La classe dirigeante française s’est une nouvelle fois ridiculisée en multipliant les déclarations grandiloquentes pour dénoncer un fait divers prétendument anti-sémite, alors que ce crime ne l’était nullement. Elle multiplie donc les tentatives d’explication pour justifier ses erreurs. Esther Benbessa, de l’École pratique des hautes études, ramène dans Libération cet emballement à un simple phénomène psychologique : la recherche du sensationnalisme. Tout doit être tenté pour évacuer la signification politique de ces affaires et pour cacher à l’opinion publique française le rôle de l’ICCA, le cabinet de relations publiques créé par le ministère israélien des affaires étrangères pour accroître cet emballement.
Dans Le Monde, Esther Benbassa, encore elle, décrit les juifs de France comme des « sionistes sans sionisme », c’est-à-dire comme des israélophiles ne souhaitant pas s’installer en Israël. Selon elle, les crises successives entre la Paris et Tel-Aviv sont largement imputables à la conception sioniste dominante en Israël selon laquelle l’État juif serait l’État de tous les juifs. Le temps est venu pour le gouvernement israélien de reconnaître l’identité de la diaspora. Notons que, jusqu’à présent, ce point de vue, qui n’est pas nouveau, est qualifié de « haine de soi-même » par les sionistes.

L’ancien directeur de la Coalition des juifs républicains, Michael J. Wissot, fait l’apologie de George W. Bush dans le Jerusalem Post. Ce président a soutenu Israël plus que nul autre, écrit-il. Kerry, quant à lui, s’est montré hésitant sur bien des sujets et ne mérite donc pas le même soutien.
Toujours à propos de ce scrutin, Ian Bremmer du World Policy Institute se demande dans l’International Herald Tribune quelles seraient les conséquences d’un attentat aux États-Unis pendant la période électorale. Selon lui, elle conduirait exclusivement à un durcissement de l’USA Patriot Act et à aucune action militaire extérieure significative. Contrairement au 11 septembre, il en résulterait un scénario à l’espagnole, c’est-à-dire profitable à Kerry plutôt qu’à Bush.

Le député conservateur britannique, Michael Ancram, s’indigne dans le Daily Telegraph du laisser-faire de Tony Blair face à la situation d’urgence au Darfour. Alors que, selon Washington, 1 000 personnes meurent chaque jour, le gouvernement travailliste a fait voter le principe vague de « sanctions » par le Conseil de sécurité, puis est parti en vacances. Si personne ne doute de la gravité de la crise et de l’urgence de la résoudre, on peut néanmoins s’interroger sur les chiffres avancés par les Etats-Unis et sur l’analyse qui est faite de ce drame. Il n’est pas sérieux de prétendre, comme le fait M. Ancram, que les milices sont intégrées à l’armée soudanaise. Secondairement, sur le plan de la communication, on observera l’efficacité et la généralisation de ce nouvel argument politique : « le gouvernement est parti en vacances ».
Jacob Kellenberger, président du Comité international de la Croix-rouge, s’exprime avec beaucoup plus de circonspection dans l’International Herald Tribune. Se gardant bien d’avaliser les chiffres et analyses contestés, il se borne à rappeler aux gouvernements qu’une crise de cette ampleur ne peut être résolue par la simple action humanitaire : il faut une solution politique.

Paula Newberg, du National Democratic Institute (NED/CIA), déplore les mauvaises conditions dans laquelle se déroule la campagne électorale en Afghanistan pour mieux se féliciter qu’elle ait lieu. On ne peut espérer installer la démocratie en un claquement de doigt, aussi faut-il se contenter d’avancer dans la bonne direction, assure-t-elle en substance dans le Los Angeles Times. Relevons que si l’argument réaliste est pertinent en soi, il n’appartient pas au National Democratic Institute de l’invoquer positivement en Afghanistan lorsque le résultat de l’élection s’annonce favorable à Washington et de le réfuter en Géorgie lorsque les résultats déplaisent au Département d’État.

Mattheuw Levitt, analyste au WINEP, se félicite dans le Daily Star que le rapport de la Commission présidentielle sur le 11 septembre connaisse un tel succès de librairie. En effet, il diffuse la théorie du clash des civilisations en désignant clairement le terrorisme islamique comme l’ennemi. Malheureusement, peut être pour des motifs diplomatiques, ce même rapport préconise des actions à long terme contre le terrorisme en favorisant une évolution positive des régimes qui le soutiennent. Ces recommandations ne sont pas opératoires puisqu’elles renforceraient en fait les régimes qui soutiennent le terrorisme, en premier lieu l’Arabie saoudite. Cette tribune, signée par un lobbyiste pro-israélien et publiée dans un journal libanais filiale du New York Times, illustre l’inquiétude de son milieu pour le manque de ferveur de la population états-unienne face à une éventuelle guerre contre Riyad. Mais la campagne de diabolisation du nouvel ennemi ne fait que commencer.