Vojislav Seselj (prononcer Voyislav Chéchélye) est né le 11 octobre 1954 à Sarajevo. Il commença sa carrière comme apparatchik communiste, puis s’engagea dans le nationalisme le plus ultra et la " purification ethnique ". Responsable de la Jeunesse communiste en Bosnie, il choisit de présenter comme thèse de doctorat la vie et l’œuvre de Tito et enseigna la sociologie à l’université de Sarajevo. En 1984, il fut condamné à huit ans de prison pour avoir, dans un texte inédit saisi à son domicile, prôné la détitoïsation de la Yougoslavie et l’éclatement de la fédération avec la suppression du Kosovo, de la Vojvodine et de la Bosnie-Herzégovine. Libéré au bout de vingt-deux mois, il s’établit à Belgrade, soutenu par de nombreux dissidents de l’époque. En 1989, il se met dans le sillage de Milosevic et développe sa propre milice, les " Tchetniks ", du nom des bandes anticommunistes de la Seconde guerre mondiale qui semaient la terreur parmi les non-Serbes. En 1991, il est à la tête du deuxième parti de Serbie, le Parti radical serbe (PRS). En 1992, le PRS recueille 30 % des sièges du Parlement serbe tandis que Seselj, qui s’est forgé l’image du Serbe orgueilleux et guerrier, est devenu l’idole d’une partie de la population.

Vojislav Seselj est considéré comme l’un des principaux responsables du déclenchement de la guerre, en particulier par le département d’État américain, qui le cite sur sa listes des criminels de guerre présumés. Durant l’été et l’automne 1990, il paradait souvent dans les rues de Belgrade à la tête d’une troupe de tchetniks portant un drapeau noir à tête de mort avec le slogan " La liberté ou la mort ". Prônant la méthode forte, il s’est illustré en menaçant étudiants contestataires et grévistes du revolver qu’il porte à la ceinture et à propos duquel il s’exclame : " Moi, le duc des Tchetniks, je devrais demander une permission pour le porter ? " En juin 1991, il dissertait joyeusement à la télévision de la manière d’égorger les Croates . " Il faut égorger les Croates avec une cuillère rouillée pour que cela dure plus longtemps ", avait-il expliqué. Pendant l’été, les Tchetniks semèrent la panique dans les villages du sud de la Croatie où les Serbes représentaient 11 % de la population. " On est là pour les encourager à la révolte ", avouait placidement aux journalistes du Monde Alexandre Stefanovic, qui s’était préalablement présenté comme le chef d’état-major des Tchetniks, avant de leur demander s’ils étaient juifs (Le Monde, 12/06/91). Vojislav Seselj est le premier politicien à avoir utilisé en public le terme de " purification ethnique " pour décrire l’action de ses milices en Croatie puis en Bosnie. Qualifiant les militaires et milices serbes qui détruisirent la ville de Vukovar de " libérateurs ", il leur rendit des visites régulières. En 1993, le socialiste Radmilo Bagdanovic l’accusa d’être un profiteur de guerre. Zeljko " Arkan " Raznatovic, un leader paramilitaire, porta les mêmes accusations à son encontre. La même année, emporté dans son élan, " le duc des Tchetniks " déclara à la tribune du Parlement serbe : " Adolf Hitler a été une victime innocente des machinations occidentales " (Vreme, 21/06/93).

Les rapports de Vojislav Seselj et de Milosevic sont ambigus. En 1990, les médias de Milosevic le décrivaient comme " une personne instable, extrémiste et chauviniste ". Juste avant les élections, Seselj est emprisonné. En 1991, répondant au quotidien allemand Der Spiegel (05/08/91) qui lui demandait s’il était payé par le président serbe, il affirme " Si j’arrive au pouvoir, j’arrêterai probablement Milosevic. Mais aussi longtemps que les Américains essayeront de le faire tomber, je le soutiendrai. " En 1992, Milosevic dit beaucoup estimer Seselj, " parce qu’il est constant dans sa pensée politique ". En septembre 1993, les députés du PRS votaient une motion de censure contre le gouvernement serbe accusé de trahir la cause de la " Grande Serbie ". Seselj était alors emprisonné et qualifié de fasciste par le parti au pouvoir. Aux dernières élections municipales, le leader du PRS n’a cependant pas vu son élection à la mairie de Zemun annulée comme l’ont été toutes celles de l’opposition... De fait, pendant la guerre, Seselj a exécuté la " purification ethnique ", soutenu financièrement par Milosevic qui apparaissait, à côté de lui, comme modéré. C’est pourquoi, au regard des rôles qu’ils se sont donnés l’un et l’autre, il n’est pas évident que le conflit public qui les oppose ne constitue pas à nouveau de la propagande.