I. Introduction

1. Présenté en application de la résolution 77/247 de l’Assemblée générale, le présent rapport porte sur la période du 1er juin 2021 au 31 mai 2023. Il repose sur les activités de suivi menées par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) dans le Territoire palestinien occupé et sur des informations recueillies par d’autres entités des Nations Unies ainsi que par des organisations non gouvernementales. Il convient de le lire conjointement avec le rapport du Secrétaire général sur les colonies de peuplement israéliennes dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et le Golan syrien occupé et avec les rapports que le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a présentés à la cinquante-deuxième session du Conseil des droits de l’homme

2. À partir des tendances observées et des cas recensés, le présent rapport montre que les politiques et pratiques israéliennes ont des répercussions sur l’exercice des droits humains dans le Territoire palestinien occupé et y constituent une entrave. Faute de place, il ne traite pas de tous les sujets de préoccupation ni de tous les cas attestés au cours de la période considérée.

3. Au cours de la période considérée, Israël a continué de priver d’accès au Territoire palestinien occupé le personnel recruté sur le plan international du bureau du Haut-Commissariat dans ce territoire, ce qui a compliqué la réalisation d’activités cruciales prescrites par l’ONU en matière de droits humains. En septembre 2023, le Chef du HCDH dans le Territoire palestinien occupé a obtenu un visa valable pour plusieurs entrées dans ce territoire et en Israël jusqu’à la fin du mois de décembre 2023.

II. Cadre juridique

4. Le droit international des droits humains et le droit international humanitaire sont applicables dans le Territoire palestinien occupé. Dans le rapport que le Secrétaire général a présenté au Conseil des droits de l’homme à sa trente-quatrième session , on trouvera une analyse détaillée du cadre juridique applicable.

III. Application de la résolution 77/247 de l’Assemblée générale

A. Conduite des hostilités

5. Au cours de la période considérée, il y a eu deux escalades majeures des hostilités entre Israël et les groupes armés palestiniens de Gaza, du 5 au 7 août 2022, puis du 9 au 13 mai 2023.

6. En août 2022, l’escalade des hostilités a entraîné la mort de 51 Palestiniens (29 hommes, 13 garçons, 5 filles et 4 femmes) dans Gaza, dont 31 ont été tués par l’armée de l’air israélienne et 16 par des groupes armés palestiniens . Il ressort des activités de suivi du HCDH que parmi les Palestiniens tués figuraient 37 civils (15 hommes, 13 garçons, 5 filles et 4 femmes) et 6 personnes dont le statut restait indéterminé. La grande majorité des 383 Palestiniens blessés (152 hommes, 103 garçons, 67 femmes et 61 filles), notamment les 164 enfants, étaient des civils . Il y a eu également 34 Israéliens blessés .

7. Plusieurs frappes menées par l’armée de l’air israélienne lors de l’escalade des hostilités en août 2022, dont la frappe du 7 août sur un cimetière situé à l’est de Jabaliya, qui a coûté la vie à 5 garçons, ont fait craindre d’éventuelles violations du droit international humanitaire, notamment des principes de proportionnalité et de précautions dans l’attaque ainsi que de l’interdiction des attaques sans discrimination et des attaques dirigées intentionnellement contre des civils .

8. En mai 2023, l’escalade des hostilités a coûté la vie à 33 Palestiniens (23 hommes, 4 filles, 2 garçons et 4 femmes) dans Gaza, dont 30 ont été tués par l’armée de l’air israélienne et 3 par des roquettes tirées par des groupes armés palestiniens et retombées avant d’avoir franchi les limites du territoire. Au moins 13 d’entre eux (3 hommes, 4 filles, 2 garçons et 4 femmes) étaient des civils . Une Israélienne et un Palestinien ont été tués par des roquettes tirées sur Israël depuis Gaza. Par ailleurs, 192 Palestiniens (82 hommes, 47 femmes et 63 enfants) ont été blessés entre le 9 et le 13 mai . Selon les autorités israéliennes, 95 Israéliens ont été blessés.

9. Des frappes de l’armée de l’air israélienne ont tué 10 civils (femmes, hommes et enfants) lors de trois attaques lancées quasi simultanément contre des immeubles d’habitation, juste après minuit, le 9 mai 2023, en vue d’atteindre 3 membres importants de la branche armée du Jihad islamique palestinien, Saraya el-Qods. Lorsqu’elles ont eu lieu, moins d’une semaine s’était écoulée depuis l’entrée en vigueur d’un cessez-le-feu entre Israël et le Jihad islamique palestinien à la suite d’un échange de tirs les 2 et 3 mai, et il n’y avait pas d’hostilités actives . Les frappes israéliennes auraient été autorisées à l’avance.

10. Les attaques en question font craindre un non-respect du droit international humanitaire, notamment des principes de précautions dans l’attaque et de proportionnalité ainsi que, dans un cas, de l’interdiction des attaques sans discrimination. En l’occurrence, le 9 mai, l’armée de l’air israélienne a pris pour cible le chef des opérations du Jihad islamique palestinien en Cisjordanie, Tariq Ezz el-Din, dans un immeuble d’habitation du quartier de Rimal, à Gaza. Il ressort des activités de suivi du HCDH que l’armée de l’air israélienne a largué au moins deux bombes sur le bâtiment, dont l’une semble avoir explosé dans l’appartement situé au dernier étage, tuant trois civils d’une autre famille , ainsi que Tariq Ezz el-Din, sa fille de 12 ans et son fils de 8 ans qui se trouvaient dans l’appartement du dessous. Une autre bombe a frappé l’édifice au rez-de-chaussée. L’attaque a causé d’importants dégâts au bâtiment et également endommagé deux immeubles d’habitation voisins. Le fait de lancer des attaques sans discrimination qui causent des décès ou des blessures parmi les civils, ou de lancer une attaque en sachant qu’elle causera incidemment des pertes en vies humaines, des blessures aux personnes civiles ou des dommages aux biens de caractère civil qui sont excessifs par rapport à l’avantage militaire concret et direct attendu, peut constituer un crime de guerre .

11. En août 2022 et en mai 2023, des groupes armés palestiniens ont tiré, notamment depuis des quartiers densément peuplés de Gaza, des projectiles qui étaient par nature dirigés sans discrimination vers Israël , ce qui peut constituer une violation des interdictions concernant les attaques sans discrimination et l’emploi d’armes de nature à frapper sans discrimination, au regard du droit international humanitaire, et, par conséquent, un crime de guerre . Un grand nombre de ces projectiles sont tombés dans Gaza ; en août 2022, ils ont fait 16 morts palestiniens (6 hommes, 6 garçons, 3 filles et 1 femme) et des blessés . En mai 2023, des roquettes tirées sans discrimination depuis Gaza ont tué une civile israélienne et un civil palestinien travaillant en Israël, et blessé 40 civils israéliens . Sur place, ces tirs ont causé la mort de trois Palestiniens, dont un garçon de 16 ans et une fille de 8 ans tués par une roquette tombée dans la rue Sahaba, à Gaza, le 10 mai 2023. Le même jour, lors d’une autre attaque, un Palestinien de 51 ans a été tué dans la province de Gaza-Nord.

12. Dans les deux cas d’escalade des hostilités, les frappes israéliennes ont touché des biens de caractère a priori civil et provoqué des dommages . Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, au cours de l’escalade de mai 2023, 2 943 logements ont été atteints, dont 103 ont été détruits et 140 gravement endommagés ; 1 244 Palestiniens ont été déplacés à l’intérieur du territoire ; 20 écoles administrées par l’Autorité palestinienne et 6 écoles administrées par l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient ont été endommagées, de même que l’hôpital Aqsa, dans la province de Deïr el-Balah, et l’hôpital indonésien, dans le nord de Gaza, ainsi que deux cliniques de soins de santé primaires, dans la province de Khan Younès et le nord de Gaza. Selon des sources israéliennes, lors de l’escalade de mai 2023, des roquettes et d’autres projectiles ont endommagé 429 structures, notamment des habitations, des bâtiments publics et des entreprises.

B. Personnes tuées ou blessées dans le cadre de l’application de la loi

13. Les forces de sécurité israéliennes ont intensifié le recours à la force meurtrière contre les Palestiniens dans toute la Cisjordanie. Parallèlement, les attaques commises par des Palestiniens armés, ou présumées comme telles, ont augmenté. Dans de nombreux cas suivis par le HCDH, les forces de sécurité israéliennes ont apparemment fait usage de la force sans nécessité ou de manière disproportionnée, ce qui a entraîné une potentielle privation arbitraire de la vie. En 2022, le nombre de Palestiniens tués en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, a été plus élevé qu’au cours de n’importe quelle autre année depuis 2005, et la situation s’est encore détériorée en 2023. Au cours de la période considérée, les forces de sécurité israéliennes ont tué, en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est, 304 Palestiniens (232 hommes, 9 femmes, 61 garçons et 2 filles), 116 d’entre eux ayant péri lors d’accrochages, 62 lors d’attaques supposément commises par des Palestiniens, 56 lors d’affrontements, 56 lors d’opérations des forces de sécurité israéliennes, 6 lors de manifestations et 8 dans d’autres circonstances , et en ont blessé au moins 21 829, dont 1 421 par des tirs à balles réelles .

14. La privation arbitraire de la vie est interdite par le droit international des droits humains. Selon le Comité des droits de l’homme, les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques sont censés prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir toute privation arbitraire de la vie par leurs agents de maintien de l’ordre . Ils devraient, entre autres, mettre en place des procédures visant à garantir que les opérations de maintien de l’ordre soient correctement planifiées compte tenu de la nécessité de réduire au minimum le risque qu’elles représentent pour la vie humaine, et utiliser des armes moins meurtrières pour mener ces opérations, conformément à l’obligation qu’ils ont de protéger le droit à la vie . Depuis 2022, le HCDH a recensé une série de cas, qui se sont multipliés en 2023, dans lesquels les forces de sécurité israéliennes appliquaient des tactiques militaires aux opérations de maintien de l’ordre en Cisjordanie, par exemple en utilisant des missiles antichars, des projectiles explosifs tirés à l’épaule et d’autres armes militaires et en postant des tireurs d’élite sur les toits, dans des zones urbaines très peuplées et très fréquentées, bien souvent en plein jour. Les forces de sécurité israéliennes semblent ne pas avoir pris de mesures pour désamorcer les situations d’affrontement ou pour veiller à ce qu’une force potentiellement létale ne soit employée qu’en dernier recours, lorsque cela est strictement nécessaire pour protéger la vie ou prévenir un préjudice grave face à une menace imminente . Les déclarations des autorités israéliennes, qui ont indiqué par la suite que les opérations ayant coûté la vie à des Palestiniens avaient été menées pour les « neutraliser » , font craindre que certains de ces meurtres, notamment dans les cas de privation arbitraire de la vie, puissent constituer des exécutions extrajudiciaires et, dans un contexte d’occupation et selon les circonstances, des homicides intentionnels .

15. Entre janvier et mai 2023, 112 Palestiniens (91 hommes, 19 garçons et 2 femmes) ont été tués en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est . En comparaison, entre janvier et mai 2022, 50 Palestiniens (33 hommes, 13 garçons et 4 femmes) avaient été tués en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est.

16. Il ressort des activités de suivi du HCDH que lors d’une opération menée le 22 février 2023 dans la vieille ville de Naplouse, les forces de sécurité israéliennes ont tué 12 Palestiniens (11 hommes et 1 garçon âgé de 16 ans) et en ont blessé 103 par des tirs à balles réelles et 55 par des tirs d’obus. Les forces de sécurité israéliennes ont affirmé que l’intervention, réalisée entre 10 h 20 et 13 heures, visait à appréhender trois hommes palestiniens qui auraient été impliqués dans des fusillades et auraient planifié d’autres attaques . L’opération a déclenché des accrochages entre des Palestiniens armés et les forces de sécurité israéliennes, qui ont utilisé notamment des projectiles explosifs tirés à l’épaule et lancé des gaz lacrymogènes depuis des drones dans deux zones habitées et très fréquentées du cœur commercial de la ville. De nombreux habitants, y compris des enfants, étaient présents à ce moment-là ; au moins 700 personnes auraient été touchées par les gaz lacrymogènes. Parmi les 12 Palestiniens tués, un homme de 72 ans a été abattu par les forces de sécurité israéliennes alors qu’il marchait. En tirant en direction d’un Palestinien armé qui s’enfuyait par la cour bondée d’une clinique, celles-ci ont également tué un jeune de 16 ans, un homme de 23 ans et un autre de 64 ans, qui ne faisaient que passer. Le 26 janvier 2023, elles ont mené une opération dans le camp de Jénine, ce qui a donné lieu à des accrochages au cours desquels 10 Palestiniens ont été tués et 28 blessés . Parmi eux, deux garçons ainsi qu’une femme de 61 ans ont été tués à l’intérieur de leur habitation, alors qu’ils ne représentaient aucune menace.

17. Dans certains cas, les meurtres commis en Cisjordanie semblent s’apparenter à des exécutions extrajudiciaires . Il ressort des activités de suivi du HCDH que, lors d’une opération menée à Jénine le 16 mars 2023, les forces de sécurité israéliennes ont tué 4 Palestiniens (dont 1 garçon) et en ont blessé au moins 23. Des vidéos montrent que deux hommes, membres présumés du Jihad islamique palestinien et du Hamas, ont été abattus à bout portant, bien qu’ils ne semblent pas armés et ne constituent vraisemblablement pas une menace imminente . L’un a été tué en prenant la fuite, tandis que l’autre a reçu une balle dans la tête alors qu’il était déjà immobilisé.

18. Certaines attaques, qualifiées de cas de « confirmation de l’élimination de la cible », font craindre que les forces de sécurité israéliennes aient pu recourir intentionnellement à la force meurtrière contre un suspect qui ne représentait plus aucune menace . Le 17 novembre 2021, un jeune Palestinien de 16 ans a été abattu dans la vieille ville de Jérusalem par un Israélien armé, supposément un colon, et la police des frontières israélienne, après avoir agressé et légèrement blessé deux membres de cette police avec un couteau . Une vidéo issue des caméras de surveillance de la police montre que les agents ont maintenu le garçon contre le mur, après quoi l’Israélien armé l’a abattu.

19. Bien que la plupart des victimes soient des hommes et des garçons, le recours à la force par les forces de sécurité israéliennes a causé de nombreux décès parmi les femmes et les jeunes filles. Au cours de la période considérée, cette pratique a coûté la vie à huit femmes et à deux filles palestiniennes en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, parmi lesquelles cinq ont été tuées lors d’opérations des forces de sécurité israéliennes et cinq lors d’agressions présumées contre des Israéliens. Dans la plupart des cas examinés, le recours à la force meurtrière par les forces de sécurité israéliennes s’est révélé inutile ou disproportionné et a apparemment entraîné la privation arbitraire de la vie. Il ressort des activités de suivi du HCDH que, le 11 décembre 2022, les forces de sécurité israéliennes ont abattu une jeune Palestinienne de 15 ans lors d’un raid nocturne à Jénine. La victime a reçu une balle dans la tête et deux balles dans la poitrine pendant qu’elle filmait l’intervention avec son téléphone depuis le toit de son habitation. On peut citer comme autre exemple le meurtre de Chirine Abou Aklé, journaliste d’Al-Jazeera tuée alors qu’elle effectuait un reportage sur une opération à Jénine . Par ailleurs, des attaques menées par des Palestiniens isolés ont coûté la vie à cinq femmes et une fille israéliennes.

20. Le recours à la force meurtrière contre les enfants s’est poursuivi. Entre le 1er juin 2021 et le 31 mai 2023, les forces de sécurité israéliennes ont tué 63 enfants (61 garçons et 2 filles) en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est : 24 ont péri lors de tirs croisés, 14 lors d’opérations des forces de sécurité israéliennes, 12 lors d’affrontements armés, 8 lors d’attaques menées supposément par des Palestiniens, 3 lors de manifestations et 2 dans d’autres circonstances. Parmi eux, 44 ont été touchés au-dessus de la taille, dont 16 à la tête, ce qui fait craindre un recours intentionnel à la force meurtrière. Au cours des cinq premiers mois de 2023, les forces de sécurité israéliennes ont tué 19 enfants palestiniens en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est, par des tirs à balles réelles : c’est le chiffre le plus élevé depuis 2008 , ce qui laisse penser qu’Israël n’a peut-être pas encore pris les mesures nécessaires pour limiter le recours à la force meurtrière contre les enfants. Parmi ces jeunes victimes, 17 ont été touchées par balle dans la partie supérieure du corps, dont 7 à la tête.

21. Dans plusieurs cas où des enfants ont été tués, une force meurtrière injustifiée semble avoir été utilisée intentionnellement, ce qui a apparemment donné lieu à des exécutions extrajudiciaires. Il ressort des activités de suivi du HCDH que le 29 avril 2023, lors d’affrontements à Touqou, au sud-est de Bethléem, les forces de sécurité israéliennes ont touché à la poitrine un jeune de 15 ans en utilisant une force meurtrière. Elles l’auraient tué après l’avoir menacé d’un châtiment pour avoir participé aux affrontements . Le 15 mars 2022, elles ont tué un jeune de 16 ans en lui tirant dans le dos. Les forces de sécurité israéliennes ont affirmé qu’il avait ouvert le feu sur elles. Cependant, selon des témoignages recueillis par le HCDH, il a été touché par balle dans le dos alors qu’il s’enfuyait lors d’une opération menée dans le camp de Balata, à Naplouse. Le 16 janvier 2023, à l’aube, les forces de sécurité israéliennes ont tué un jeune de 14 ans à l’issue d’une opération visant le camp de Dheïché, à Bethléem. Les informations rapportées par le HCDH laissent penser que les tireurs d’élite ont visé le garçon avec une force meurtrière après qu’un cocktail Molotov avait été lancé par un inconnu sur un véhicule blindé.

22. Les forces de sécurité israéliennes ont mis des enfants palestiniens en danger, notamment en recourant à des pratiques qui revenaient à les utiliser comme boucliers humains lors de certaines opérations de maintien de l’ordre. Au cours d’une opération menée à Jénine le 13 mai 2022, elles ont contraint une jeune fille de 16 ans, dont le frère était recherché, à rester pendant plus de deux heures devant l’un de leurs véhicules militaires lors d’un échange de tirs avec des Palestiniens armés. Le 22 février 2023, un jeune de 16 ans a été menotté, puis positionné entre les forces de sécurité israéliennes et des Palestiniens visés par une opération à Naplouse. Le 1er mars 2023, lors d’une opération menée dans le camp Aqbet Jabr, au sud de Jéricho, les forces de sécurité israéliennes ont contraint un Palestinien de 20 ans et son cousin de 21 mois à rester près d’elles pour leur servir de boucliers contre des jets de pierres.

23. Les forces de sécurité israéliennes ont continué d’utiliser des armes à feu, apparemment sans recourir à des armes moins meurtrières, indépendamment de la gravité de la menace potentielle détectée et souvent en premier ressort , notamment face à Palestiniens qui leur jetaient des pierres, ce qui ne constituait peut-être pas, dans la plupart des cas, une menace imminente de mort ou de blessure grave. Au cours de la période considérée, elles ont tué 56 Palestiniens (32 hommes et 24 garçons) en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, après avoir été visées par des jets de pierres. Par exemple, le 26 janvier 2023, lors d’affrontements avec des Palestiniens qui leur jetaient des pierres, elles ont tué par balle un homme de 22 ans originaire de Ram, au nord de Jérusalem, après qu’un Palestinien avait lancé des pièces d’artifice dans leur direction.

24. Dans la grande majorité des cas recensés, l’usage de la force par les forces de sécurité israéliennes n’a peut-être pas été légitime, ni conforme aux principes de nécessité et de proportionnalité . L’utilisation d’armes à feu causant le décès de personnes qui ne représentent pas une menace immédiate de mort ou de blessure grave peut constituer une violation de l’interdiction de privation arbitraire de la vie et peut, selon les circonstances, constituer un acte d’homicide intentionnel, c’est-à-dire un crime de guerre dans le contexte d’une occupation militaire .

25. Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a exprimé son inquiétude quant à l’impunité concernant l’usage illégitime de la force par les forces de sécurité israéliennes . Il faut que toute présomption d’homicide arbitraire donne lieu à une enquête diligente, efficace, indépendante et transparente et, s’il existe des preuves suffisantes, à des poursuites contre les auteurs de ce crime .

C. Pratiques pouvant constituer des peines collectives

26. Israël continue d’imposer des mesures punitives à des personnes et des communautés palestiniennes pour des infractions qu’elles n’ont pas commises, de façon discriminatoire . Les peines collectives sont expressément interdites par le droit international humanitaire et peuvent constituer des violations de nombreuses dispositions du droit international des droits humains .

27. Les autorités israéliennes ont poursuivi et développé la pratique consistant à murer et à démolir l’habitation des familles de Palestiniens soupçonnés d’avoir attaqué ou tué des Israéliens. Cette pratique a visé uniquement des Palestiniens, sans être appliquée à d’autres personnes accusées de faits similaires. Lorsqu’Israël a démoli à titre punitif 27 structures d’habitation en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, 132 Palestiniens (42 hommes, 35 femmes, 30 garçons et 25 filles) ont été expulsés de leur logement et 171 ont subi d’autres formes de préjudice .

28. En particulier, les décisions prises de murer immédiatement les habitations, première étape vers leur démolition, ont pris de plus grandes proportions, ce qui a encore affaibli le contrôle exercé par le système judiciaire . Au petit matin du 28 janvier 2023, les forces de sécurité israéliennes auraient fait une descente au domicile familial de l’auteur présumé de la fusillade survenue à Neve Yacoub le 27 janvier, lors de laquelle sept Israéliens auraient été tués par un Palestinien à Jérusalem-Est, et arrêté 15 de ses proches, dont sa mère. Le 29 janvier, le logement aurait été muré avec du béton et le 8 février, la famille a été informée qu’il serait démoli .

29. La démolition à titre punitif d’habitations familiales peut être accompagnée d’autres violations des droits humains. Le 15 novembre 2022, un Palestinien du village de Harès (province de Salfit), soupçonné d’avoir tué trois Israéliens et d’en avoir blessé trois près de la colonie d’Ariel, a été abattu . Il ressort des activités de suivi du HCDH que les forces de sécurité israéliennes ont confisqué la dépouille de l’auteur présumé de l’attaque, fait une descente au domicile familial, arrêté son cousin et maintenu ce dernier en détention sans inculpation pendant 27 jours, durant lesquels il a dit avoir subi de mauvais traitements. Le Coordonnateur des activités gouvernementales dans les territoires a annulé le permis de travail de dizaines de proches de l’auteur présumé, pour lesquels un emploi en Israël ou dans les colonies israéliennes constituait la principale source de revenus. Selon les informations rapportées par le HCDH, le domicile familial de l’auteur présumé a été démoli le 3 mai 2023.

30. Le 10 février 2023, le père de l’auteur présumé d’un attentat à la voiture bélier qui avait tué trois Israéliens aurait été convoqué par le bureau du Ministère israélien de l’intérieur à Jérusalem-Est, pour une vérification de son statut de résident. Ses frères ont tous été détenus, pendant des périodes variables, et deux d’entre eux ont été assignés à résidence. Le 14 mars 2023, le beau-frère de l’auteur présumé a été arrêté et placé en détention administrative jusqu’au 30 avril. Dans aucun de ces cas, les proches de l’auteur présumé n’ont été accusés ou inculpés d’une quelconque infraction.

31. Les pratiques israéliennes pouvant constituer des peines collectives touchent de manière disproportionnée les femmes et les filles palestiniennes et ont de graves répercussions sur leur bien-être physique et psychologique . Dans certains cas rapportés, en plus d’avoir subi des expulsions, les proches des auteurs présumés, souvent des épouses, des mères et des sœurs, auraient été arbitrairement arrêtés, détenus et maltraités.

32. Les autorités israéliennes ont peut-être utilisé arbitrairement les pouvoirs administratifs prévus par la législation antiterroriste pour saisir les biens de Palestiniens reconnus coupables d’avoir agressé ou tué des Israéliens . Ces mesures touchent les membres des familles de prisonniers palestiniens, dont l’habitation a dans de nombreux cas été démolie illégalement par les autorités israéliennes. Selon les informations disponibles, à la fin du mois de février 2023, les autorités israéliennes avaient saisi les comptes bancaires et les objets de valeur de 160 personnes de Jérusalem-Est (24 détenus, 55 anciens détenus et 81 membres de familles de Palestiniens emprisonnés) .

33. Au cours de la période considérée, le bouclage de Gaza est entré dans sa seizième année. Le Secrétaire général a exprimé à maintes reprises sa préoccupation quant aux conséquences de cette mesure pour la population civile, soulignant qu’elle pourrait constituer une peine collective . Les autorités israéliennes ont continué d’aggraver les souffrances de la population civile de Gaza par des mesures pouvant constituer des violations massives de ses droits économiques, sociaux et culturels, notamment par la réduction intermittente ou l’interdiction totale de la zone de pêche et la fermeture des points de passage entre Gaza et Israël, qui limite considérablement la circulation des personnes, du combustible, du gaz, des vivres, des fournitures médicales et des articles de première nécessité à destination ou en provenance de la bande de Gaza . En plus d’empêcher les civils de fuir les violences liées au conflit, ces fermetures ont eu de graves conséquences pour les personnes devant fuir les violences sexistes.

34. Il ressort des activités de suivi du HCDH que la marine israélienne a continué de restreindre l’accès côtier de Gaza, en tirant des balles réelles ou recouvertes de caoutchouc et en utilisant des canons à eau contre les pêcheurs locaux. En 2022, elle a considérablement intensifié les mises en détention de pêcheurs naviguant le long de la côte de Gaza (souvent dans un rayon de 1 à 3 milles marins, donc dans les zones de pêche autorisées par Israël), ce qui a accentué leur précarité. Selon les informations rapportées par le HCDH, 66 d’entre eux ont été arrêtés en 2022, contre 12 en 2021. Au cours des cinq premiers mois de 2023, la marine israélienne a arrêté 14 pêcheurs gazaouites. Souvent, elle les a forcés à se déshabiller et à sauter dans l’eau froide, les a menottés et leur a bandé les yeux, et leur a refusé l’accès à leur famille ou à une représentation en justice. En outre, 23 pêcheurs ont été blessés, la plupart lors d’arrestations en 2022, par des balles recouvertes de caoutchouc tirées par la marine israélienne, y compris à bout portant. Par ailleurs, 7 bateaux ont été confisqués en 2021, 24 en 2022 et 4 au 31 mai 2023, ce qui a eu de lourdes répercussions sur les moyens de subsistance des pêcheurs concernés. Les autorités israéliennes n’ont pas inculpé les pêcheurs arrêtés et les ont relâchés, la plupart dans la journée, ce qui laisse penser que ces arrestations ont pu être arbitraires.

35. Selon le Jerusalem Legal Aid and Human Rights Center, à la fin de la période considérée, les autorités israéliennes avaient confisqué les corps de 127 Palestiniens, dont 1 femme et 10 garçons, tués par les forces de sécurité israéliennes . Il n’y a eu aucun fait nouveau concernant la situation des 2 civils israéliens et des dépouilles de 2 soldats israéliens retenus à Gaza . Le Comité des droits de l’homme a noté que le fait de confisquer les corps de personnes décédées et de priver les familles du droit de les enterrer pouvait constituer un acte de torture et une forme de mauvais traitements . La non-restitution des dépouilles est également incompatible avec les obligations d’Israël en tant que Puissance occupante .

D. Détention et mauvais traitements

36. Le nombre de Palestiniens détenus par Israël a considérablement augmenté. Selon des rapports d’organisations non gouvernementales, à la fin du mois de mai 2023, l’administration pénitentiaire israélienne détenait au nom de raisons de sécurité 4 857 prisonniers (dont 160 enfants, parmi lesquels 1 fille, et 29 femmes), notamment 181 Gazaouites . La plupart avaient été arrêtés dans le Territoire palestinien occupé et étaient incarcérés en Israël. Le droit international humanitaire prévoit que les personnes inculpées seront détenues dans le pays occupé et que, si elles sont condamnées, elles devront y purger leur peine. La déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale peuvent être considérés comme des infractions graves à la quatrième Convention de Genève et comme des crimes de guerre au titre de l’article 8 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale . Conformément à la réglementation israélienne, les personnes incarcérées pour raisons de sécurité sont soumises à des conditions difficiles, telles que la restriction de l’accès à leur famille et au monde extérieur par la privation d’appels téléphoniques, de congés pénitentiaires ou de visites conjugales . Pour faire pression sur le Hamas, il serait interdit aux prisonniers gazaouites affiliés à ce mouvement de recevoir la visite de leur famille . Le refus de laisser les personnes privées de liberté recevoir des visites de leur famille peut constituer un traitement contraire à l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et, dans certaines circonstances, une peine collective

37. Selon l’Addameer Prisoner Support and Human Rights Association, le nombre de Palestiniens en détention administrative a doublé (passant de 495 à 1 131) entre le mois de mai 2021 et le 31 mai 2023, où il a atteint son niveau le plus élevé depuis 2008 . La détention administrative est appliquée pendant des périodes indéfinies et, souvent, sur la base d’informations secrètes, sans qu’il soit possible de la contester véritablement ; elle pourrait entraîner des souffrances physiques et mentales susceptibles de constituer des actes de torture ou d’autres mauvais traitements . Selon le Comité des droits de l’homme, la détention administrative équivaut généralement à une détention arbitraire étant donné que d’autres dispositifs efficaces sont disponibles pour faire face à la menace. Pour être conforme au droit international des droits humains, toute privation de liberté doit être appliquée pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi. Lorsqu’aucun fondement juridique raisonnable n’est invoqué, la détention peut être considérée comme arbitraire . En contraste avec le nombre élevé de Palestiniens concernés, au 1er mars 2023, seuls quatre Israéliens se trouvaient en détention administrative, ce qui fait craindre que cette pratique touche les Palestiniens de manière disproportionnée .

38. Le 2 mai 2023, Khader Adnan, militant palestinien et membre politique du Jihad islamique palestinien, a été retrouvé mort dans sa cellule du centre de détention Nizan, à l’issue d’une grève de la faim de 86 jours. Les autorités israéliennes n’ont pas veillé à ce qu’il soit transféré dans un hôpital, alors que des représentants de la société civile, notamment des experts médicaux de Physicians for Human Rights, son avocat et sa famille avaient insisté pour qu’il soit hospitalisé immédiatement . Ayant été précédemment détenu par les autorités israéliennes à 12 reprises, Khader Adnan a passé environ huit ans dans les prisons israéliennes, souvent sans inculpation ni jugement, et y a fait cinq grèves de la faim pendant de longues périodes.

39. Le 1er février 2023, le Ministre israélien de la sécurité nationale a annoncé des mesures visant à aggraver les conditions de détention des Palestiniens (y compris des femmes), dont certaines auraient déjà été mises en œuvre . Elles consisteraient notamment à supprimer les fours servant à cuire du pain, à réduire la durée des bains et à diminuer la quantité d’eau allouée pour les douches. Des détenues de la prison Damon ont signalé à Addameer que le contrôle quotidien des cellules était assuré par un gardien qui accompagnait la gardienne . Selon Physicians for Human Rights, les protestations contre les mesures annoncées ont donné lieu à de sévères représailles, notamment à une descente dans le quartier des femmes de la prison Damon, au placement de détenues à l’isolement et à l’interdiction des visites familiales et de l’utilisation des téléphones pendant un mois . L’administration pénitentiaire israélienne aurait effectué des descentes similaires dans des prisons pour hommes .

40. Selon Addameer, en mai 2023, plus de 700 Palestiniens souffrant de graves problèmes de santé, dont 200 atteints de maladies chroniques, étaient détenus dans les prisons israéliennes . L’article 40A de la loi antiterroriste de 2016 empêche la libération anticipée des personnes emprisonnées pour raisons de sécurité et condamnées pour des infractions considérées comme des actes de terrorisme en lien avec des meurtres. Jusqu’à présent, cet article n’a été appliqué qu’aux Palestiniens, y compris ceux atteints d’une maladie en phase terminale .

41. Une femme de 24 ans souffrant d’un trouble neurologique a été arrêtée lors d’une descente menée à son domicile à 3 heures du matin et envoyée, mains et jambes entravées, au centre de détention Jalama. Elle a signalé au HCDH qu’elle était maintenue à l’isolement et soumise à des mauvais traitements. Elle a été transférée à la prison Damon et condamnée à cinq mois d’emprisonnement, au cours desquels elle n’a pas été soignée de manière appropriée, ce qui a entraîné des complications de santé. D’autres femmes ont signalé qu’on leur avait refusé des médicaments ou qu’on leur en avait administrés sans leur consentement.

42. Les Palestiniens ont continué de faire l’objet de détentions provisoires prolongées . La détention avant jugement ne doit pas être la règle et doit reposer sur une évaluation au cas par cas déterminant qu’elle est raisonnable et nécessaire au regard de toutes les circonstances, par exemple pour éviter que l’intéressé ne prenne la fuite, ne modifie des preuves ou ne commette une nouvelle infraction . En outre, comme l’a déclaré le Comité des droits de l’homme, elle doit être aussi brève que possible .

43. Des défenseuses palestiniennes des droits humains ont indiqué que la menace d’une détention provisoire prolongée, à laquelle elles pensaient pouvoir échapper en plaidant coupable, les poussait à accepter une procédure de jugement sur reconnaissance préalable de culpabilité, convaincues qu’innocentes ou pas, elles seraient déclarées coupables et condamnées. Ce constat est étayé par des données que les forces de défense israéliennes ont fournies au Mouvement pour la liberté d’information, selon lesquelles entre 2018 et 2021, 96 % des affaires ouvertes par des procureurs militaires contre des Palestiniens se sont soldées par une condamnation, et seulement 0,3 % par un acquittement. Parmi les condamnations, 99,6 % ont été prononcées à la suite d’un plaider-coupable .

44. Des Palestiniennes auraient été soumises à des mauvais traitements fondés sur le genre lors de leur arrestation, de leur interrogatoire ou de leur détention. Une Palestinienne de Jérusalem-Est a fait part de fouilles à nu inutiles, dégradantes et humiliantes qu’elle et sa fille, mineure, qui avaient des liens de parenté avec l’auteur présumé d’une infraction, avaient subies à leur domicile. Des femmes ont indiqué qu’on leur avait infligé des traitements destinés à leur arracher des aveux et à les dissuader de militer. Une Palestinienne de Jérusalem-Est a déclaré avoir essuyé des insultes verbales à caractère sexuel de la part d’une policière israélienne lors de son transfert vers Israël. Une autre Palestinienne a raconté avoir été transportée, pieds et mains liés, dans une camionnette « semblable à une cage », « sombre et étroite ». L’ancienne Directrice de Health Work Committees (organisation non gouvernementale palestinienne œuvrant dans le domaine de la santé et du développement), Shatha Odeh, a relaté que les trajets effectués entre Ramat HaSharon et la prison Ofer dans ces camionnettes duraient huit heures et étaient suivis de huit à onze heures d’interrogatoire. Des femmes ont qualifié l’expérience d’humiliante et d’intimidante.

45. Les forces de sécurité israéliennes auraient eu recours à la violence physique lors d’interrogatoires, en particulier contre des jeunes hommes et des garçons palestiniens. Un adolescent a déclaré avoir subi de multiples interrogatoires, au cours desquels il avait été giflé et frappé à coups de bâton, de poing et de genou, au visage et à la tête, et à coups de pied, aux jambes et au ventre. Les autorités israéliennes n’ont toujours pas pris de mesures législatives ou autres pour garantir que, quand il est établi qu’une déclaration a été faite à la suite de tortures, cette déclaration ne soit pas invoquée comme preuve au cours de poursuites, quelles qu’elles soient .

46. Entre le 31 mai 2021 et le 30 mars 2023, on a recensé en moyenne mensuelle 146 enfants palestiniens détenus dans les prisons israéliennes , dont 27 % purgeaient une peine, les autres étant incarcérés dans l’attente de leur procès ou de leur jugement ou à titre administratif. Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) a confirmé que pendant cet intervalle, au moins 29 enfants palestiniens avaient été retenus en détention administrative par Israël. Selon les témoignages sous serment de 149 enfants palestiniens détenus par l’armée israélienne (en Israël pour 57 % d’entre eux), l’arrestation, le transfert, l’interrogatoire et la détention donneraient lieu à des mauvais traitements systématiques, notamment des violences physiques (77 %) et des privations de nourriture et d’eau (61 %), d’accès aux toilettes (47 %) et d’accès à un avocat ou à un parent avant et pendant l’interrogatoire (91 %) . En outre, 50 enfants ont déclaré avoir été placés à l’isolement lors d’interrogatoires, pendant des périodes allant d’un à quarante-cinq jours. Le droit international des droits humains dispose que la détention d’enfants doit n’être qu’une mesure de dernier ressort et être d’une durée aussi brève que possible .

47. Les informations recueillies indiquent, de même, une utilisation inappropriée de la mise à l’isolement contre les Palestiniens. Le 13 mars 2023, le tribunal de district de Beersheba a prolongé de six mois l’isolement de seize mois auquel était soumis Ahmad Manasra, bien que ce prisonnier palestinien de 21 ans ait été diagnostiqué comme souffrant de schizophrénie. Pendant son séjour en prison, depuis l’âge de 13 ans, sa santé mentale se serait considérablement détériorée. L’isolement provoque souvent de graves souffrances mentales et physiques qui s’apparentent à de la torture ou à des traitements cruels et inhumains. La loi antiterroriste de 2016 empêche la libération anticipée d’Ahmad Manasra pour raisons médicales.

E. Restrictions des droits aux libertés d’expression, de réunion et d’association

48. Au cours de la période considérée, les autorités israéliennes ont continué de restreindre les droits aux libertés d’expression, de réunion pacifique et d’association , en redoublant d’efforts pour réduire au silence les personnes défendant les droits humains des Palestiniens et mettre un terme aux activités des organisations de la société civile œuvrant dans ce domaine, sous prétexte de leur affiliation à des organisations terroristes, et peut-être aussi en représailles pour leur coopération avec l’Organisation des Nations Unies .

49. La législation antiterroriste israélienne a parfois été appliquée pour interdire le travail légitime des organisations consacrées à l’action humanitaire et à la défense des droits humains . Les forces de sécurité israéliennes ont convoqué ou arrêté des membres du personnel de sept de ces organisations, qu’Israël classait parmi les entités terroristes ou jugeait illégales . Les citations à comparaître, les arrestations, les détentions et les intimidations semblent avoir visé tout particulièrement les défenseuses des droits humains, parfois avec une orientation clairement sexiste .

50. Des interdictions de voyager ont visé les personnes défendant les droits humains, ce qui a empêché les membres des organisations pointées du doigt d’exprimer dans les instances internationales leurs préoccupations en matière de droits humains. Par exemple, la Directrice exécutive de Union of Palestinian Women’s Committees, Tahreer Jaber, et la Directrice exécutive de Bisan, Ubai Al-Aboudi, frappées d’une interdiction de voyager, n’ont pas pu se rendre à la Commission d’enquête sur le Territoire palestinien occupé et Israël pour témoigner le 8 novembre 2022 .

51. En novembre 2021, une analyse scientifique et technique menée par l’organisation non gouvernementale Front Line Defenders sur des appareils appartenant à des personnes palestiniennes œuvrant à la défense des droits humains ou travaillant pour des organisations de la société civile a révélé que ceux des directions du Bisan Center, d’Al-Haq et d’Addameer avaient été infectés par le logiciel espion Pegasus , .

52. Le fait, pour les sept organisations d’action humanitaire et de défense des droits humains, d’être assimilées à des entités terroristes ou illégales a eu de graves répercussions sur leurs activités : retraits de financement, rejets ou retards de virements bancaires, convocations à des interrogatoires, interdictions de voyager, mise en détention, notamment administrative, de membres du personnel et du conseil d’administration et démission de leurs pairs par crainte de subir le même sort ou des représailles. Ces mesures ont eu un impact considérable sur l’action des défenseuses des droits humains et perturbé des services essentiels pour les femmes, notamment les services de santé les concernant tout particulièrement.

53. Selon la Commission chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et en Israël, les autorités israéliennes ont pris pour cible les organisations de la société civile qui dénonçaient les violations des droits humains, ce qui a fait craindre, dans un cas au moins, que les mesures prises puissent constituer un crime de guerre . Le 7 mars 2022, les forces de sécurité israéliennes ont arrêté un membre du personnel d’Addameer (l’une des organisations désignées comme terroristes), Salah Hammouri, puis l’ont placé en détention administrative pour une durée de trois mois, prolongée à deux reprises, sur la base de « preuves secrètes ». L’homme n’a jamais été inculpé ni jugé . En octobre 2021, il s’est vu retirer son permis de séjour à Jérusalem-Est pour cause de « manquement à l’allégeance » à Israël et, le 12 décembre 2022, il a été expulsé vers la France, apparemment en violation du droit international humanitaire, qui interdit l’expulsion de la population protégée d’un territoire occupé .

54. Le 30 août 2022, l’ancien chef du bureau de Gaza de l’organisation non gouvernementale World Vision International, Mohammad el-Halabi, a été condamné par un tribunal israélien à douze ans de prison. Il a été jugé coupable pour 13 chefs d’accusation liés au terrorisme , alors que de graves violations du droit à une procédure régulière auraient été commises à son égard : détention provisoire d’une durée de six ans , torture, mise au secret, extorsion d’aveux sous la contrainte, absence de preuves à charge présentées en audience publique, recours massif à des preuves secrètes, audiences tenues à huis clos sans motif valable, et restriction de l’accès à son avocat, entre autres . Le recours qu’il a déposé devant la Cour suprême est en instance depuis le 18 octobre 2022, après une succession de reports d’audience, principalement en raison de procédures de confidentialité et de restrictions imposées à la défense . De graves violations du droit à une procédure régulière peuvent rendre arbitraire une détention .

55. Les journalistes palestiniens demeurent aux prises avec un environnement qui restreint la liberté d’expression et les expose à des risques de violence. Selon le Committee to Protect Journalists, Israël n’a poursuivi aucun des auteurs de meurtres commis sur 20 journalistes étrangers (19 hommes et 1 femme), de nationalité palestinienne ou autre, depuis 2001 . Une journaliste palestinienne indépendante, Lama Ghousheh, a été arrêtée le 4 septembre 2022 pour « identification à une organisation terroriste et incitation à la violence », en raison de ses reportages, diffusés sur les médias sociaux, concernant des Palestiniens tués par les forces de sécurité israéliennes, et de ses entretiens avec des prisonniers libérés. Le 13 septembre 2022, elle a été relâchée dans le cadre d’une assignation à résidence à la condition de ne pas accéder aux médias sociaux et de ne pas communiquer avec des personnes extérieures à sa famille.

F. Restrictions à la liberté de circulation et leurs effets sur l’exercice d’autres droits

56. Les autorités israéliennes ont continué de restreindre la liberté de circulation, principalement au moyen d’un régime de permis discriminatoire, et en restreignant unilatéralement l’accès à certaines zones de Gaza, sur terre et en mer, dans le cadre de la fermeture de la province . Ces restrictions ont continué de perturber la vie quotidienne des Palestiniens et eu de graves répercussions qui les ont empêchés d’exercer d’autres droits, notamment le droit au travail, à un niveau de vie adéquat, à l’éducation et à la santé. Les restrictions à la liberté de circulation et aux déplacements imposées par Israël, notamment le système de points de contrôle en Cisjordanie, restent un des principaux facteurs qui empêchent les femmes palestiniennes d’accéder aux services de santé, à l’éducation et aux possibilités d’emploi et d’exercer leurs droits en tant que femmes et de bénéficier de l’égalité des genres . Le Comité des droits de l’homme s’est déclaré profondément préoccupé par la persistance des restrictions à la liberté de circulation imposées au moyen du régime de permis discriminatoire . En outre, il s’est inquiété du fait que les violations du droit à la liberté de circulation renforçaient le climat de coercition et d’oppression à l’égard des Palestiniens, en les forçant à fuir la communauté où ils étaient implantés depuis des générations. Le déplacement et la réinstallation dans d’autres zones résidentielles du fait d’un climat de coercition pourraient constituer une forme de transfert forcé, contraire aux obligations incombant à Israël au regard du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme .

57. La législation, que le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale juge discriminatoire à l’égard de la population palestinienne du Territoire palestinien occupé, a continué d’être appliquée afin que le statut de résident soit retiré à des Palestiniens de Jérusalem-Est occupée. Selon HaMoked, les chiffres du Ministère de l’intérieur montrent qu’en 2022, 81 résidents palestiniens de Jérusalem-Est, dont 42 femmes et 1 enfant, ont perdu leur statut de résident pour avoir quitté le pays, contre 26 en 2021 . Toujours selon HaMoked, entre 1967 et 2022, Israël a retiré ce statut à 14 808 Palestiniens de Jérusalem-Est, au motif qu’il avait « expiré » . Les restrictions à la liberté de résidence et de circulation fragmentent les communautés palestiniennes, les isolent les unes des autres et les ségréguent de la population israélienne juive.

58. Depuis 2003, Israël applique des lois visant à refuser aux Palestiniens le statut de résident dans le cadre d’un regroupement familial sur son territoire . En décembre 2022, à la suite d’une requête déposée par des organisations de défense des droits humains, la Haute Cour de justice a demandé au Gouvernement d’envisager des mesures d’atténuation de responsabilité au regard de la loi , qui n’ont pas encore été mises en œuvre. Les autorités israéliennes ont continué d’utiliser le régime discriminatoire de permis et la « procédure de délivrance de permis pour les personnes de Judée-Samarie résidant dans la bande de Gaza » afin d’interdire le regroupement familial des Palestiniens gazaouites en Israël ou en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est ; en conséquence, les familles dont un ou plusieurs membres sont enregistrés comme résidents de Gaza sont, soit séparées, soit forcées de partir s’y installer . Selon l’organisation non gouvernementale Gisha, cela a pour effet de pousser la population palestinienne à quitter la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, pour Gaza . Les normes culturelles faisant qu’elles vivent généralement avec leur mari, les femmes palestiniennes sont touchées de manière disproportionnée par cette politique . Cette pratique, instaurée dans le cadre de la politique israélienne de séparation, favorise le déplacement forcé des Palestiniens de Cisjordanie, y compris de Jérusalem-Est, vers Gaza .

59. En apportant des modifications à la législation entre 2008 et 2018, la Knesset a habilité le Gouvernement à retirer leur citoyenneté et leur permis de séjour permanent à Jérusalem-Est aux Palestiniens reconnus coupables d’actes constituant un « manquement à l’obligation de loyauté » . En février 2023, ces pouvoirs ont été étendus de sorte que les Palestiniens condamnés à une peine de prison pour « acte de terrorisme » et ayant reçu des avantages monétaires de l’Autorité palestinienne prétendument en relation avec l’acte qu’ils auraient commis puissent être privés de leur citoyenneté et de leur permis de séjour . Cette modification permet à Israël de transférer ou d’expulser des Palestiniens, y compris de Jérusalem-Est occupée, dans d’autres parties de la Cisjordanie, Gaza ou un pays tiers. Les transferts forcés, ainsi que les déportations de personnes protégées hors du territoire occupé, sont interdits par la quatrième Convention de Genève et constituent une infraction grave à celle-ci . Le 5 mars 2023, après que Munir Ar-Rajabi eut purgé une peine de vingt ans d’emprisonnement, Israël aurait retiré à l’ancien prisonnier palestinien son permis de séjour à Jérusalem-Est et l’aurait transféré à Hébron, en Cisjordanie .

60. Le 4 septembre 2022, le Coordonnateur des activités gouvernementales dans les territoires a publié une version actualisée de la « procédure d’entrée des étrangers en Judée-Samarie », entrée en vigueur le 20 octobre 2022, qui régit toutes les entrées d’étrangers en Cisjordanie uniquement. Selon HaMoked, la procédure est très restrictive et pourrait nuire à des milliers de familles dans lesquelles l’un des conjoints est un ressortissant étranger. Elle pourrait perturber le fonctionnement normal des institutions éducatives et universitaires et empêcher de nombreux détenteurs de passeports étrangers de travailler, de faire du bénévolat ou d’étudier dans le Territoire palestinien occupé, ce qui porterait préjudice à l’économie et à la vie locales .

61. Les restrictions de circulation imposées par Israël ont continué d’avoir des effets très préoccupants sur le droit à la santé des Palestiniens . Selon l’Organisation mondiale de la Santé, entre le 1er juin 2021 et le 31 mai 2023, les autorités israéliennes n’ont approuvé que 26 419 (soit 69,1 %) des 38 226 demandes de permis concernant des patients gazaouites. L’acheminement d’équipements et de fournitures médicaux essentiels vers Gaza est resté limité, alors que les périodes de pénurie perduraient : d’après les informations reçues au 31 mai 2023, pour 43 % des médicaments essentiels et 25 % des produits médicaux jetables essentiels, les stocks représentaient moins de trente jours de réserves.

IV. Recommandations

62. Les recommandations qui suivent doivent être lues conjointement avec les recommandations déjà formulées dans les précédents rapports du Secrétaire général et du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.

63. Le Secrétaire général recommande qu’Israël :
a) Respecte le droit international humanitaire dans la conduite des hostilités, en particulier au regard des principes de nécessité militaire, de distinction, de proportionnalité et de précaution, et veille à ce que les responsables de toutes violations du droit international humanitaire et du droit international des droits humains répondent de leurs actes ;
b) Fasse que la force soit toujours employée dans le respect du droit international et des normes internationales, y compris pendant les opérations de maintien de l’ordre, en réglementant l’utilisation des balles réelles, en donnant aux forces de sécurité le matériel et la formation nécessaires pour qu’elles utilisent des armes à létalité réduite, en veillant à ce que toutes les opérations de maintien de l’ordre soient planifiées et exécutées de sorte à réduire au minimum la menace mettant la vie en danger et en adoptant des sanctions disciplinaires et pénales appropriées à l’égard des membres des forces de sécurité qui ne respectent pas ces dispositions ;
c) Procède rapidement à une enquête pénale indépendante, impartiale, transparente, approfondie et efficace sur tous les cas d’emploi de la force pendant les opérations de maintien de l’ordre qui entraînent la mort ou occasionnent des blessures, fasse en sorte que les personnes responsables répondent des violations commises et octroie aux victimes une réparation adéquate ;
d) Prenne toutes les mesures qui s’imposent pour garantir le plein respect du droit international humanitaire, surtout en ce qui concerne les civils vivant sous occupation ou la conduite des hostilités, et pour s’assurer qu’aucune violation ne reste impunie ;
e) Mette immédiatement fin à toutes pratiques pouvant s’apparenter à de la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, veille à ce que toutes allégations de violations donnent rapidement lieu à des enquêtes impartiales, approfondies et indépendantes, fasse en sorte que les responsables répondent de leurs actes, octroie des réparations intégrales aux victimes et donne des garanties de non-répétition ;
f) Veille à ce que la législation antiterroriste soit conforme au droit international et aux normes internationales et, en particulier, à ce que les définitions des « actes terroristes » et des « organisations terroristes » soient compatibles avec les principes de légalité, de prévisibilité et de sécurité juridique. Ces définitions doivent être accessibles et formulées avec précision, respecter les principes de non-discrimination et de non-rétroactivité, et faire que les organisations palestiniennes d’action humanitaire et de défense des droits humains cessent d’être jugées illégales ou classées parmi les organisations terroristes ;
g) Mette fin aux détentions arbitraires et garantisse le respect des droits des détenus, y compris toutes les garanties de procédure et d’un procès équitable ;
h) Prenne toutes les mesures qui s’imposent pour mettre fin à toutes les pratiques discriminatoires et illégales, notamment celles qui s’apparentent à des peines collectives, et pour abroger toutes les lois discriminatoires ;
i) Lève immédiatement les mesures de bouclage de Gaza et garantisse la liberté de circulation de tous les Palestiniens du Territoire occupé. Toute restriction de la liberté de circulation doit être conforme au droit international, en particulier au droit international des droits humains ;
j) S’acquitte de ses responsabilités en tant que Puissance occupante, notamment en ce qui concerne l’accès des Palestiniens aux soins de santé ;
k) Respecte les droits des enfants palestiniens, y compris le droit à la vie, et s’assure qu’ils sont traités avec les égards dus à leur âge. Ils ne doivent être détenus qu’en dernier recours et, le cas échéant, le moins longtemps possible ;
l) Fasse que les journalistes, les parties prenantes de la société civile et les personnes, notamment les femmes, qui défendent les droits humains puissent mener leurs activités sans être harcelés ni soumis à des procédures judiciaires contraires au droit international des droits humains, et que leurs droits soient respectés et protégés ;
m) Veille à ce que les cas signalés de meurtres, d’intimidations ou d’attaques visant des journalistes ou des parties prenantes de la société civile fassent l’objet d’enquêtes approfondies, afin que les auteurs de ces actes soient poursuivis. En particulier, il recommande qu’Israël veille à ce que les enquêtes concernant des attaques contre les défenseuses des droits humains tiennent compte des questions de genre, et prenne d’urgence des mesures conservatoires pour prévenir d’autres actes de violence, de menace et d’intimidation fondées sur le genre ;
n) Accorde au personnel du HCDH recruté sur le plan international des visas et un accès sans restriction, afin que celui-ci puisse mener à bien le travail crucial qui lui a été confié en matière de droits humains dans le Territoire palestinien occupé.

64. Le Secrétaire général recommande que les autorités et les groupes armés palestiniens de Gaza respectent pleinement le droit international humanitaire, en particulier les principes de distinction, de proportionnalité et de précaution, et veillent à ce que les auteurs de violations répondent de leurs actes.

65. En outre, le Secrétaire général :
a) Demande à tous les États de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir le respect des Conventions de Genève du 12 août 1949 par la Puissance occupante, compte tenu des moyens dont ils peuvent raisonnablement disposer et de l’influence qu’ils peuvent exercer, et rappelle aux États, en particulier à ceux ayant des liens étroits avec les parties, qu’ils doivent user de leur influence pour garantir le respect du droit international ;
b) Demande à tous les États de prendre les mesures nécessaires pour garantir le plein respect et l’application des résolutions du Conseil de sécurité, de l’Assemblée générale et du Conseil des droits de l’homme.

Référence : A/78/502