniens salafistes se sont retirés et l’armée a poursuivi son opération contre el- Assir et ses hommes, parvenant en moins de 48 heures à contrôler son QG.

Ach Sharq Al-Awsat (Quotidien saoudien)
(26 juin 2013)
Le roi Abdallah II de Jordanie a dit craindre une division de la Syrie, qui serait « une source sûre de destruction » pour la région, et un clivage entre chiites et sunnites aux « conséquences désastreuses ». « Une Syrie divisée signifierait un conflit sans fin qui déstabiliserait la région et le futur de ses peuples pour des générations à venir », a déclaré le souverain. « Diviser la Syrie n’est dans l’intérêt de personne, et jouer avec l’unité de la Syrie est une source sûre de destruction, a-t-il poursuivi. Attiser le feu du confessionnalisme dans le monde arabe et musulman aura des conséquences désastreuses pour des générations à venir et pour le monde entier. »
« La pire crainte, ça serait que le conflit syrien ne sème la discorde entre sunnites et chiites de la région », a-t-il déclaré avant d’ajouter : « Nous ne pouvons rester silencieux face aux tentatives des jouer avec le destin de la région, et ses peuples en exploitant la religion et les écoles religieuses à des fins politiques et en les utilisant pour diviser les gens. Ce que je crains est de nous retrouver un jour dans la difficile situation, Dieu nous en préserve, de ne plus pouvoir fournir d’aide à nos frères et sœurs, les réfugiés syriens. Nous ne permettrons pas cela, pour des raisons humanitaires et politiques ».

Cath.ch (Site catholique suisse, 24 juin 2013)
Des rebelles ont assassiné dimanche 23 juin 2013 le Père François Mourad dans le couvent de Ghassanieh, près de Homs, en Syrie. Le monastère a été entièrement pillé par des hommes armés, rapporte le 24 juin la Custodie franciscaine de Terre sainte à Jérusalem. Le religieux âgé, de nationalité syrienne, qui vivait en ermite, avait quitté son ermitage au début de la guerre en Syrie. Il avait rejoint un frère affaibli et pour desservir une communauté religieuse voisine, mais également pour trouver un peu plus de sécurité. « Je voudrais que tout le monde sache, a pour sa part insisté le Père Halim Noujaim, Ministre régional des franciscains de Syrie, qu’en soutenant les "révolutionnaires", l’Occident soutient les extrémistes religieux et aide à tuer les chrétiens... À ce rythme, il ne restera plus un seul chrétien dans ces zones », a-t-il déclaré à l’agence de presse catholique italienne SIR. Les franciscains, qui militent pour instaurer la trêve et œuvrer à la réconciliation, dissuadent l’Occident de prendre des mesures susceptibles d’apporter davantage de violence et d’augmenter le nombre de morts. Pour les religieux, ce ne sont pas les armes qui sont en mesure de donner à la Syrie ce dont elle a besoin : « Les conditions pour que la paix revienne au plus vite ! »

Source
New Orient News