L’administration Bush mérite le respect pour son engagement à long terme en faveur de la démocratie au Moyen-Orient. Cependant même une bonne idée peut être détournée et avoir des effets pervers, surtout si vous êtes soupçonnés d’avoir des objectifs cachés derrière les bonnes intentions affichés.
C’est précisément ce qui se passe avec « l’initiative du grand Moyen-Orient » de l’administration Bush, un texte proposé aux membre du G8 pour développer la démocratie, la liberté et les droits des femmes dans la région. Le monde arabe l’a reçu défavorablement et Hosni Moubarak l’a qualifié de « texte trompeur ». L’administration Bush peut encore le sauver, mais il faut agir vite.
Il faut en terminer avec la tonalité paternaliste car elle provoque des inquiétudes dans une région qui n’a pas oublié le colonialisme. Il faut aussi avoir conscience qu’une démocratie rapidement posée pourrait avoir des résultats imprévus. Aujourd’hui lors d’une élection libre en Arabie saoudite Ben Laden gagnerait plus sûrement que le prince Abdallah. Sans tradition constitutionnelle, la démocratie dérive vite en régime autoritaire plébiscitaire.
Il est également important de convaincre les Européens du bien fondé de ce programme, ce qui passe par un engagement en parallèle dans le processus de pays israélo-palestinien. En effet, depuis les déclarations de Dick Cheney à Davos, affirmant que la démocratie était un préalable à la paix, les Européens croient que cette initiative est un moyen de repousser toute résolution du conflit.
Pour que le projet fonctionne, il faut qu’il soit une réflexion commune aux États-Unis, aux pays arabes et aux Européens et qu’il s’accompagne d’efforts pour rendre leurs souveraineté aux Palestiniens et aux Irakiens.

Source
New York Times (États-Unis)
Le New York Times ambitionne d’être le premier quotidien global au travers de ses éditions étrangères.

« The Wrong Way to Sell Democracy to the Arab World », par Zbigniew Brzezinski, New York Times, 8 mars 2004.