Dans un jugement rendu le 14 juin 2006, le tribunal fédéral de Brooklyn a jugé que le gouvernement des États-Unis a le droit, dans le cadre des nouvelles lois sur l’immigration, d’arrêter tout non-citoyen des États-Unis se trouvant sur son sol, sur la base de sa religion, de sa race ou de son origine, et de le maintenir en détention aussi longtemps qu’il le jugera nécessaire.

Ce jugement a été rendu dans le cadre d’un procès (« class-action ») intenté par des immigrés musulmans arrêtés après le 11 Septembre.

C’est la première fois que la Justice fédérale états-unienne prend position vis-à-vis de la discrimination qui a frappé des centaines de musulmans, raflés dans les semaines suivants les attentats de septembre 2001 et maintenus en détention préventive pendant des mois, avant d’être reconnus innocents, relâchés et pour la plupart expulsés du pays.

Les rafles avaient été vivement critiquées par les défenseurs des droits des immigrés, mais aussi par l’inspecteur général du Département de la Justice des États-Unis. Ce dernier avait publié un rapport démontrant que le gouvernement n’avait fait aucun effort pour distinguer entre les suspects véritables et des immigrés musulmans ayant simplement commis des infractions mineures à la législation sur les visas.

Les avocats des plaignants ont déclaré que ce jugement ouvrait la porte à une application bien plus vaste, permettant l’arrestation arbitraire et le maintien en détention sans justification de n’importe quel non-citoyen du pays, se trouvant sur le territoire des États-Unis.

Un des avocats de la Coalition pour la défense des libertés civiques de New York, a déclaré : « Le gouvernement peut emprisonner indéfiniment n’importe qui, pour la raison qui lui plait, et la personne ainsi emprisonnée disparaîtra du radar du système judiciaire. Elle n’aura pas accès à un avocat, sa famille ne pourra obtenir d’informations sur sa situation ou son état de santé, elle ne pourra même pas savoir s’il a été arrêté ou non. Le prisonnier ne pourra même pas exiger de savoir pourquoi il a été arrêté. Le gouvernement a désormais le droit de faire tout cela, autrement dit de se comporter comme une dictature du temps de Pinochet. »

« Judge Rules That U.S. Has Broad Powers to Detain Noncitizens Indefinitely », par Nina Bernstein, The New York Times, États-Unis, 15 juin 2006.