L’administration Clinton, qui reformule la politique anti-drogue des États-Unis, a laissé filtrer des indications contradictoires concernant ses projets dans la région andine. Des responsables comme le "Tzar" (Monsieur drogue) Lee Brown, ont indiqué que des opérations de répression continueraient dans les pays producteurs du continent Sud-Américain. La chambre des Représentants et le Sénat, au contraire, ont approuvé des projets de loi de finance qui, s’ils étaient adoptés après négociations avec la Présidence, signifieraient des coupes sombres dans les ressources destinées à lutter contre la drogue dans les pays andins. Le Conseil national pour la sécurité (NSC) vient de terminer une évaluation de la politique des États-Unis en matière de drogue entreprise il y a six mois. Selon un expert auprès du Congrès qui a participé à ces travaux, une première version du document confidentiel qui en résulte contient "une critique sévère de la politique consistant à faire porter l’effort sur le contrôle des frontières des États-Unis", tout en recommandant de poursuivre des opérations de la police et de l’armée à l’étranger. Ce point de vue a été repris par plusieurs responsables de l’administration. En juillet, Brown a déclaré à la presse que les efforts des États-Unis à l’étranger porteraient sur "l’éradication des cultures, le démantèlement des cartels. Et des pressions diplomatiques musclées pour forcer les gouvernements à collaborer à cette lutte seraient faites". Lors d’une conférence qui s’est tenue récemment au Capitole, Tim Wirth, le candidat de Clinton au poste de sous-secrétaire d’Etat pour les Affaires mondiales, a averti que si les États-Unis se retiraient de la guerre mondiale à la drogue, "ils se retrouveraient face à des narco-démocraties dans le monde entier". Jusqu’à ce que Lee Brown présente la nouvelle politique anti-drogue devant le Congrès, on ne voit pas comment l’Administration pourra concilier ces objectifs avec les coupes dans ses budgets traditionnellement pratiquées par les deux chambres. Jusqu’ici, la Maison Blanche avait laissé entendre que sa politique consisterait à réduire considérablement les fonds importants consacrés au contrôle des frontières pour les consacrer à la prévention et aux soins d’une part ; à la répression à l’intérieur des États-Unis et à l’extérieur d’autre part. Le Congrès a d’ores et déjà fait connaître son opposition à une telle politique. Quelques jours avant que l’évaluation du Conseil national pour la sécurité ne soit achevée, le Sénat a opéré de fortes coupes dans l’aide prévue pour les programmes internationaux de lutte contre la drogue, y compris 47 millions de dollars destinés au Bureau international pour les Affaires de Drogue du Département d’Etat. Des programmes consacrés à la consommation de drogues, qui sont en principe au cœur de la stratégie de Bill Clinton, ont été sérieusement affectés : la Chambre des représentants a ainsi amputé de 200 millions de dollars la part du budget du Département de l’Education destiné à la prévention et aux soins. Les plans de l’Administration en ce qui concerne la "Stratégie andine" ont également suscité le plus grand scepticisme. Le projet de budget pour l994 de la Maison Blanche consacré à l’aide internationale est étrangement similaire à celui de l’Administration Bush. Il réduit l’aide économique d’à peu près 30 millions de dollars sur un total de 163, 5 millions, et accroît l’aide policière et militaire de 137 à 147 millions de dollars. Pour les opposants à la politique Reagan-Bush qui faisait porter l’effort dans la lutte contre l’offre, les propositions de Clinton représentent une profonde déception (correspondant de l’OGD aux États-Unis).

(c) La Dépêche Internationale des Drogues n° 24