Q - Une minorité importante d’internautes (41 %) juge que la Défense aurait dû être touchée par le même effort de restriction budgétaire que les autres ministères. Que leur répondez-vous ?

R - La première responsabilité de l’Etat, c’est d’assurer la sécurité de ses concitoyens, à l’intérieur comme à l’extérieur de son territoire. Face aux nouvelles menaces qui pèsent sur la sécurité du monde, la raison d’être de nos forces armées, c’est de protéger. De plus ces moyens impliquent des commandes de matériel et des personnels formés et entraînés, donc un engagement sur le long terme. Ce n’est pas un luxe que l’on s’offrirait les années fastes et que l’on réduirait les autres. Le budget est donc considéré comme prioritaire au même titre que celui des ministères de l’Intérieur et de la Justice, de l’Education et de la Recherche. Cet effort consenti par les citoyens comporte en retour une exigence accrue de bonne gestion, de rationalisation et d’optimisation dans le but d’atteindre une meilleure efficacité au moindre coût. D’ailleurs un grand nombre de mesures qui interviendront en 2004 seront financées par la suppression d’autres dépenses, au sein même du budget de la défense.

Q - Les internautes jugent que la lutte contre le terrorisme relève davantage du ministère de l’Intérieur que du ministère de la Défense. Quelle est votre position ?

R - La lutte contre le terrorisme relève de plusieurs ministères, Intérieur, Finances, Affaires étrangères Santé, Défense au sein du Conseil de sécurité intérieure, placé sous l’autorité du président de la République. Le ministère de la Défense contribue à la lutte contre le terrorisme à l’étranger par ses services de renseignement et par ses militaires, par exemple en Afghanistan. Il joue un rôle important sur le territoire national par l’action de la gendarmerie nationale mais aussi par ses services en charge de la mise en œuvre des plans de prévention, dans le domaine bactériologique et chimique par exemple. Ses avions sont en alerte en permanence contre les risques de terrorisme aérien et la marine nationale protège des risques venant de mer.

Q - Les internautes sont opposés à la réduction de la part du nucléaire. Est-il possible de concilier cet objectif avec les autres priorités de la Défense nationale ?

R - La dissuasion nucléaire est la protection ultime de notre territoire et un moyen qui permet à la France d’affirmer son autonomie stratégique. La menace terroriste ne résume pas tous les risques, elle ne doit pas exclure l’hypothèse d’une menace majeure contre nos intérêts vitaux. Pour autant, la loi de programmation militaire insiste également sur d’autres axes, comme la mise à niveau de nos forces au niveau d’équipement et d’entraînement des armées les plus modernes. Cet effort nous permet de disposer en toutes circonstances d’une armée dotée de toutes les compétences exigées pour remplir au mieux ses missions.

Q - Les internautes ne semblent pas partager votre position sur la non-prise en compte des dépenses militaires dans le calcul des déficits publics. Comment les convaincre ?

R - Tous mes collègues ministres de la Défense de l’Union européenne ressentent la même difficulté face à ce problème. Les dépenses liées à la défense se considèrent sur le long terme. On ne peut pas interrompre l’effort que nous faisons, qui est l’assurance de notre sécurité, en fonction des variations de la conjoncture économique. En réalité nos dépenses profitent à tous les Européens et en particulier à ceux qui ne font pas le même effort que nous. Ce sont des militaires français qui ont pu, grâce à leur compétence et à leurs moyens, évacuer en Côte d’Ivoire ou au Liberia des civils étrangers pris au milieu des combats, et les Français étaient une infime minorité de ceux qui ont ainsi pu être sauvés. Il serait paradoxal que les pays qui ne se donnent pas les moyens d’agir nous reprochent des dépenses qui ont servi à sauver leurs propres ressortissants.

Q - Les internautes sont partisans d’une politique commune d’achat d’équipement militaire, mais pas d’une mise en commun des forces armées. L’Europe de la Défense peut-elle s’en tenir à cet objectif ?

R - Dans les opérations européennes nos armées travaillent en commun sans aucune difficulté, mais demeurent bien sûr des forces armées nationales. Nous souhaitons par contre œuvrer ensemble pour combler nos lacunes d’équipement et, plus généralement, de capacité pour garantir la coordination, l’interopérabilité et la capacité à gérer les crises de nos armées. La décision de créer une Agence européenne de l’Armement, prise au mois de novembre dernier par les Vingt-cinq, constitue une véritable avancée. Le lancement de plusieurs grands programmes conjoints d’armement, comme l’A400M, le Tigre, le NH90, Meteor ou les frégates multimissions, ont déjà prouvé notre capacité à réfléchir ensemble et notre volonté d’avancer dans la même direction. Elle sera très importante pour l’industrie et l’emploi en Europe.