J’ai voté en faveur de la Guerre d’Irak, non pas à cause des armes de destruction massive, mais car cela offrait la possibilité de renverser Saddam Hussein. En 1991, nous avions échoué à le faire et cela avait conduit à une répression et à des sanctions économiques qui n’avaient pas touché le pouvoir irakien, mais avaient été terribles pour la population. La volonté d’action des États-Unis après le 11 septembre nous en a donné l’occasion. Les avantages et inconvénients de l’intervention sont désormais du passé, nous devons maintenant analyser ceux de l’occupation. Comme la situation a changé, nous devons nous adapter.
Nous avons résolu le problème de Saddam Hussein, mais nous ne pouvons pas résoudre le problème de l’Irak et nous sommes même devenus une part du problème. Le Pentagone est en train de prévoir un accroissement des troupes en Irak alors qu’il faut prévoir notre départ au contraire. En 1920, les Britanniques avaient d’abord été vus en Irak comme des libérateurs face à la présence ottomane, mais avaient très vite été considérés comme des occupants. Aujourd’hui, nous faisons face à la même situation et les Irakiens soutiennent de plus en plus les insurgés.
D’une certaine manière, le soulèvement de Faludja nous a offert une solution : en ressuscitant une figure respectée de l’ancien régime irakien pour diriger les forces de l’ordre dans la région, la Coalition a donné un visage irakien à la politique de stabilisation. Cela fait cependant peser un risque pour la politique de déba’asification, essentielle pour la démocratisation de l’Irak. Dans le sud, il faudrait nommer un chiite mais, même mal entraînées, des forces locales parviendront mieux à rétablir l’ordre que les forces de la Coalition. Cette règle est transposable au pouvoir politique.
Un départ d’Irak est également essentiel pour restaurer l’autorité morale des valeurs libérales dans le monde arabe, ce qui est essentiel à la démocratisation de la région et à la guerre au terrorisme.

Source
The Guardian (Royaume-Uni)

« We are now the problem in Iraq », par Crispin Blunt, The Guardian, 18 mai 2004.