Mme Sterk est impliquée depuis plus de dix ans dans une procédure de divorce. Une décision de justice lui a retiré la garde de ses enfants au profit de son ex-époux, qui est membre de Siddha Shiva Yoga. Les enfants avaient environ 6 et 7 ans à l’époque. M. Nösselt fait observer qu’aujourd’hui, bien qu’ils soient encore mineurs, les enfants sont retenus depuis dix ans déjà au sein de la secte contre le gré de leur mère.

Récemment, ils ont tenté de s’évader. Un huissier a toutefois convaincu le fils de Mme Sterk de retourner auprès de son père, parce que " s’il fuyait son père, il était un délinquant juvénile ". Mme Sterk estime que son fils a été brisé psychologiquement. Lorsqu’on tente de le raisonner, il promet tout pour avoir la paix. Quoi qu’on lui dise, il dit toujours oui.

La fille de Mme Sterk a toutefois réussi à tenir tête et a affirmé qu’elle voulait habiter chez sa mère. L’huissier est parti, mais, quelques jours plus tard, le père s’est fait justice lui-même et l’a emmenée dans la secte. Il l’avait attendue devant l’école et attirée dans sa voiture. Depuis lors, Mme Sterk n’a plus revu ses enfants. Le seul rapport qui ait été établi au sujet de la secte est un rapport de la brigade spéciale de recherche (BSR) de la gendarmerie, rapport qui, apparemment, concorde avec un passage de l’Encyclopédie Winkler Prins. L’assistante sociale qui a été chargée d’enquêter, a tout confondu et, selon les témoins, a fait preuve d’une méconnaissance totale de la situa-tion.

M. Nösselt précise que les sectes sont un phénomène d’une ampleur internationale, auquel il faut s’attaquer au niveau européen. Il estime qu’une des caractéristiques essentielles des sectes est qu’elles nient d’être des sectes.

La maltraitance des enfants, le satanisme, les meurtres rituels dans les sectes constituent aujourd’hui, selon M. Nösselt, un prolongement direct de l’affaire Dutroux. Il n’y a qu’un seul journaliste qui ait eu le courage d’écrire un article au sujet des enfants de Mme Sterk. La presse se tait généralement, parce qu’elle craint que la secte qu’elle aurait attaquée, n’entame une procédure judiciaire contre elle. La liberté de la presse est ainsi de facto vidée de sa substance par les sectes. Le ministre de la Justice devrait publier une liste officielle des sectes, liste qui serait communiquée aux médias.

Il ressort des rapports des procureurs généraux que les plaintes à l’égard des sectes sont quasi inexistantes, c’est du moins ce qu’a déclaré le ministre de la Justice (Doc. n° 313/5-95/96, p. 7) et on devrait donc en conclure que les sectes ne commettent pas d’actes répréhensibles. Comment pourrait-il en être autrement si chaque plainte contre les sectes est classée d’office ?

M. Nösselt estime que les sectes sont des chancres qui menacent l’Etat de droit. Elles abusent de la tolérance inhérente au régime démocratique pour détruire celui-ci.

La liberté de culte est un des grands mythes, au même titre que la séparation des pou-voirs. Les sectes commettent un type d’infraction qui leur est propre et qui n’est pas prévu par le Code pénal. La liberté de culte implique-t-elle que l’on tolère les sacrifices humains ou la maltraitance des enfants ?

Le Siddha Shiva Yoga est dirigée par Armando Acosta, un réalisateur de cinéma américain qui, au sein de la secte, porte le nom de Shiva Mukta Swami Ganapati ; il se fait également appeler le " Baghwan de Gand ".Le mouvement a établi son quartier général à Gand, mais il dispose également de sièges à Bruxelles, à Anvers, à Hasselt, à Rome et à New York. Il s’agit d’une secte tantriste qui recourt à la méditation, à l’hypnose, à la transe, à l’extase, ... Ces pratiques peuvent avoir un effet très déstabilisateur pour la psyché, principalement chez les enfants. Organisée de façon hiérarchisée, cette secte compterait quelques centaines de membres. Son objectif serait le développement spirituel de l’individu et de l’humanité par l’organisation de toutes sortes d’activités, de conférences, de cours, par la méditation et par la réalisation et la production de films, de livres et de documentation audiovisuelle. La secte vise par ailleurs à soutenir, organiser et gérer des établissements d’enseignement dispensant une formation qualifiée à des " enfants spéciaux et hors du commun ". Le Siddha Shiva Yoga prétend ausi vouloir soutenir tous les projets profitables à la santé humaine. Tels sont également les objectifs poursuivis par une branche de la secte camouflée en une A.S.B.L. aux apparences innocentes et dénommée " SEVA ".

Les témoins affirment qu’en réalité les enfants sont brisés psychologiquement et que leur santé est même négligée. Les techniques d’hypnose sont utilisées de façon abusive. Une plainte a d’ailleurs été déposée pour utilisation de techniques d’hypnose sur des enfants. Les enfants de Mme Sterk - âgés actuellement d’environ 16 et 17 ans - doivent suivre des cours de méditation et s’agenouiller devant le gourou qui les bénit à l’aide d’une plume de paon. On leur fait croire que d’innombrables réincarnations leur ont permis d’atteindre le niveau supérieur dans la vie civile et qu’ils ont à présent trouvé la personne pouvant les aider à atteindre la plénitude de soi. Le gourou ne peut toutefois atteindre son objectif parce que leur mère n’est pas d’accord et le contrecarre. C’est la raison pour laquelle il faut l’écarter.

De l’avis des témoins, il est question de négligence tant sur le plan physique, médical et psychique que sur le plan de l’éducation.

Les témoins se sont adressés à la justice de Tongres et de Gand, mais sans le moindre résultat. Au tribunal de Tongres, l’affaire a totalement dégénéré. L’ex-époux de Mme Sterk a fait appel : il souhaitait même empêcher les enfants de voir leur mère en invoquant l’influence négative qu’elle exerçait sur eux. La police judiciaire a acté que les enfants étaient sous hypnose. Mais aucune suite n’a été donnée à cette constatation. La justice de Gand, ville où est établie la secte, a notamment prétexté ne pas connaître l’allemand afin de ne pas devoir prendre connaissance des rapports sur les sectes rédigés en allemand dont disposent les témoins.

Il est clair que les mouvements sectaires ont les moyens de faire appel à d’excellents avocats en face desquels un simple avocat ne fait pas le poids.

M. Nösselt déplore qu’aucun juge ne puisse demander directement aux enfants où ils souhaitent vivre.

Les témoins estiment dès lors qu’il est capital qu’un magistrat national soit nommé pour pouvoir se consacrer, avec toute la compétence requise, à ce genre d’affaires.

Les témoins trouvent également inadmissible que la Justice viole la convention de l’ONU sur les droits des enfants et bafoue la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.


Source : Chambre des Représentants de Belgique http://www.lachambre.be