Il s’agit d’une organisation sectaire hiérarchisée (plusieurs cercles), spiritiste et guérisseuse, regroupée autour du médium parlant, Yvonne Theisen, et du médium non parlant, Ketty Donnersbach, alias l’Ange Albert, qui s’est proclamée " Führer ". La maison- mère se situe au New Jersey. Il existe des filiales en Suisse et aux Etats-Unis.

Selon des témoins, d’autres membres sont Mme Hilda Rau-Scholtus, épouse d’un ex-député du parti social chrétien luxembourgeois aujourd’hui décédé, ainsi que Mme Dondelinger, épouse du premier échevin d’Athus.

TEMOIGNAGE DE M. STEPHANY, PUBLIE A LA DEMANDE EXPRESSE DE CE DERNIER

L’épouse du témoin a emmené ses trois enfants dans la secte de L’Ange Albert.

Selon le témoin, Ketty Donnersbach dicte une philosophie du karma, basée sur la purification d’une vie antérieure. Si quelqu’un souffre, ce n’est pas un hasard, mais une punition divine. Il ne faut donc pas soigner les souffrants (même s’il s’agit d’enfants), car les aider c’est aller à l’encontre de la volonté de Dieu. Seul le médecin de la secte (en l’occurrence le dr. Carmela Ragaglia, épouse du témoin) peut décider (en accord avec le médium) de la thérapie à suivre, parce qu’il est le relais entre Dieu et les adeptes.

L’Ange Albert utilise des thérapies charlatanesques, comme, par exemple, du jus de choucroute, des pierres à tenir dans chaque main, l’eau de Melickshaff (en fait impropre à la consommation). Certaines personnes sont décédées à la suite de ces types de traitements. C’est de cette manière que la gourou arrive à exercer un certain droit de vie ou de mort sur ses adeptes.

Le témoin a porté plainte pour non-assistance à personne en danger à l’égard d’un de ses fils : il s’était coupé un centimètre de l’annulaire gauche. La thérapie suivie par le dr. Ragaglia a consisté à mettre le bout de doigt dans le congélateur pendant 6 heures. Ensuite, il a été remis en place et maintenu par un bandage. Pour ce faire, elle suivait les conseils de l’Ange Albert par téléphone. Il fallait également tremper régulièrement le doigt pendant une demi-heure dans de l’eau de Melickshaff. Mme Ragaglia a refusé de faire bouillir l’eau au préalable ou de la purifier. Malgré ces faits, la plainte a été classée sans suite.

Les enfants buvaient aussi des potions magiques et même de l’eau de Melickshaff. Leur mère en avait oublié dans la cave. Après un mois ou deux, cette eau avait pris une couleur jaune brun. Lorsqu’elle l’a montrée à la gourelle, celle-ci a dit que c’était l’or des alchimistes !

De même, au cours de la période où les enfants ont été confiés à leur mère (après la séparation du couple), l’un d’eux a eu l’oreille tellement infectée que le pus lui coulait sur la joue. Les traitements prescrits par la mère consistaient à placer l’enfant sous une pyramide et à lui administrer des potions magiques. L’enfant avait perdu 35 % de son ouïe et a dû être opéré d’urgence.

En fait, Mme Ragaglia a suivi des cours d’homéopathie à Huy, où elle est entrée en contact avec le dr. Colombera, à l’époque membre de la secte de l’Ange Albert.

Deux mois et demi après cette rencontre, elle a demandé le divorce sans aucune raison valable. L’Ange Albert considérait en fait le témoin comme un esprit satanique (puisqu’il refusait que son épouse adhère au groupe), qu’il n’était pas bon de fréquenter. Le divorce a été entièrement organisé par le mouvement.

En 1984, Ketty Donnersbach fut condamnée pour exercice illégal de la médecine sur une jeune fille mineure d’âge de Vianden, tombée dans un coma diabétique. Elle a alors décidé d’utiliser les diplômes des dr. Colombera et Ragaglia. Le dr. Colombera a ensuite été renvoyé, Mme Ragaglia se laissant, selon le témoin, mieux manipuler.

En outre, Ketty Donnersbach prétend à certaines personnes qu’elles sont atteintes d’un cancer. Lorqu’elles vont consulter leur médecin, celui-ci leur démontre qu’il n’en est rien. Alors, accusée d’avoir menti, elle leur répond qu’elles sont entretemps gué-ries grâce à ses prières.

Ketty Donnersbach envoie aussi certaines persones chez le dr. Ragaglia, qui définit une thérapie (en suivant les conseils de la première). Le patient revient alors se faire traiter chez la gourelle. Généralement, le premier traitement n’améliore toutefois pas la situation, si bien que de nouvelles séances (payantes) sont prescrites.

Le témoin souligne également la complicité de certains pharmaciens qui préparent, selon lui, ces prescriptions charlatanesques.

Mme Ragaglia a contracté divers emprunts, dont un à l’insu de son mari, auprès d’autres membres du groupe (une manière de mieux tenir les adeptes). Le compte en banque du témoin a pratiquement été vidé par son épouse. De plus, elle ne payait qu’une infime partie des impôts, le reste étant laissé à charge du témoin.

Des adeptes de l’Ange Albert ont été placés au domicile du témoin comme gens de maison, notamment afin d’assurer la garde des enfants.

Pour l’éducation des enfants, il était demandé conseil à " Isidore ", un ostérien supposé définir le type de punitions, etc.

Le témoin est convaincu d’avoir été empoisonné par des drogues visant à annihiler sa résistance.

Plusieurs incidents se sont produits avec les enfants :

 brûlures non soignées parce que les enfants étaient soi-disant placés sous protection spirituelle ;

 enfants malades négligés par leur mère, pressée d’assister aux réunions du groupe jusque tard dans la nuit (séances de spiritisme) ;

 pendant que la gouvernante s’absentait, un des enfants est tombé du lit et s’est ouvert l’arcade sourcillière ...

Le témoin a finalement décidé de quitter le domicile conjugal et d’emmener ses enfants chez ses parents. Il a obtenu la garde provisoire des enfants pendant 8 mois (par un référé du 22 décembre 1988).

En appel, un autre juge, proche d’un parti politique dont certains de ses membres n’ont jamais caché leur sympathie pour la secte, a décidé de confier les enfants à leur mère (référé du 25 juillet 1989), et ce malgré une enquête sociale ordonnée par le tribunal d’Arlon, favorable au placement des enfants chez leur père, et les antécédents connus de la secte, impliquant notamment des mineurs d’âge. ".

Par ailleurs, M. Stéphany souligne les effets néfastes des nominations politiques au sein de la magistrature et fait état de protections politiques importantes accordées à l’Ange Albert, notamment grâce à Mme Hilda Rau. Des pressions auraient été exercées sur la justice.

Aux dires du témoin, l’enquête de la police judiciaire concernant les agissements de l’Ange Albert a omis de joindre au dossier l’audition du concluant et n’a pas jugé nécessaire d’entendre un certain nombre de personnes victimes de la secte (cf. conclusions formulées par maître Bernard, ex-avocat du témoin, pour le tribunal d’Arlon, le 19 mai 1989).

Lors d’un droit de visite pendant les vacances de Noël, le témoin n’a pas rendu ses enfants à leur mère car il craignait qu’elle ne les emmène à l’étranger (suite aux perquisitions faites à cinq endroits par la sûreté grand-ducale).

Les enfants ont alors été placés dans un home au Grand-Duché de Luxembourg. Après deux semaines et demie, le juge de la jeunesse a toutefois replacé les enfants auprès de leur mère, au sein du mouvement sectaire, en demandant une nouvelle enquête de la P.J. et une enquête sociale, les enfants devant être suivis par un psychologue (jugement du 30 janvier 1990). A ce propos, le témoin fait remarquer que le psychologue qui a examiné les enfants était le conseiller personnel de leur mère.

L’enquête sociale du Service central d’assistance sociale a dénoncé les dangers tant physiques que psychiques auxquels sont exposés les enfants dans ce mouvement (notamment le non-droit à un traitement médical), ainsi que la rupture des liens familiaux. Elle a également constaté que l’appartenance à ce groupe a provoqué au cours des années des ravages auprès de personnalités fragiles, influençables, crédules. Et pourtant la juge a décidé une troisième fois de confier la garde des enfants à leur mère (jugement du 29 mai 1990) malgré l’interdiction imposée provisoirement à Mme Ragaglia d’exercer sa profession (30 mars 1990) et l’existence d’une enquête instruite par la Sûreté de l’Etat luxembourgeoise à l’encontre de la secte.

Après de nombreuses démarches, demeurées infructueuses, auprès des plus hautes autorités politiques et judiciaires luxembourgeoises, le témoin obtint la garde des enfants par un jugement du 5 novembre 1990, mais celui-ci ne fut pas frappé d’exécution provisoire, ce qui permit à la partie adverse de poursuivre les procédures judiciaires en argumentant que les enfants faisaient opposition au jugement.

Finalement, le témoin obtint la garde des enfants le 8 avril 1992, un droit de visite étant accordé à leur mère, devenue entretemps la " prêtresse " du mouvement, également chargée du recrutement.

M. Stéphany affirme, par ailleurs, que cette organisation sectaire a infiltré au Luxembourg tous les rouages de la société (armée, gendarmerie, monde politique, ...). Elle semble être prévenue des descentes de police.

Mme Rau a créé un nouveau parti politique, le NOMP, qui prétend défendre les droits de l’homme et de l’enfant.

Pour se donner une image respectable, l’organisation édite aussi un journal : " Justice ", dont Hilda Rau est éditrice et qui est également consacré à la défense des droits de l’homme et de l’enfant.

Un autre journal du groupe aborde des questions religieuses et publie le résultat des procès gagnés par les membres de la secte, afin de convaincre du bien-fondé de son action.

D’après l’orateur, le but final du groupe est de gagner de l’argent, notamment en recrutant de nouveaux adeptes. L’Ange Albert infiltre aussi les milieux sportifs et possède un fitness center.

En conclusion, M. Stéphany réitère sa conviction que des pressions importantes ont été exercées dans cette affaire. Il pose, à cet égard, plusieurs ques-ions : pourquoi plusieurs enquêtes ont-elles été refusées ? Pourquoi sa plainte a-t-elle été classée sans suite ? Pourquoi la garde des enfants a-t-elle à plusieurs reprises été confiée à leur mère, membre actif de l’Ange Albert, alors qu’il s’agit en fait d’un groupe de malfaiteurs qui se livre notamment à l’exercice illégal de la médecine et à diverses escroqueries. Ainsi, une société (Sycarga) a été mise sur pied dans le but d’escroquer l’Etat belge (tentative de vente d’une pyramide pour la somme de 400 millions de francs en vue d’assainir la décharge de Mellery). Il est aussi question de captation d’héritages et de la vente de viande soi-disant purifiée des esprits sataniques à un prix anormalement élevé.

TEMOIGNAGE DE MME LAUBACH, PUBLIE A LA DEMANDE DE CETTE DERNIERE

Le témoignage de Mme Laubach s’articule sur deux préoccupations essentielles :

 assurer la protection de son enfant qui, lorsqu’il doit rendre visite à son père, ex-époux du témoin et adepte de l’Ange Albert, est exposé aux nombreux dangers inhérents à la fréquentation d’une telle secte.

Même si ce droit de visite s’exerçait dans un centre de rencontre parents/enfants, sous la surveillance d’un assistant social, un danger subsisterait dans la mesure où ces personnes ne sont pas suffisamment informées sur les techniques subtiles de manipulation mentale utilisées par les mouvements sectaires.

Le témoin déclare se trouver dans une situation très difficile et dénonce l’attentisme du pouvoir judiciaire témoin devrait pouvoir prouver qu’il y a danger mais pour le prouver, il faudrait d’abord qu’il arrive quelque chose. Le témoin se refuse bien évidemment à attendre pareil événement ;

 informer les habitants de sa région du danger potentiel. C’est pourquoi le témoin a décidé de témoigner lors d’une conférence sur les sectes à Messancy. Toutefois, après avoir témoigné, Mme Laubach a reçu la visite de M. Dondelinger, 1 er échevin d’Athus, qui lui a demandé de ne plus faire de déclarations publiques à propos de l’Ange Albert car celles-ci pourraient lui nuire. Il lui a affirmé qu’il n’avait jamais rien eu à voir avec ce mouvement et que son épouse, Mme Dondelinger-Martiny, avait définitivement quitté la secte. Or, selon les informations du témoin, cette personne serait toujours active au sein du mouvement et donnerait même des instructions aux autres adeptes en tant que " médium parlant " (sous le nom de " Salomé "). Il semble qu’elle organise (ou, en tout cas, ait organisé) régulièrement des réunions à son domicile et qu’elle recrute notamment par le biais de cours de fitness.

[Un autre témoin fait également état de recrutements dans certains établissements scolaires primai-res.]

Après la conférence, le témoin a, par ailleurs, fait l’objet de menaces " non signées " : quelqu’un s’est introduit dans son domicile et a blessé ses animaux domestiques. En outre, son courrier a été subtilisé. Elle a aussi reçu des appels téléphoniques anonymes fréquents à toute heure après avoir quitté la secte.

Selon le témoin, les objectifs de l’Ange Albert sont présentés de manière insidieuse, en les adaptant aux préoccupations de chaque adepte (protection de la nature, etc). Le premier accueil est chaleureux.

Les adeptes croient en l’existence d’ostériens, êtres mi-matériels, mi-spirituels, qui habitent sur une autre planète. L’Ange Albert prédit l’Apocalypse et les adeptes se promènent avec une trousse de survie, équipée de manière très précise, et une corde dans leur voiture de manière à pouvoir se tirer d’affaire lors de l’apocalypse : la terre doit en effet s’ouvrir en deux (crevasses).

Les adeptes doivent aussi avoir des réserves d’eau dans leur maison, à condition qu’elle soit protégée par les esprits et les ostériens, sinon il leur faut déménager et faire appel au sourcier du groupe pour rechercher un puits à l’heure exacte fixée par l’Ange Albert.

La vie des adeptes est entièrement régentée par la secte : les adeptes doivent se conformer à certaines règles, telles que suivre certains itinéraires et en éviter d’autres (mais à certaines occasions déterminées par l’Ange Albert - il faut lui en demander la permission - les routes interdites sont quand même protégées par les extraterrestres et peuvent être empruntées), ne pas prendre sa voiture à certains moments, éviter d’entrer dans certains magasins,etc ;

Diverses pratiques sont imposées : prières pour obtenir des protections, écoute de cassettes, compte rendu de " messages " à lire, régime alimentaire, port d’amulettes, épreuves à subir pour se parfaire, pyramides placées dans les voitures pour recevoir des ondes positives, ...

Principaux faits portés à charge de l’Ange Albert par le témoin :

 atteinte à l’intégrité physique de la personne humaine : les traitements proposés par l’Ange Albert et le docteur Ragaglia, médecin de la secte, ont entraîné des séquelles graves, voire même la mort de certains adeptes, selon les informations du témoin. Même si les adeptes ne demandent rien, il leur est proposé certains traitements susceptibles, par exemple, de guérir le diabète ou d’aider une grossesse difficile. Aux incrédules, il est affirmé qu’ils guériront " spirituellement " ;

 les enfants participent aux réunions (séances de réflexion, médium), parfois tardives. Le témoin estime qu’il y a abus de confiance vis-à-vis des enfants lorqu’on leur apprend des chansons dans un langage qui n’existe pas et auquel il est donné une signification tendancieuse et qu’on leur raconte des histoires horribles sur des extra-terrestres qui vont venir les chercher ou encore lorsqu’on les place sous des pyramides afin qu’ils reçoivent des ondes positives ;

 les adultes sont également abusés dans la me-sure où, comme indiqué ci-dessus, chaque décision prise l’est en fonction des instructions du groupe. Pour être reçu en audience par l’Ange Albert, il faut tirer un numéro dans un panier et inscrire son nom sur un papier ; c’est l’Ange Albert qui décide en dernier ressort qui il daignera rencontrer. Voir égale-ment les pratiques en matière de dons (voir ci-des-sous) ; - exigences financières : lors des réunions, il est généralement procédé à une collecte sous prétexte de l’un ou l’autre but social. Il a également été procédé à la vente de tableaux par de soi-disant médiums en transe, censés apporter des ondes bénéfiques dans la maison de l’acheteur. De même, dans le journal " Justice ", un appel aux dons a été publié en faveur de l’Abbé Pierre, mentionnant un numéro de compte et une boîte postale à Paris. Renseignements pris auprès du secrétariat de l’Abbé Pierre, il est apparu que ce dernier n’avait jamais sollicité pareille aide et que ce compte n’avait aucun lien avec son oeuvre ;

 rupture avec le milieu familial et social : si les adeptes ne viennent pas assister à l’une ou l’autre réunion, on vient les chercher. Leur famille, leurs amis, s’ils n’adhèrent pas au mouvement, sont considérés comme porteurs d’ondes négatives ou sont pré-sentés comme des suppôts de satan. Il en va de même pour les adeptes qui ont décidé de quitter le mouvement et cherchent à en éloigner leurs proches. Les adeptes sont encouragés à rencontrer de plus en plus fréquemment les autres membres du groupe, si bien qu’ils finissent par s’isoler du monde extérieur. Certains membres sont même encouragés à changer d’emploi ;

 tentatives d’intimidation à l’égard d’ex-adeptes (voir ci-dessus).

D’après certaines informations recueillies par le témoin, des dirigeants du mouvement auraient eu des contacts avec Luc Jouret. On retrouve en tout cas chez l’Ange Albert, des symboles semblables à ceux de l’OTS (épées sur un tapis mural et des roses).


Source : Chambre des Représentants de Belgique http://www.lachambre.be