En développant très rapidement les Forces spéciales, le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld ne cherche pas seulement à doter les États-Unis de moyens d’intervention rapides échappant au droit international. Il constitue surtout une armée parallèle pour vaincre les résistances de l’establishment militaire. Mais en affranchissant les Forces spéciales aussi bien du droit international que de la chaîne de commandement traditionnelle, il en fait des milices incontrôlables et s’expose à devoir assumer leurs pires exactions.
À Washington, les partisans de l’impérialisme militaire US -et principalement les membres du Center for Security Policy [1]- considèrent chaque jour un peu plus la Charte de San Francisco et le Conseil de sécurité des Nations Unies comme des obstacles à leurs ambitions. Ils interviennent sans cesse dans les médias pour mettre en cause la suprématie des traités internationaux sur la Constitution et les lois adoptées par les États-Unis.
Ils rencontrent surtout l’opposition d’officiers supérieurs qui se considèrent comme responsables de la sécurité collective et redoutent donc, par principe, de faire parler les armes ; ainsi que l’opposition de diplomates, par nature peu enclins à souhaiter des affrontements généralisés. Ces partisans du multilatéralisme ont fait du général-secrétaire d’État Colin L. Powell leur porte-parole.
La réforme des armées est devenue l’un des points essentiels de cristallisation de ce débat. Le secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, ne manque aucune occasion de stigmatiser en public la lourdeur bureaucratique de sa propre administration et d’exhorter le corps des officiers à s’adapter à ses exigences. Cette crise perpétuelle est devenue si aiguë qu’elle paralyse partiellement l’état-major interarmes et rend difficile toute nomination.
Au cours des derniers mois, premièrement, un Commandement central d’Amérique du Nord a été créé. En violation de l’esprit, sinon de la lettre, du Comitatus Act [2], il place la Garde nationale dépendant des gouverneurs et les forces armées présidentielles sous un commandement unique permettant une ingérence des militaires dans la politique intérieure. En outre, par voie de traité, le Commandement central a de facto pris autorité sur ce qui reste de l’armée canadienne[[Le 9 décembre 2002, le gouvernement canadien a rendu public un accord de défense avec les États-Unis. En théorie, les deux pays ont désormais un système de défense commun, coordonné au sein du Commandement de l’Amérique du Nord. En pratique, cet état-major est purement états-unien et l’armée can
[1] Sur le Center of Security Policy, voir notre étude Les marionnettistes de Washington, in Réseau Voltaire du 13 novembre 2002. Accessible sur la Zone Réseau Les marionnettistes de Washington .
[2] Le Posse Comitatus Act (PCA), adopté à l’issue de la guerre de sécession et incorporé au Titre 18, Section 1385 de l’US Code, interdit aux forces armées (mais pas à la Garde nationale) de participer au maintien de l’ordre, sauf dérogation expresse du Congrès.
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